Pour ce qui est des Crous, on impose à un opérateur en difficulté budgétaire, dont les référents harcèlement ne seront plus financés à partir de septembre prochain, de remplir une mission que leur ministère de tutelle ne semble pas avoir songé à leur confier…
Notre critique principale concerne l’article 4, qui crée un délit pénal spécifique de harcèlement scolaire. Loin de le renforcer, on vient ainsi affaiblir l’arsenal juridique existant déjà étoffé, quitte, comme l’écrivait Colette Mélot dans son rapport, à « nuire à la nécessaire mobilisation générale ».
Nous ne comprenons pas la volonté des députés d’adopter un quantum de peine qui risque de n’être jamais appliqué tant il est disproportionné par rapport au droit commun. Oui, il faut mieux, beaucoup mieux lutter contre le harcèlement qui intervient dans le cadre scolaire en renforçant les instruments juridiques existant dans notre droit, en cohérence avec celui-ci. De ce point de vue, faire du harcèlement scolaire une circonstance aggravante du harcèlement nous semble particulièrement sensé.
Comme cela a été souligné, l’efficacité de la lutte contre le harcèlement scolaire passe par l’action systémique et conjuguée des différents acteurs de la communauté éducative. À ce propos, il manque dans cette proposition de loi des éléments centraux de la mobilisation contre le harcèlement : des moyens pour la médecine scolaire, l’amélioration de la prise en charge psychologique et psychique des élèves, la mise en sécurité d’urgence des élèves harcelés.
Le Sénat avait fait des propositions en ce sens. Je pense notamment à nos amendements sur la santé scolaire, qui est en grande difficulté dans nos établissements.
La formation est également indispensable pour aider les personnels de l’éducation nationale à repérer et à accompagner les victimes. À l’heure actuelle, un tiers seulement des enseignants se sentent suffisamment armés pour cela et 83 % d’entre eux indiquent n’avoir jamais reçu aucune formation ni information sur la détection du harcèlement scolaire et l’accompagnement des victimes.
Quant aux multiples enjeux qui doivent être abordés en éducation morale et civique – environnement, laïcité, lutte contre le harcèlement, et j’en passe –, leur énumération suffit à démontrer qu’il est impossible de les traiter véritablement sous cette forme. Même chose pour les comités d’éducation à la santé, à la citoyenneté et à l’environnement, dont le champ d’action ne cesse d’être élargi.
Enfin, le programme pHARe à peine généralisé, les dispositions de cette proposition de loi viennent en percuter les objectifs, sans rien améliorer.
Il est donc regrettable que nos deux chambres n’aient pas trouvé de terrain de conciliation sur ce sujet qui mérite pourtant notre pleine et entière mobilisation, un sujet d’intérêt général qui devrait tout particulièrement nous inciter à travailler de concert, comme vient de le rappeler notre rapporteur Olivier Paccaud, ce que la majorité présidentielle n’est visiblement pas prête à faire !