Intervention de Florence Blatrix Contat

Réunion du 26 janvier 2022 à 15h00
Marché de l'assurance emprunteur — Discussion générale

Photo de Florence Blatrix ContatFlorence Blatrix Contat :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, souscrire un prêt immobilier est un acte important dans une vie. Il engage l’emprunteur pour de longues années. Afin de garantir le remboursement en cas d’accident de la vie, un contrat d’assurance est alors signé, le plus souvent, avec l’organisme prêteur.

Depuis 2014, les emprunteurs peuvent résilier ce premier contrat d’assurance et en choisir un autre, sur le marché, qui viendra en substitution à condition qu’il y ait équivalence de garantie. La loi Hamon du 26 juillet 2014 a permis la résiliation à tout moment, pendant la première année, et l’amendement Bourquin de la loi du 22 février 2017 la permet à chaque date anniversaire du contrat. C’est en nous inscrivant dans ces pas que nous souhaitons compléter les dispositions déjà adoptées par le Parlement.

Il s’agit, en effet, d’assurer une meilleure information de l’emprunteur, d’empêcher les mauvaises pratiques de certains organismes prêteurs, enfin de garantir l’accès au crédit de certaines catégories de personnes qui en sont exclues, au prétexte qu’elles ont souffert de pathologies, dans le passé.

L’ouverture à la concurrence du marché de l’assurance emprunteur s’est révélée vertueuse. Elle a entraîné une diminution des prix de l’ordre de 40 % au profit des emprunteurs, sans baisse de garanties. La part des contrats dits alternatifs représente désormais 25 % de l’ensemble de ce marché, qui pèse en France près de 10 milliards d’euros et dont le secteur bancaire continue cependant de capter près de 85 %.

Notre volonté est d’améliorer l’information des consommateurs. Aujourd’hui encore, certains emprunteurs ignorent parfois jusqu’à l’existence même du droit à résiliation. Il est par ailleurs nécessaire de faciliter la résiliation en limitant les diverses pratiques dilatoires des prêteurs.

Ces pratiques s’opposent, de fait, à la volonté continue du législateur, en dépit des rappels à l’ordre de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et des interventions du CCSF. Nous proposons donc de clarifier et de simplifier cette procédure.

En premier lieu, il faudra renforcer l’information des emprunteurs. En début de contrat, l’emprunteur devra être informé non seulement du coût total de l’assurance, mais aussi de son coût sur une durée de huit ans, soit la durée moyenne d’un prêt. Tel est l’objet de l’un des amendements que nous vous proposerons.

En cours de contrat, les assureurs seront soumis à une obligation d’information annuelle, de sorte que chaque assuré connaîtra la possibilité qu’il a de résilier son contrat, les démarches à accomplir et les délais à respecter.

Une ambiguïté demeurait sur la date d’échéance. Il sera désormais entendu que celle-ci correspond soit à la date anniversaire de la signature de l’offre de prêt, soit à une autre date d’échéance prévue au contrat, au choix de l’emprunteur. Cette date sera obligatoirement notifiée à l’emprunteur par le prêteur.

En second lieu, il est essentiel de mettre fin aux pratiques dilatoires des banques visant à empêcher la résiliation. L’article 2 renforce l’effectivité du droit de résiliation en encadrant strictement les motivations de refus de substitution d’assurance. L’article 4, quant à lui, encadre plus précisément le délai d’émission de l’avenant.

Pour que ces nouvelles dispositions soient observées, il importe que le contrôle administratif soit plus effectif et que les sanctions en cas de manquement soient sensiblement plus fortes. Dans le texte que nous examinons, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et l’ACPR sont chargées d’effectuer ce contrôle et de sanctionner plus fortement les contrevenants, l’amende pouvant aller jusqu’à 15 000 euros par infraction pour une personne morale. Elles auront, en outre, la possibilité de rendre publiques leurs décisions de sanction, ce qui aura sans aucun doute un caractère dissuasif.

Il sera bien entendu nécessaire de renforcer les moyens de ces autorités de contrôle, en particulier ceux de la DGCCRF, pour que ces contrôles soient effectifs. Le législateur que nous sommes doit veiller à la réalité de l’application des lois et à l’effectivité du droit.

Enfin, l’emprunt s’apparente souvent à un parcours semé d’embûches pour les personnes qui ont souffert ou qui souffrent de pathologies. Elles doivent remplir des questionnaires médicaux intrusifs et sont soumises à des surprimes excessives et souvent non justifiées.

La convention Aeras est imparfaite. Il nous semble nécessaire d’élargir aux pathologies chroniques le champ des pathologies susceptibles d’être couvertes. Alors que la médecine progresse de manière significative, nous souhaitons également un droit à l’oubli sensiblement raccourci, de dix à cinq ans. Enfin, nous proposons que le questionnaire médical soit purement et simplement supprimé pour les prêts immobiliers inférieurs à 500 000 euros, si le signataire à moins de 62 ans.

Ainsi modifiée par notre assemblée, cette proposition de loi rendra effectif le droit à résiliation. Comme l’a indiqué M. le rapporteur, elle constitue surtout une avancée historique qui permettra un accès plus inclusif et plus solidaire à l’emprunt.

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