Intervention de Éric Bocquet

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 26 octobre 2022 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2023 — Mission « solidarité insertion et égalité des chances » - examen du rapport spécial

Photo de Éric BocquetÉric Bocquet, rapporteur spécial de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » :

Nous nous sommes intéressés à la dynamique importante des crédits de la mission depuis 2019. Si nous tirons le bilan de la période récente, nous constatons que chaque année, depuis 2019, des enveloppes supplémentaires ont été ouvertes en urgence sur la mission. D'abord, en réaction au mouvement dit des gilets jaunes, avec une majoration de la prime d'activité, qui représente un coût pérenne pour l'État d'environ 4,4 milliards d'euros par an. Ensuite, pendant la crise sanitaire, avec le versement au printemps puis à l'automne 2020 de deux aides exceptionnelles de solidarité en faveur des bénéficiaires des minima sociaux et des aides au logement, d'un montant de 150 euros avec une majoration de 100 euros par enfant à charge et représentant un coût de près de 2 milliards d'euros.

Enfin, en réaction à la forte accélération de l'inflation qui fragilise considérablement le pouvoir d'achat de nos concitoyens les plus modestes, deux nouveaux dispositifs d'urgence ont successivement été financés sur la mission. D'abord l'indemnité inflation fin 2021, qui cumule le défaut d'une aide à la fois limitée - 100 euros -, très peu ciblée - elle s'adresse à toutes les personnes percevant moins de 2 000 euros de revenus mensuels sans considération des revenus du foyer -, et très coûteuse pour le budget de l'État : 3,8 milliards d'euros, dont 3,2 milliards d'euros financés par la mission. Plus récemment, en LFR 2022, une aide exceptionnelle de rentrée de 1,2 milliard d'euros a ensuite été votée.

Nous avons dans cette commission, assurément, des visions très divergentes de la politique économique et budgétaire. Je pense cependant que nous pourrons tous nous accorder sur un point : cette politique du chèque ne constitue pas une politique sociale. Elle aide uniquement les plus pauvres de nos concitoyens à passer le mois, sans leur donner la moindre perspective, et ne résout en rien le problème de fond. Le budget de la mission ne peut pas, à lui seul, absorber des chocs sociaux qui trouvent leur racine dans nos fragilités structurelles. Je pense, en particulier, à la faiblesse des salaires.

Il y a certes des points positifs dans ce budget, tels que la déconjugalisation de l'AAH prévue à compter du 1er octobre 2023. Cette mesure était très attendue. On ne peut que regretter le temps perdu avant que cette réforme ne soit enfin arrachée au Gouvernement à la faveur de la campagne présidentielle.

Je m'en remettrai pour ma part à la sagesse de la commission quant à sa position sur l'adoption des crédits.

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