Intervention de Gabriel Attal

Commission des affaires sociales — Réunion du 25 octobre 2022 : 1ère réunion
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 — Audition de M. Gabriel Attal ministre délégué auprès du ministre de l'économie des finances et de la souveraineté industrielle et numérique chargé des comptes publics

Gabriel Attal, ministre délégué :

Avant de répondre aux questions, une réaction à l'observation de Mme la rapporteure générale concernant les déficits. Il y a une forme d'« effet ciseau » dans nos prévisions : un point d'inflation supplémentaire représente 3 milliards d'euros de dépenses en plus dans notre système social, quand un point de masse salariale supplémentaire représente 2 milliards d'euros de recettes en plus. Cela explique la dégradation du solde sur plusieurs années. Cette dégradation est par ailleurs largement tirée par le déficit du régime de retraite, lié à un nombre important de départs à la retraite dans les prochaines années.

Mme la rapporteure générale estime que le montant de 1 milliard d'euros consacré à l'épidémie de covid-19 est insuffisant. Nous avons accumulé des stocks, notamment de vaccins, au cours des derniers mois et un travail très important a été réalisé pour avoir une prévision la plus réaliste possible. Néanmoins, s'il faut réajuster à la hausse, nous le ferons.

S'agissant des retraites, le Président de la République s'est engagé sur un report progressif de l'âge légal de départ à la retraite à raison de quatre mois par an à partir de l'été 2023, pour atteindre une limite de 65 ans au bout de dix ans. Cette mesure a été chiffrée au moment de la campagne présidentielle : nous en attendons un gain « brut » - c'est-à-dire sans le financement de certains engagements concernant les carrières complètes ou pénibles - de plus de 8 milliards d'euros à l'horizon de 2027.

J'insiste aussi sur le gain indirect d'une telle réforme. Celle-ci vise évidemment à améliorer l'équilibre de notre régime de retraite, mais aussi à améliorer le taux d'emploi dans notre pays, ce qui engendrera cotisations sociales et recettes fiscales supplémentaires. Ainsi, la direction générale du Trésor nous a récemment remis une étude dans laquelle elle estime les recettes sociales et fiscales attendues d'ici à 2027, en lien avec ce report d'âge, à un niveau compris entre 15 et 20 milliards d'euros. Contrairement à ce que l'on peut lire ou entendre, le recul de l'âge légal de départ à la retraite ne se traduit pas par une diminution du taux d'emploi des seniors. Au contraire ! Toutes les études réalisées sur la réforme de 2010 ont montré qu'elle avait été suivie d'une amélioration de ce taux de plus de 10 points en dix ans.

Sur les transferts à la Cades, le PLFSS fixe à 17,7 milliards d'euros l'objectif d'amortissement de la dette sociale en 2023. La dette restant à amortir devrait s'élever à 154,9 milliards d'euros au début de l'année. Au total, 241,6 milliards d'euros ont déjà été amortis depuis la création de la Cades. Nous ne prévoyons pas de nouvelle loi sur le sujet.

Par ailleurs, ne pas adopter le projet de loi de programmation des finances publiques serait envoyer un mauvais signal. Tous les pays européens se dotent d'une telle loi et il est important d'avoir de la visibilité sur l'évolution de nos dépenses. Nous pouvons avoir des désaccords sur les politiques menées, mais ne pas établir de programmation des finances publiques serait problématique. Certains de nos financements européens sont conditionnés, par exemple, à l'établissement d'un dispositif d'évaluation pérenne de la qualité de la dépense publique, dispositif prévu dans le projet de loi précité. Mon souhait est donc que nous puissions l'adopter, sachant que le vote solennel a lieu cet après-midi à l'Assemblée nationale et que les oppositions ont choisi de voter contre. Nous comptons beaucoup sur la responsabilité des sénatrices et des sénateurs !

Le transfert des indemnités journalières postnatales de la branche maladie à la branche famille ne constitue pas une ponction. Il est cohérent avec des dépenses déjà incluses dans la branche famille, comme les indemnités journalières versées pendant le congé de paternité. Il me semble d'ailleurs que, par amendement, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a adopté un amendement visant le transfert des indemnités journalières pour congé d'adoption. Aucune autre mesure de ce type n'est prévue dans les années à venir.

S'agissant de la fiscalité du tabac, nous partageons tous l'objectif de réduire la prévalence du tabagisme dans notre pays. Le signal-prix est effectivement un bon levier, même si la prévention est aussi très importante. La mesure prévue dans le PLFSS n'est pas une mesure de rendement ; il s'agit de faire en sorte que les efforts réalisés au cours des dernières années ne soient pas annihilés par l'inflation. Aucune nouvelle trajectoire fiscale n'est envisagée, mais je suis très attentif à faire reculer la contrebande et les trafics dans le pays. Je travaille sur un nouveau plan dans ce domaine.

J'en viens aux questions exposées par M. Mouiller pour le compte de Mme Imbert. En 2025 et 2026, l'Ondam progressera plus rapidement que l'inflation et, pour avoir participé au quinquennat de François Hollande au sein du ministère de la santé, je vois mal comment on peut qualifier d'austère notre politique de santé : on en aurait rêvé à l'époque où les socialistes étaient au pouvoir ! J'entends qu'il faut faire plus, mais nous investissons massivement, tout en continuant à rechercher des leviers d'économies.

Des moyens importants ont été alloués aux Ehpad au cours des dernières années, comme les 500 millions d'euros attribués, entre 2017 et 2021, au renforcement de leur médicalisation. Dans le cadre de la campagne présidentielle, nous nous sommes engagés sur la création de 50 000 postes supplémentaires. Nous franchissons une première marche cette année, avec 170 millions d'euros visant à financer 3 000 équivalents temps plein (ETP), 50 millions d'euros pour faire basculer 200 Ehpad au tarif global et près de 60 millions d'euros destinés à la création de nouvelles places en Ehpad. Je suis néanmoins conscient de la nécessité de renforcer l'attractivité des métiers, d'où les 3,2 milliards d'euros alloués au secteur depuis 2020.

Enfin, je vous confirme que nous allons continuer à investir dans la politique familiale de notre pays.

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