Intervention de Adrien Taquet

Réunion du 26 janvier 2022 à 21h30
Réforme de l'adoption — Article 11 bis, amendements 5 11

Adrien Taquet :

Cependant, sur quelques points essentiels, il nous semblait important de nous représenter devant vous avec nos propositions. Nous ne l’avons pas fait, d’ailleurs, sur les habilitations à légiférer par ordonnances, qui, pourtant, avaient été récrites, suivant les sages conseils du Sénat et de l’Assemblée nationale, pour les circonscrire à deux objets très précis de nature légistique. Mais passons…

L’amendement n° 5 vise à rétablir la rédaction de l’article 11 bis adoptée à l’Assemblée nationale en nouvelle lecture. Il s’agit de réintroduire l’interdiction du recueil direct d’enfants en France par les organismes autorisés pour l’adoption, les fameux OAA.

Cette interdiction, je vous le redis, est conforme à l’intérêt de l’enfant, car elle garantit que tous les enfants privés définitivement de la protection de leur famille d’origine bénéficieront du statut de pupille de l’État. Or c’est le statut le plus protecteur pour les enfants.

Vous avez dit, madame la rapporteure, que cela ne concernait qu’une OAA et six enfants par an en moyenne.

Vous nous avez dit également, madame la rapporteure, que les personnes que vous aviez auditionnées étaient souvent des parents, surtout des mères, qui étaient eux-mêmes passés par l’aide sociale à l’enfance et qui ne souhaitaient pas remettre leur enfant dans cet environnement. Je ne porte évidemment aucun jugement sur ce point, mais il faut savoir que nous parlons de nourrissons qui vont être confiés à l’ASE pendant deux ou trois mois au maximum, avant de trouver une famille. Il est faux de dire qu’ils vont rester des années, voire la moitié de leur enfance ou toute leur enfance dans le giron de l’ASE. Ne laissons pas croire cela.

Cette interdiction ne prive pas les enfants d’une quelconque chance.

Un argument revient souvent, mais vous ne l’avez pas repris, madame la rapporteure : les enfants recueillis par des OAA seraient plus facilement adoptés que les enfants confiés à l’ASE. Ce n’est pas la réalité !

La majorité des enfants recueillis en France par des OAA ne présentent pas de besoins spécifiques et n’auront pas la moindre difficulté à trouver des parents, dans le respect des règles de déontologie et de transparence applicables à ces procédures, qui ne sont, il faut le dire, pas toujours totalement, complètement, parfaitement appliquées par les OAA qui recueillent des enfants.

Pour autant, c’est vrai, les OAA ont une vraie expertise sur l’accompagnement, des départements notamment, en matière d’adoption des enfants à besoins spécifiques. D’ailleurs, dans votre texte, vous consacrez cette expertise. Et cette mission qui est exercée par un certain nombre d’OAA en France aujourd’hui pourra évidemment être poursuivie demain. J’avais d’ailleurs eu l’occasion de rassurer personnellement le représentant d’un organisme qui était assez inquiet à l’issue de la première lecture à l’Assemblée nationale : ils pourront continuer d’agir auprès des départements.

Seulement, il y a une différence entre le recueil d’enfants et l’accompagnement des départements, des parents, sur l’adoption d’enfants à besoins spécifiques, un domaine dans lequel, je le répète, ils ont une vraie expertise, que je salue.

Il y a aujourd’hui cinq OAA encore autorisés à recueillir des enfants : la Confédération française pour l’adoption (COFA), Vivre en famille, SOS Emmanuel, La Cause et La Famille adoptive française.

Or seule cette dernière structure fait encore, pour cinq enfants par an sur la France entière, du recueil d’enfants, c’est-à-dire du placement sous leur responsabilité chez des assistants familiaux.

Les autres, et plus particulièrement SOS Emmanuel France, que j’avais eu en direct au téléphone, ne recueillent plus de mineurs. Ils assurent cependant une préparation, un accompagnement des candidats à l’adoption, et travaillent en lien étroit avec les départements au profit des pupilles de l’État à besoins spécifiques. Je le répète et j’y insiste, cette dernière compétence n’est absolument pas remise en cause. Au contraire, elle est confortée par la présente proposition de loi, qui prévoit expressément dans son article 11 que les départements peuvent prendre appui sur ces associations dans la recherche de familles adoptantes pour des pupilles pour lesquels un projet d’adoption est souhaité.

Nous souhaitons donc conforter les OAA en France sur cette mission-là, mais nous souhaitons aussi consacrer le monopole de l’ASE, du système public, avec toutes les garanties qu’offre pour l’enfant le statut de pupille de l’État, s’agissant du recueil des enfants en vue d’une adoption.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous souhaitons que cet article 11 bis soit récrit.

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