Intervention de Jean-Claude Requier

Réunion du 25 janvier 2022 à 14h30
Harkis et autres personnes rapatriées d'algérie — Discussion générale

Photo de Jean-Claude RequierJean-Claude Requier :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il a fallu du temps – trop de temps, sans aucun doute – pour que la France reconnaisse l’abandon dans lequel ont été plongés les harkis au lendemain des fameux accords d’Évian.

Parce qu’ils avaient servi la France, ils eurent le choix entre la mort et l’exil. Dans ces conditions, les harkis n’ont pas hésité à passer, quand ils l’ont pu, de l’autre côté de la Méditerranée, où l’horizon leur paraissait plus clair.

Quelle déception ! La terre promise ne s’est pas révélée aussi accueillante qu’elle aurait dû l’être.

Pour une partie d’entre eux, près de 42 000, le passage ou l’installation dans des camps de transit et de reclassement ou des hameaux de forestage a constitué une véritable relégation faite de souffrances et de légitime amertume. Dans ces camps qui, rappelons-le, étaient fermés, précarité, privations, déscolarisation et brimades étaient le lot quotidien des harkis – notre collègue rapporteure l’a très bien souligné.

Il faut le dire : c’est l’indignité légalisée qui figurait au fronton obscur de ces structures, en lieu et place de la fraternité qui aurait dû y être prodiguée.

Notre pays – patrie des droits de l’homme, dit-on souvent – a clairement raté, à cette époque, le rendez-vous de la compassion à l’égard de ceux qui croyaient en elle et qu’elle aurait dû accueillir avec plus de générosité.

À Bias, en Lot-et-Garonne, à Rivesaltes, dans les Pyrénées-Orientales, ou au Larzac, dans l’Aveyron, est-il compréhensible que de jeunes enfants aient longtemps vu la France des barbelés avant de connaître celle des libertés ?

Mes chers collègues, vous le savez : on ne saurait prétendre que le législateur n’a rien fait par la suite pour améliorer leur sort. Entre mesures sociales, indemnisation des biens perdus et aides au logement, de nombreux dispositifs ont pu aider certains d’entre eux à s’en sortir. Mais le compte n’y est pas, ce que le Conseil d’État n’a pas manqué de rappeler en 2018, en condamnant l’État à dédommager un fils de harki ayant séjourné dans l’un de ces camps.

Aussi, l’engagement du Président de la République, prononcé le 20 septembre dernier, permettra d’accorder les réparations qu’exige ce sombre épisode de l’histoire de France.

Naturellement, les élus de mon groupe soutiennent ce projet de loi, lequel institue un mécanisme de réparation financière en faveur des rapatriés ayant transité par un camp ou par un hameau de forestage entre 1962 et 1975.

Nous approuvons également les articles renouvelant ou approfondissant la reconnaissance de la Nation à l’égard des harkis.

Je salue enfin la mesure relative à l’allocation viagère : la suppression de la forclusion permettra à des familles qui ignoraient leurs droits de les exercer.

Toutefois, comme le souligne la commission, « ce texte ne saurait constituer le solde de tout compte ». Une majorité des sénateurs de mon groupe aurait d’ailleurs souhaité étendre le bénéfice du dispositif de réparation à tous les harkis

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