Intervention de François Braun

Réunion du 20 juillet 2022 à 15h00
Veille et sécurité sanitaire en matière de lutte contre la covid-19 — Discussion générale

François Braun :

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d’abord, à l’occasion de ma première intervention à la tribune de l’hémicycle de la chambre haute, de vous faire part de l’honneur qui est le mien d’être parmi vous pour présenter le projet de loi entérinant la sortie de l’état d’urgence sanitaire.

Je suis un homme de dialogue et de compromis. Je crois que nous pourrons collectivement parvenir à bâtir des solutions au service de l’intérêt supérieur de la Nation.

Il me semble que cet état d’esprit est aussi celui du Sénat. Je me réjouis donc de pouvoir travailler avec vous sur ce sujet ô combien essentiel pour les Français, la santé.

Permettre à chaque Français, quel que soit son revenu ou son lieu de résidence, d’être soigné dans de bonnes conditions ; redonner du sens au métier de soignant ; sauver l’hôpital ; développer une véritable culture de la prévention : autant de défis majeurs pour lesquels nous aurons besoin de tous, soignants, soignés, élus, pour parvenir à des solutions pragmatiques, efficaces et facilement applicables.

Cet après-midi, mon propos se concentrera évidemment sur le projet de loi dont nous venons d’entamer la discussion.

Ce texte entérine, conformément à l’engagement du Gouvernement, la fin de l’état d’urgence sanitaire au 31 juillet prochain. Je le dis avec force, car j’entends et je lis des discours mensongers qui permettent à des commerçants de la désinformation de prospérer sur les réseaux sociaux, et ce au détriment de la santé des Français et de la sauvegarde des valeurs démocratiques.

Le régime juridique et le régime de sortie de l’état d’urgence sanitaire s’éteindront le 31 juillet prochain. Pour moi, qui – vous le savez – ai été en première ligne au mois de mars 2020, c’est un moment fort d’émotion.

On ne pourra donc plus demander de passe sanitaire pour des actes de la vie quotidienne, comme le fait d’aller au restaurant. Aucun article du projet de loi tel que déposé par le Gouvernement, adopté par l’Assemblée nationale ou issu des travaux de la commission des lois du Sénat ne le prévoit.

Le projet de loi qui vous est proposé comprend deux mesures minimales, mais essentielles, pour protéger les Français. En effet, si l’état d’urgence sanitaire est derrière nous, l’épidémie continue. Nous vivons actuellement une septième vague, qui semble être – je reste prudent – sur une phase descendante.

Nous connaîtrons sans doute à l’avenir d’autres vagues. Nous ne sommes pas à l’abri de l’émergence d’un nouveau variant plus inquiétant. Il faudra alors être collectivement sûrs d’avoir légiféré de manière à pouvoir protéger rapidement les Français.

Les dispositions concernées, qui sont simples et proportionnées, ont quatre objectifs : nous permettre de suivre l’évolution de l’épidémie et le nombre de contaminés au jour le jour ; garantir la libre circulation des personnes, avec l’émission des certificats nécessaires pour se rendre vers des pays qui maintiennent des restrictions ; informer les cas contacts pour qu’ils puissent s’isoler et se tester ; protéger les Français si un variant inquiétant émerge à nos portes.

Avant de vous détailler les différentes mesures, je voudrais vous rappeler, comme je l’ai fait lors de mon audition en commission des lois, mon engagement envers les Français et leurs représentants en matière de gestion épidémique. Il est de cinq ordres : transparence quant à la situation sanitaire que nous connaissons ; protection de la population par l’adoption de mesures nécessaires pour limiter, autant que faire se peut, la diffusion du virus ; proportionnalité des mesures adoptées pour que nos concitoyens puissent mener une vie aussi normale que possible ; préservation du système de santé pour éviter le risque de saturation, a fortiori dans le contexte que nous connaissons et qui justifie pleinement mon engagement aux côtés des professionnels pour l’accès des Français à la santé ; maintien de la prise en charge des soins hors covid, ce qui est une exigence d’équité vis-à-vis de nos concitoyens.

Tout d’abord, conformément à mon engagement de transparence, je voudrais vous communiquer les derniers chiffres dont je dispose sur la septième vague, qui est due aux sous-variants d’Omicron BA4 et BA5.

Au 19 juillet, le taux d’incidence s’établit à 1 133 pour 100 000 habitants, en diminution de 16 % sur les sept derniers jours. Il était de 1 433 le 10 juillet. Nous enregistrons en moyenne, sur les sept derniers jours, 95 000 nouveaux cas journaliers. Le taux de reproduction du virus, le fameux R0, est inférieur à 1, puisqu’il s’élève à 0, 83, ce qui est plutôt encourageant s’agissant de l’évolution de la vague.

L’ensemble du territoire est touché. À cet égard, je souhaite évoquer la situation dans les outre-mer, à laquelle je serai toujours attentif. Le système hospitalier y est plus vulnérable et peut être saturé plus rapidement. Mon action en tant que ministre est de protéger les territoires concernés sans jamais les stigmatiser. À ce stade, la situation y est maîtrisée. Mais je reste bien entendu vigilant.

De même, je reste très attentif à la capacité de nos hôpitaux à faire face à la covid-19. Actuellement, 8 000 personnes sont en hospitalisation conventionnelle, et 898 personnes sont en soins critiques.

Je le rappelle, même si nous semblons être sur la pente descendante de la septième vague, les hospitalisations sont, elles, légèrement décalées dans le temps par rapport à l’évolution des contaminations. La vigilance reste donc de mise.

