Madame la ministre, nous sommes heureux de vous accueillir aujourd'hui pour une audition budgétaire sur les moyens de votre ministère pour 2023.
Nous allons bien entendu parler chiffres et pourcentages, mais notre échange sera aussi l'occasion d'évoquer votre vision de l'état du monde, qui ne se porte pas très bien en ce moment, et les principales positions prises par la France.
Les autorisations d'engagement de votre ministère progressent de 16 %, et les crédits de paiement de 9 %. Les moyens de l'aide publique au développement (APD) augmentent de 13 %, et ceux de l'action extérieure de l'État de 5 %. Nous saluons ces efforts, même si ce dernier chiffre nous semble encore insuffisant au regard du niveau atteint par l'inflation.
Les crédits de paiement du coeur de l'APD, à savoir les dons-projets, augmentent de 9 %, mais l'on note surtout une hausse de 146 % des crédits de « gestion et sortie de crise », qui passent à 730 millions d'euros, ce qui en dit long du reste sur l'état du monde. Quelle sera l'affectation de ces crédits de gestion de crise ? Cette hausse ne reflète-t-elle pas, malheureusement, une sorte de retour en arrière vers l'aide humanitaire, au détriment de l'aide au développement, qui correspond aussi à une forte dégradation de l'état de nombreux pays, notamment au Sahel ?
Par ailleurs, nous aimerions avoir quelques nouvelles de la commission d'évaluation de l'APD, dont la création était prévue par la loi du 4 août 2021. Plus d'un an après, nous attendons toujours son installation.
Pour les moyens du réseau diplomatique, nous nous réjouissons vivement de l'augmentation des effectifs de 106 équivalents temps plein travaillés (ETP) en 2023. Notre commission souligne depuis des années que nous avons été imprudents de fragiliser par tant d'attritions répétées notre réseau. Je renouvelle notre reconnaissance aux personnels, dont l'engagement sans faille a permis de faire face aux défis du coronavirus, mais Il est vraiment nécessaire de redonner des moyens humains au Quai d'Orsay dans ces temps de compétition internationale exacerbée. Des pays voisins comme l'Allemagne, le Royaume-Uni ou la Turquie intensifient fortement leur présence diplomatique. Nous ne devons pas laisser l'écart se creuser.
Nous attendons aussi beaucoup de vos explications sur l'application de la réforme de l'encadrement de la haute fonction publique au Quai d'Orsay. Les États généraux de la diplomatie doivent être l'occasion de revenir sur les conséquences de cette réforme. Je rappelle que notre commission a adopté des recommandations constructives dans ce domaine, à l'issue d'un important travail mené par nos rapporteurs Jean-Pierre Grand et André Vallini. Il me semble, madame la ministre, que vous auriez tout à gagner à prendre en compte certaines de leurs propositions. La qualité de notre personnel diplomatique est reconnue dans le monde entier ; nous devons préserver cet outil fort précieux.
Autre sujet de préoccupation de notre commission : la sécurité de nos concitoyens et de nos implantations à l'étranger. Nous avons tous en tête les images de l'attaque de notre ambassade à Ouagadougou. Vous nous direz si vos moyens sont à la hauteur des enjeux d'un monde où l'affrontement n'est plus un risque, mais trop souvent une réalité, et qui rend plus que jamais nécessaire la protection de nos emprises et des diplomates professionnels.