Mon propos sera très bref, puisque je veux simplement indiquer le sens du vote de notre groupe : de même que nous sommes abstenus sur les amendements de suppression, nous nous abstiendrons sur l’article.
Nous avons essayé d’établir un dialogue pour que ce texte soit amélioré. Certaines de nos propositions ont été retenues, nous vous en remercions, mais l’ensemble n’est pas suffisamment significatif pour nous amener à voter cet article et mes collègues vous ont exposé toutes les raisons pour lesquelles un tel vote n’est pas possible.
Puisque je dispose de quelques instants, je voudrais revenir sur la question de savoir si la réparation doit être individuelle ou collective. Je défendrai toujours l’idée que les deux possibilités doivent être envisagées et je ne veux pas me laisser enfermer dans un débat entre individuel et collectif. Il faut évidemment qu’une réparation collective soit possible, mais une réparation individuelle doit aussi pouvoir être obtenue. Pourquoi ?
Je reprendrai le cas de l’amiante, que je connais un peu. La justice a reconnu la responsabilité de l’employeur, sur le terrain de la faute inexcusable, et estimé que, dans le cas de la Direction des constructions navales, par exemple, l’entreprise en tant que telle était concernée. Certains contestent parfois ce dernier choix ; je ne le conteste pas, quant à moi, parce que je connais les conditions de travail et je sais que tout le monde était exposé à l’amiante.
En revanche, puisque seule l’entreprise a été retenue comme responsable, tous les salariés des entreprises sous-traitantes qui venaient y travailler n’arrivent pas à faire valoir leurs droits et ne sont pas reconnus comme ayant été exposés à l’amiante. C’est pourquoi l’Association nationale de défense des victimes de l’amiante, l’ANDEVA, demande une procédure d’indemnisation individuelle depuis longtemps. Mais, chaque fois, elle se fait « retoquer ».
Comment les choses se passaient-elles ? Dans ces ateliers, travaillaient non seulement les salariés des sous-traitants, mais aussi des femmes de ménage. Elles sont souvent dans l’incapacité de reconstituer leur carrière, parce que les entreprises qui les employaient ont disparu. Quand bien même elles arriveraient à obtenir cette reconstitution, elles ne pourraient pas faire valoir qu’elles ont été exposées à l’amiante parce que les entreprises qui les employaient ne figurent pas parmi celles qui sont reconnues comme ayant exposé leurs salariés.
J’ai donc la conviction profonde qu’il ne faut pas opposer les deux modes de réparation. Dans certains cas, c’est peut-être une branche professionnelle dans son ensemble qui devra être reconnue comme ayant exposé ses salariés à un risque, dans d’autres cas, il faudra ouvrir la possibilité d’engager des procédures individuelles.
Il serait bon de remettre ces questions à l’étude, afin que, lors de la rédaction des décrets et en fonction de l’évolution de cette loi, comme vous l’avez dit, monsieur le ministre, on réfléchisse bien à « mixer » ces deux possibilités pour ouvrir des droits à la retraite anticipée.