La séance, suspendue à douze heures cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.
La séance est reprise.
Monsieur le garde des sceaux, monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement, mes chers collègues, dans environ trente heures maintenant, le très long quadrimestre entamé au tout début du mois de septembre va s’achever. Le travail législatif du Sénat au cours de ces quatre mois a ressemblé à une véritable course de fond.
Il y a eu le débat sur les retraites, au cours duquel chacun s’est exprimé presque autant qu’il l’a souhaité. Au Sénat, je le rappelle, le temps législatif est non pas programmé, mais concerté, du mieux possible, entre nous.
Aussi cette réforme, ici, au Sénat, a-t-elle pris du temps, mais je pense, car j’en reçois de fort nombreux échos du pays, que cela n’a pas été inutile, ni pour notre assemblée ni pour les Français, auprès desquels nous avons pu faire véritablement œuvre de pédagogie.
Il y a eu le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il y a eu le collectif budgétaire. Il y a eu la proposition de loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit. Il y a eu enfin le projet de loi de finances pour 2011.
À ce sujet, je formulerai une demande, relayant ainsi celle du président de la commission des finances : je crois que, dans l’avenir, il incombera au Gouvernement d’éviter, autant que faire se peut, la profusion d’articles rattachés, laquelle a singulièrement complexifié nos débats et les a rendus peu visibles et peu lisibles.
Applaudissements
Mes chers collègues, nous sommes assez prompts à faire l’union vis-à-vis du Gouvernement, mais nous devons également le contrôler, et vous le savez mieux que quiconque, monsieur Mercier, vous qui – je ne l’oublie pas – avez été parlementaire avant d’être membre du Gouvernement.
Or le budget ne constitue plus le seul moment de contrôle de l’action du Gouvernement. Le passage en revue des politiques publiques s’est annualisé, notamment au travers des semaines mensuelles de contrôle. Il me semble que nous devons les utiliser le mieux possible, et nous avons commencé. C’est là un sujet de méditation en cette fin d’année.
Nous avons siégé un peu moins que l’année précédente, mais plus que l’Assemblée nationale. Je tiens à cette occasion à remercier les vice-présidents du Sénat de la manière dont ils ont présidé nos travaux, se succédant sans relâche au fauteuil de la présidence.
Applaudissements
Si nous avons siégé plus que l’Assemblée nationale, c’est parce que nous avons tenu, ensemble – majorité, groupes d’opposition et groupes minoritaires –, à utiliser pleinement les semaines affectées à nos missions d’initiative, de contrôle et de prospective, ce qui n’a pas été tout à fait le cas dans l’autre assemblée…
Plus que jamais, notre objectif premier doit être de maîtriser notre ordre du jour et d’en garantir la prévisibilité, pour nos collègues, pour l’organisation de nos travaux et pour nos collaborateurs, ici, au Parlement.
Pour autant, il ne saurait être question à mes yeux de toucher aux deux droits fondamentaux du sénateur : le droit de parole et le droit d’amendement.
Je tiens également à adresser de nouveau, au nom du Sénat tout entier, mes félicitations à ceux de nos collègues qui ont été nommés, ou confortés, au Gouvernement, tout d’abord à M. le garde des sceaux, mais aussi à nos collègues Philippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales, dossier qui doit être particulièrement suivi, et à Henri de Raincourt, dont la mission promet d’être compliquée, compte tenu de l’actualité internationale.
Mon salut s’adresse également à ceux qui sont allés vers d’autres horizons, Christian Gaudin et Alain Lambert.
En votre nom à tous, je souhaite la bienvenue à Valérie Létard, Hubert Falco et Jean-Marie Bockel, qui ont retrouvé notre assemblée. J’exprime également ma gratitude à leurs suppléants, qui ont siégé parmi nous pendant toutes ces années. Je pense à Béatrice Descamps, à Élie Brun et à Jacques Muller
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste
Nous avons un nouveau ministre chargé des relations avec le Parlement, Patrick Ollier, avec qui nous avons entamé ce travail essentiel de relation et de communication entre le Gouvernement et le Sénat.
Permettez-moi aussi de saluer le dévouement, la compétence et la disponibilité des fonctionnaires du Sénat pendant cette période, car ils ont été particulièrement sollicités.
Applaudissements
Enfin, je tiens à remercier très sincèrement tous ceux qui relaient les images et les informations du Sénat au-delà du Palais du Luxembourg. Je pense à la presse, écrite et audiovisuelle, à l’Agence France-Presse, ainsi qu’à notre chaîne Public Sénat.
L’année 2010 a été particulièrement chargée. C’est une raison de plus, mes chers collègues, de vous souhaiter une détente bien méritée – nous aurons achevé nos travaux, je l’espère, demain, vers dix-huit heures trente – et de vous inviter à marquer une pause salutaire, à prendre un peu de recul sur les événements, la vie parlementaire, quoi qu’en pensent certains, étant parfois particulièrement dense et intense.
Le Sénat, qui a particulièrement été sur le devant de la scène tout au long de ce quadrimestre, grâce à vous tous, mes chers collègues, est aussi un lieu où l’on prend le temps de réfléchir, loin du zapping du quotidien.
Un certain nombre de textes importants nous attendent à la rentrée prochaine, notamment sur la sécurité et la liberté, individuelle et collective, ainsi que sur la bioéthique, sujet majeur.
Ces rendez-vous seront essentiels, et le Sénat – je n’en doute pas – y apportera sa plus-value, après un travail de préparation effectué dans les différentes commissions ou dans le cadre de missions.
Enfin, nous aurons à mener une réflexion non moins essentielle dans les semaines et dans les mois qui viennent sur un sujet de société dont les enjeux ne sont pas uniquement financiers : la dépendance.
À chacune et à chacun, je souhaite d’heureuses et joyeuses fêtes de fin d’année. Qu’elles soient un moment d’écoute et de partage, aussi, car je ne saurais oublier en cet instant les personnes seules, dont la solitude est encore plus grande en cette période.
Monsieur le garde des sceaux, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce sera un grand plaisir de nous retrouver l’année prochaine.
Applaudissements
Monsieur le président, permettez-moi, au nom du Gouvernement, de m’associer aux vœux que vous venez de présenter.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je pensais connaître un tant soit peu l’Assemblée nationale, où j’ai siégé vingt-deux ans, mais les fonctions qui sont aujourd'hui les miennes m’appellent à beaucoup de modestie, parce qu’elles m’offrent l’occasion inestimable de mieux connaître votre assemblée et d’approfondir avec vous ma connaissance du Parlement.
J’ai pu apprécier, depuis ma prise de fonctions, la qualité et la sérénité des débats que la Haute Assemblée conduit. Je n’étais pas habitué à ce style-là, je le reconnais. Je ne peux que vous complimenter, mesdames, messieurs les sénateurs, pour le souci permanent qui est le vôtre d’enrichir les textes du Gouvernement, en allant souvent au-delà des clivages, pour votre détermination à contribuer à l’initiative législative, pour le sens du dialogue permanent, l’écoute attentive, la recherche de la mesure, alchimie qui fait la singularité du Sénat.
Monsieur le président, vous avez évoqué à juste titre la charge de travail du Sénat cette année. Vous avez en effet siégé 1 160 heures, et ce chiffre à lui seul en dit assez sur l’importance de vos débats.
Parmi les soixante-trois lois qui ont été définitivement adoptées, je n’en citerai que cinq : la loi portant réforme des retraites, la loi de réforme des collectivités territoriales, la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, la loi relative au Grand Paris, sans oublier la loi portant engagement national pour l’environnement. C’est considérable.
Je vous remercie, monsieur le président, d’avoir relevé la poursuite de la décrue de l’engagement de la procédure accélérée. Vous le souhaitiez ; le Gouvernement a répondu favorablement à la demande du Sénat. Ainsi, seuls dix-huit projets de loi ont été concernés en 2010 par cette procédure, contre vingt-huit l’année précédente. Le Gouvernement, j’y insiste, a entendu l’appel de la Haute Assemblée. Cela démontre sa volonté de développer un dialogue toujours plus constructif avec le Parlement.
J’évoquerai maintenant les articles rattachés, monsieur le président. À ce sujet aussi, j’ai bien entendu votre message. J’ai vécu moi aussi, alors que je venais juste d’être nommé, la complexité du débat, notamment lors des secondes délibérations. Je puis vous assurer que je mettrai toute mon énergie, au cours de l’année qui vient, à faire en sorte que cette situation ne se reproduise pas.
Je me réjouis de la volonté du Sénat d’appliquer pleinement la réforme constitutionnelle de 2008, qui renforce le rôle du Parlement.
Avec les commissions permanentes, les missions d’information, les nombreux débats d’origine sénatoriale, dix-sept séances de questions d’actualité, près de quatre cents questions orales posées, ainsi que treize séances de questions cribles thématiques – une spécificité du Sénat –, vous avez pleinement exercé votre mission de contrôle de l’action gouvernementale. Le Gouvernement ne peut qu’en être satisfait.
En outre, trente-sept propositions de loi, monsieur le président, ont été discutées au Sénat, ce qui illustre parfaitement la nouvelle place qui est celle du Parlement dans l’initiative de la loi.
Et je pourrais encore allonger la liste, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs.
Monsieur le président, cher Gérard Larcher, je tiens à vous remercier, car vous m’avez témoigné beaucoup d’amitié en m’accueillant ici. Je vous en suis reconnaissant. Je puis vous assurer du respect que j’ai pour vous et pour votre fonction, ainsi que du plaisir qui est le mien de travailler avec vous et avec les membres de la conférence des présidents à la construction d’un calendrier parlementaire, dans le souci permanent de la prévisibilité qui vous est chère. Je m’attacherai à faire en sorte de prendre en compte ce souci de prévisibilité.
Je voudrais également saluer de manière très chaleureuse les vice-présidents de la Haute Assemblée, quelle que soit leur sensibilité politique. En effet, j’ai pu observer avec quelle efficacité ils mènent les débats. Ayant moi-même exercé cette fonction à l’Assemblée nationale, j’en connais les difficultés.
Je souhaite aussi exprimer ma gratitude aux présidents des commissions permanentes et des délégations, ainsi qu’à M. le rapporteur général de la commission des finances – le débat budgétaire a été quelque peu rude à certains moments –et à M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales.
Vous avez tous brillamment répondu aux exigences imposées par le rythme des réformes que nous conduisons et par les nouveaux défis liés à la révision constitutionnelle de juillet 2008.
Je tiens également à saluer, comme l’a fait M. le président du Sénat, le travail des fonctionnaires de la Haute Assemblée – je pense notamment aux administrateurs des commissions –, qui sont d’une efficacité tout à fait remarquable.
Mesdames, messieurs les présidents des groupes politiques, vous qui jouez un rôle essentiel aux activités de l’hémicycle, permettez-moi de vous remercier également de la manière dont vous m’avez accueilli. Nous avons engagé des relations qui, je l’espère, deviendront des relations de confiance. Puissions-nous, même si nous ne sommes pas toujours d'accord sur tout, construire ensemble chaque fois que cela est possible, dans le respect que le Gouvernement doit au Sénat, des relations toujours plus fructueuses.
Enfin, mes derniers remerciements seront pour chacune et chacun d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs. À l’instar de M. le président, je vous souhaite de profiter d’un repos bien mérité, et je vous adresse tous mes vœux de bonnes et heureuses fêtes de fin d’année.
Applaudissements
J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne est parvenue à l’adoption d’un texte commun.
J’informe le Sénat que le groupe de l’Union centriste a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu’il propose pour siéger à la commission des affaires sociales, à la place laissée vacante par Mme Béatrice Descamps, dont le mandat de sénateur a cessé.
Cette candidature va être affichée et la nomination aura lieu conformément à l’article 8 du règlement.
(Texte de la commission)
L’ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi de loi, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, portant réforme de la représentation devant les cours d’appel (projet n° 43, texte de la commission n° 161, rapport n° 160).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le garde des sceaux.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite m’associer aux vœux de joyeuses fêtes de fin d’année que M. Ollier vient de vous adresser.
Je vous indique que nous aurons très souvent l’occasion de nous rencontrer en 2011. Le Sénat sera ainsi saisi de l’examen de plusieurs textes législatifs venant du ministère dont j’ai la charge. J’entends que la Haute Assemblée puisse y imprimer toute sa marque, mesdames, messieurs les sénateurs.
La réforme de la représentation devant les cours d’appel a pour objet de rendre notre système judiciaire plus simple et moins cher.
En pratique, il y a aujourd'hui une dualité d’interventions, celle de l’avocat et celle de l’avoué, ce qui est difficilement compréhensible pour le justiciable. Ce dernier pourra, à l’issue de la réforme, s’adresser à un professionnel unique, habilité à le conseiller, à le représenter en justice et à plaider son dossier devant les deux degrés de juridiction.
Le projet de loi vise également à mettre la législation française en conformité avec le droit européen.
Alors que nous débutons cette deuxième lecture, je me félicite des nombreuses avancées apportées au projet de loi par le Sénat et confirmées par l’Assemblée nationale.
En effet, la Haute Assemblée a permis de mettre en place un régime d’indemnisation des avoués et de leurs salariés prenant mieux en compte les préjudices subis. Le texte renforce également les possibilités de reconversion professionnelle pour les avoués et leurs salariés.
Mes chers collègues, je vous rappelle que M. le garde des sceaux a la parole, et lui seul.
M. Michel Mercier, garde des sceaux. Je vous remercie, monsieur le président. Cela étant, tout ce que M. Sueur nous dit maintenant, il ne dira plus après, et ce sera aussi bien.
Sourires.
Nouveaux sourires.
J’en suis tout à fait conscient, le calendrier de l’examen parlementaire de ce projet de loi a été quelque peu erratique, monsieur le rapporteur.
Désormais, les professionnels ont besoin rapidement d’une sécurité juridique que seule l’adoption de ce texte peut leur donner.
J’essaierai tout au long de nos débats d’apporter des réponses précises aux questions qui demeurent en suspens.
Le souci du Gouvernement, partagé par le Sénat et par l’Assemblée nationale, a été de trouver la meilleure solution possible pour les salariés des avoués.
Ainsi, de grands principes ont d’ores et déjà été votés par les deux assemblées. Ils permettent de prendre en compte les différentes situations et de définir une juste indemnisation.
