Les deux programmes qui portent les crédits dédiés à l'enseignement supérieur bénéficient cette année encore d'une hausse importante, pour atteindre 18 milliards d'euros. L'augmentation s'élève à près de 750 millions d'euros en crédits de paiement (CP), soit une progression de 4,3 % par rapport à 2022.
Compte tenu de la masse salariale des universités, près de la moitié des nouveaux crédits sont consacrés à la mise en place pour 2023 de la compensation de la hausse du point d'indice pour les établissements d'enseignement publics. Il est à noter qu'aucune mesure de compensation n'aura été mise en place pour les mois de juillet à décembre 2022, pour lesquels les universités devront mobiliser leurs fonds propres.
Je partage avec mon collègue Jean-François Rapin la satisfaction de voir que l'ensemble des engagements figurant dans la loi de programmation de la recherche (LPR) sont respectés dans ce budget. La poursuite de la mise en oeuvre de cette LPR contribue, en effet, à la croissance de la mission « Enseignement supérieur » à hauteur de 140 millions d'euros. Ces crédits sont essentiellement destinés aux personnels, via des mesures de revalorisation salariale et d'élargissement des voies de recrutement. Le projet de loi de finances (PLF) pour 2023 prévoit, en outre, la création de 413 emplois, dont 385 au titre de la LPR.
Nous pouvons, je le pense, nous féliciter du renforcement des moyens consacrés aux universités, qui contribue à leur redonner des marges de manoeuvre et à limiter les tensions sur leur masse salariale.
Nouveauté de ce budget, 35 millions d'euros supplémentaires sont prévus pour la mise en place expérimentale des contrats d'objectifs et de moyens pluriannuels avec une dizaine d'universités. L'idée me semble être intéressante, mais les montants destinés à être contractualisés sont à ce stade extrêmement faibles à l'échelle des crédits accordés aux universités. Nous n'en sommes pour l'instant qu'à la phase de définition de cette expérimentation, mais nous serons attentifs à la négociation en cours entre le ministère et les universités.
Permettez-moi toutefois de souligner un point de vigilance. Du fait de la taille de leur patrimoine immobilier et des infrastructures de recherche qu'ils hébergent, les établissements d'enseignement supérieur sont particulièrement touchés par la crise énergétique. Le surcoût en 2022 s'élèverait à 40 à 50 % de plus par rapport à 2021, soit 100 millions d'euros. Concernant 2023, et bien que l'évaluation des surcoûts potentiels soit un exercice délicat, le ministère estime que le surcoût énergétique s'élèvera à 400 millions d'euros par rapport à 2022.
En 2022, les universités devront mobiliser leurs fonds de roulement pour tenir compte de ces hausses. En 2023, elles devraient bénéficier du fonds de compensation du surcoût de l'énergie qui devrait être créé dans le cadre du projet de loi de finances rectificative (PLFR). La ministre avait annoncé un fonds doté de 275 millions d'euros, dont plus de 200 pour les établissements d'enseignement supérieur. Cette aide devrait être versée au prorata des surcoûts aux universités, en fonction de la situation financière ad hoc de chacune d'entre elles et du coût de l'énergie dans leurs dépenses.
Si, sur le principe, cela semble être un signal très positif pour les universités, seuls 150 millions d'euros de nouveaux crédits sont en réalité ouverts par ce PLFR. Il semblerait que les 125 millions complémentaires soient en partie financés sur les crédits dégagés par la baisse du nombre d'étudiants boursiers.
Le constat de la vulnérabilité des établissements d'enseignement supérieur aux difficultés énergétiques m'amène à évoquer les enjeux cruciaux en matière d'investissement dans le patrimoine immobilier universitaire. J'ai déjà souligné à plusieurs reprises l'ampleur du défi, considérant le caractère parfois vétuste et souvent énergivore du patrimoine immobilier universitaire. Alors qu'il est impératif de lancer un plan massif de rénovation de ce patrimoine, seuls 30 millions d'euros supplémentaires sont consacrés, dans le PLF, à l'immobilier universitaire. Cet effort ponctuel demeure insuffisant et ne permettra pas à la France de respecter les objectifs ambitieux qu'elle s'est fixés en matière de transition énergétique. Le coût de l'inaction serait bien supérieur à celui des dépenses engagées par anticipation, et nous devons tenir compte de plusieurs décennies de délaissement du patrimoine immobilier universitaire. Je vous le redis, nous ne pourrons repousser indéfiniment le plan de rénovation immobilière de grande ampleur qui s'avère indispensable.
J'en viens maintenant aux moyens consacrés à la vie étudiante, qui constituent l'autre pan de la mission pour son volet « Enseignement supérieur ». En 2021 et 2022, ils avaient enregistré une hausse très importante. Le PLF 2023 prévoit cependant une stabilisation des crédits.
Le montant des bourses sur critères sociaux a été revalorisé de 4 % à la rentrée de 2022, afin de tenir compte de l'inflation. Le coût de cette mesure s'élèvera à 85,1 millions d'euros en 2023, mais les crédits dédiés restent cependant identiques à ceux qui ont été prévus l'année dernière, du fait de la baisse attendue du nombre d'étudiants boursiers. En outre, cette revalorisation ne permettra pas de couvrir l'érosion du pouvoir d'achat découlant de l'inflation constatée en 2022 et 2023.
En parallèle, la subvention versée au réseau des oeuvres universitaires progressera de 35,6 millions d'euros par rapport à 2022 pour financer notamment la prolongation du ticket de resto U à 1 euro pour les étudiants boursiers et du gel des loyers dans les résidences étudiantes. Le coût du repas à 1 euro s'élèvera à 51 millions d'euros en 2023, pour 430 000 étudiants bénéficiaires.
La situation financière du réseau des centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (Crous), qui avait été très exposé pendant la crise sanitaire, continue de s'améliorer. Là encore, je voudrais soulever un point d'attention. La hausse des coûts des denrées alimentaires pourrait engendrer un effet ciseaux, puisque le nombre de repas servis augmenterait alors de façon parallèle. Les prévisions à date du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (CNOUS) font état d'une possible répercussion à la hausse des effets du repas à 1 euro pour la fin de l'année, pour un coût total de l'ordre de 50 millions d'euros. La fréquentation des restaurants universitaires croît en parallèle très rapidement, l'activité à la rentrée 2022 étant supérieure de 20 %, voire 30 %, à l'année précédente.
Au-delà de ces quelques remarques, la mission dans son volet « Enseignement supérieur » bénéficiant de hausses de crédits conséquentes, permettant le respect de la trajectoire définie en loi de programmation, je vous propose d'en adopter les crédits.