Madame la présidente, messieurs les secrétaires d’État, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui traite d’un sujet important : l’exposition des enfants à des contenus violents, pornographiques et haineux sur internet et leur protection face à ces contenus.
Nous nous trouvons là à l’intersection de plusieurs impératifs, tous également légitimes : le libre accès à internet, la nécessaire protection des enfants, la liberté des choix éducatifs et la protection des données. Cette complexité a été bien comprise, mais l’objet principal du texte est finalement simple : prévoir la présence d’un dispositif de contrôle parental préinstallé sur les terminaux permettant d’accéder à internet. Tout le reste – les modalités concrètes d’installation de ce dispositif, le contrôle nécessaire d’application de la mesure, la certification – est renvoyé à un décret.
Au fur et à mesure des discussions à l’Assemblée nationale et au Sénat, tant en commission qu’en séance, cet objectif simple s’est toutefois largement étoffé.
Il a tout d’abord été ajouté la nécessaire protection des données, et il s’agit d’une avancée bienvenue. La commission a ainsi précisé que les données des mineurs utilisateurs des terminaux ne pouvaient être commercialisées ou utilisées à des fins « marketing ». Il s’agit d’une précision utile, car il serait regrettable que le dispositif de contrôle parental devienne un « cheval de Troie » utilisé par les entreprises peu scrupuleuses du numérique, qui captent déjà nos attentions, nos esprits et nos vies avec leurs publicités ciblées omniprésentes. Nous vous proposerons d’étendre cette interdiction aux données collectées des parents installant ce dispositif, qui seront donc potentiellement amenés à saisir leurs informations personnelles lors de la première utilisation.
Ont aussi été ajoutés dans ce texte l’inclusion des terminaux d’occasion dans le dispositif, l’amélioration de l’information à destination des utilisateurs ou encore le fait de conditionner l’entrée en vigueur du texte à la réponse de la Commission européenne attestant de la conformité du dispositif proposé au droit européen, le tout sans empiéter sur la liberté des utilisateurs ou sur la liberté de choix d’éducation des enfants.
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires voit d’un œil favorable ces nouvelles mesures, qui ne bouleversent pas l’équilibre général du texte.
Nous proposerons toutefois d’aller un peu plus loin, pour améliorer la protection des données, je l’ai dit, mais aussi pour défendre un secteur oublié jusqu’à présent : celui de la vente de terminaux sans système d’exploitation. Il s’agit d’un marché limité, de niche, mais qui est important pour un grand nombre d’utilisateurs, très attachés à leurs libertés individuelles en ligne.
Nous souhaitons donc, comme vous, madame la rapporteure, que ces terminaux dits « nus » soient extraits du champ d’application de la loi, d’une part, parce que, par définition, un terminal sans système d’exploitation ne peut avoir de logiciel de contrôle parental, et, d’autre part, parce que les utilisateurs de ces terminaux sont très rarement des enfants qu’il faudrait protéger des usages d’internet.
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera cette proposition de loi qui va dans le bon sens, mais il ne peut s’agir que d’un premier pas législatif et technique pour traiter d’un sujet bien plus vaste : l’éducation au numérique.
En effet, cela a été rappelé à plusieurs reprises, l’éducation est la clé de tout. Nous en avons débattu récemment lors de l’examen de la proposition de loi visant à combattre le harcèlement scolaire et le cyberharcèlement. Comment utiliser internet ? Quels contenus éviter ? Quelle durée maximale d’exposition à l’écran autoriser ? Comment fonctionnent les algorithmes ? Comment lutter contre la désinformation et contre le harcèlement ? Tout cela s’apprend. Est-ce à l’école de s’en charger ? À l’enseignement secondaire ? Au temps périscolaire ? Le débat est ouvert.
Nous pensons qu’il est temps d’engager une politique publique d’éducation populaire au numérique, mais c’est un autre sujet.
Je le répète, nous voterons ce texte.