Intervention de Catherine Di Folco

Réunion du 24 février 2022 à 14h30
Choix du nom issu de la filiation — Discussion générale

Photo de Catherine Di FolcoCatherine Di Folco :

Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la matière sur laquelle nous légiférons une nouvelle fois en ce jour est grave, intime et complexe.

Toucher à l’institution du nom et à son évolution, c’est toucher à l’un des premiers marqueurs de l’identification d’une personne, mais aussi, indirectement, à son histoire personnelle, à ses origines et à sa descendance.

Le nom évolue, change, disparaît parfois, fidèle en cela aux développements de nos vies humaines, traversées par des naissances, des mariages, des ruptures ou des décès.

Modifier le droit des personnes ne peut ainsi se faire que prudemment, quelles que soient les douleurs vécues par tel ou tel.

Ces douleurs, Mme le rapporteur les a entendues. Nous les avons entendues et nous n’y sommes pas insensibles – contrairement à ce que j’ai entendu dire par notre collègue Hussein Bourgi. Nous les comprenons, et nous partageons l’idée selon laquelle il était opportun de légiférer pour assouplir notre droit dans certaines circonstances.

Cependant, changer nos règles communes sur de tels sujets ne peut se faire dans la précipitation ou l’émotion, et je regrette une nouvelle fois que nous ayons dû examiner ce texte dans de telles conditions.

Sur le fond, le Sénat a souhaité établir en première lecture un texte conciliant davantage stabilité du nom et volonté individuelle, afin notamment de mieux prendre en compte l’intérêt supérieur de l’enfant qui a été le souci permanent de notre rapporteur, dont je salue le travail remarquable qu’elle a mené avec la sensibilité que nous lui connaissons.

C’est dans un esprit constructif que notre assemblée avait suivi le Gouvernement à l’article 1er pour permettre aux majeurs la substitution d’un nom de parent par un autre, au titre du nom d’usage. Nous avions cependant refusé cette possibilité pour les mineurs, considérant que la substitution – qui va nettement plus loin que la simple adjonction – était un acte grave et que le droit existant s’avérait plus protecteur.

Nous avions par ailleurs voté les dispositions de l’article 2 qui permettaient aux adultes, selon une procédure simplifiée, de choisir leur nom de famille parmi les noms issus de la filiation au premier degré, une fois dans leur vie. Nous avons été nombreux à reconnaître dans cette possibilité une mesure pertinente, à condition qu’elle ne soit pas banalisée sous prétexte de simplification administrative.

Il nous faut, sur ce sujet, faire preuve de bon sens : si la proposition de loi vise à faciliter le changement de nom, d’usage ou de famille, c’est bien parce que ses auteurs en ont reconnu l’importance symbolique et historique dans la vie de chacun.

Comment, dès lors, envisager que l’évolution du nom puisse devenir un acte anodin, réduit aux plus simples formalités ?

Nous en convenons tous, la procédure actuelle est dysfonctionnelle et lourde. Néanmoins, ce n’est pas parce que l’administration centrale fait face à une surcharge de travail qu’il convenait de se défausser sur l’échelon local.

La proposition de loi envisageait une nouvelle procédure, déléguée aux communes. Nous nous y sommes opposés, tant pour maintenir la solennité d’une décision centralisée que pour éviter à nos communes de se voir confier une charge supplémentaire dont elles pourraient se passer.

Nous avions proposé une procédure plus simple, conduisant à la prise d’un arrêté ministériel. Le Gouvernement s’y est opposé.

Chers collègues, vous en conviendrez, les sujets de divergence avec le Gouvernement et la majorité parlementaire à l’Assemblée nationale étaient nombreux et profonds.

C’est à la fois la situation des enfants mineurs et la procédure décentralisée auprès des communes qui ont conduit à l’absence d’accord avec les députés lors de la réunion de la commission mixte paritaire.

Nous constatons, pour le regretter, que le Gouvernement ne souhaite pas faire un pas en direction du Sénat. Les principales améliorations apportées par notre rapporteur n’ont pas été reprises par la majorité présidentielle.

Monsieur le ministre, vous souhaitiez un texte consensuel et progressiste. Je constate que le consensus n’a été réalisé qu’entre vous et les députés de votre majorité

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