Les salariés percevront une indemnité de licenciement d’un mois de salaire par année d’ancienneté, avec un plafond de trente mois. L’indemnité sera versée directement par le fonds d’indemnisation et pourra être cumulée avec les aides relevant de la convention de reclassement personnalisé.
Ceux qui seraient conduits à démissionner percevront l’indemnité la plus avantageuse entre celle qui est prévue par le code de travail et celle qui est prévue par la convention collective.
En fonction de leurs qualifications, les salariés bénéficieront de passerelles avantageuses vers les autres professions du droit.
Je sais qu’il reste des inquiétudes sur le reclassement de ces salariés.Je peux vous apporter quelques précisions avant que ne s’engagent nos débats.
Je tiens à souligner que 383 postes ont été ouverts pour ces salariés dans les effectifs du ministère de la justice en 2010. Néanmoins, il y a eu peu de candidats et aucun des salariés qui a été accepté n’a souhaité finalement rejoindre le ministère de la justice, vraisemblablement parce que la loi n’avait pas été encore votée et qu’ils n’étaient donc pas susceptibles de percevoir les indemnités de licenciement qu’elle crée.
En 2011, l’effort se poursuit, avec le recrutement de 19 agents contractuels de catégorie A et le recrutement sans concours de 223 agents de catégorie C. Seront aussi ouverts 497 postes de greffier sur concours : ce concours est rénové et comprend dorénavant une épreuve orale destinée à valoriser l’expérience professionnelle acquise.
Ainsi, selon leur niveau, les salariés d’avoués pourront postuler à ces différents recrutements.
Je peux vous assurer que tout sera fait au sein du ministère de la justice pour faciliter ce reclassement. Mais encore faut-il qu’il y ait des candidats. Pour cela, je suis persuadé qu’il est important d’adopter rapidement le présent projet de loi, afin que les salariés puissent bénéficier des indemnités prévues et envisager plus sereinement leur avenir professionnel.
Nous devons aussi valoriser les compétences professionnelles des salariés d’avoués. Leur reclassement passe – nous en sommes tous convaincus – par un accompagnement personnalisé à la recherche d’emploi.
Une convention tripartite sera conclue à cet effet dès le vote de la loi entre l’État, la Chambre nationale des avoués près les cours d’appel et les représentants des salariés. Elle fixera les modalités de la convention de reclassement personnalisé dont les salariés pourront bénéficier.
Des moyens seront mobilisés : la convention prévoira des aides à la mobilité, des allocations compensant les pertes de revenus, des aides à la formation qui pourront se cumuler avec les indemnités de licenciement perçues en vertu de la loi.
Des dispositions spécifiques sont également prévues pour le reclassement des collaborateurs d’avoués. Vous avez voté dans le projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées un amendement qui prévoit que les collaborateurs d’avoués diplômés avoués auront droit à la spécialisation « procédure d’appel ».
Nous sommes donc parvenus à un dispositif global d’accompagnement des salariés qui prend en charge leur situation de façon à la fois complète et personnalisée.
L’examen parlementaire nous permet également d’aboutir à une solution juste et équilibrée pour l’indemnisation des avoués.
Comme pour les salariés, à ce stade de la discussion parlementaire, un certain nombre de principes sont acquis.
Premièrement, l’indemnisation des avoués sera fixée par le juge de l’expropriation, conformément à ce que vous aviez voté en première lecture. Cette phase judiciaire sera précédée d’une offre d’indemnisation faite par la commission d’indemnisation.
Deuxièmement, l’accord est aussi acquis sur le champ de l’indemnisation, qui portera sur le préjudice de perte du droit de présentation, mais aussi sur le préjudice économique, le préjudice de carrière et tous les autres préjudices accessoires.
Troisièmement, un consensus s’est également formé sur l’entrée en vigueur de la fusion des professions d’avocat et d’avoué au 1er janvier 2012. À cette date, les avoués deviendront automatiquement avocats. Par ailleurs, ils bénéficieront de passerelles très avantageuses vers les autres professions du droit.
Pour ce qui reste en débat, je peux d’ores et déjà vous apporter des précisions sur les conditions d’une indemnisation efficace.
Le texte prévoit que la commission d’indemnisation formule une offre d’indemnisation dans les trois mois de la cessation d’activité. Bien évidemment, rien n’empêche que cette offre soit faite avant, si les avoués fournissent tous les éléments nécessaires. J’y veillerai.
Il prévoit également le versement d’un acompte de 50 % du dernier chiffre d’affaires, de même que le remboursement du capital restant dû. L’un comme l’autre peuvent être demandés dès la promulgation de la loi. Cet acompte sera imputé sur l’indemnité de perte de droit de présentation et aura donc le même traitement fiscal.
Reste la question du traitement fiscal de ces indemnités et, le cas échéant, des modalités de la fiscalisation.
Le débat sur le principe de la fiscalisation des indemnités versées aux avoués, qui a eu lieu au Sénat l’année dernière, avait abouti à l’adoption d’un dispositif d’exonération fiscale et sociale.
L’Assemblée nationale est revenue sur cette disposition et a voté un amendement de suppression de ces exonérations. En cela, elle a tenu compte du contexte budgétaire global pour 2011, qui est à la réduction des niches fiscales, comme cela apparaît dans le projet de loi de finances pour 2011, adopté par votre Haute Assemblée.
Le Gouvernement estime que c’est le régime de droit commun qui doit s’appliquer, comme dans tous les précédents cas de suppression d’un monopole ou d’une profession. C’est ce qui s’est passé notamment pour les professions de commissaire-priseur, de courtier maritime et d’avoué de première instance.
Pour ces professionnels, le montant des indemnités alloué était beaucoup moins élevé que celui qui est prévu aujourd’hui pour les avoués. Je rappelle également que ces indemnités ont été fiscalisées.
Par conséquent, et dans un contexte budgétaire rigoureux, ce régime de droit commun doit s’appliquer.
Ainsi, dans le strict respect du principe d’égalité, chaque avoué sera traité comme, par exemple, un entrepreneur qui se trouverait dans une situation similaire, qu’il parte en retraite ou qu’il continue d’exercer une activité professionnelle.
Lorsque l’avoué continue d’exercer une activité professionnelle, les plus-values seront égales au différentiel entre le montant de l’indemnité et la valeur d’acquisition de la charge. Toutefois, un mécanisme correctif existe pour les associés qui ont acheté leurs parts récemment : s’ils liquident leur société, la valeur d’acquisition de leurs parts sera prise en compte pour le calcul de la plus-value, qui sera soumise à l’impôt sur le revenu.
Des dispositions spécifiques seront mises en place lorsque la fixation de l’indemnité et la liquidation de la société n’interviennent pas la même année, afin de permettre cette imputation. Vous avez l’engagement du Gouvernement sur ce point.
Les autres indemnités prévues par le texte seront aussi traitées selon le droit commun.
Par exemple, si le juge alloue une indemnité au titre du préjudice moral, elle ne sera pas fiscalisée si elle est inférieure à un million d’euros, en vertu de l’article 96 de la loi de finances initiale pour 2011. Par ailleurs, si un avoué perçoit une indemnité pour préjudice de carrière, elle sera soumise, elle, à l’impôt sur le revenu.
Ainsi, chaque avoué doit être traité comme toute personne qui perçoit une indemnité, selon la nature de cette indemnité.
Mesdames, messieurs les sénateurs, en réformant la représentation devant les cours d’appel, le texte soumis à votre examen simplifie la procédure d’appel ; il s’inscrit dans le processus plus large de modernisation de la justice, puisqu’il s’accompagne d’une réforme procédurale et d’une dématérialisation des échanges.
La réforme de l’appel est destinée à mieux encadrer cette procédure en renforçant, notamment, les pouvoirs du conseiller de la mise en état. Elle aura pour effet de rendre la procédure plus efficace. Elle entrera en vigueur le 1er janvier 2011.
Quant à la communication électronique pour échanger avec les cours d’appel, elle sera rendue obligatoire progressivement, en commençant par la déclaration d’appel. Ainsi, à compter du 31 mars 2011, la déclaration d’appel devra obligatoirement être faite par voie électronique.
D’ici au début du mois de février 2011, toutes les cours d’appel auront été formées à l’utilisation des logiciels nécessaires et les avoués qui l’auront demandé seront équipés des moyens permettant d’être raccordés à la plateforme de communication électronique des avocats. À ce jour, plus de 80 % des avoués ont demandé les clés d’accès à cette plateforme. Le Conseil national des barreaux est prêt à mettre à la disposition des avoués son réseau de formateurs agréés.
Soyez assurés que le chantier de la dématérialisation électronique est primordial pour moi, mais aussi pour la réforme de notre système judiciaire. C’est la raison pour laquelle mon cabinet tient des réunions mensuelles sur le sujet. Il n’est pas imaginable que la justice reste en marge de ces progrès technologiques.
Enfin cette réforme ambitieuse nécessite l’engagement de chacun, des professionnels concernés comme du ministère. Les avoués ne peuvent pas rester à l’écart de cette modernisation.
Mon ambition est de mobiliser tous les moyens pour mettre en œuvre la dématérialisation, dans les délais prévus. Les échanges que nous avons avec les représentants des professions nous permettent de lever les difficultés et d’envisager des solutions pratiques satisfaisantes.
Je me félicite du travail qui a déjà été accompli par les deux assemblées, notamment par le Sénat, et de l’accord qui semble se dégager.
Cet accord porte sur les points essentiels du projet de loi soumis à votre examen aujourd'hui. Les discussions ont en effet permis de perfectionner le dispositif. Sur ce point, le rôle du Sénat a été décisif. À n’en pas douter, les débats que nous engageons maintenant préserveront l’équilibre du texte, qui offre des garanties supplémentaires aux professionnels et une heureuse clarification de la procédure pour le justiciable.
Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.
Monsieur le président, monsieur le garde de sceaux, mes chers collègues, nous sommes donc saisis en deuxième lecture du projet de loi portant réforme de la représentation devant les cours d’appel.
Ce texte a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 3 juin 2009. Son examen en première lecture au Sénat n’a eu lieu que les 21 et 22 décembre 2009, et il aura fallu attendre le 13 octobre 2010 pour que l’Assemblée nationale l’examine en deuxième lecture. La deuxième lecture au Sénat aujourd'hui intervient donc un an après la première lecture…
Il est vrai que la procédure s’est accélérée un peu et que, au fur et à mesure des changements ministériels intervenus - trois gardes des sceaux se sont succédé depuis le 3 juin 2009 -, la loi a progressé dans le bon sens !
Sourires.
Je tiens à saluer, tout d’abord, l’important travail effectué par l’Assemblée nationale et par le rapporteur, M. Gilles Bourdouleix.
À l’issue de la deuxième lecture à l’Assemblée nationale, vingt-deux articles ont été adoptés conformes ; seuls treize articles n’ont donc pas encore fait l’objet d’un vote unanime. Mais peut-être arriverons-nous aujourd'hui à ce résultat.
Comme M. le garde des sceaux, je souligne que les principales améliorations décidées en première lecture par le Sénat ont été confirmées.
Ainsi, il incombera dorénavant au juge de l’expropriation de fixer l’indemnité au titre de l’ensemble des préjudices subis. Il sera versé aux salariés une indemnité par année d’ancienneté dans la limite de trente années et la loi entrera en vigueur le 1er janvier 2012, ce qui permettra des mesures transitoires pendant une année complète.
Compte tenu des avancées acceptées par l’Assemblée nationale, le Sénat peut être légitimement satisfait, mais, pour qu’il le soit totalement, je sollicite un engagement solennel du garde des sceaux sur quatre points.
Premièrement, et M. le garde des sceaux a entamé tout à l’heure la discussion sur ce point, l’engagement pris de créer 380 emplois, notamment dans les greffes, a causé de grandes désillusions aux personnels. Aucun concours spécial n’a en effet été organisé pour eux et ils se sont trouvés mis en compétition et en concurrence avec les autres candidats sans être particulièrement armés pour présenter tel ou tel concours.
Par conséquent, je souhaite la confirmation des engagements pris envers les 380 salariés des études d’avoués qui devaient être affectés dans les greffes des juridictions, conformément à ce qui avait été prévu dans la loi de finances pour 2010. Il faudra préciser et adapter au mieux au fur et à mesure les règles des concours pour le recrutement des fonctionnaires des catégories A ou B, en tenant compte de la situation de chacun.
Monsieur le garde des sceaux, vous avez pris des engagements pour les fonctionnaires de catégorie A. Le problème est donc résolu en ce qui les concerne, mais il reste entier pour les fonctionnaires des catégories B et C. Il faudra que vous preniez également des engagements précis à cet égard.
Deuxièmement, vous avez terminé votre intervention sur ce sujet, la généralisation de la communication électronique des actes de procédure en appel.
Vous vous êtes engagé à ce que les choses avancent dans ce domaine, mais il y aura un petit délai supplémentaire par rapport à ce qui était prévu puisque la mise en œuvre se fera non au 1er janvier, mais à la fin du mois de mars. Je crains que, dans certaines cours d’appel, tout ne se passe pas aussi bien que vous l’espérez.
Je vous suggère donc de mettre d’ores et déjà en place une équipe de sauvetage des cours d’appel en péril en prévision du moment où le traitement électronique sera généralisé ! §À défaut, le garde des sceaux sera tenu responsable du dysfonctionnement des différentes cours d’appel, même si certaines d’entre elles sont déjà tout à fait prêtes.
Troisièmement, j’en viens à une préoccupation qui n’en est plus une, puisque, monsieur le garde de sceaux, vous venez de me donner satisfaction, je veux parler de l’acompte sur la part d’indemnisation, qui représente 50 % de la recette nette. Mon interrogation portait sur le régime d’imposition applicable, celui des plus-values ou celui du revenu. La commission est satisfaite de votre réponse, monsieur le ministre, et je ne reviendrai pas sur ce point. Néanmoins, il faudrait une instruction du garde des sceaux afin que nous soyons assurés que la décision du ministère de la justice sera respectée par Bercy et par les services fiscaux.
Quatrièmement, question importante à laquelle vous avez en partie répondu, monsieur le garde des sceaux, mais peut-être pas de façon suffisante, j’évoquerai l’application des dispositions fiscales à l’indemnisation de la perte du droit de présentation. Le problème se pose uniquement lorsque le titulaire de l’office est une société civile professionnelle. Le calcul de la plus-value se fera-t-il à partir de la date de la création de l’office, ce qui nécessitera parfois de remonter trente ou quarante ans dans le temps, ou à partir de la date de l’acquisition des parts ? C’est capital car, selon la date retenue, l’imposition ne sera pas du tout la même.
