Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, notre droit doit s’adapter en permanence aux évolutions d’un monde économique qui se transforme. Ainsi, le sujet de la protection des travailleurs liés à des plateformes numériques est devenu la préoccupation du législateur, conduisant notre Haute Assemblée à approfondir sa réflexion par la rédaction de plusieurs rapports.
En effet, si la mise en relation de travailleurs, de plateformes et de consommateurs crée de nouveaux services et des opportunités d’emplois, elle vient bouleverser les règles sociales habituellement attachées à l’exercice d’une profession salariée ou indépendante.
Cela est particulièrement vrai dans les deux secteurs de la conduite de VTC et de la livraison de marchandises en véhicule à deux ou trois roues, les travailleurs en relation avec des plateformes y étant exposés à des risques particuliers et à une certaine précarité. De plus, l’asymétrie des pouvoirs dans l’organisation des activités impose une vigilance particulière.
Le présent texte est particulièrement important, car il privilégie la voie du dialogue social pour assurer la protection des travailleurs des deux secteurs, au-delà de la question de leur statut juridique, qui semble, elle, devoir évoluer au niveau européen, comme l’a souligné notre rapporteur.
Je me réjouis que nous soyons parvenus à un accord avec les députés, lors d’une commission mixte paritaire conclusive à laquelle j’ai participé.
En mai 2020, dans le cadre de leur rapport sénatorial, nos collègues Frédérique Puissat, Catherine Fournier et Michel Forissier recommandaient, comme je l’avais souligné en première lecture, le développement de ce dialogue social au travers d’une meilleure représentation des travailleurs et des plateformes.
Ils prévoyaient par ailleurs des thèmes de négociation obligatoires, tels que la détermination des revenus des travailleurs, le développement de leurs compétences, la prévention des risques professionnels, qui présentent une importance particulière.
Notre rapporteur, Frédérique Puissat, a obtenu en CMP un accord des députés pour une nouvelle rédaction imposant le maintien de ces trois thèmes identifiés par le Sénat dans la négociation obligatoire au niveau des deux secteurs. C’est à cette condition que le Sénat a pu accepter l’habilitation donnée au Gouvernement pour fixer par ordonnance la définition des thèmes débattus et la périodicité de la négociation.
J’en profite pour saluer le travail de notre rapporteur, dont les connaissances et le sens de l’écoute ont été fort utiles pour améliorer ce texte.
En vertu de la rédaction proposée par le Sénat, l’habilitation porte sur l’organisation du dialogue social au niveau de chaque secteur, et non au niveau de chaque plateforme, ce qui aurait été prématuré et pourra être mis en place ultérieurement.
Notre Haute Assemblée a également mieux encadré les missions de l’ARPE, autorité créée pour organiser les élections professionnelles et accompagner le dialogue social. Nous avons souhaité recentrer son rôle sur la régulation de ce dialogue entre travailleurs et plateformes plutôt que sur la régulation de leurs relations sociales. La CMP a également suivi nos propositions en encadrant les pouvoirs de médiation de l’ARPE, ainsi que ses activités d’expertise.
Enfin, comme nous souhaitions éviter toute perte de temps dans l’organisation du dialogue social de ce secteur, nous avons retenu un délai de neuf mois pour la durée d’habilitation, délai plus avantageux que les douze mois initialement prévus par les députés, mais moins exigeant que les six mois que nous avions prévus en première lecture. Rappelons que le Gouvernement disposait de dix-huit mois dans le texte initial.
Ainsi le présent texte a-t-il été particulièrement enrichi par nos travaux.
L’étape fondamentale franchie aujourd’hui repose sur le poids donné à la négociation collective. Nous souhaitons que cette voie de régulation soit féconde, et qu’elle puisse par la suite être une source d’inspiration pour d’autres pays.
Aussi notre groupe votera-t-il ce projet de loi.