Intervention de Yves Détraigne

Réunion du 21 décembre 2010 à 14h30
Représentation devant les cours d'appel — Discussion d'un projet de loi en deuxième lecture

Photo de Yves DétraigneYves Détraigne :

J’espère sincèrement que nous ne sommes pas en train de nous engager dans un processus incertain qui exposerait les justiciables à des risques de radiation et, inévitablement, à un allongement des délais d’audiencement des affaires.

Toujours concernant les avocats, le texte que nous examinons aujourd’hui me donne l’occasion de poursuivre une réflexion engagée il y a quelques jours lors de la discussion du projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées, introduisant l’« acte contresigné par avocat ».

Il est paradoxal d’affirmer que les avoués pourront demain exercer sereinement la profession d’avocat quand on sait que le nombre très important – supérieur à 50 000 – et toujours croissant d’avocats dans notre pays provoque déjà un certain appauvrissement de cette profession.

Sans doute le Gouvernement ne partage-t-il pas cette analyse, sinon pourquoi provoquer demain l’arrivée de 400 nouveaux candidats au sein de cette profession ?

Une chose est sûre : pour ceux qui décideront de devenir avocat, reconstituer rapidement une clientèle ne sera pas chose facile dans le contexte actuel, c’est une évidence !

Ma deuxième source d’inquiétude tient à l’indemnisation des avoués.

Sur ce sujet, je reconnais bien évidemment les améliorations importantes qui ont été apportées au dispositif, principalement par le Sénat, par rapport au texte initial du projet de loi.

Comme l’a rappelé notre rapporteur, l’Assemblée nationale a confirmé le recours au juge de l’expropriation, et je m’en félicite. Les inquiétudes ne portent donc pas sur l’indemnisation elle-même, mais plus sur l’éventuelle fiscalité qui pourra lui être appliquée. Vous nous avez déjà donné des précisions à ce sujet, monsieur le garde des sceaux, vous aurez sans doute l’occasion d’y revenir.

Des incertitudes pèsent aussi sur le moment de cette indemnisation qui, selon la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, doit être préalable à l’expropriation. J’aurai l’occasion de revenir sur ce thème lors de la défense de mes amendements.

Autre interrogation, qu’en est-il des reclassements promis l’année dernière par votre prédécesseur, monsieur le ministre ? Vous avez rappelé la création de près de 400 nouveaux postes dans les services judiciaires ; mais qu’en est-il dans les faits ? Les premiers échos que j’ai pu recueillir sur la mise en œuvre concrète de ces annonces me laissent perplexe. J’ai, par exemple, eu connaissance du cas d’une salariée d’étude d’avoué qui, alors qu’elle postulait pour un poste en juridiction très éloigné de sa résidence habituelle, s’est entendu répondre qu’elle était trop qualifiée pour le poste. Un comble ! Et ce cas n’est sûrement pas isolé.

Il apparaît donc que la mise en œuvre de cette réforme pose de vrais problèmes et que la réalité n’est pas toujours à la hauteur des espérances ou des annonces. C’est la raison pour laquelle il me semble nécessaire de mieux cadrer certaines des dispositions de ce projet de loi, de sorte que la mise en œuvre de cette réforme, que les avoués n’ont pas demandée, ne constitue pas un marché de dupes pour eux-mêmes et leurs salariés.

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