Par conséquent, nous demandons fermement que le garde des sceaux s’engage et obtienne une instruction fiscale pour que le calcul de l’imposition se fasse à partir de la date d’acquisition des parts sociales.
Telles sont, monsieur le garde de sceaux, les préoccupations de la commission des lois. Pour l’essentiel, nous approuvons ce texte, mais nous ne pouvons pas en repousser l’adoption de changement ministériel en changement ministériel. Je suggère par conséquent, si vous nous donnez toutes les garanties que je viens de vous demander, que le Sénat adopte conforme le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale.
Dans l’hypothèse où ces garanties ne seraient pas suffisantes, je serais contraint de maintenir des amendements dont l’adoption nous conduirait inéluctablement à examiner ce texte en troisième lecture.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur le président, monsieur le garde de sceaux, mes chers collègues, dans son dernier rapport, M. Gélard écrit que ce projet de loi « a suivi un parcours erratique ». C’est le moins que l’on puisse dire d’un texte présenté en conseil des ministres le 3 juin 2009 par Mme Dati !
Des mains de cette dernière, il est passé entre celles de Mme Alliot-Marie. Celle-ci nous affirmait alors, après avoir dans un premier temps pris prétexte de la directive Services, que cette réforme avait pour objet de rendre plus simple et moins chère la justice devant les cours d’appel. Or cette affirmation, nous l’avons souligné en première lecture, est fausse et totalement récusable.
Le projet de loi que nous examinons n’a rien d’objectif et est avant tout guidé par des intérêts politiques, ainsi que par une volonté de réaliser une concentration autour des intérêts financiers de structures à l’anglo-saxonne. Cela n’a rien à voir avec les intérêts des avoués, de leurs salariés et du justiciable !
Le justiciable, tout d’abord, ne sera certes plus contraint de recourir à deux professionnels, mais il devra payer une taxe de 330 euros à laquelle s’ajoutera une somme forfaitaire exigée au simple titre de la postulation devant les cours et estimée par le Conseil national des barreaux à 860 euros, et ce avant tout règlement des honoraires d’avocat.
En somme, faire appel ne sera ni plus simple ni moins coûteux.
Concernant le volet social de ce texte ensuite, 1 850 personnes sont licenciées sur un marché de l’emploi complètement saturé sans que l’État prenne ses responsabilités : voilà ce que nous retenons !
Michèle Alliot-Marie déclarait avec une certaine fierté qu’elle avait obtenu dans le budget 380 postes dans les services judiciaires auxquels pourraient postuler les salariés d’avoués. Elle osera réitérer ses affirmations le 23 juin dernier devant l’Assemblée nationale : « Nous avons déjà réglé quantité de problèmes, notamment celui des salariés ».
Nous avons rencontré ces salariés et ils nous ont affirmé le contraire !
Qu’en est-il de ce projet de loi depuis qu’il est entre vos mains, monsieur Mercier ? Nous retrouvons le même discours, hélas ! Le Gouvernement nous dit se soucier du sort des salariés et se vante d’avoir une approche humaine. Mais les actes ne sont toujours pas en concordance avec les déclarations.
Les licenciements sont qualifiés de licenciements économiques, mais qu’elle est la nature d’un licenciement économique sans réel plan sauvegarde de l’emploi ? Il s’agit là seulement d’un licenciement politique, pour reprendre la terminologie employée par les avoués et leurs salariés eux-mêmes.
La vérité est qu’il n’y a aucune réelle prise en compte spécifique de leur avenir : les aides à la mobilité et à la formation que vous mettez en avant sont celles du droit commun dont bénéficient déjà les 3 millions de chômeurs que compte notre pays. On voit le résultat !
Le seul engagement pris par l’État repose sur la création d’une cellule de reclassement, autant dire un pseudo-plan social, qui n’a toujours pas vu le jour.
Vous avez cependant manifesté pour les avoués bien plus d’intérêt, même si des points restent à régler tels que le caractère préalable de l’indemnisation promise.
Surtout, nous devons parler des oubliés de la réforme. En effet, en l’état du texte, il existe une véritable rupture d’égalité entre les avoués détenteurs de parts et les collaborateurs d’avoués titulaires du certificat d’aptitude à la profession d’avoué. Si ces derniers ne sont pas vraiment concernés par l’indemnisation de la charge, puisqu’ils ne peuvent prétendre à un préjudice lié à la perte du droit de présentation, pour autant leur préjudice de carrière sera identique à celui des avoués.
Aucune raison objective ne justifie de réserver un traitement inégalitaire aux collaborateurs diplômés par rapport aux avoués en titre : tous ont été formés pour exercer une seule et même profession et ont obtenu, dans des conditions assez draconiennes, le diplôme d’avoué. Ils étaient destinés à racheter tout ou partie des parts d’un office et ont consacré sans doute leur carrière à cet objectif, avant que l’État, sans bourse délier, ne le réduise à néant. D’ailleurs, nombre d’entre eux étaient déjà en possession d’un traité de cession de parts.
Il est donc légitime que les collaborateurs titulaires du diplôme d’avoué obtiennent une indemnisation spécifique complémentaire, destinée à compenser leur préjudice de carrière, au même titre que les avoués titulaires de parts, en sus de l’indemnité de licenciement légale, que tous les salariés percevront. Un amendement avait été déposé en ce sens par notre groupe, mais il n’a pas résisté au couperet de l’article 40 de la Constitution ; nous regrettons de ne pas pouvoir débattre de cette question.
Ainsi, pour résumer, malgré le « parcours erratique » de ce projet de loi, nous retrouvons les mêmes problématiques qu’en première lecture : ce projet de loi est injustifié, incomplet, pour ne pas dire bâclé. Ce constat confirme donc mon vote de refus.
Je terminerai par une ultime question, monsieur le ministre, et je suppose que vous y répondrez sans ambages : quel est le coût réel de cette décision pour les finances publiques, alors même que les moyens alloués à la justice restent dramatiquement faibles ?
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, je suis tenté, pour commencer cette intervention, de poser une question que j’avais déjà posée en première lecture : les avoués ont-ils tant démérité et leurs études sont-elles dans une situation si mauvaise que la suppression de cette profession et le licenciement économique de ses salariés seraient justifiés ? Il me semble que tel n’est pas le cas.
À l’évidence, cette question n’est plus vraiment d’actualité. En effet, la suppression d’une profession qui, au demeurant, a toujours bien fait son travail, a été proposée par le pouvoir exécutif et a déjà été confirmée par plusieurs votes du Parlement.
La décision politique est donc prise : les avocats remplaceront les avoués à compter du 1er janvier 2012.
Mais, une fois cette décision prise, il est de notre responsabilité, monsieur le ministre, mes chers collègues, de mener à son terme le processus engagé, et ce dans les meilleures conditions possibles, ce qui suppose aujourd’hui la réunion de deux préalables : tout d’abord, garantir que le fonctionnement des cours d’appel ne sera pas affecté, afin que cette réforme se fasse effectivement en faveur du justiciable, comme nous l’a annoncé le Gouvernement ; ensuite, vérifier que les avoués et leurs salariés seront indemnisés dans des conditions justes et équitables.
Concernant le fonctionnement des cours d’appel, le calendrier de la réforme est le point important à souligner. Il y a apparemment urgence : urgence à adopter un texte, et dans des termes identiques à ceux de l’Assemblée nationale. Le vote conforme serait indispensable...
L’urgence n’était sans doute pas la même pendant les dix mois qui se sont écoulés entre la première lecture au Sénat et la deuxième lecture à l’Assemblée nationale ! Ce retard est regrettable, mais il n’est pas de la responsabilité du Sénat. Il est donc osé de venir aujourd’hui demander à la Haute Assemblée de pallier ce retard alors que des questions de fond restent toujours sans réponse et que des points méritent encore d’être précisés.
Le retard pris a réduit quasiment à néant l’une des avancées importantes obtenues par le Sénat en première lecture, à savoir une période transitoire suffisante pour que la réforme puisse entrer en vigueur dans de bonnes conditions.
L’article 34 du projet de loi ayant été adopté conforme par nos collègues députés – je le regrette –, il nous est maintenant impossible de modifier à nouveau la date d’entrée en vigueur de la loi, ce qui aurait été de bon sens, au vu des mois de retard accumulés à l’Assemblée nationale.
Ce retard a été préjudiciable à tous, certains professionnels ayant même pu penser que le projet de loi était purement et simplement abandonné !
Dans ces conditions, les avoués et leurs salariés ont perdu un temps précieux dans la préparation de leur reconversion. De facto, la période transitoire est aujourd’hui grandement raccourcie. Or, comme le rappelle notre collègue Patrice Gélard dans son rapport, celle-ci est nécessaire pour assurer le bon fonctionnement des cours d’appel.
Gardons à l’esprit que, demain, il faudra gérer non pas seulement la suppression des avoués, mais aussi, parallèlement – c’est là que tout se complique ! –, l’entrée en vigueur de la réforme de la procédure d’appel. À ce propos, l’application du « décret Magendie » reste une source d’incertitude et je souhaiterais que vous nous expliquiez précisément, monsieur le garde des sceaux, quand ce décret entrera en vigueur, notamment concernant les échanges par voie électronique.
À l’heure où vont entrer en application ces nouvelles règles de la procédure d’appel, la contribution des avoués aurait été précieuse et il est pour le moins étrange de demander à des professionnels qui savent que leur métier va disparaître de mettre en œuvre une réforme de fond de la procédure d’appel.
Plus généralement, je suis convaincu que la simultanéité de la suppression des avoués et de l’entrée en vigueur de la réforme de la procédure d’appel va entraîner des dysfonctionnements majeurs au sein des cours d’appel dans les mois qui viennent.
Autre question importante, les avocats seront-ils en mesure d’assurer la postulation devant la cour d’appel dès le 1er janvier 2012 ?
Les 440 avoués disposent aujourd’hui d’un système de communication électronique avec les cours d’appel qui fonctionne parfaitement. Comment peut-on imaginer que les 51 000 avocats de France soient tous en mesure, d’ici un an, d’introduire l’instance devant les juridictions d’appel par voie électronique, sous peine d’irrecevabilité, alors que leur application informatique – le « e-barreau » – n’est pas opérationnelle ?
J’espère sincèrement que nous ne sommes pas en train de nous engager dans un processus incertain qui exposerait les justiciables à des risques de radiation et, inévitablement, à un allongement des délais d’audiencement des affaires.
Toujours concernant les avocats, le texte que nous examinons aujourd’hui me donne l’occasion de poursuivre une réflexion engagée il y a quelques jours lors de la discussion du projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées, introduisant l’« acte contresigné par avocat ».
Il est paradoxal d’affirmer que les avoués pourront demain exercer sereinement la profession d’avocat quand on sait que le nombre très important – supérieur à 50 000 – et toujours croissant d’avocats dans notre pays provoque déjà un certain appauvrissement de cette profession.
Sans doute le Gouvernement ne partage-t-il pas cette analyse, sinon pourquoi provoquer demain l’arrivée de 400 nouveaux candidats au sein de cette profession ?
Une chose est sûre : pour ceux qui décideront de devenir avocat, reconstituer rapidement une clientèle ne sera pas chose facile dans le contexte actuel, c’est une évidence !
Ma deuxième source d’inquiétude tient à l’indemnisation des avoués.
Sur ce sujet, je reconnais bien évidemment les améliorations importantes qui ont été apportées au dispositif, principalement par le Sénat, par rapport au texte initial du projet de loi.
Comme l’a rappelé notre rapporteur, l’Assemblée nationale a confirmé le recours au juge de l’expropriation, et je m’en félicite. Les inquiétudes ne portent donc pas sur l’indemnisation elle-même, mais plus sur l’éventuelle fiscalité qui pourra lui être appliquée. Vous nous avez déjà donné des précisions à ce sujet, monsieur le garde des sceaux, vous aurez sans doute l’occasion d’y revenir.
Des incertitudes pèsent aussi sur le moment de cette indemnisation qui, selon la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, doit être préalable à l’expropriation. J’aurai l’occasion de revenir sur ce thème lors de la défense de mes amendements.
Autre interrogation, qu’en est-il des reclassements promis l’année dernière par votre prédécesseur, monsieur le ministre ? Vous avez rappelé la création de près de 400 nouveaux postes dans les services judiciaires ; mais qu’en est-il dans les faits ? Les premiers échos que j’ai pu recueillir sur la mise en œuvre concrète de ces annonces me laissent perplexe. J’ai, par exemple, eu connaissance du cas d’une salariée d’étude d’avoué qui, alors qu’elle postulait pour un poste en juridiction très éloigné de sa résidence habituelle, s’est entendu répondre qu’elle était trop qualifiée pour le poste. Un comble ! Et ce cas n’est sûrement pas isolé.
Il apparaît donc que la mise en œuvre de cette réforme pose de vrais problèmes et que la réalité n’est pas toujours à la hauteur des espérances ou des annonces. C’est la raison pour laquelle il me semble nécessaire de mieux cadrer certaines des dispositions de ce projet de loi, de sorte que la mise en œuvre de cette réforme, que les avoués n’ont pas demandée, ne constitue pas un marché de dupes pour eux-mêmes et leurs salariés.
Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées de l ’ UMP et du RDSE.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, il y a un an, jour pour jour, dans la même enceinte, je posais cette question : la disparition des avoués va-t-elle contribuer à rapprocher le justiciable de ses juges, à diminuer le coût des procédures ou à les accélérer ?
Un an après, jour pour jour, je pourrais reprendre, mot pour mot et chiffre pour chiffre, les propos que j’avais tenus. Malheureusement, en effet, cette année entière n’a pas permis à la Chancellerie de régler les différentes difficultés provoquées par la disparition prochaine de cette profession.
La première difficulté posée par ce projet de loi est constitutionnelle, M. Détraigne vient d’ailleurs de l’évoquer à l’instant.
En effet, l’article XVII de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen précise : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition…
M. Alain Anziani. … d’une juste et préalable indemnité. » Vous connaissez ce texte par cœur, monsieur le rapporteur, monsieur le garde des sceaux !
