Puisque j’ai évoqué rapidement le monde de la justice, je crois qu’à droite comme à gauche, nous regrettons de ne pas parvenir à aborder les questions de sécurité et de justice dans un même élan. Nous faisons tous un lien entre les problèmes de sécurité et la réponse pénale, et nous constatons les occasionnelles tensions entre magistrats et policiers. Il nous manque la stéréophonie chère au rapporteur Marc-Philippe Daubresse. Ce regret concerne d’ailleurs tout autant le Parlement que l’exécutif.
Nous regrettons également l’absence de mention du continuum de sécurité. Ce silence sur la coopération entre les collectivités et l’État central est étonnant, alors que la loi du 25 mai 2021 pour une sécurité globale préservant les libertés semblait en faire un tout indépassable.
Nous craignons qu’un tel silence ne soit la traduction de faiblesses dont nous avions fait état à l’époque : le continuum de sécurité peut en effet rapidement ressembler à un marché de dupes. Si une mairie ne consacre pas suffisamment vite des moyens à la sécurité, que ce soit en raison d’un contexte budgétaire ou d’une croissance démographique locale exigeante, elle pourra être pointée du doigt ; c’est arrivé récemment. Si elle le fait, elle prendra la lumière médiatique, donc les coups, en lieu et place du Gouvernement, et on lui en demandera toujours plus.
Nous considérons pour notre part que la sécurité doit rester d’abord la prérogative de l’État central.
Mais j’ai assez parlé de ce qui n’est pas dans le texte ! Le vote de notre groupe repose bien évidemment sur les trois aspects principaux du projet de loi.
Il y a une certaine cohérence dans le rapport annexé. On voit la filiation avec le livre blanc de la sécurité intérieure et le Beauvau de la sécurité. La place octroyée au numérique, même si nous comprenons les inquiétudes de certains agents échaudés par les échecs récents, nous semble légitime.
Nous vous remercions d’avoir bien voulu prendre en considération plusieurs améliorations proposées par notre groupe au travers des amendements de mes collègues Laurence Harribey, Gisèle Jourda ou Patrick Kanner. Ainsi en va-t-il de l’accessibilité des locaux et des démarches dématérialisées pour les personnes en situation de handicap et de la meilleure projection des moyens de sécurité civile sur tout le territoire. Les modifications apportées au texte qui permettront de s’assurer de l’objectivité du choix d’implantation des 200 brigades de gendarmerie annoncées ou encore d’étudier la création d’une seconde base pour les Canadairs constituent de bonnes nouvelles.
J’en viens au volet budgétaire. Le groupe socialiste se félicite des moyens accordés au ministère de l’intérieur. Nous en profitons pour exprimer de nouveau un soutien sans réserve à nos forces de l’ordre – police, gendarmerie, police municipale –, qui ne comptent bien souvent ni leurs heures ni leurs efforts pour assurer la tranquillité de nos concitoyens partout sur notre territoire.
La plupart des candidats à l’élection présidentielle, de gauche comme de droite, s’étaient engagés à accorder plus de moyens à la lutte contre l’insécurité. Les 15 milliards d’euros annoncés dans ce texte constituent donc une bonne nouvelle que nous approuvons sans réserve, même si nous serons vigilants sur l’application de cette loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi), budget après budget, dans le contexte économique incertain qui est le nôtre.
Pour finir, les articles normatifs ont peu évolué après l’examen dans l’hémicycle, malgré l’apport bienvenu des amendements de mes collègues Rémi Cardon ou Catherine Conconne.
Le dépôt de plainte par visioconférence me semble mieux encadré, le projet de réseau Radio du futur (RRF) sera sans doute mieux assuré sans ordonnance, tout comme l’adaptation aux collectivités ultramarines. Nous approuvons l’alignement sur le régime des autres personnes dépositaires de l’autorité publique des peines encourues pour les agressions sur les élus.
Nous déplorons le rejet des propositions de mes collègues Laurence Rossignol et Marie-Pierre de La Gontrie visant à mieux lutter contre les violences intrafamiliales et conjugales.
Sur les refus d’obtempérer, il est dommage de ne pas être allé plus loin dans la discussion de l’amendement socialiste qui visait à revenir au dispositif gouvernemental initial de 2016.
Bien entendu, nous ne soutenons pas l’extension des amendes forfaitaires délictuelles (AFD), même si les limites fixées par les rapporteurs sont bienvenues. Nous n’approuvons pas davantage les nouvelles modalités d’accès à l’examen d’officier de police judiciaire (OPJ) ou le nouvel article qui vise les violences dites « gratuites ».
Je ne trahirai pas de secret en disant que nous nous sommes arraché les cheveux sur la loi anticasseurs et que nous avions des oppositions très profondes sur la loi Sécurité globale. Tout ne nous plaît pas, et c’est un euphémisme, dans cette Lopmi.
Nous avons donc, en raison de ces désaccords, envisagé l’abstention. Mais notre groupe a choisi de prendre ses responsabilités. La demande de sécurité exprimée par nos concitoyens et relayée partout par les élus locaux nous a convaincus de voter en faveur de ce texte et des moyens supplémentaires qui sont alloués à nos forces de l’ordre.