Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous avions eu l’occasion de le dire en première lecture, ce texte, s’il comporte quelques avancées, demeure cependant largement décevant.
Je commence par les avancées, étant quelqu’un de positif.
Bien sûr, nous saluons l’ouverture aux couples en concubinage et pacsés du droit à l’adoption, lequel ne sera plus réservé aux seuls couples mariés et aux personnes célibataires. C’est la fin d’une discrimination fondée sur rien d’autre qu’une vision traditionaliste de la famille, sans rapport réel avec l’intérêt de l’enfant, l’équilibre affectif et psychologique d’un enfant étant évidemment sans lien avec statut marital de ses parents.
D’autres articles ouvrent l’adoption plénière à des enfants de plus de 15 ans, qui étaient privés jusqu’à présent de cette possibilité. Il était temps de reconnaître ce droit à ces enfants, marqués par des parcours de vie hachés, parfois très difficiles.
Enfin, le renforcement des droits des pupilles de l’État constitue une mesure importante pour les droits de l’enfant. Seulement 706 enfants sur 3 248 bénéficiant de ce statut ont été adoptés, plus de trois enfants sur quatre se retrouvant sans solution.
Ce texte est néanmoins insuffisant à plusieurs égards : pas d’amélioration de la situation des enfants placés à l’aide sociale à l’enfance ; pas d’avancée sur l’accès aux origines des enfants nés dans le secret et admis de ce fait au statut de pupille de l’État ; silence également sur l’adoption internationale et ses pratiques illicites, même si je me réjouis des annonces faites par M. le secrétaire d’État un peu plus tôt.
Je voudrais terminer sur un point de la position du Sénat que, vous vous en doutez, je ne comprends vraiment pas. Il s’agit de la suppression en commission de l’article 9 bis, introduit par l’Assemblée nationale, et qui permet l’adoption, dans le cas d’une PMA effectuée à l’étranger, par la mère d’intention de l’enfant, si la mère qui a accouché s’y oppose sans motif légitime. Ce dispositif est évidemment protecteur pour l’enfant, et ce pour une raison très simple : un enfant ne devrait pas se voir privé d’un parent simplement à cause des conditions dans lesquelles ses parents se sont séparés. C’est un dispositif de surcroît nécessaire pour corriger un problème né d’une discrimination désormais légalement réparée : seules les lesbiennes peuvent aujourd’hui se retrouver dans ce genre de cas.
Imaginez une seconde ce refus appliqué aux couples hétérosexuels : franchement, qui, ici, pourrait s’opposer à ce qu’un père puisse être reconnu comme tel simplement parce que la mère, dont il s’est séparé avant la naissance, n’y consent pas ?
Vous nous dites que nous sommes dogmatiques, mais c’est plutôt l’inverse : c’est bien le refus de cette disposition, qui, à mon sens, est totalement dogmatique ! En effet, elle ne priverait que des couples de lesbiennes et leurs enfants de ce droit. Surtout, cette disposition est quand même très encadrée, l’article 9 bis disposant que « le juge prononce l’adoption s’il estime que le refus de la reconnaissance conjointe est contraire à l’intérêt de l’enfant et si la protection de ce dernier l’exige ».
On s’est donc opposé à une disposition prévoyant que l’intérêt de l’enfant primait et qu’un juge le faisait passer avant les affaires du couple, causant ainsi l’échec d’une commission mixte paritaire… Et c’est nous qui serions dogmatiques ? Honnêtement, je ne vous suis pas.
En ce qui nous concerne, au groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, pas d’ambiguïté, nous voterons l’amendement du Gouvernement demandant le rétablissement de l’article 9 bis.
Vous l’aurez compris, nous sommes globalement déçus par le texte, mais, afin de rendre concrètes les quelques avancées qu’il contient, nous voterons néanmoins en sa faveur en fonction du sort qui sera réservé à l’article 9 bis.