M. le garde des sceaux opine.
Ce texte fondamental pose ainsi comme principe que, lors d’une expropriation, l’indemnisation doit être préalable à la prise de possession. Or ce principe est directement violé par le cinquième alinéa de l’article 13 du présent projet de loi, qui prévoit que l’offre d’indemnisation, puis l’indemnisation elle-même, interviennent après la cessation de l’activité d’avoué.
La difficulté constitutionnelle est réelle et j’espère que vous la lèverez, monsieur le ministre, sans attendre que le Conseil constitutionnel le fasse lui-même.
La deuxième difficulté posée par ce projet de loi est plus humaine, plus sociale. Elle naît de la volonté gouvernementale, avec validation législative, de faire disparaître une profession. Ce type d’événement est rarissime.
Puisqu’il est rarissime, cet événement doit s’accompagner nécessairement de mesures dérogatoires.
Vos deux prédécesseurs, monsieur le ministre, avaient pris toute la mesure de l’enjeu, au moins en parole. J’ai encore en mémoire les fortes paroles de Mme Alliot-Marie, nous assurant que les avoués et le personnel de leurs études pourraient intégrer l’administration judiciaire : la perspective de cette « voie royale » devait faire cesser toute inquiétude…
Un an après, où en sommes-nous ? Je me permettrai de citer les propos empreints de sagesse de notre excellent rapporteur, qui demande au Gouvernement de « confirmer et de préciser ses engagements, pour assurer l’effectivité du recrutement de 380 salariés des études d’avoués dans les greffes des juridictions ».
Je vous parlerai plus directement, monsieur le ministre, en décryptant quelque peu la prose de notre rapporteur. De quoi s’agit-il, en réalité ?
À ce jour, 380 postes ont été ouverts par la Chancellerie pour accueillir le personnel des études. Vous savez comme moi que onze personnes seulement ont pu effectivement intégrer les greffes des juridictions ; c’est le chiffre que nous ont communiqué la semaine dernière vos services. Est-ce parce que ces personnels se désintéresseraient de cette « voie royale », ou parce qu’il s’agirait bien plutôt d’un chemin semé d’embûches ?
Nous avons reçu des témoignages très précis : le lieu des entretiens est en général très éloigné du domicile des candidats ; les conditions financières qui leur sont faites reviennent à leur faire accepter une division par deux de leur rémunération ; surtout, un accueil glacial leur est réservé. Tout est donc fait pour dissuader les candidats éventuels.
Le résultat que vous cherchiez est obtenu – je vous en félicite, d’une certaine façon – : vous n’avez recruté que onze personnes, mais la parole donnée n’a pas été respectée.
Elle n’a pas été non plus respectée en ce qui concerne les avoués tentés de rejoindre la magistrature, alors qu’il leur avait également été annoncé que les portes leur étaient ouvertes et que leurs compétences seraient appréciées. Pour quel résultat ? Aujourd’hui, huit avoués seulement ont intégré la magistrature.
L’autre voie qui leur était offerte, l’intégration dans un cabinet d’avocats, a-t-elle été plus facile ? Bien sûr que non ! Nous avons les éléments chiffrés qui l’attestent.
Cette voie est tout aussi tortueuse. Les avoués ont, aujourd’hui, beaucoup de mal à se faire une place dans cette profession d’avocat.
C’est la même chose pour les salariés. Mais on le savait d’avance ! Les études d’avoués embauchent quatre fois plus de personnel que les cabinets d’avocats ; il y a donc forcément un goulet d’étranglement. Dire que le personnel des avoués viendra dans les cabinets d’avocats c’est, évidemment, se moquer des uns et des autres.
La troisième difficulté porte sur la procédure d’appel elle-même. La Chancellerie a eu l’idée audacieuse, que nous pourrions d’ailleurs comprendre, d’effectuer une double réforme, visant à la fois la représentation devant la cour d’appel et la dématérialisation de la procédure d’appel, notamment de l’acte d’appel à peine de nullité.
Pourquoi pas ? Mais le croisement des deux réformes apparaît comme un saut dans le vide. Le vide informatique, c’est aussi le vide de l’appel, avec toutes les conséquences que cela peut avoir pour les justiciables.
Dès le 1er janvier prochain, le « décret Magendie » devait dématérialiser l’appel sous peine de nullité. Devant l’Assemblée nationale, Mme Alliot-Marie a annoncé le report de cette mesure au 31 mars 2011. Je pense, cependant, qu’à cette date la situation sera exactement la même. Nous allons avoir un vrai vide entre le 1er janvier 2011, date d’entrée en application du texte, et le 31 mars 2011. Que va-t-il se passer ? Comment l’informatisation va-t-elle pouvoir être effectuée ?
Vous avez rencontré la Chambre nationale des avoués pour leur demander s’il était possible qu’ils reprennent du service pendant ces trois mois afin d’assurer la prestation informatique…Je ne connais pas le résultat de vos négociations, mais je sais que vous avez eu une réunion sur ce point la semaine dernière.
La réponse ne peut pas être celle que vous avez donnée, monsieur le garde des sceaux, et qui consiste à affirmer que les professionnels sont d’accord pour coopérer et qu’une prestation minimale sera assurée.
J’ai ici une lettre de la Chambre nationale des avoués qui prouve exactement le contraire et où l’on vous rappelle que la procédure, en l’état, ne pourra pas fonctionner, ni au 1er janvier, ni au 31 mars, ni au 1er avril, ni même, sans doute, beaucoup plus loin dans le temps.
Dernier point, qui est essentiel, même si nous savons que ces mesures sont aujourd’hui définitives : quel est le sens de cette réforme pour la justice et le justiciable ?
Pour le justiciable, nous savons qu’elle n’allégera pas le coût des procédures.
Le coût de l’intervention d’un avoué a été apprécié par l’étude d’impact à 981 euros. Le coût de la nouvelle procédure comprendra 150 euros de taxe pour financer la réforme, 60 euros de taxe informatique, un forfait de 800 euros de frais, soit déjà 1010 euros, auxquels il faudra ajouter les honoraires de l’avocat. C’est, là aussi, se moquer du justiciable que de lui dire de ne pas s’inquiéter et que cette réforme est dans son intérêt : il paiera beaucoup plus cher !
Je salue, encore une fois, le doyen Gélard qui, dans un style affable mais percutant, indique que ces mesures ne permettront pas au justiciable d’économiser de l’argent.
Voilà pour le justiciable. Mais quid du contribuable ? Y trouvera-t-il son intérêt ? La Chambre nationale des avoués a évalué le coût de la réforme à près de 900 millions d’euros. Je rappelle que la suppression des avoués avait pour objectif de contribuer à la réduction des déficits publics…
Alors, monsieur le garde des sceaux, pourquoi cette loi ? Nous ne le comprenons pas. Une certaine commission, que nous connaissons, présidée par une autorité à l’intelligence remarquable que nous ne manquons pas de saluer à chaque occasion, a recommandé de lever tous les freins à la croissance, de réduire tous les coûts possibles dans notre pays. Parmi ses multiples propositions, on trouve celle qui consiste à supprimer la profession d’avoué.
Mais je prends chacun à témoin : qui dans cet hémicycle peut croire que le double but affiché, c’est-à-dire la réduction du coût pour le justiciable et pour le contribuable, va être atteint ? Personne !
Le doyen Gélard vous a demandé de prendre des engagements, monsieur le garde des sceaux. Nous préférons, quant à nous, une loi précise. Ce sera le sens de nos amendements.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
M. Jacques Mézard. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, c’est la deuxième année que le Gouvernement et la Chancellerie souhaitent un joyeux Noël à la profession d’avoué !
Sourires.
Trois ministres de la justice ont accompagné cette chronique funèbre.
Je pensais, monsieur le garde des sceaux, que vous alliez clôturer ce dossier dans des conditions moins brutales et moins chaotiques.
En fait, tout cela se terminera par un vote conforme et par un débat tronqué au moyen de l’article 40 et de la règle de l’entonnoir, en l’absence de toute véritable discussion sur les amendements. Et cela, alors même que M. le ministre chargé des relations avec le Parlement nous parlait à l’instant de dialogue constructif et vantait l’enrichissement que pouvait apporter le Sénat aux textes du Gouvernement.
Grâce au doyen Gélard et au vote du Sénat le 23 décembre 2009, l’exécution de cette profession a au moins évité ce qui eût été une véritable spoliation de 440 avoués, doublée du licenciement par l’État de 1 850 collaborateurs.
On ne soulignera jamais assez l’originalité du procédé : liquidation par l’État d’une entreprise en bonne santé, dégageant des bénéfices, suscitant de l’impôt local et national, et embauchant du personnel ! Originalité d’une liquidation ordonnée par le chef de l’exécutif, et dont le coût sera essentiellement payé par le contribuable, et par le justiciable, aussi, qui aura à sa charge une taxe et des frais pour plus de 1000 euros.
Intérêt du justiciable, que de réformes inopportunes, mal préparées sont perpétrées en ton nom !
Si chacun a compris que la décision était irréversible, il n’en reste pas moins qu’il est encore temps de dire fermement que cette réforme, seule réalisation phare découlant du rapport Attali, en sa décision 213, méritait d’être conclue définitivement par la prise en compte de quelques observations légitimes.
Selon M. le rapporteur, la transposition de la directive du Parlement européen et du Conseil relative aux services dans le marché intérieur ne constitue pas, elle non plus, une raison valable. La suppression des avoués à la cour relève d’une logique. Il aurait été plus pertinent qu’elle se réalise en 1972 ; ce ne fut pas le cas. Elle pouvait se réaliser dans la clarté, sans la brutalité qui fut employée par Mme Dati, alors même qu’en 2009 la Chancellerie avait laissé délivrer des diplômes à de jeunes avoués.
Deux conditions devaient être remplies : tout d’abord, une indemnisation juste, donc intégrale, pour les avoués, une solution équitable pour chaque collaborateur ; ensuite, une date de prise d’effet de la réforme permettant une période de transition, donc d’adaptation, suffisante. Aucune de ces conditions ne fut remplie.
Heureusement qu’il y eut le travail du doyen Gélard, et je tiens à nouveau à le saluer. Ce fut haro sur la profession d’avoué, à commencer par les avocats qui, frustrés de leur débâcle devant les notaires et les experts comptables, ont trouvé enfin un petit gibier livré prêt à être dévoré.
Le risque dans cette réforme serait qu’elle n’aboutisse pas à la réalisation d’objectifs partagés : qualité du droit, accélération de la procédure, accès du justiciable au droit. Nous sommes de ceux qui considèrent que l’évolution de la procédure d’appel était inéluctable et nécessaire, mais dans le cadre d’une approche complète englobant les questions de la dématérialisation, de la fusion, de la spécialisation et d’un véritable tarif répétible.
En ce qui concerne l’accélération de la procédure, reportez-vous à l’étude d’impact : le nombre des appels augmentera d’au moins 15 %, tandis que les effectifs des magistrats resteront constants. Aussi, les dossiers ne seront pas traités plus rapidement.
Pour ce qui est de la simplification de la procédure, le justiciable pourra désormais s’adresser à un professionnel unique, nous dit-on. Mais c’était déjà le cas dans l’immense majorité des dossiers, le justiciable s’adressant directement à l’avocat.
Quant à la réduction du coût de la justice d’appel, notre excellent rapporteur considère avec sagesse que ce motif est « discutable », en raison notamment de la taxe.
Monsieur le garde des sceaux, je me dois, à ce stade, de renouveler mon interpellation sur le problème fondamental de l’aide juridictionnelle dans la procédure d’appel, problème occulté par vos prédécesseurs de toutes sensibilités. Il s’agit là de la défense du justiciable démuni.
Il existait une indemnité d’aide juridictionnelle, ridicule, de quatorze unités de valeur pour chacun des professionnels. Allez-vous les cumuler, les réévaluer dans l’avenir ?
Je reste aussi convaincu que la réforme, telle qu’elle est engagée, va inéluctablement et rapidement, mais, je l’espère, non durablement, entraîner une baisse de la qualité du droit devant les cours d’appel. Les avoués connaissant parfaitement la jurisprudence et évitant nombre d’appels voués à l’échec, jouaient certainement le rôle d’un très bon tamis. De plus, connaissant les arcanes de la procédure d’appel, ils corrigeaient et évitaient nombre d’événements procéduraux, et assuraient un lien de proximité entre tous les intervenants.
Ceux qui rêvent aujourd’hui d’une justice totalement dématérialisée, de la généralisation de la visioconférence, oublient, en parfaits technocrates, que la justice est d’abord une question de relations humaines, et nécessite l’écoute, la vision et l’intelligence non d’une machine mais d’un homme.
Nous avons déposé une série d’amendements qui portent globalement sur trois problèmes : l’indemnisation des avoués, le sort des salariés et la période charnière. Nous savons cependant que cela ne servira strictement à rien et que, comme je l’ai dit, tous les moyens – article 40, entonnoir - seront mis en œuvre, car tout est bon pour étouffer le débat et aller vite.
Ce n’est pas une bonne chose.
Sur l’indemnisation, en particulier celle des avoués les plus jeunes, qui vont avoir une vraie difficulté de carrière, la question des plus-values est extrêmement importante, et je salue encore l’intervention du doyen Gélard sur ce point. Nous avons encore besoin sur ce sujet de réponses claires.
Je précise, monsieur le garde des sceaux, que, dans la note transmise par votre ministère, il est mentionné « pour plus de détails, nous tenons à votre disposition une fiche explicative ». Nous l’attendons encore ! Voilà encore une promesse non tenue, encore une fiche occulte…Peut-être la recevrons-nous bientôt !
Concernant le sort des salariés, vous nous dites que le ministre a offert 164 postes de catégorie C en 2010 ; on nous en avait annoncé 380. Notre collègue Alain Anziani a parfaitement décrit la situation et ce qui s’est passé pour écarter les candidats ou pour les dégoûter.
Aujourd’hui, le droit de déposer un dossier est un véritable leurre. À ma connaissance, aucune convention n’a été signée entre l’État, la Chambre nationale des avoués et les représentants des salariés.
Pour ce qui est du reclassement, aucune aide spécifique n’est prévue. Monsieur le garde des sceaux, l’État s’aligne-t-il sur Molex ? Voilà la bonne question !
En ce qui concerne la période charnière, tout a déjà été dit sur le décret Magendie. Vous savez parfaitement qu’il ne peut être efficient et sécurisé avant le 1er janvier 2013. Dire l’inverse ne correspond pas à la réalité ! Il est significatif que la Chancellerie ait demandé le renouvellement de la convention NIO ADESIUM pour un an.
La réalité, c’est que la plateforme e-barreau n’est pas globalement opérationnelle, et tout le monde le sait ! Vous vous arc-boutez sur la date du 31 mars en raison d’annonces antérieures. La sécurisation des procédures impose un changement de calendrier.
Encore une fois, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, c’est la méthode de la rupture qui a été privilégiée dans ce dossier, ici pour détruire une profession qui consentait manifestement à disparaître, mais qui, légitimement, attendait que vous l’enterriez au moins avec les honneurs !
Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd’hui, en seconde lecture, prévoit la fusion des professions d’avoué et d’avocat, à l’issue d’une période transitoire et avec un accompagnement des salariés.
Nous arrivons à l’épilogue d’un long processus. Ce feuilleton a été jugé par certains un peu long, j’en conviens. Le sujet, qui touche à la justice, au patrimoine et à l’humain, est sensible.
L’évolution nécessaire de la représentation devant les cours d’appel répond au besoin de rendre notre procédure d’appel plus accessible, plus lisible et plus compréhensible pour nos concitoyens justiciables.
Ce texte permet aussi de nous mettre en cohérence avec la directive européenne, le statut actuel des avoués, en particulier les règles d’accès à cette profession, n’étant plus conforme avec le principe de libre concurrence.
Annoncé par le Gouvernement dès le 9 juin 2008, ce texte s’inscrit dans la continuité de la réforme de 1971, avec la fusion des professions d’avocat et d’avoué auprès des tribunaux de grande instance. Depuis lors, les avocats inscrits au barreau du tribunal de grande instance bénéficient du monopole de la postulation devant cette juridiction.
Il s’agit donc de poursuivre cette démarche et d’achever la réforme en fusionnant les professions d’avoué et d’avocat auprès des cours d’appel. Les avoués qui le souhaitent deviendront ainsi avocats, dès le 1er janvier 2012, et pourront exercer à ce titre la mission de postulation en appel qui leur est aujourd’hui dévolue en tant qu’avoués. Cela permettra aux justiciables d’avoir un interlocuteur unique en appel.
Le projet de loi prévoit également une réforme globale de la procédure et une dématérialisation progressive des échanges devant la cour d’appel.
Nous nous réjouissons du consciencieux travail mené sur ce texte par la commission des lois du Sénat, particulièrement par son excellent rapporteur, Patrice Gélard, ainsi que par son président. Tout cela nous permet d’aborder un dispositif qui nous semble à la fois juste et équilibré.
Il témoigne en effet des efforts consentis par le Gouvernement, en particulier concernant les mesures destinées aux avoués et à leurs salariés en matière d’indemnisation, de régime de retraite, mais aussi d’accompagnement personnalisé.
Le Sénat, en première lecture, s’était aussi montré particulièrement attentif aux conséquences que pourrait avoir cette réforme pour les 440 avoués et leurs 1 800 collaborateurs. Nous avons toujours eu à cœur de veiller à garantir l’équité de leur accompagnement financier et professionnel.
Complété par l'Assemblée nationale, le projet de loi répond désormais à la triple exigence qui a guidé l’ensemble des réflexions menées par les parlementaires de la majorité : d’abord, favoriser, sur la base du libre choix, des passerelles vers d’autres professions du droit ; ensuite, prévoir une juste indemnisation du préjudice subi ; enfin, éviter toute rupture brutale, en aménageant une période transitoire.
Ainsi, en plus de l’accès automatique à la profession d’avocat, le texte présenté aujourd’hui prévoit de mettre en place le reclassement des collaborateurs juristes des avoués, afin que ces salariés retrouvent, dans le domaine du droit, une profession et des conditions de travail satisfaisantes. Par exemple, l’accès au métier d’officier public ministériel sera facilité.
L’indemnisation de ces salariés, quant à elle, est prévue pour les dommages dus à la fermeture des offices d’avoués. Ainsi, s’ils suivent leur employeur dans sa nouvelle profession d’avocat, ils conserveront les avantages qu’ils auront acquis en application de leur convention collective et, s’ils décident de démissionner, percevront une indemnité.
Une convention tripartite entre l’État, la Chambre nationale des avoués et les représentants des salariés prévoira des aides à la mobilité, des formations, un suivi personnalisé par un prestataire privé ainsi que des allocations destinées à compenser une perte de revenus.
Pour pallier tout risque de lenteur de la procédure dans l’indemnisation des avoués, un acompte s’élevant à 50 % du dernier chiffre d’affaires connu pourra leur être versé immédiatement.
En outre, une commission d’indemnisation devra désormais faire une offre dans un délai de trois mois suivant la cessation de l’activité d’avoué et au plus tard le 31 mars 2012. Si cette offre est acceptée, le salarié percevra l’indemnité correspondante dans le mois de son acceptation.
L’objet de cette nouvelle mesure est de permettre aux avoués de ne pas recourir à la procédure devant le juge de l’expropriation si le montant proposé par la commission leur convient, et ainsi d’obtenir une indemnisation plus rapidement.
Malgré le « retard » pris dans l’examen du projet de loi par le Parlement, la période transitoire, ardemment souhaitée par les avoués, a été conservée, afin de préparer au mieux la reconversion des avoués et de répondre aux conséquences sociales des fermetures d’offices.
L’Assemblée nationale a finalement fixé la fin de cette période transitoire au 1er janvier 2012. Ce délai nous semble tout à fait raisonnable au regard des exigences matérielles d’une telle réforme.
De même, les avoués pourront exercer les deux professions, celle d’avoué et celle d’avocat, à partir du 1er octobre 2011, soit trois mois avant la fin de la période transitoire, afin d’éviter une trop grande distorsion de concurrence avec les avocats.
Le texte qui nous est aujourd'hui soumis nous apparaît donc cohérent et équilibré. Face à tout ce qui a été dit sur le sujet dont il traite, je tenais à ce que ce texte ne soit en aucun cas un reniement de ce qu’ont pu apporter les avoués à la justice française durant leur histoire professionnelle.
Cette profession a longtemps eu un rôle primordial, depuis le XVe siècle, qui l’a vu naître. Il nous faut donc nous réjouir que les avoués qui le souhaitent puissent continuer à mettre toutes leurs compétences et leur grande expérience au service de la justice.
La fusion des professions d’avocat et d’avoué permettra de simplifier les règles de représentation des parties devant les cours d’appel, dans l’intérêt à la fois des justiciables, mais aussi du bon fonctionnement de la justice.
Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera ce texte, et avec d’autant plus de satisfaction, monsieur le garde des sceaux, que vous aurez à cœur de répondre aux demandes d’éclaircissement du rapporteur de la commission des lois, notre excellent collègue Patrice Gélard.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Mme Monique Papon remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord de relever dans ce projet de loi une avancée positive, qui me semble importante, à savoir l’apparition, maintenue et confirmée, du juge de l’expropriation pour tout ce qui concernera l’indemnisation des avoués comme de leurs salariés.
Cela étant, je suis maire et, dans ma commune, quand il y a expropriation, c’est-à-dire quand il y a atteinte à un bien privé, celle-ci n’est acceptée et considérée comme juste que si l’on peut démontrer qu’elle sert un intérêt collectif supérieur.
Cela s’appelle tout simplement une enquête d’utilité publique.
J’ai donc voulu mener en quelque sorte une enquête d’utilité publique sur ce texte parce que, quand il s’agit de rendre la justice moins chère, de la rapprocher du justiciable, de favoriser l’appel, d’aider ceux qui ont besoin de la justice, ceux qui sont vulnérables et faibles, il me semble important de se replacer dans le contexte général de la justice aujourd'hui.
Dans ce contexte, cela a été rappelé mais je ne sais pas si tout a vraiment été rappelé, la réforme de la carte judiciaire est, à mon sens, le premier mauvais coup porté à la maison « Justice ». D’ailleurs, on s’en aperçoit aujourd’hui, puisque, dans certains secteurs – c’est notamment le cas à proximité de ma commune – des tribunaux qui avaient fermé sont rouverts à grands frais. Certes, on répare quelques erreurs, mais quel dommage qu’elles aient été commises ! Quel dommage que l’on soit allé trop vite et que cela doive coûter cher à tout le monde !
La réforme du Conseil supérieur de la magistrature, qui ne va pas vraiment dans le sens d’une plus grande indépendance de la justice, ne favorisera pas non plus une justice sereine. Et l’on ne peut que déplorer les atteintes qui sont portées à la justice quand, au plus haut niveau de l’État, des décisions rendues par des magistrats donnent lieu à commentaires.
Tous ces textes, toutes ces mesures tendent à favoriser la constitution en France de gros cabinets d’avocats à l’anglo-saxonne, une culture judiciaire à l’anglo-saxonne et un fonctionnement de la justice à l’anglo-saxonne, mais ce n’est pas ce à quoi nous étions habitués et, en tout cas, ce à quoi j’aspire en tant que citoyenne française.
La suppression des juges d’instruction est, certes, pour le moment, mise en sommeil, mais elle ne manquera pas, tel le monstre du Loch Ness, de ressurgir un jour. La justice se réveillera tout à coup avec un système à vitesses variables. C’est ainsi, on avance par à-coups, on fait un grand pas, on s’arrête, on recule, on oublie et on avance de nouveau, à l’image d’ailleurs de ce que nous avons vécu avec l’examen du présent texte.
Ces mouvements d’accordéon affectent les plus fragiles, les plus défavorisés. Les moyens qui sont alloués à la Protection judiciaire de la jeunesse lui permettront-ils de fonctionner demain ? Quant à l’aide juridictionnelle, ses moyens diminuent drastiquement, quoi que l’on en dise.
Et que dire du budget de la justice lui-même ?
La part que l’on réserve à la projection pluriannuelle des créations de postes de magistrat, l’anticipation qui serait nécessaire au vu de la pyramide des âges des juges, les recrutements à l’École nationale de la magistrature, tout cela me semble plus que problématique. Alors, le budget de la justice se serait bien passé de ce nouveau mauvais coup, de cette dépense qu’on lui impose aujourd’hui, que plus personne ne sait chiffrer, mais qui augmente progressivement tous les ans, chaque fois que l’on reparle de cette réforme de la représentation devant les cours d’appel !
Beaucoup ayant déjà été dit sur ce texte, je me bornerai à souligner quelques points. Nous aurons l’occasion, lors de la défense de nos amendements, d’y revenir plus longuement.
La première chose que je dénoncerai, la plus gênante peut-être, c’est de nouveau le délai insuffisant qui nous est laissé, la précipitation qui caractérise l’examen de ce texte, avec un calendrier en accordéon qui entraîne des incohérences, des erreurs, même si l’erreur est humaine…
Certains textes seront demain inapplicables, anticonstitutionnels pour une part, tout simplement parce que l’on ne veut pas prendre le temps de la réflexion, alors que de nombreuses modifications sont intervenues au cours de la navette, ne serait-ce que la réintroduction du juge de l’expropriation dans le présent projet de loi, et que, du fait de l’année de retard que nous venons de prendre, bien des choses ont également changé.
Alors n’agissons pas dans la précipitation. Prenons un, deux ou trois mois de plus, s’il le faut, pour examiner de nouveau ce texte. Donnons-nous le temps, pourquoi pas ? d’une troisième lecture, et non pas seulement d’une CMP. Quel mal y a-t-il à vouloir prendre le temps d’étudier les dispositifs que nous votons afin d’éviter les erreurs et les inéluctables mesures qui sont prises pour les réparer ensuite ?
Parlons aussi du chômage, monsieur le garde des sceaux.
Cette réforme aura pour conséquence de mettre beaucoup de salariés au chômage, en particulier des femmes, souvent peu diplômées, âgées de 40 à 45 ans, et elles auront beaucoup de difficultés à retrouver un emploi, en tout cas un emploi au même niveau de rémunération et aussi intéressant. C’est également une question dont nous aurons l’occasion de reparler.
À cet égard, l’alinéa 3 de l’article 9 entraîne aujourd'hui les avoués à dissoudre purement et simplement leurs sociétés pour pouvoir constater des moins-values et être moins taxés demain. Cette disposition les incite donc à licencier l’ensemble de leur personnel sans même savoir si, demain, une fois devenus avocats, ils ne pourront pas faire vivre leurs cabinets, même avec moins de salariés. Les délais qu’on leur impose aujourd’hui ne leur laissent même pas le temps de réfléchir à cette question.
On leur impose de liquider les sociétés, de licencier le personnel et de faire remonter des moins-values pour que, à tout le moins, cette réforme ne leur coûte pas trop cher à eux, avoués, et que l’argent ne sorte pas de leur poche.
Alors concilier atteinte aux biens privés et utilité publique me semble ici un peu difficile.
Pour ce qui est de l’utilité publique, l’objet de la réforme est, nous dit-on, de faciliter l’accès à la justice, singulièrement en appel.
Comme nous l’avons déjà longuement souligné lors de la première lecture du texte, et cela reste vrai en deuxième lecture, pour le contribuable, on le sait, l’appel sera plus difficile, plus cher et donc moins accessible financièrement.
On fait financer cette réforme voulue par l’État par les contribuables, par les justiciables. Est-ce normal, est-ce logique, est-ce bien ?
Les petits cabinets d’avocats, ceux qui subsistent encore dans nos provinces, n’auront jamais les moyens de recruter les compétences nécessaires ni de se former pour suivre leurs clients en appel. Ils devront donc, pour l’appel, renvoyer leurs clients vers les gros cabinets d’avocats, dans la Capitale ou les grandes métropoles…
Est-ce cela, rapprocher la justice du justiciable ? Est-ce cela, favoriser l’appel, favoriser l’accès à la justice ? C’est tout le contraire, et c’est encore désertifier un peu plus nos campagnes.
Après la réforme de la carte judiciaire, c’est un nouveau coup porté à la justice, aux justiciables et à nos structures rurales, qui aujourd’hui vivent tant bien que mal. Ne l’oubliez pas, car les Français sauront ne pas l’oublier, eux non plus !
Il a aussi été question de « e-transmission ». Il est faux de dire que la plateforme e-barreau va compenser la convention avec NIO ADESIUM. On sait que cela ne fonctionnera pas.
