Intervention de Olivier Dussopt

Réunion du 28 juillet 2022 à 14h30
Mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat — Article 4, amendements 164 145

Olivier Dussopt :

Il s’agit effectivement de rétablir l’article 4 dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale.

J’ai entendu les arguments de Mme le rapporteur, dans la discussion générale ou à travers nos différents échanges ; j’ai également pris connaissance du compte rendu des travaux de la commission des affaires sociales.

Parmi les 171 branches qui font l’objet d’une observation fine de la part de la direction générale du travail, certaines éprouvent des difficultés structurelles à garantir un niveau minimum de rémunération au moins égal au SMIC.

Pour éviter tout malentendu, précisons tout d’abord qu’aucun salarié n’est payé en dessous du SMIC, fort heureusement. Mais le maintien de niveaux de rémunération conventionnels inférieurs au SMIC entraîne des tassements de carrière et, surtout, une forme de désespoir, dans la mesure où un salarié recruté au premier niveau de rémunération doit passer plusieurs stades de qualification pour voir enfin son salaire décoller du niveau du SMIC.

Nous disposons déjà d’outils incitatifs, notamment le Comité de suivi des négociations salariales de branches – j’ai présidé le dernier, ma prédécesseure avait présidé l’avant-dernier. Nous pouvons aussi inscrire les branches qui restent durablement à un niveau inférieur au SMIC en commission paritaire pour garantir un suivi encore plus fin.

Nous proposons à travers cet article 4 un nouvel outil : prévoir comme critère de restructuration de branches le maintien durable de minima conventionnels inférieurs au SMIC.

La mécanique que nous proposons est la suivante : un décret constaterait la carence et le maintien durable des minima conventionnels à un niveau inférieur au SMIC ; il serait accompagné d’un projet de fusion et de restructuration de la branche.

Cette dernière aurait alors deux solutions : soit réagir immédiatement en ouvrant des négociations pour se mettre en accord avec la loi, soit se soumettre à la restructuration ainsi prévue.

Ce mécanisme est très incitatif ; il comporte même un aspect assez coercitif, mais il a vocation à être mis en œuvre avec parcimonie.

Aujourd’hui, l’état des lieux est le suivant : quinze branches ont au moins un minimum conventionnel inférieur au SMIC depuis plus de neuf mois, et deux branches ont des minima conventionnels inférieurs au SMIC depuis plus de dix-huit mois.

J’entends que l’utilité à court terme de ce dispositif puisse être interrogée, mais, à l’avenir, cet outil pourra être utile en cas de maintien de minima conventionnels à un niveau inférieur au SMIC.

La plupart des branches font preuve de beaucoup de diligence pour se mettre en accord avec la loi. Ainsi, après la dernière revalorisation du SMIC au mois de mai, 145 branches avaient au moins un minimum inférieur au SMIC. À l’heure où je m’exprime devant vous, 90 sont encore dans cette situation, ce qui signifie que 55 ont fait le travail de négociation depuis le 1er mai jusqu’à aujourd’hui. La nouvelle revalorisation du SMIC le 1er août entraînera une situation assez identique à celle du 1er mai, avec de nouveau des ouvertures de discussion.

Enfin, l’Assemblée nationale a adopté un amendement qui vise à réduire de 90 à 45 jours le délai au cours duquel les branches doivent ouvrir des négociations, si un minimum passe en dessous du SMIC, ce qui dynamiserait encore plus le dialogue social.

Je ne dis pas que l’outil est parfait, et cela n’aurait aucun sens de l’utiliser de manière brutale. Il s’agit simplement d’un outil supplémentaire à la disposition de l’État, et à travers lui du Comité de suivi des négociations salariales par branches, pour dynamiser les négociations et faire en sorte que les branches disposent de minima conventionnels au moins égaux au SMIC.

Enfin, monsieur le président, je saisis également cette occasion pour dire que le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements n° 164 et 145.

Nous considérons que l’indexation automatique ferait perdre son sel et son intérêt au dialogue social, sans compter qu’il empêcherait les partenaires sociaux de procéder à des revalorisations différenciées des niveaux de rémunération. L’amendement n° 145 s’inscrit dans la même logique ; c’est pourquoi nous y sommes également défavorables.

Nous privilégions vraiment ce nouvel outil de dynamisation du dialogue social que nous vous proposons, M. Iacovelli et moi-même, à travers ces deux amendements identiques.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion