C'est un vrai privilège de débattre avec vous, monsieur le ministre : cet échange est tout à fait stimulant !
Dans notre esprit, il n'est pas question de dessaisir le Parlement de ses prérogatives car, chaque année, lors de l'examen de la loi de finances, le Parlement serait appelé à se prononcer sur la fixation du niveau du transfert à opérer. Il n'y aurait pas d'automatisme, et c'est fondamental.
Observez néanmoins que, depuis un certain nombre d'années, les cotisations sociales ne parviennent plus à équilibrer les régimes paritaires, ce qui implique que l'État affecte des crédits budgétaires ou se dessaisisse d'impôts qui, jusque-là, assuraient l'équilibre du budget.
On ne peut pas dire que le déficit de la sécurité sociale soit vraiment celui des organismes sociaux. Ainsi, c'est la CADES qui prend en charge la dette de la sécurité sociale, d'une dette que nous souhaiterions voir consolidée. Nous nous sommes d'ailleurs permis de vous faire une suggestion, dans le prolongement du rapport de Paul Girod, pour gagner quelques points dans la rémunération de la charge de la dette, mais j'ai l'impression que la distinction opérée entre la dette de la CADES et celle de l'Etat est assez virtuelle.
Cela étant, je vous rappelle qu'il y a eu un précédent en matière d'affectation d'une part de TVA au financement de la protection sociale : le BAPSA était très largement financé par une affectation directe de TVA. Mais il ne s'agissait pas là, bien sûr, d'une TVA sociale !
Je reviendrai maintenant à votre dernière observation.
Personnellement, je ne redoute pas l'inflation. Je considère que notre système de prélèvements obligatoires fonctionnait lorsque l'économie du pays était étanche.
Le double objectif du Gouvernement est de lutter contre la vie chère et pour l'emploi. Mais cela me semble difficile dans une économie mondialisée. Car, dès qu'on relance la consommation, les importations augmentent. Les produits, et pas seulement les produits de grande consommation, ne sont pas chers, parce que le sourcing est fait en Chine ou en Inde.
Par conséquent, si vous prélevez les ressources qui assurent le financement de la santé ou de la politique familiale sur des cotisations sociales, les emplois de production disparaîtront. Seuls gagneront de l'argent dans ce pays ceux qui travaillent dans la distribution ou dans la logistique. Comment ferez-vous alors pour assurer la cohésion sociale ?
Nous démontrerons que, s'agissant des biens et services produits en France, la baisse des charges sociales amènerait une baisse à due concurrence du prix. Dès lors, le supplément de TVA n'entraînerait pas d'inflation des prix, toutes taxes comprises. Seuls les produits et les services importés subiraient l'inflation.
S'agissant du prix à l'exportation, il sera forcément plus compétitif, puisqu'il n'intégrera plus le poids de ces charges sociales dont on aura assuré le financement par la TVA.
Monsieur le ministre, lors de la discussion générale, vous nous avez dit que vous étiez prêt à faire vivre intensément le débat !
Vous pouvez faire confiance à la commission des affaires sociales et à la commission des finances pour instruire ce dossier, car nous sommes sur le terrain et nous constatons aujourd'hui qu'un certain nombre d'entreprises sont en difficulté !
Au-delà des discours convenus, se manifestent partout des phénomènes très préoccupants, comme la perte de compétitivité, la disparition d'emplois, moins par des délocalisations visibles que par des non-localisations.
J'entends donc bien vos observations, monsieur le ministre, mais elles me paraissent s'appuyer sur des présupposés qui ne sont pas fondés, car le Parlement et le Gouvernement chaque année fixeraient le niveau du produit de TVA, ainsi transféré au financement de la protection sociale en contrepartie des exonérations de charges.
En agissant ainsi, nous ne devons pas non plus être soupçonnés de laisser croire qu'il s'agit de la TVA sociale, car ce n'est vraiment pas la même chose !