Pour la seule région parisienne, 45 000 dossiers sont soumis au délai du décret « Magendie » et vont devoir repasser sous la forme papier, et l’on sait, avant même qu’ils soient déposés, que, de toute façon, ils seront caducs, irrecevables simplement pour cause de non-respect du délai.
Il est inutile de se cacher derrière son petit doigt. Ayons au moins le courage de dire aux 45 000 justiciables qui ont fait appel aujourd’hui qu’ils vont payer 150 euros pour rien du tout parce que, de toute façon, leurs dossiers sont déjà caducs !
Vous comprendrez bien, monsieur le ministre, qu’en tant que commissaire enquêteur chargé de ce dossier pour les besoins de cette courte démonstration, je ne peux que conclure à une proposition d’expropriation abusive pour cause de nuisance publique à la maison « Justice » en général et aux plus de 2 000 personnes directement concernées en particulier, avec la circonstance aggravante de la précipitation obstinée qui est manifestée pour que ce texte soit promulgué au plus vite.
Vous l’aurez compris, je voterai, avec mon groupe, contre ce texte.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Madame la présidente, mes chers collègues, il m’est difficile de succéder à Virginie Klès, car elle a défendu le droit et la justice avec une fougue qui – j’en suis persuadé – n’a pu que vous toucher, monsieur le ministre !
Je ne vais pas non plus revenir sur les excellents propos d’Yves Détraigne concernant le retard préjudiciable et le raccourcissement de la période de transition pour les avoués, non moins préjudiciable. Monsieur le ministre, les argumentaires sur l’expropriation ont bien évidemment été préparés par votre prédécesseur. Peut-être ne souscrivez-vous pas à sa prose, ou, tout du moins – je l’espère – pas dans les mêmes termes.
Car enfin, on nous dit que des garanties importantes auraient été obtenues. Ainsi, selon le ministère, « l’offre préalable d’indemnisation interviendra au plus tard dans les trois mois à compter de la cession d’activité ». Mais on passe délibérément sous silence que cette offre ne sera notifiée qu’après la cessation d’activité. Le jeune avoué ne recevra donc cette offre que postérieurement à la disparition de sa profession.
En outre, aucune garantie n’a été fournie quant à la date de règlement de l’indemnité, notamment en cas de contestation de l’offre.
Le projet de loi, dans son état actuel, en offrant aux avoués la possibilité de devenir avocats, ne leur confère donc aucun avantage : les textes actuellement en vigueur prévoient d’ores et déjà cette passerelle, sans autre formalité qu’une simple demande d’inscription au barreau.
S’agissant de la fiscalité, tout a déjà été dit. Cependant, monsieur le ministre, en soutenant qu’il conviendrait de liquider les entreprises pour éviter les effets pernicieux du droit commun et une fiscalité alors très lourde et pénalisante, vous admettez derechef que l’outil de travail serait définitivement détruit, sans aucun espoir, au préjudice de ceux qui auraient peut-être espéré prolonger un tant soit peu leur activité professionnelle et procéder à leur reconversion en qualité d’avocat dans les sociétés existantes en conservant une partie de leur personnel.
Comme je dispose d’un temps limité, je m’attacherai à bien l’employer. Je veux faire ici état des demandes émanant des personnels titulaires du diplôme d’aptitude à l’exercice des fonctions d’avoué : la reconnaissance de la spécialisation en procédures d’appel pour tous les collaborateurs titulaires du diplôme d’avoué ; l’inscription de plein droit sur le tableau de l’ordre des avocats à la première demande pour tous les collaborateurs diplômés qui en feraient la demande, après prestation de serment ; le droit à une indemnité complémentaire pour perte de salaires.
Nous serons très intéressés par les réponses que vous pourrez nous apporter sur ces points, monsieur le garde des sceaux.
En ce qui concerne toujours les personnels, nous refusons la propagande qui a été faite
M. le garde des sceaux s’exclame
On nous dit – Alain Anziani, Virginie Klès, Jacques Mézard et Josiane Mathon-Poinat l’ont tous relevé avec éloquence – que « le ministère de la justice a offert 164 postes de catégorie C en 2010 ». Mais votre prédécesseur en avait annoncé 380 devant le Sénat il y a un an, et la plupart des salariés d’avoués qui ont déposé un dossier ont vu leur candidature rejetée.
Vous indiquez que « la plupart des postes n’ayant pas été pourvus, leur ouverture est prolongée en 2011 » et que « des postes supplémentaires seront ouverts aux salariés d’avoués ». « Ouverts », quelle belle expression ! Ces salariés n’auront que le simple droit de déposer un dossier – nous pouvons tout de même nous en réjouir –, car, pour le reste, les règles administratives ne permettent pas de privilégier telle ou telle candidature. Que deviendront donc ces personnels ?
Je continue de citer la prose du Gouvernement, puisque vous n’aimez pas le mot « propagande » : « Un accompagnement personnalisé » – que de sollicitude ! – « sera mis en place dans chaque cour d’appel dès le vote de la réforme. Une convention a été signée à cet effet entre l’État, la Chambre nationale des avoués et les représentants des salariés. » Monsieur le garde des sceaux, pourriez-vous nous communiquer cette convention, si elle existe et si elle est signée ? Sinon, pourquoi l’évoquer ? Je pense être clair…
Enfin, je citerai les documents du ministère, car il me semble que les personnels ne sont pas considérés avec la dignité nécessaire.
Marques d’approbation sur différentes travées
Si nous défendons les uns comme les autres, c’est parce que c’est la justice qui est ici en cause et qui doit être défendue !
Vous annoncez des aides à la mobilité, des aides à la formation, des allocations compensant une éventuelle perte de revenus, des aides à la création d’entreprise : n’en ajoutez plus, monsieur le garde des sceaux ! En vérité, les 1 800 salariés d’avoués ne bénéficieront d’aucune aide spécifique. Mais, si tel devait pourtant être le cas, pouvez-vous, monsieur le ministre, nous indiquer leur nature, leur montant et la date à laquelle ces aides seront disponibles ? Nous sommes très intéressés par vos réponses à ces questions.
C’est le droit commun qui s’appliquera à eux : ils auront uniquement ce que chacun des trois millions de chômeurs de France se voit proposer par Pôle emploi.
Voilà la vérité, la triste vérité ; alors, dites-la !
Pour conclure, nous nous doutons bien que ce texte ne sera pas fortement modifié à la faveur de ce débat. Nous ne pourrons le voter en l’état, car il ne nous convient pas, ni en termes d’indemnisation, ni en termes de fiscalité. De plus, il ne répond pas aux attentes des salariés, dont nous partageons les très légitimes angoisses et inquiétudes.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, je tiens à attirer votre attention sur le fait que le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale en première lecture était tout à fait inadmissible.
Ainsi, les modalités d’indemnisation des personnels n’avaient strictement rien à voir avec celles que nous avons, nous, obtenues et qui, je le rappelle, sont sans commune mesure avec ce qui se pratique habituellement en matière de licenciement.
Il en est de même du recours au juge de l’expropriation, monsieur le garde des sceaux. Nous avions fini par trouver cette formule, parce que la Chancellerie ne voulait absolument pas indemniser le préjudice de carrière. Cela nous paraissait absolument inacceptable, notamment pour les jeunes avoués.
Sur tous ces points, l'Assemblée nationale a, en deuxième lecture, suivi la position du Sénat. Je rappelle que nous avions presque tous voté ce texte en première lecture.
Je veux bien reprendre le débat pour essayer d’aller plus loin encore, mais il me semble qu’il y a un moment où, si les deux assemblées s’accordent, et de surcroît sur la base des propositions du Sénat, il ne faut pas être plus royaliste que le roi ! Sinon, nous n’aboutirons jamais à une réforme.
Toutefois, je voudrais revenir sur trois sujets que M. le rapporteur a évoqués.
Tout d’abord, le Sénat avait, en première lecture, refusé la fiscalisation des plus-values, …
… une indemnisation n’ayant rien à voir, selon nous, avec le produit de la cession d’un office. La situation est complètement différente s’il résulte de l’application du texte que les jeunes avoués ne seront imposés que pour de faibles plus-values. Monsieur le garde des sceaux, nous attendons des précisions en la matière.
Ensuite, vous le savez bien, le malaise est profond chez les personnels. Certes, nous avions obtenu des conditions d’indemnisation, je le répète, sans commune mesure avec ce qui se fait habituellement, et les personnels nous ont d’ailleurs remerciés de la dignité avec laquelle le Sénat les avait traités, surtout ceux qui sont proches de l’âge de la retraite et qui auraient eu des difficultés à retrouver un emploi.
Pour ce qui est des reclassements dans des emplois de greffe, nous savons qu’il existe des phénomènes de rejet de certains corps administratifs à l’égard des personnels venant de l’extérieur : il faut donc assouplir le dispositif. Vous avez évoqué les postes de catégorie C, pour lesquels il n’est pas nécessaire de recourir au concours : le recrutement peut se faire directement en prenant simplement en compte les acquis de l’expérience. Nous aimerions que vous nous apportiez des garanties sur ce point.
Je tiens aussi à rappeler à certains de nos collègues, pour qu’il n’y ait pas de confusion, que l’indemnisation n’intervient qu’à la cessation d’activité, mais un acompte représentant 50 % de la recette annuelle est tout de même prévu. Cet acompte est nécessaire pour permettre aux professionnels d’avoir immédiatement des revenus en vue de se préparer, le cas échéant, à leur nouvelle profession.
En revanche, après une longue réflexion, nous avons considéré, comme l'Assemblée nationale, que la période transitoire devait être raccourcie. Nous regrettons que le dialogue ait été interrompu pendant près de neuf mois, alors même que les personnels et les avoués étaient dans la plus grande incertitude. La commission des lois a estimé que la période transitoire ne devait pas durer trop longtemps, sauf à ajouter de l’incertitude à l’incertitude !
La formule qui a été trouvée nous semble être la plus satisfaisante, à condition que la loi soit promulguée rapidement et que toutes les garanties soient apportées, sinon tout sera remis en cause.
Monsieur le garde des sceaux, vous l’avez compris, beaucoup d’entre nous n’étaient convaincus ni de l’urgence ni de la nécessité de la réforme. Cependant, dès lors qu’il a été décidé de l’engager, il nous faut bien évidemment assurer la transition dans les meilleures conditions pour les avoués et leurs personnels.
Au demeurant, subsiste la difficile question de la dématérialisation de la procédure d’appel : nous devons être sûrs que la mise en œuvre de la nouvelle procédure ne provoquera pas une pagaille considérable dans notre système judiciaire. Je ne veux pas sous-entendre que le ministère de la justice n’est pas le plus doué s’agissant des questions informatiques – je pourrais évoquer à cet égard différents problèmes rencontrés depuis vingt-cinq ans –, mais il me semble important pour la justice que vous nous apportiez également des garanties sur ce point, monsieur le garde des sceaux.
Monsieur le rapporteur, je tiens à vous remercier du travail que vous avez fourni et de l’ouverture d’esprit dont vous avez fait preuve dans votre intervention.
Vous avez souhaité obtenir un certain nombre d’engagements, et je vais essayer de répondre à vos interrogations.
S’agissant du reclassement des personnels, les règles de la fonction publique interdisent l’organisation de concours réservés à telle ou telle catégorie, nous le savons tous. M. Sueur nous l’a brillamment rappelé voilà quelques jours.
Je souligne que 380 postes ont été ouverts en 2010. Pour l’année 2011, 739 postes de greffe seront ouverts, soit 19 postes de catégorie A pourvus par la voie contractuelle, 497 postes de catégorie B pourvus par concours, et 223 postes de catégorie C recrutés sur dossier.
Je prends l’engagement de veiller à ce que les salariés des avoués soient accueillis correctement. J’ajoute que d’autres postes de greffe seront probablement créés cette année : des arbitrages sont en cours sur ce point.
Des possibilités existent. Le concours, notamment, qui comprend une épreuve orale, doit permettre le recrutement d’un certain nombre de personnes, et je saurai rappeler que les salariés des avoués doivent être accueillis convenablement.
En ce qui concerne la communication par voie électronique, les avoués peuvent aujourd’hui se connecter à la plateforme des avocats. Il leur suffit pour cela de demander des clefs d’accès, et elles leur sont délivrées dans un délai de trois semaines. D’ores et déjà 80 % des avoués ont fait la démarche et sont donc prêts. J’insiste sur ce pourcentage, tout en précisant qu’il ne s’agit là que de l’un des aspects du vaste chantier que représente la dématérialisation de la justice.
Il faudra aller plus loin, en veillant à supprimer ce qu’il faudra des documents « papier », pour qu’il n’y ait pas de doublons avec les communications électroniques. Mais nous aurons très probablement l’occasion de reparler de ce sujet.
Je rappelle également, puisque la question m’a été posée, que l’acompte s’imputera effectivement sur la part de l’indemnisation correspondant à la perte du droit de présentation.
En ce qui concerne le traitement fiscal, et même si, comme toujours en la matière, les choses simples peuvent trouver à s’exprimer en termes complexes, la plus-value sera, dans un premier temps, calculée par rapport à la valeur historique de l’office. Mais, dans un second temps, lors de la dissolution de la société civile professionnelle, la plus-value réalisée par l’associé tiendra compte de la valeur d’acquisition des parts, le montant de la première plus-value étant retranchée du montant de la seconde.
En conséquence, je vous affirme très clairement, mesdames, messieurs les sénateurs, que la plus-value soumise à l’imposition sera bien, in fine, calculée par rapport à la valeur d’acquisition des parts. Cette précision a son importance, notamment pour les jeunes avoués.
Si jamais le versement de l’indemnité de dissolution n’avait pas lieu la même année, des dispositions spécifiques seront prises de sorte que la plus-value soit également calculée par rapport à la valeur d’acquisition des titres.
Il me semble donc que ma réponse est parfaitement claire, et chacun pourra se prévaloir de sa transcription au Journal officiel dans ses relations avec l’administration fiscale.
Mme Mathon-Poinat nous a expliqué qu’elle était contre le texte. Je respecte son point de vue, et je ne chercherai pas à la convaincre de changer de position en si peu de temps, même si je pense que le texte est bon.
