La commission des affaires sociales s'est saisie des articles 17 à 20 et de l'article 24 de ce texte.
Comme vous, nous sommes sceptiques vis-à-vis de la trajectoire financière des régimes obligatoires de base et du Fonds de solidarité vieillesse, et plus spécifiquement de celle de l'Ondam. Celui-ci devrait frôler les 250 milliards d'euros dès 2024, soit cinq fois plus que le budget de la défense et quatre fois plus que celui de l'Éducation nationale.
La trajectoire affichée est pour le moins ambitieuse et, en tout cas, difficilement tenable.
Difficilement tenable, car les incertitudes sont grandes sur l'impact financier de la crise sanitaire en 2023 et dans les années suivantes.
Difficilement tenable, car nous voyons bien l'ampleur des besoins de santé, l'ampleur des attentes en matière de rénovation de l'hôpital, mais aussi l'ampleur de l'impact financier que représente le choc d'innovation dans le secteur du médicament, nécessaire pour relocaliser notre industrie et assurer notre autonomie.
Difficilement tenable, car le contexte inflationniste rend le taux réel de progression de l'Ondam bien moindre que celui qui est affiché. Si le ministre chargé des comptes publics considère que l'inflation ne se reproduit pas de manière identique sur les dépenses de santé, celle-ci est parfois plus forte encore sur certaines des charges principales des hôpitaux, comme l'énergie.
Difficilement tenable, enfin et surtout, car le Gouvernement comme le directeur de la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) reconnaissent qu'il faudra prendre des mesures fortes d'économies pour garantir le respect de cette trajectoire. Quelles seraient ces mesures ? Nous n'avons obtenu aucune information sur ce point. Régulera-t-on enfin l'Ondam de ville et, si oui, comment ? À moins que cela ne signe le retour explicite d'économies sur l'hôpital...
Quant au reste des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, je ne peux là encore que regretter le caractère particulièrement lacunaire des informations transmises par le Gouvernement. Pour m'en tenir à l'exemple le plus significatif, l'évolution des dépenses de la branche vieillesse est censée intégrer dès 2023 les effets d'une réforme des retraites, mais ni ses paramètres ni même son impact financier ne sont précisés dans un quelconque document. Et, malgré mes demandes réitérées, je n'ai eu aucune précision - pas plus que votre commission, semble-t-il.
Néanmoins, eu égard au rôle qui doit être celui d'une loi de programmation, c'est à dire, en premier lieu, permettre au Gouvernement de vérifier chaque année si la trajectoire fixée est respectée ou non, la commission des affaires sociales a émis un avis défavorable à l'adoption des articles dont elle était saisie, sous réserve de l'adoption de cinq amendements, que je vais vous présenter brièvement.
À l'article 17, la commission des affaires sociales a adopté deux amendements dont l'objet est de prolonger la trajectoire des dépenses des Robss et de l'Ondam. En effet, le « compteur des écarts » entre les dépenses prévues par le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) et celles figurant dans la loi de programmation des finances publiques (LPFP) doit concerner toutes les lois de financement de la sécurité sociale (LFSS) jusqu'à l'année 2027. La nouvelle rédaction de l'article L.O. 111-4 du code de la sécurité sociale fait même de ce « compteur des écarts » un élément obligatoire de la LFSS de l'année. Il importe donc que l'horizon de programmation ne se limite pas à l'année 2025.
À l'article 18, nous avons adopté un simple amendement de précision.
J'évoquerai plus en détail l'article 19, qui porte sur la « mise en réserve » de l'Ondam. Le montant minimal est fixé, depuis 2010, à « au moins 0,3 % » et suit en réalité ce taux. Pour 2022, cela représente 710 millions d'euros. Or, mes chers collègues, dans le silence de la loi, comment cette réserve a-t-elle été concrètement mise en oeuvre jusqu'à présent ? Pour 47 %, cette année, au moyen du « coefficient prudentiel » appliqué sur les tarifs hospitaliers, qui permet de les minorer en début d'année. Pour 21 %, en gelant une partie des dotations hospitalières. Pour 0 % sur l'Ondam de ville, parce que cela n'a pas de sens de mettre en réserve le remboursement des feuilles de soins et qu'aucun mécanisme de régulation n'existe sur les rémunérations, mêmes forfaitaires, des professionnels de santé.
L'hôpital porte donc en réalité 68 % des mises en réserve, ce qui représente un gel de 0,51 % de ses crédits. Dans ces conditions, notre commission a souhaité dire qu'il fallait cesser de faire porter les débordements de l'Ondam de ville par la régulation de l'hôpital.
À cette fin, nous proposons, d'une part, de fixer le taux de la mise en réserve : ce serait non plus un « plancher », mais un taux fixe ; d'autre part, d'inscrire de manière claire que la mise en réserve est homogène sur l'ensemble des sous-objectifs, de manière à mettre fin à l'effort supplémentaire demandé à l'hôpital.
Enfin, l'article 24 propose que le Gouvernement transmette chaque année au Parlement une décomposition du solde du sous-secteur des administrations de sécurité sociale (Asso), tout en précisant les différents éléments de cette décomposition. En cohérence avec la création des lois d'approbation des comptes de la sécurité sociale, notre commission a adopté un amendement dont l'objet principal est d'assurer qu'une telle décomposition soit également transmise au Parlement, pour ce qui concerne l'exercice clos chaque année, avant le 1er juin, soit au moment du dépôt du projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale.
Mes chers collègues, j'espère que la commission des finances partagera notre approche et pourra intégrer ces amendements dans le texte qu'elle établira à l'issue de cette réunion.