Madame la ministre, dans un peu plus d’un mois commencera la XXIIe Coupe du monde de football, au Qatar.
Sans préjuger de la sélection finale, il faut admettre que, cette année, nous avons une équipe de très haut niveau ; cette Coupe du monde aurait donc dû être une très belle fête pour la France.
Pourtant, on le voit, un malaise, pour ne pas dire du dégoût, est en train de grandir, y compris chez certains des plus fervents supporters des Bleus. En réalité, nous sommes face à un dilemme : une troisième étoile sur le maillot bleu vaut-elle toutes les compromissions ? Car, des compromissions, il y en a eu et il y en a encore.
En 2010, Kylian Mbappé n’avait que 12 ans, mais, à cette époque, Nicolas Sarkozy œuvrait déjà avec succès pour que la monarchie qatarie se voie attribuer l’organisation de l’événement. Douze ans plus tard, on s’apprête à jouer la plus grande compétition de football sur les cadavres de 6 500 travailleurs qui ont participé à la construction de stades climatisés. Douze ans plus tard, les droits humains n’ont pas progressé au Qatar, les minorités sexuelles sont toujours persécutées, les femmes ne sont pas libres et l’esclavage continue. Douze ans plus tard, le climat prend la trajectoire d’un chaos global et on continue d’organiser de grands événements sportifs dans le déni climatique, en dépit de toutes les alertes, de toutes les catastrophes, de tous les emballements, de tous les drames qui surviennent.
Vous me direz sans doute, madame la ministre, que vous n’êtes pas comptable des compromissions passées, mais la France s’apprête à exporter, demain, son savoir-faire en matière de sécurité, en mettant au service de la dictature qatarie 220 gendarmes et agents de la sécurité civile, tous des hommes, bien entendu, pour ne pas choquer le rigorisme religieux des émirs…
Pourtant, au-delà du rayonnement de nos équipes nationales, le sport français devrait être un réel vecteur d’engagement en faveur des droits humains et du climat.
Ma question est donc la même que celle que je posais à votre prédécesseur voilà quelques mois, à l’occasion des jeux Olympiques au pays du génocide ouïghour : si nos joueurs n’ont pas à assumer les choix politiques de la France, allez-vous, de votre côté, au moins boycotter diplomatiquement cette Coupe du monde de la honte et de la compromission ? Allez-vous enfin engager votre ministère dans une réelle diplomatie sportive au service du climat et des droits humains ?