Madame Mathon-Poinat, le Gouvernement a accepté que les indemnités versées aux salariés des avoués soient sensiblement augmentées. Je rappelle également que des postes seront ouverts à leur intention dans les services du ministère de la justice. Quant aux collaborateurs d’avoués, diplômés avoués et avoués titulaires de charge, ils ne sont pas dans la même situation, mais seront toutefois dispensés des conditions de diplômes et de formation nécessaires pour accéder à la profession d’avocat.
S’agissant du coût de la réforme, celle-ci sera financée, comme vous l’avez vous-même rappelé, madame la sénatrice, par une taxe de 150 euros, qui sera due par chaque partie à l’appel. Quant au montant total, il sera fonction des indemnités fixées par le juge, sur le fondement de la loi qui sera votée.
M. Détraigne nous a rappelé que beaucoup de retard avait été pris dans le calendrier parlementaire. Il a raison, et c’est pourquoi nous devons faire en sorte que ce texte soit adopté le plus rapidement possible.
Sur la période transitoire, fixée à un an, je souscris aux arguments de M. Hyest, qui a fort justement expliqué les raisons pour lesquelles la commission des lois s’en était tenue à cette durée.
La communication par voie électronique doit pour l’instant entrer en vigueur le 31 mars 2011, et les neuf mois qui suivront permettront aux avoués de se perfectionner dans l’utilisation de ce nouveau système. Je rappelle que, à l’heure actuelle, seules onze cours d’appel communiquent par voie électronique avec les avoués.
Je viens de répondre aux inquiétudes qui s’étaient exprimées sur la fiscalité, et de prendre un engagement au nom du Gouvernement.
Je rappelle également que 739 postes seront ouverts en 2011 dans les services du ministère de la justice et que, selon l’emploi concerné, les personnels des cabinets d’avoués pourront soit concourir, soit présenter des dossiers de candidature.
Monsieur Anziani, nous sommes tous d’accord pour dire que la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen fonde notre droit public : nous n’avons aucune divergence sur ce point. Simplement, le mécanisme proposé dans ce texte a déjà été utilisé pour certaines professions, notamment lors de la suppression des courtiers maritimes, et le Conseil constitutionnel l’avait alors jugé conforme à la Déclaration.
Pour ce qui est du reclassement, certains avoués ont été recrutés comme magistrats, et certains salariés ont d’ores et déjà été admis dans les services judiciaires. Je partage votre sentiment, ils sont encore trop peu nombreux, mais j’espère que, tous ensemble, nous ferons mieux en 2011, compte tenu du nombre important de postes ouverts.
En ce qui concerne la communication électronique, je voudrais indiquer que toutes les cours d’appel auront été formées au 31 mars 2011 et que tous les avoués seront en mesure d’avoir les clefs d’accès à la plateforme des avocats. Le renouvellement de la convention liant la Chambre nationale des avoués au ministère de la justice a été proposé à la Chambre nationale qui, à ce stade, ne l’a pas encore accepté.
Quel sera le coût pour le justiciable ? Au lieu de payer les honoraires de l’avocat et les émoluments de l’avoué, le justiciable devra acquitter les honoraires de l’avocat et la taxe de 150 euros. Le tarif de postulation sera supprimé.
M. Mézard, avec, comme toujours, beaucoup d’esprit, d’aisance et de connaissance du terrain, nous a expliqué pourquoi il ne voulait pas voter ce texte. Je le regrette, mais je vais tout de même essayer de le convaincre, même si je sais que je vais à l’échec !
Sourires.
Il a parfaitement raison, on aurait dû supprimer les avoués près les cours d’appel en 1971, en même temps que les avoués de première instance. Ce n’est pas ce qui avait été décidé à l’époque, et il faut bien terminer le travail !
Je ne reviens pas longuement sur le tarif de postulation. Les avoués devenus avocats pourront se prévaloir d’une spécialisation en procédure d’appel ; ainsi, les justiciables ou les avocats ayant besoin de ces compétences sauront naturellement à qui s’adresser.
À ma connaissance, et cela se comprend, les avoués près les cours d’appel ne sont jamais loin des sièges des cours d’appel. On ne peut donc pas dire, comme Mme Klès, que cette réforme se traduira par une désertification du territoire.
La convention tripartite sera signée dès le vote de la loi et l’entrée en vigueur du décret sur la procédure d’appel, le 1er janvier prochain, donnera un atout aux avoués qui pratiquent cette procédure.
Je remercie Mme Des Esgaulx, qui a bien voulu apporter le soutien de son groupe au projet de loi tel qu’il se présente désormais. Elle a pu au demeurant constater que j’essayais de répondre à toutes les questions posées par M. le rapporteur, et ce de la façon la plus positive qui soit.
Mme Klès, avec beaucoup de passion, nous a expliqué pourquoi elle était contre le texte. C’est son droit le plus strict, même si je l’ai parfois trouvée un peu excessive dans son propos. La passion peut parfois nous entraîner plus loin que la raison le commanderait…
C’est toujours un peu antinomique, vous le savez bien, monsieur le sénateur !
Il n’y a pas de précipitation dans le calendrier. On peut, certes, déplorer le cheminement parlementaire quelque peu erratique de ce texte, monsieur le rapporteur, mais il faut à présent que le processus aboutisse et que le projet de loi soit adopté.
Pour ce qui est du reclassement des salariés, je crois vous avoir déjà répondu, mesdames, messieurs les sénateurs : les avoués savent maintenant depuis plusieurs années que la fusion avec les avocats va avoir lieu, et ils ont eu, me semble-t-il, le temps de s’y préparer.
Je pense aussi que des actions communes intéressantes peuvent être menées, y compris des regroupements entre avocats et anciens avoués devenus avocats spécialisés en procédure d’appel, qui permettront d’aboutir à une meilleure organisation de la profession, au profit des justiciables.
Au sujet des collaborateurs d’avoués diplômés avoués, je répondrai à M. Sueur que le projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées, tel qu’il a été adopté par le Sénat la semaine dernière, prévoit déjà la spécialisation en procédure d’appel. M. Sueur a donc d’ores et déjà obtenu la réponse qu’il souhaitait.
En ce qui concerne le reclassement des salariés d’avoués, comme je l’ai déjà indiqué à plusieurs reprises, 739 postes seront ouverts en 2011. La convention tripartite, en négociation depuis plus d’un an, sera signée dès la publication de la loi, et je tiens à votre disposition le dernier état d’avancement du projet de convention. Le cahier des charges qui précède cette convention n’a pas encore été signé par la Chambre nationale et les syndicats, mais je suis tout prêt à mettre sur la table le texte en négociation, même s’il n’est pas définitif.
Tels sont, madame la présidente, les éléments de réponse que je tenais à communiquer aux différents intervenants.
Je m’adresserai pour conclure à M. le président de la commission des lois.
Le Sénat, je le sais, avait initialement opté pour l’exonération des plus-values, mais je pense que nous avons trouvé un juste compromis, qui tient compte à la fois de la situation de nos finances publiques et de celle des jeunes avoués.
Sur l’indemnisation des salariés, vous avez reconnu que des efforts avaient été faits. Contrairement à ce que d’aucuns prétendent, nous allons plus loin que le régime de droit commun. On peut certes désapprouver le dispositif proposé, mais il convient, à tout le moins, de reconnaître les efforts qui ont été faits.
Enfin, sur le reclassement des salariés, je puis vous assurer que les services de la Chancellerie veilleront à ce que tous les dossiers déposés soient traités. Je partage également l’avis de la commission sur le caractère opportun de la période transitoire.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
La commission des lois, saisie par M. le Premier ministre, en application des dispositions des articles 65 et 13 de la Constitution, a émis un vote favorable, par 7 voix pour et 2 voix contre, sur le projet de nomination par M. le Président de la République de M. Jean-Pierre Machelon et de Mme Rose-Marie Van Lerberghe au Conseil supérieur de la magistrature.
Par ailleurs, sur les propositions de nominations de M. le président du Sénat au Conseil supérieur de la magistrature, la commission des lois a respectivement émis un vote favorable, par 8 voix pour et 1 voix contre, en faveur de M. Pierre Fauchon, et par 6 voix pour et 1 voix contre, en faveur de Mme Chantal Kerbec.
Acte est donné de ces communications.
J’informe le Sénat que la question orale n° 1114 de M. Marcel Rainaud est retirée de l’ordre du jour de la séance du mardi 11 janvier 2011 et est remplacée par la question orale n° 1112 de Mme Bernadette Bourzai.
J’informe par ailleurs le Sénat que les questions n° 1137 de M. Michel Billout et 1138 de M. Robert Hue pourraient être inscrites à l’ordre du jour de cette même séance.
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
Je rappelle au Sénat que le groupe de l’Union centriste a présenté une candidature pour la commission des affaires sociales.
Le délai prévu par l’article 8 du règlement est expiré.
La présidence n’a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame Mme Valérie Létard membre de la commission des affaires sociales, à la place laissée vacante par Mme Béatrice Descamps, dont le mandat de sénateur a cessé.
(Texte de la commission)
Nous reprenons la discussion en deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, portant réforme de la représentation devant les cours d’appel.
La discussion générale ayant été close, nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que, en application de l’article 48, alinéa 5, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets et propositions de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux assemblées du Parlement n’ont pas encore adopté un texte identique.
En conséquence, sont irrecevables les amendements remettant en cause les articles adoptés conformes ou les articles additionnels sans relation directe avec les dispositions restant en discussion.
Chapitre IER
Dispositions modifiant la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques
(Non modifié)
L’article 43 de la même loi est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« La Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales et la caisse d’assurance vieillesse des officiers ministériels, des officiers publics et des compagnies judiciaires au titre du régime de base, du régime complémentaire et du régime invalidité-décès restent tenues aux obligations dont elles sont redevables en ce qui concerne les personnes exerçant à la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la loi n° … du … portant réforme de la représentation devant les cours d’appel ou ayant exercé avant cette date la profession d’avoué près les cours d’appel, leurs conjoints collaborateurs ainsi que leurs ayants droit.
« Pour l’application de l’article L. 723-11 du code de la sécurité sociale, la durée d’assurance des avoués devenant avocats tient compte du total du temps passé dans l’une et l’autre professions d’avoué et d’avocat.
« Les transferts financiers résultant de l’opération sont fixés par convention entre les caisses intéressées et, à défaut, par décret. Ils prennent en compte les perspectives financières de chacun des régimes. »
L'article 8 est adopté.
(Non modifié)
L’article 46 de la même loi est ainsi rédigé :
« Art. 46. – Les rapports entre les avocats et leur personnel sont régis par la convention collective nationale du personnel des cabinets d’avocats et ses avenants, quel que soit le mode d’exercice de la profession d’avocat.
« Toutefois, jusqu’à la conclusion d’une nouvelle convention collective de travail et au plus tard un an après la date fixée à l’article 34 de la loi n° … du … portant réforme de la représentation devant les cours d’appel, les rapports entre les anciens avoués près les cours d’appel devenus avocats et leur personnel demeurent réglés par la convention collective et ses avenants qui leur étaient applicables avant la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la loi n° … du … précitée, y compris pour les contrats de travail conclus après cette date.
« Pendant cette période, en cas soit de regroupement d’avocats et d’anciens avoués au sein d’une association ou d’une société, soit de fusion de sociétés ou d’associations, le personnel salarié bénéficie de la convention collective qui lui était applicable avant la date d’entrée en vigueur du chapitre précité ou, à défaut, de la convention collective nationale du personnel des cabinets d’avocats et ses avenants.
« À défaut de conclusion d’une nouvelle convention collective de travail à l’expiration du délai prévu au deuxième alinéa, les rapports entre les anciens avoués près les cours d’appel devenus avocats et leur personnel sont régis par la convention collective nationale du personnel des cabinets d’avocats et ses avenants. Les salariés conservent, dans leur intégralité, les avantages individuels qu’ils ont acquis en application de leur ancienne convention collective nationale.
« Les clauses des contrats de travail des salariés issus des études d’avoués restent applicables dès lors qu’elles ne sont pas en opposition avec la nouvelle convention collective de travail prévue à l’alinéa précédent ou de la convention collective nationale du personnel des cabinets d’avocats.
« Lorsqu’un avoué, à compter de l’entrée en vigueur de la loi n° … du … précitée, exerce la profession d’avocat, d’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, de notaire, de commissaire-priseur judiciaire, de greffier de tribunal de commerce, d’huissier de justice, d’administrateur judiciaire ou de mandataire judiciaire, les salariés qu’il n’a pas licenciés conservent l’ancienneté et les droits acquis liés à leur contrat de travail en vigueur. »
L'amendement n° 27, présenté par MM. Anziani et Michel, Mme Klès, MM. Sueur, Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 5, première phrase
Après les mots :
devenus avocats
insérer les mots :
, les avocats déjà en exercice
La parole est à Mme Virginie Klès.
Cet amendement a pour objet de garantir aux salariés d'avoués qui vont retrouver un emploi auprès d'un avocat en exercice de conserver les avantages individuels qu'ils ont acquis auparavant en application de leur ancienne convention collective nationale.
Cet amendement, qui avait déjà été présenté en première lecture, avait été adopté par la commission des lois avant d’être victime, en séance, d’un amendement présenté par M. Pillet. Ce dernier redoutait en effet que cet amendement n’ait un effet contre-productif et que les avocats n’hésitent à recruter des anciens salariés d’avoués.
Est-ce à dire que les avoués sont des employeurs à ce point généreux que personne ne peut être mis en concurrence avec eux ? J’ai quelques doutes à ce sujet.
Les salariés des anciens avoués vont déjà voir leur rémunération baisser lorsqu’ils seront recrutés dans des cabinets d’avocats. On ne peut pas leur demander, tout à la fois, de renoncer à une partie de leur salaire et de perdre des avantages individuels, alors qu’ils apportent une expérience, souvent de plusieurs années voire de plusieurs dizaines d’années, à des cabinets d’avocats qui auront bien besoin de ces compétences pour assumer leurs nouvelles missions.
Je pense que cette expérience apportée par les anciens salariés d’avoués sera très utile dans les cabinets d’avocats. Il serait donc désastreux, à mon sens, de leur refuser à la fois le maintien de leur précédent salaire et celui des avantages individuels acquis.
La commission émet, bien sûr, un avis défavorable, pour les mêmes motifs qu’en première lecture.
En réalité, cet amendement va à l’encontre des intérêts des personnes concernées. Si l’on exige pour eux le maintien des avantages dont ils bénéficiaient antérieurement, aucun avocat ne voudra les embaucher.