La capacité de l’hôpital à faire face à l’épidémie sera par ailleurs renforcée par l’instruction que j’ai signée voilà une dizaine de jours. Elle traduit la mise en œuvre des mesures d’urgence de la mission réalisée à la demande de ma prédécesseure Brigitte Bourguignon et entérinée par la Première ministre.

Toujours dans mon objectif de transparence à votre égard et pour les Français qui nous écoutent, je veux aussi rappeler notre stratégie face à la covid-19. Elle est claire et peut se résumer en cinq mots : prévenir, vacciner, tester, isoler, traiter.

Nous devons prévenir la propagation du virus par les gestes barrières. J’appelle ici à la mobilisation citoyenne, car nous ne pourrons pas légiférer à chaque vague de l’épidémie. Les gestes barrières, comme le port du masque en situation de promiscuité, doivent redevenir des réflexes.

La vaccination est essentielle. C’est notre arme de protection massive. Je m’insurgerai toujours, en tant que médecin, contre la désinformation qui circule, notamment sur les réseaux sociaux. Le vaccin réduit significativement le risque de développer une forme grave de la covid-19. C’est pourquoi, conformément aux recommandations des autorités scientifiques, nous avons ouvert le deuxième rappel vaccinal aux personnes vulnérables, à savoir les plus de 60 ans, les personnes immunodéprimées et à risque de forme grave.

En cas de doute, test. En cas de test positif, isolement. Dès que nous sommes cas contact ou symptomatiques, nous ne devons pas hésiter. Nous devons réduire les contacts, nous tester, et, si le test est positif, nous isoler jusqu’au rétablissement.

Les Français ont intégré ces procédures et se testent massivement. Ainsi, 2, 8 millions de tests ont été pratiqués au cours des sept derniers jours.

Nous devons également limiter le risque en utilisant les traitements disponibles. Il existe des traitements curatifs, comme le Paxlovid, qui permettent de diminuer le risque de développer une forme grave de la maladie. Les Français doivent connaître l’existence de tels traitements et pouvoir en discuter avec leurs médecins et pharmaciens.

Face à une épidémie qui revient par vague et au risque de l’émergence d’un variant inquiétant, le projet de loi comporte deux dispositions essentielles et minimales.

L’article 1er vise à maintenir l’existence des systèmes d’information de gestion de l’épidémie, à savoir le système d’information de dépistage populationnel (SI-DEP) et Contact Covid. Ils sont essentiels, car ce sont nos thermomètres de l’épidémie. Ils nous permettent de suivre son évolution et de protéger les Français.

SI-DEP permet l’enregistrement des tests covid, afin que nous puissions suivre l’épidémie. C’est également grâce à ce système que nous produisons les certificats permettant à nos concitoyens de voyager vers des pays qui ont maintenu des restrictions sanitaires à l’entrée de leur territoire.

Je me félicite que la commission des lois du Sénat ait prolongé, en cohérence avec le règlement européen, la validité de SI-DEP jusqu’au 30 juin 2023. Cela garantira aux Français la possibilité de voyager en Europe et dans le monde, en leur permettant de disposer des certificats de test ou de rétablissement que tout État peut exiger pour entrer sur son territoire. Il s’agit d’une évolution bienvenue. Nous conserverons ce thermomètre irremplaçable de l’épidémie jusqu’à cette date.

Contact Covid nous permet d’identifier les cas contacts, de les informer et de les protéger. La commission des lois a maintenu, pour ce qui concerne ce système d’information, la date du 31 janvier, qui avait également fait consensus à l’Assemblée nationale.

L’article 2 a connu un destin mouvementé. Dans sa version initiale, il nous offrait la possibilité, comme c’est le cas dans le droit en vigueur depuis plus d’un an, de demander certains justificatifs aux personnes qui se déplacent depuis ou vers le territoire hexagonal. Je pense en particulier à la Corse et aux collectivités d’outre-mer. La commission des lois de l’Assemblée nationale a ramené la fin de l’application du dispositif du 31 mars 2023 au 31 janvier 2023.

Cette mesure de protection face à la possible émergence d’un variant inquiétant a été supprimée à l’occasion d’une alliance singulière dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale.

Je me félicite que la commission des lois ait confirmé le principe de l’intérêt d’une telle disposition. Je salue l’esprit de responsabilité qui a prévalu.

Un tel travail peut, je le crois, être poursuivi dans cet hémicycle sur quelques points d’importance, pour donner sa pleine mesure à l’article. Je soutiendrai certains des amendements qui ont été déposés pour contribuer à améliorer encore, avec vous, le texte adopté par la commission des lois.

Cette dernière a également souhaité supprimer formellement, au lieu de simplement laisser les dispositions s’éteindre, le régime juridique de l’état d’urgence sanitaire. Si cela allait sans dire, cela va peut-être mieux en le disant. Le Gouvernement, qui avait suivi l’avis du Conseil d’État sur ce point, comprend la préférence de votre commission pour une suppression plus nette, même si cela suppose des travaux légistiques un peu sophistiqués.

Enfin, vous avez souhaité préciser le contenu du rapport prévu à l’article 3, afin qu’il aborde les potentielles dispositions de droit commun qui seraient pertinentes face aux menaces sanitaires, en lieu et place d’un régime d’exception. Le Gouvernement répondra à cette demande d’information.

Mesdames, messieurs les sénateurs, construisons donc ce « compromis sans compromission ». Pour ma part, j’y suis prêt.

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