Intervention de Olivier Dussopt

Réunion du 25 octobre 2022 à 14h30
Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi — Discussion générale

Olivier Dussopt :

Je remercie l’ensemble des intervenants de la discussion générale, en particulier ceux qui ont indiqué que ce projet de loi apportait certaines améliorations en matière de réforme des règles de l’assurance chômage ou de validation des acquis de l’expérience.

Évidemment, ce texte ne peut pas être le seul outil pour tendre vers le plein emploi. Se posent en effet des questions relatives à la formation et à l’accompagnement des hommes et des femmes les plus éloignés de l’emploi, à la formation initiale, comme la réforme de la voie professionnelle, ou encore au développement de l’apprentissage. Je pourrais ajouter à cette liste, en écho à des concertations menées actuellement, les aspects relatifs au taux d’emploi des seniors ou encore aux conditions de travail. Tous ces sujets nous permettront, au-delà des dispositions de ce texte, d’aller vers le plein emploi.

Il ressort des interventions quatre thèmes qui, sans doute, structureront nos débats de ce soir.

Le premier a trait à la place du paritarisme ; nous y reviendrons dans un instant, quand je défendrai un amendement tendant à rétablir la rédaction de l’article 1er. Sur proposition, me semble-t-il, de Mme le rapporteur, la commission des affaires sociales a modifié cet article 1er, en limitant la durée d’application du texte par l’anticipation de la date butoir et en instituant un cadre dérogatoire de dialogue social à propos de la gouvernance de l’assurance chômage. Je suis assez convaincu que, au-delà des choix respectifs de la commission des affaires sociales et du Gouvernement, une forme de consensus peut émerger sur cette question.

Nous n’avons effectivement pas ouvert de négociation interprofessionnelle autour des questions d’indemnisation au moment où nous aurions dû le faire pour respecter les délais nécessaires à la conclusion d’un accord national interprofessionnel (ANI), c’est-à-dire au moment de l’élection présidentielle. D’où la situation d’urgence que nous connaissons et notre demande de prolongation des règles jusqu’au 31 décembre 2023, date correspondant à d’autres échéances ; j’y reviendrai.

En revanche, en ce qui concerne la gouvernance et le paritarisme, je me suis engagé auprès de tous les partenaires sociaux – c’est l’occasion pour moi de le répéter – à organiser une négociation, qui soit très ouverte. Il existe quatre grands scénarios d’évolution de la gouvernance de l’assurance chômage. Un seul d’entre eux ne recueille pas l’assentiment du Gouvernement, l’étatisation, mais, pour les autres, le document sur lequel nous engagerons la négociation gardera les pistes ouvertes, afin d’étudier en profondeur tous les aspects du sujet.

Deuxième thème pouvant donner matière à débat : l’abandon de poste.

Tout d’abord, madame Cohen, vous avez raison, il n’existe pas d’agrégat statistique précis permettant de mesurer le nombre d’abandons de poste. Néanmoins, ces situations entraînent un licenciement pour faute grave et nous pouvons mesurer l’évolution du nombre de ces licenciements.

Il se trouve que l’on observe une augmentation assez importante du nombre de CDI faisant l’objet d’une rupture pour faute grave, mais cette augmentation est proportionnelle à la hausse du nombre d’emplois en CDI dans le pays. On peut donc considérer qu’il n’y a pas d’évolution majeure en la matière.

En revanche, on observe un doublement du nombre de licenciements pour faute grave d’employés en CDD. J’ai diligenté des recherches sur la question, mais il est très vraisemblable que cette augmentation s’explique par la vague d’abandons de poste que nous observons sur les CDD, en particulier dans le secteur des hôtels, cafés, restaurants (HCR).

Nous aurons donc un débat sur l’abandon de poste, car, lorsque celui-ci n’est pas justifié par une mise en danger – j’accueille d’ailleurs très favorablement les évolutions apportées par la commission des affaires sociales à cet égard –, il s’agit d’une rupture unilatérale d’un engagement contractuel devant s’apparenter à une démission. En effet, un abandon de poste ne saurait donner droit à une indemnité Unédic s’il n’est pas lié à un danger, y compris s’il s’agit de maltraitance.

Le troisième sujet qui occupera nos débats sera la question du bonus-malus. Je n’y reviens pas, divers arguments ayant déjà été évoqués pour justifier le maintien de cette procédure. Nous proposons de fixer l’échéance au 31 décembre 2024, afin de respecter le cycle d’observation et de mise en œuvre de trois ans prévu dans la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Nous aurons l’occasion d’y revenir, donc je m’arrête là pour ne pas être trop long.

Le quatrième et dernier enjeu est celui du refus de CDI à l’issue d’un ou de plusieurs CDD. J’ai déjà exprimé mes plus grandes réserves au sujet de la disposition adoptée en commission ; mes réserves seront, par voie de conséquence, plus importantes encore sur l’amendement visant à appliquer une sanction dès le premier refus d’un CDI. Plusieurs raisons peuvent expliquer ma position, des raisons très pratiques, mais également des raisons de fond.

Lorsqu’un salarié embauché pour une durée déterminée est allé au bout de son engagement contractuel sans revenir, à aucun moment, sur son engagement initial et en respectant son contrat en intégralité, je considère qu’il n’y a pas de raison de le sanctionner s’il refuse de prolonger son engagement par un CDI. J’ajoute que, en vertu du code du travail, l’employeur peut d’ores et déjà ne pas verser de prime de précarité s’il démontre qu’il a proposé au titulaire d’un CDD qui s’achève un CDI rédigé dans les mêmes termes – j’insiste sur cette notion d’identité des termes – ou répondant aux mêmes conditions.

Enfin, je ne reviens pas sur la validation des acquis de l’expérience, que beaucoup d’intervenants ont évoquée. Les débats relatifs à l’article 4 permettront à la ministre déléguée Carole Grandjean de répondre à l’ensemble de vos questions. Je précise qu’elle nous a quittés pour assister aux questions d’actualité au Gouvernement de l’Assemblée nationale et m’y représenter.

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