Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le nom de famille nous distingue et nous identifie, tant dans nos rapports avec les autres que dans ceux que nous entretenons avec l’administration.
Le nom est avant tout un héritage. C’est un flambeau qui se transmet de génération en génération. Il contient une signification, une histoire, que nous recevons et que la majorité d’entre nous conserve jusqu’à la mort.
Pendant des siècles, les femmes ont été exclues de cette histoire. Elles ne transmettaient pas leur nom de famille à leurs enfants.
Pendant longtemps également, ce sont uniquement les femmes qui adoptaient le nom de famille de leur mari, à titre d’usage. Le nom de jeune fille s’effaçait devant le nom de l’épouse. Les choses changent, et la loi offre désormais à nos concitoyens davantage de liberté.
Depuis 2003, les parents peuvent décider du nom transmis à leur enfant et choisir notamment celui de la mère. Cette possibilité n’est pas majoritairement mise en œuvre : plus de 80 % des enfants nés en 2020 portent le nom de leur père, mais cette attribution n’est désormais plus imposée ; elle est laissée au libre choix des parents.
Cette plus grande liberté n’a cependant pas permis de résoudre toutes les difficultés, car notre nom de famille est choisi pour nous ; nous en héritons.
Cet héritage est parfois lourd à porter. Il est parfois bien difficile d’être « le fils de » ou « la fille de ». Porter un nom qui prête à rire l’est parfois tout autant. Si certains noms nous font sourire, nous avons du mal à mesurer le fardeau qu’ils constituent pour ceux qui les portent.
Dans d’autres cas, le nom de famille renvoie à un passé douloureux. Il rappelle cruellement une histoire de violence, de maltraitance ou d’abus.
Pour des raisons qui leur appartiennent, nombre de nos concitoyens demandent à changer de nom chaque année. La procédure est souvent longue et toujours complexe ; elle nécessite la démonstration d’un intérêt légitime.
La proposition de loi que nous examinons vise à accroître la liberté de nos concitoyens en matière de nom, en ce qui concerne tant le nom de famille lui-même que le nom d’usage.
Le texte entend ainsi clarifier la possibilité pour les époux de prendre le nom de leur conjoint à titre d’usage. Il précise également le régime du nom d’usage pour les mineurs. Si cette dernière possibilité n’est pas très usitée – les mineurs sont moins de 2 % à s’en être emparés –, il demeure important de clarifier les règles en la matière pour leur permettre de mieux s’en saisir.
Le cœur de la proposition de loi est constitué par l’instauration d’une procédure simplifiée de changement de nom. Si une telle évolution paraît nécessaire à tous, les avis divergent quant aux moyens d’y parvenir.
Le texte initial proposait un changement de nom par déclaration auprès de l’officier de l’état civil, ouverte aux personnes qui souhaitent substituer ou ajouter à leur nom le nom de famille du parent qui n’a pas transmis le sien. Chaque Français pourrait alors, par simple dépôt de formulaire, changer de nom une fois dans sa vie.
La commission des lois du Sénat a craint qu’une telle procédure ne banalise le changement de nom. La solution qu’elle a retenue consiste à maintenir la procédure actuelle, mais à ne pas exiger d’intérêt légitime lorsque le changement de nom de la personne porte sur le nom de ses parents. Cela nécessite toujours la prise d’un décret, mais devrait réduire les délais de traitement.
L’objectif de ces deux propositions est identique, mais les formules qu’elles avancent diffèrent. Nous devons nous assurer qu’elles parviennent à trouver un équilibre entre sécurité juridique et liberté. En effet, le changement de nom n’est pas une procédure anodine. Nous sommes néanmoins convaincus que nos concitoyens doivent bénéficier de la plus grande liberté dans leur appréciation de ce qui leur convient.
Le groupe Les Indépendants – République et Territoires soutient l’objectif porté par ce texte et votera donc en faveur de son adoption.