Intervention de Maryse Carrère

Réunion du 23 février 2022 à 21h30
Garantie à l'emploi pour les chômeurs de longue durée — Discussion générale

Photo de Maryse CarrèreMaryse Carrère :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’année 2021 a connu une baisse importante du chômage.

Le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie A a ainsi reculé de 12, 6 %, ce qui représente 480 000 chômeurs de moins.

Il semblerait également que, après avoir atteint un pic au premier trimestre 2021, le chômage de longue durée ait entamé une légère décrue en fin d’année. Il représente toutefois encore 49, 6 % du total des demandeurs d’emploi.

Par ailleurs, si l’on regarde les chiffres de plus près, le nombre de chômeurs inscrits depuis au moins deux ans a augmenté. Les personnes les plus éloignées de l’emploi sont les premières frappées par les crises et souvent les dernières à bénéficier de la reprise.

Derrière ces chiffres égrenés régulièrement, n’oublions pas qu’il y a des personnes détruites par des carrières brisées ou par des fractures de vie ; elles ont perdu leur confiance en elles et, parfois, leur dignité.

Nous connaissons les conséquences humaines et sanitaires de l’absence d’emploi. De plus en plus d’associations, d’organisations syndicales et de professionnels de santé nous alertent sur le traumatisme que constitue le chômage et sur ses effets délétères sur la santé physique et psychique.

Comme le rappelait un avis du Conseil économique, social et environnemental (CESE), perdre son emploi en France, où la population se distingue par un véritable investissement dans la valeur travail, qui vient parfois supplanter d’autres dimensions de la vie, c’est perdre son identité sociale, voire sa valeur sociale.

Coupables d’avoir perdu leur emploi, les personnes finissent par s’isoler socialement. Le traumatisme du chômage se traduit également par une surmortalité, par une détérioration de la santé physique et mentale et par des conduites addictives plus fréquentes.

Quand le chômage dure plusieurs années, il fait naître chez beaucoup un sentiment d’exclusion, un traumatisme que les psychiatres assimilent à une période de deuil.

Dans ces conditions, nul doute que la lutte contre le chômage de longue durée doit être une priorité. C’est l’objet de la proposition de loi présentée par groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, qui vise à mobiliser plusieurs dispositifs d’insertion professionnelle.

Nous souscrivons pleinement à l’objectif de nos collègues. Personne ne doit en effet s’accommoder d’un taux de chômage récurrent.

Pour autant, penser un tel combat sous le seul prisme des emplois aidés risque de nous faire passer à côté du défi majeur que notre pays doit relever.

Les emplois aidés sont malheureusement bien souvent des contrats précaires. Ils constituent malheureusement aussi une aubaine pour certains employeurs. Dans le secteur marchand, seulement 25 % des contrats aidés débouchent ensuite sur un emploi.

Nous regrettons en outre que la proposition de loi ne comporte pas de volet formation, pilier pourtant indispensable.

Le Premier ministre a annoncé au mois de septembre dernier sa volonté de former 1, 4 million de demandeurs d’emploi en 2022. Pour éviter que la reprise ne laisse au bord de la route les publics vulnérables, Pôle emploi devrait déployer le parcours de remobilisation expérimenté depuis quelques mois, qui doit permettre aux chômeurs sans activité depuis deux ans ou plus de retrouver un emploi ou une formation dans une période de six mois.

Enfin, la pérennisation du dispositif Territoires zéro chômeur de longue durée (TZCLD) qui est proposée semble prématurée. La loi du 14 décembre 2020 a prévu une évaluation de l’expérimentation, afin qu’elle puisse être prolongée, élargie ou pérennisée.

Pour toutes ces raisons, le groupe du RDSE s’abstiendra majoritairement sur la présente proposition de loi.

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