Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous apprenons à vivre avec les réseaux sociaux, mais ceux-ci évoluent sans cesse, tout comme leurs usages.
J’ai évoqué, lors de la première lecture de ce texte, le récent acte terroriste d’extrême droite commis aux États-Unis, à Buffalo, par un suprématiste blanc. L’auteur a diffusé ses actes en direct sur Twitch. La vidéo dont il est question a été retirée en moins de deux minutes : comme nous l’a rappelé France Culture, « c’est considérablement moins que les 17 minutes qu’il avait fallu à Facebook pour retirer une vidéo similaire, diffusée par le suprématiste blanc autoproclamé qui avait tué 51 personnes dans deux mosquées néo-zélandaises, à Christchurch, en 2019 ». Pourtant, ces deux minutes ont suffi pour que certains copient les images concernées et les diffusent à leur tour.
Le temps réel constitue bel et bien un défi en ce qui concerne le contrôle de la propagation des contenus terroristes en ligne.
La proposition de loi que nous examinons en séance a trait à ces enjeux. Nous nous interrogeons de nouveau, comme beaucoup de collègues sur toutes les travées, sur le véhicule législatif choisi.
L’adoption du règlement TCO nécessite une adaptation de la législation nationale. Ne pas procéder à celle-ci placerait la France en contradiction avec ses obligations et ses engagements européens.
Pour cette raison, un projet de loi s’imposait. Le Parlement aurait tiré profit de l’étude d’impact et, surtout, de l’avis du Conseil d’État sur la compatibilité du règlement avec notre ordre constitutionnel, un sujet qui a soulevé de nombreuses questions, comme l’a rappelé tout à l’heure notre rapporteur.
Peut-être le secrétariat général du Gouvernement, auditionné demain en commission, pourra-t-il nous fournir des explications et répondre à notre souhait qu’il ne soit plus abusé de la procédure législative par voie de proposition de loi.
L’objectif principal de la présente proposition de loi, à savoir la lutte contre le terrorisme et sa propagande, n’est pas contestable. Le dispositif qu’elle met en œuvre a vocation à s’insérer dans le cadre du régime de blocage administratif en vigueur dans notre droit interne. Si l’hébergeur ou le fournisseur de contenus refuse de se conformer dans l’heure à l’injonction de retrait du contenu, une demande de blocage pourra être adressée par l’autorité administrative au fournisseur d’accès à internet, à l’issue d’un délai de vingt-quatre heures, conformément à l’article 6-1 de la LCEN.
Rappelons que les mesures de lutte contre la diffusion des contenus à caractère terroriste en ligne doivent être complétées par des stratégies de lutte contre le terrorisme, de la part des États membres. Il s’agit du renforcement de l’éducation aux médias et de l’esprit critique et de toute autre initiative permettant de réduire à la fois l’impact des contenus à caractère terroriste en ligne et la vulnérabilité à leur égard.
Il ne faut pas sous-estimer l’investissement nécessaire dans le travail social, dans les initiatives de déradicalisation et dans le dialogue avec les communautés touchées, afin de parvenir à une prévention durable de la radicalisation dans la société.
Dans le droit fil de l’accord trouvé – l’essentiel du désaccord persistant, qui portait sur les modalités d’appel des décisions de blocage, a trouvé une issue favorable –, accord qui intègre les apports du Sénat au texte initial, notre groupe adoptera les conclusions de cette commission mixte paritaire.