La mission d’information sur les ingérences étatiques extra-européennes à l’université a eu le mérite d’explorer un nouveau champ de réflexion pour l’action gouvernementale : la protection des universités contre ces manœuvres.
Les mots ont un sens, tout particulièrement celui d’« ingérence ». Notre rapporteur l’a clairement rappelé, il s’agit là d’une zone grise entre, d’une part, l’influence, laquelle est parfois légitime, et, de l’autre, l’intrusion, la captation, le vol ou la trahison, qui sont, eux, déjà sévèrement punis par notre droit national.
C’est de cet entre-deux que le danger semble provenir. Si le Gouvernement se décide à contrer ces dérives, il devra suivre une ligne de crête entre protection de notre souveraineté et préservation des libertés académiques.
En effet, ces libertés sont une richesse pluriséculaire de notre pays. Nos universités ont tout loisir de nouer des partenariats et de dialoguer scientifiquement avec les établissements d’autres pays. Elles sont autant de ponts qui relient les cultures ; elles constituent les vecteurs de notre influence nationale et de l’enrichissement du patrimoine scientifique mondial. Cette richesse doit être préservée.
Madame la ministre, voilà pourquoi il me semble important de ne pas surréagir : il ne faudrait pas que le remède soit pire que le mal.
À cet égard, j’attire votre attention sur la vingtième préconisation de notre rapport : soumettre les projets d’accords internationaux des universités à l’avis des ministères concernés. J’insiste sur ce point : il s’agirait d’un avis simple et non d’une autorisation. C’est un impératif si l’on ne veut pas rogner un certain nombre de libertés, fondamentales pour notre pays.
Dès lors, ma question est simple. Si une politique gouvernementale est indispensable en la matière, quelles garanties pouvez-vous nous donner qu’elle ne se traduise pas, dans les faits, par le renforcement du contrôle de l’État sur les universités ?
Pour ce qui concerne les sciences humaines et sociales, les propos tenus en début d’après-midi par votre collègue Sarah El Haïry comme par les membres du groupe Les Républicains ne m’ont pas rassuré : on peut bel et bien craindre que l’État n’entreprenne de soutenir une recherche autorisée, face à une autre jugée déviante.