Intervention de Christine Lavarde

Réunion du 28 juillet 2022 à 10h30
Mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Christine LavardeChristine Lavarde :

La progression des salaires sur le long terme est rendue possible uniquement par des gains de productivité. Or l’on constate aujourd’hui que les gains de productivité sont très en deçà de la progression du salaire réel. En 2009, lors de la crise financière, la productivité a baissé, mais les salaires ont continué de progresser, et l’écart a été rattrapé ensuite par la mise en place du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE).

Est-ce encore possible aujourd’hui ? Non, car l’état de nos finances publiques ne permet pas de créer un nouveau CICE.

Par ailleurs, la prime peut créer un effet d’aubaine pour les entreprises. Au premier trimestre de l’année 2019, l’Insee relevait que le salaire moyen par tête avait augmenté de 2, 7 %, mais seulement de 1, 3 % si on y retranchait l’effet de la PEPA, soit un niveau de croissance inférieur au trimestre antérieur et au trimestre suivant, où la hausse était plutôt de 1, 5 %.

Les entreprises ont-elles les moyens de participer ? Compte tenu de l’évolution de la structure des coûts des entreprises, le niveau de résultat d’exploitation rapporté à la valeur de leur production recule, jusqu’à rejoindre les points bas de 2012 et de 2013.

On s’attend aujourd’hui à une réduction des marges, qui n’est pas alarmante en l’état – car ces marges étaient hautes en 2021 –, mais qui devrait les ramener à un niveau proche de celui de 2018.

Par ailleurs, la baisse de la productivité depuis 2019 pose de véritables questions sur les marges de manœuvre des entreprises pour augmenter les salaires ou pour verser une prime. Ce n’est pas la multiplication par trois du plafond entre la PEPA et la prime de partage de la valeur (PPV) – il s’agit surtout d’un effet d’annonce – qui leur permettra d’en dégager.

Faut-il une intervention ciblée ou un soutien général ? Au mois de mars, l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) a calculé que, sur 5 % d’inflation générale, les 10 % des ménages les mieux lotis face à ce choc subissent une inflation de seulement 2, 5 %, là où les 10 % des ménages les plus exposés subissent une inflation de 8, 5 %.

Cet écart se justifie moins par les revenus que par les lieux de résidence de ces personnes. En effet, au sein d’un même décile, les situations sont très différentes selon que l’on ait besoin ou non d’utiliser sa voiture, notamment pour aller travailler.

Il est donc très important, dans la définition des politiques publiques, de tenir compte de la diversité des situations face à l’inflation.

L’inflation se nourrit également de l’afflux de liquidités. À cet égard, la généralisation et la pérennisation d’une prime centrée sur le pouvoir d’achat contribueraient à autoentretenir l’inflation.

C’est la raison pour laquelle la commission des finances a décidé de recentrer le dispositif pour en faire un véritable dispositif de soutien au pouvoir d’achat des plus modestes.

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