Même avis.
Je me permets d’insister sur le fait que ces personnes vont déjà perdre une partie de leur salaire. On ne peut pas demander le beurre, l’argent du beurre et le sourire de la crémière… C’est sans doute le projet de loi lui-même qui va à l’encontre de leurs intérêts.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 9 est adopté.
Chapitre II
Dispositions relatives à l’indemnisation des avoués près les cours d’appel et de leurs salariés
(Non modifié)
I. – Les avoués près les cours d’appel en exercice à la date de la publication de la présente loi ont droit à une indemnité au titre du préjudice correspondant à la perte du droit de présentation, du préjudice de carrière, du préjudice économique et des préjudices accessoires toutes causes confondues, fixée par le juge de l’expropriation dans les conditions définies par les articles L. 13-1 à L. 13-25 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.
Le juge détermine l’indemnité allouée aux avoués exerçant au sein d’une société dont ils détiennent des parts en industrie afin d’assurer, en tenant compte de leur âge, la réparation du préjudice qu’ils subissent du fait de la présente loi.
L’indemnité est versée par le fonds d’indemnisation prévu à l’article 19.
Par dérogation aux règles de compétence territoriale, le juge de l’expropriation compétent est celui du tribunal de grande instance de Paris.
Dans un délai de trois mois suivant la cessation de l’activité d’avoué près les cours d’appel et au plus tard le 31 mars 2012, la commission prévue à l’article 16 notifie à l’avoué le montant de son offre d’indemnisation. En cas d’acceptation de l’offre par l’avoué, l’indemnité correspondante est versée à l’avoué dans un délai d’un mois à compter de cette acceptation.
II à V. –
Supprimés
Je suis saisie de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 7, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jacques Mézard.
L’article 16 du projet de loi détermine les conditions dans lesquelles la commission nationale compétente sera chargée d’examiner les demandes de versement d’indemnités de licenciement, ainsi que les sommes versées en application de la convention de reclassement visée aux articles 14 et 15.
Dans le même temps, l’alinéa 5 de l’article 13 précise une des missions de cette même commission, à savoir la notification à l’avoué dans les trois mois suivant la cessation de l’activité du montant de l’offre d’indemnisation. Il nous paraît donc plus cohérent de supprimer cette disposition de l’article 13 afin de l’insérer au sein de l’article 16.
Il s’agit d’un amendement de coordination et de pure logique, mais puisqu’il n’est pas question d’accepter le moindre amendement, un avis défavorable me sera certainement opposé, contrairement à la logique et au bon sens…
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 3 rectifié est présenté par MM. Fouché, Gournac et Pintat, Mme Bruguière, MM. Doublet, Laurent, Bécot, Alduy, Houel, B. Fournier, Martin et Doligé, Mmes B. Dupont et Mélot et MM. Juilhard, Beaumont, Couderc, Vial, Ferrand, Cléach et Demuynck.
L'amendement n° 49 rectifié ter est présenté par MM. Détraigne et Dubois, Mme Gourault, MM. Maurey, Deneux et Amoudry, Mmes Férat, N. Goulet et Morin-Desailly et M. Merceron.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 5
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
L’offre prévue à l’article L. 13-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique est adressée à l’avoué dans les deux mois suivant la promulgation de la présente loi.
En cas de refus de l’offre, la décision du juge de l’expropriation est rendue dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine. Elle est exécutoire de droit à titre provisoire.
La parole est à M. Alain Fouché, pour présenter l’amendement n° 3 rectifié.
Les avoués seront privés de leur métier, et donc de leurs ressources, au 1er janvier 2012, sans être pour autant indemnisés avant cette date. Il est donc impératif de compléter le dispositif d’indemnisation en fixant le point de départ de la procédure, le délai maximal dans lequel le juge doit rendre sa décision, s’il est saisi, et le principe que cette décision sera exécutoire de droit à titre provisoire.
La rédaction actuelle du dernier paragraphe de l’article 13, issue des travaux de l’Assemblée nationale, est contraire à l’article XVII de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, dans la mesure où le dispositif présenté implique une indemnisation nécessairement postérieure au 1er janvier 2012, date à laquelle les avoués seront privés de leur outil de travail. L’indemnisation doit être préalable à cette date ; à défaut, la loi serait contraire à la Constitution.
Par ailleurs, il serait anormal de permettre de différer le règlement des indemnités allouées par le juge de l’expropriation en cas d’appel de sa décision par l’une ou l’autre des parties. L'objet de cet amendement est d’éviter toute ambiguïté sur le fait que, même en cas d’appel, toutes les indemnités fixées par le juge de l’expropriation résultant de l’application de l’article 13 devront être versées à l’avoué dans le mois du prononcé de la décision, conformément à l’article 16, l’appel ne produisant aucun effet suspensif.
La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter l'amendement n° 49 rectifié ter.
Je fais mienne l’excellente argumentation de mon collègue Alain Fouché.
L'amendement n° 29 rectifié, présenté par MM. Anziani et Michel, Mme Klès, MM. Sueur, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
Les offres prévues à l'article L. 13-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique sont adressées aux avoués associés et au titulaire de l'office dans les deux mois suivant la promulgation de la loi.
En cas de refus de l'offre, la décision du juge de l'expropriation est rendue dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine. Elle est exécutoire de droit à titre provisoire.
La parole est à M. Alain Anziani.
Le texte, dans sa rédaction actuelle, est effectivement contraire à l’article XVII de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ainsi qu’à l’article 545 du code civil, disposant que l’indemnisation doit être juste et préalable.
Par ailleurs, en l’état actuel du texte, si l’avoué refuse l’offre qui lui est faite, il devra attendre la décision du juge de l’expropriation du tribunal de grande instance de Paris, c'est-à-dire qu’il devra peut-être patienter deux ans avant d’être indemnisé.
Tout cela ne nous paraît conforme ni à la Constitution ni aux engagements pris.
L'amendement n° 8, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
Dans un délai de trois mois suivant la promulgation de la présente loi, la commission prévue à l’article 16 notifie au titulaire de l’office et aux avoués associés le montant des offres d’indemnisation. En cas d’acceptation des offres par leurs bénéficiaires, les indemnités correspondantes leur sont versées au plus tard dans un délai d’un mois à compter de la cessation d’activité.
La parole est à M. Jacques Mézard.
Il s’agit de fixer le point de départ du processus d’indemnisation.
En effet, eu égard aux conditions dans lesquelles intervient la suppression de la profession d’avoué, la procédure d’indemnisation doit démarrer le plus tôt possible, dès la promulgation de la loi, et non dans les trois mois suivant la cessation de l’activité.
Une offre postérieure à la cessation de l’activité aurait en effet pour conséquence de priver les avoués de la possibilité d’être indemnisés alors qu’ils n’auraient déjà plus de revenus. Nous souhaitons, dans ces conditions, leur permettre de se préparer au mieux à leur reconversion professionnelle en prenant en compte l’ensemble des préjudices qui les frappent et résultent, selon les cas, soit de la structure d’exercice titulaire de l’office, soit des avoués eux-mêmes à titre individuel.
L’offre de la commission doit donc être établie en fonction de chaque bénéficiaire. En conséquence, l’offre d’indemnisation de la perte du droit de présentation et du préjudice liquidatif doit être acceptée par le titulaire de l’office, à savoir les associés en fonction des règles statutaires qui les régissent lorsqu’ils exercent sous forme de société. Ainsi, l’indemnisation du préjudice de carrière lié à la perte d’activité et des autres préjudices est personnelle à chaque avoué et ne peut donc être acceptée que par la personne concernée.
Le présent amendement prévoit en outre que les indemnités correspondantes, en cas d’acceptation des offres par les bénéficiaires, leur seront versées au plus tard dans un délai d’un mois à compter de la cessation de l’activité.
C’est là aussi une mesure de justice et de sagesse. La position du Gouvernement est contraire à celle que le Sénat avait adoptée en première lecture, en décembre 2009.
L'amendement n° 55, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer les mots :
cessation de l'activité d'avoué près les cours d'appel et au plus tard le 31 mars 2012
par les mots :
promulgation de la présente loi
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
La suppression d’un outil de travail sur décision unilatérale de l’État impose que celui-ci assure une indemnisation avec une célérité particulière.
Cet impératif est affirmé à l’article XVII de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui exige une indemnisation préalable et s’est appliqué à de nombreuses reprises, comme en témoigne la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.
La question n’est pas seulement théorique. Nombre de personnes concernées sont exposées à des difficultés financières immédiates, parfois insurmontables, risquant de paralyser tout projet de reconversion professionnelle. Il est prévu un acompte à l’article 17 du projet de loi, mais il est insuffisant, notamment en raison de la déduction dont cet acompte fera l’objet, pour la plupart des avoués, au titre du remboursement de leurs emprunts professionnels.
De plus, le tribunal de grande instance de Paris a fait connaître que le délai observé devant le juge de l’expropriation, entre la saisine du juge et le prononcé du jugement pour une affaire « de droit commun », est de deux ans et demi. Par conséquent, en cas de saisine du juge en avril 2012, un avoué ne pourrait escompter obtenir un jugement qu’en octobre 2014.
Il paraîtrait donc sage que le Sénat, afin de se conformer à ces exigences constitutionnelles et conventionnelles et de prévenir tout contentieux, adopte un texte permettant de garantir que l’indemnité sera versée à une date antérieure à la suppression de l’outil de travail, soit, en l’état actuel du texte, avant le 1er janvier 2012.
La commission des lois du Sénat a souhaité que les avoués soient soumis au droit commun de l’imposition, ce dernier étant interprété dans un sens qui leur est, en principe, favorable. Le Gouvernement doit s’engager sur ce point : c’est l’objet de l’amendement d’appel de la commission que nous examinerons tout à l’heure.
Dès lors, il n’est pas possible de souscrire aux présents amendements, qui prévoient un dispositif d’exonération fiscale généralisé, en contradiction avec la position que nous avons adoptée en première lecture et en commission des lois.
Si les réponses du Gouvernement n’étaient pas satisfaisantes, nous pourrions nous replier sur l’amendement de la commission que j’évoquais à l’instant. Dans l’immédiat, la commission émet un avis défavorable sur les six amendements.
Ces six amendements visent à bâtir un système différent de celui qui est soumis au Sénat au travers du présent texte. Ils tendent à préciser que l’offre d’indemnisation devra être adressée à l’avoué dans les deux ou trois mois suivant la promulgation de la loi, que, en cas de refus de l’offre, la décision du juge de l’expropriation devra être rendue dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine et sera exécutoire de droit à titre provisoire et que, en cas d’acceptation de l’offre d’indemnisation, les indemnités correspondantes devront être versées dans le mois de la cessation de l’activité.
Le Gouvernement souhaite le retrait de ces amendements ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Tout d’abord, la règle relative à l’offre préalable d’indemnisation a sa place dans l’article consacré à l’indemnisation des avoués…
… plutôt que dans l’article 16 relatif aux missions de la commission nationale. Je vous invite donc, monsieur Mézard, à retirer l’amendement n° 7.
S’agissant du point de départ du délai dans lequel la commission doit faire l’offre préalable d’indemnisation, MM. Fouché, Détraigne, Mézard et Anziani et Mme Mathon-Poinat contestent la rédaction actuelle du texte, qui prévoit un délai de trois mois à compter de la cessation de l’activité. Je ne crois pas que la date de la promulgation de la loi soit un meilleur point de départ, …
… car certains préjudices ne seront pas forcément chiffrables à ce moment-là.
Par ailleurs, ce délai est, à l’évidence, un délai butoir, et rien n’empêchera la commission de faire une offre avant même que les avoués cessent leur activité, s’ils lui donnent tous les moyens de se prononcer. À ce titre, je rappelle que la commission sera créée dès la publication de la loi.
En ce qui concerne l’encadrement de la décision du juge de l’expropriation, MM. Fouché, Détraigne et Anziani et Mme Mathon-Poinat souhaitent prévoir un délai de quatre mois pour que le juge rende sa décision, celle-ci devant être selon eux automatiquement exécutoire. Je crois pour ma part au contraire que les règles de procédure sont actuellement suffisantes pour répondre à toutes les situations, sans qu’il soit opportun d’enfermer la décision que doit rendre le juge de l’expropriation dans un délai, au demeurant très court, qui peut s’avérer inadapté ou incompatible avec certains cas d’espèce.
En outre, il n’est pas nécessaire de prévoir que l’indemnisation prononcée par le juge soit exécutoire de plein droit. Le juge a toujours la faculté de prononcer cette exécution provisoire au cas par cas, y compris en cas d’appel, en saisissant le premier président ou le conseiller de la mise en état.
Enfin, s’agissant de la date du versement des indemnités en cas d’acceptation de l’offre préalable d’indemnisation, M. Mézard souhaite préciser que les indemnités seront versées dans le mois de la cessation de l’activité. Je ne crois pas qu’une telle disposition aille dans le sens des intérêts des avoués, car si l’offre est faite rapidement après l’entrée en vigueur de la loi et que la cessation de l’activité n’a lieu qu’en fin d’année 2011, cette précision pourra conduire les avoués à devoir attendre plus que de raison le versement des indemnités.
Je souhaiterais préciser que, en l’occurrence, il s’agit non pas d’une expropriation, comme je l’entends dire, mais d’une procédure comparable à celle de l’expropriation. Si le Sénat a opté, en première lecture, pour cette procédure, c’est justement afin de favoriser les avoués.
Le projet de loi initial ne parlait pas du tout d’expropriation ; il mettait en place une démarche tout à fait différente, qui elle était absolument conforme à la Constitution. Ne revenons pas en permanence à la procédure d’expropriation et à l’article XVII de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui n’est pas applicable en l’espèce.
L'amendement n'est pas adopté.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 3 rectifié et 49 rectifié ter, tendant à modifier l’article 13.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 136 :
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à M. Alain Anziani, pour explication de vote sur l'amendement n° 29 rectifié.
M. Alain Anziani. Je voudrais féliciter M. le garde des sceaux : sa force de persuasion lui a permis de convaincre les signataires de l’amendement n° 3 rectifié de renier celui-ci, y compris lorsqu’ils n’étaient pas présents dans l’hémicycle !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Tout cela est déplorable, madame la présidente, les signataires des amendements votent contre !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisie de huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° 4 rectifié bis est présenté par MM. Fouché, Pintat, