Intervention de Nicole Duranton

Réunion du 18 octobre 2022 à 22h00
Intervention des cabinets de conseil privés dans les politiques publiques — Discussion générale

Photo de Nicole DurantonNicole Duranton :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les pouvoirs publics ont toujours eu besoin de s’appuyer sur des compétences extérieures. C’est une réalité ancienne, qui ne date pas uniquement de l’élection présidentielle de 2017 : elle existe depuis de nombreux quinquennats et s’est accélérée depuis 2007.

Ressources humaines, informatique, gestion de données massives, communication, analyse comparative : les besoins sont en réalité nombreux. Pourquoi ? D’abord, parce que certains champs d’expertise très spécialisés nécessitent un recours à des cabinets de conseil. Ensuite, parce qu’un arbitrage apaisé appelle parfois un regard extérieur. Enfin, parce que l’urgence ou le lancement d’un projet impliquent l’action rapide et coordonnée d’un grand nombre de consultants, agissant uniquement dans un laps de temps déterminé, ce qui se prête mal au processus de recrutement de fonctionnaires.

Pour autant, le besoin ne sera pas toujours aussi important que durant la crise du covid-19. D’une part, nous avons vécu ces dernières années une accumulation de crises globales tout à fait inédite. D’autre part, chaque administration travaille son attractivité afin d’engager en interne les compétences dont elle a besoin.

Je tenais également à souligner que nous ne sommes pas les plus mauvais élèves en Europe. En 2018, un rapport relevait qu’en comparaison avec les autres pays européens, le conseil au secteur public apparaissait limité en France, les chiffres étant cinq fois plus élevés en Allemagne et quatre fois plus au Royaume-Uni.

La résolution n° 111 a été enregistrée à la présidence du Sénat le 27 octobre 2021. Une commission d’enquête a ensuite été constituée. Cette commission, dont j’étais membre, a entendu pendant quatre mois 47 personnes sous serment, lu les réponses à 131 questionnaires, et analysé 7 300 documents, comme mes collègues l’ont déjà souligné.

Le rapport a été rendu le 16 mars dernier, et je salue le fait que le Gouvernement ait pris en considération ses recommandations lors de l’élaboration du nouvel accord-cadre plafonnant les dépenses de conseil, renforçant la transparence et améliorant l’évaluation.

Par ailleurs, le Gouvernement a d’ores et déjà publié un « jaune budgétaire » annexé au projet de loi de finances pour 2023, intitulé Recours aux conseils extérieurs. Il s’agit là d’un pas supplémentaire vers plus de transparence.

Compétence, souveraineté, démocratie et légitimité de la décision : tels sont les enjeux que cette pratique implique et qu’il convient de sécuriser. Le Premier ministre avait déjà publié le 19 janvier dernier une circulaire fixant l’objectif ambitieux de diminuer de 15 % le volume des prestations de conseil en stratégie en 2022. Toutefois, les dispositions concernant la transparence méritent d’entrer dans le champ législatif.

Je salue le travail préalable, en 2014 et 2015, des rapporteurs de la commission des finances sur la communication de la Cour de Comptes. Le mercredi 12 octobre dernier, la commission des lois a adopté à l’unanimité la proposition de loi encadrant l’intervention des cabinets de conseil privés dans les politiques publiques. Tous les amendements de la rapporteure ont également été adoptés.

Cette proposition de loi vise à traduire dans la loi les préconisations de la commission d’enquête. Il s’agit d’assurer la traçabilité de la participation de ces cabinets et de garantir une meilleure information des citoyens, mais en aucun cas de « supprimer » le conseil.

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