Intervention de Patrick Chauvet

Réunion du 8 février 2022 à 14h30
Aménagement du rhône — Vote sur l'ensemble

Photo de Patrick ChauvetPatrick Chauvet :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons vise à prolonger la concession du fleuve Rhône, attribuée à la Compagnie nationale du Rhône.

Il s’agit d’un texte important pour l’avenir de cet opérateur, alors que nos concessions hydroélectriques sont l’objet d’un contentieux européen.

La commission des affaires économiques souscrit pleinement aux objectifs de la proposition de loi. Ils sont essentiels pour notre souveraineté et notre transition énergétiques.

Nous apprécions profondément le modèle économique de la CNR, opérateur exemplaire pour la conciliation des activités économiques avec les enjeux environnementaux, pour l’implication des collectivités publiques aux côtés d’entreprises privées et pour la complémentarité des missions énergétiques avec les autres.

Créée en 1933, la CNR s’est vu confier la concession du Rhône avec pour missions la production d’hydroélectricité, la navigation fluviale et l’irrigation agricole. Il s’agit d’une société anonyme d’intérêt général dont le capital est détenu pour un tiers par l’État et un sixième par les collectivités.

Dotée de 47 ouvrages hydroélectriques, dont 20 centrales, la CNR produit 25 % de notre hydroélectricité. Elle est également très impliquée dans le photovoltaïque et l’éolien.

Or cette concession arrive à échéance en 2023. Faute d’une prolongation, elle serait placée sous le régime des délais glissants dont relèvent aujourd’hui 39 concessions sur 400, soit 10 % d’entre elles.

Compte tenu de l’enjeu, nous nous étonnons que la prolongation de la concession intervienne tardivement et législativement : le Gouvernement aurait pu et dû prolonger la concession par décret, sitôt les travaux préalables achevés.

Nous prenons acte de la méthode retenue et des garanties avancées par le Gouvernement quant à la conformité du texte avec nos engagements européens, notamment en ce qui concerne les aides d’État ou la directive Concessions.

Nous souhaitons que la proposition de loi mette la CNR à l’abri du contentieux européen. Nous attendons du Gouvernement qu’il apporte enfin une solution globale, pérenne et négociée, pour les concessions en délais glissants, car cette insécurité juridique est délétère.

Dans ce contexte, la proposition de loi approuve un nouveau cahier des charges de 70 articles et un nouveau schéma directeur, en 5 volets, qui comportent plusieurs évolutions.

Premièrement, un transfert de 3 000 hectares de Voies navigables de France (VNF) est organisé vers la CNR, ce qui représente 300 titres d’occupation et 500 000 euros de redevances.

Deuxièmement, des programmes pluriannuels quinquennaux fixent les principaux investissements : 165 millions d’euros par plan et 500 millions d’euros au total.

Troisièmement, un programme de travaux supplémentaires prévoit des opérations de rénovation ou de construction. L’une d’elles, à Saint-Romain-de-Jalionas, est en suspens : c’est un point d’attention, car son coût est de 190 millions d’euros.

Autre changement : la redevance intègre davantage l’évolution du prix de l’électricité. Elle peut être alourdie faute de réalisation de l’opération en suspens.

Enfin, les énergies réservées allouées aux bénéficiaires agricoles confortent les usages liés à l’irrigation. Ce sont 10 000 kilowatts qui pourraient leur être réaffectés.

Les amendements que la commission a adoptés sur mon initiative visent à consolider la proposition de loi selon quatre axes.

Tout d’abord, nous avons souhaité développer les énergies renouvelables en intégrant pleinement les missions de la CNR, cent ans après la loi de 1921 sur l’aménagement du Rhône, dans la promotion de la transition énergétique et la réduction des émissions de gaz à effet de serre, avec l’atteinte de la neutralité carbone d’ici à 2050 pour ligne de mire.

Plus concrètement, nous avons entendu favoriser deux projets énergétiques : l’hydrogène renouvelable et bas-carbone et le photovoltaïque innovant.

Plus encore, nous avons souhaité mieux associer les collectivités en consacrant l’organisation du comité de suivi en commissions territoriales et en prévoyant leur consultation sur le programme de travaux supplémentaires, dont l’opération en suspens.

Nous avons aussi souhaité rétablir l’avis des conseils départementaux et régionaux sur la modification du cahier des charges et du schéma directeur.

Nous avons enfin voulu garantir l’éligibilité des groupements de communes aux projets de la CNR.

Nous avons aussi voulu soutenir les professionnels agricoles en assurant l’association du ministère de l’agriculture aux statuts de la CNR et à son comité de suivi.

En ce qui concerne les énergies réservées, nous avons souhaité éviter tout effet de bord sur les bénéficiaires et garantir l’allocation de la compensation financière aux acteurs de terrain.

Il nous a aussi semblé utile de compléter les missions de la CNR par le développement des emplois liés à l’irrigation agricole.

Le dernier point a consisté à renforcer la sécurité juridique de la concession : nous avons ainsi maintenu la référence aux missions d’intérêt général de la CNR, précisé une obligation comptable et encadré une procédure domaniale.

Mon travail de rapporteur s’est donc voulu concret, consensuel et concerté pour enrichir le texte en direction de la transition énergétique, du dialogue territorial et du développement agricole. Il répond directement aux demandes formulées lors de mes auditions, au cours desquels j’ai entendu trente personnalités, dont les collectivités.

Je suis fier que le texte ainsi amendé ait été adopté à l’unanimité par la commission. J’invite le Sénat à réitérer ce vote.

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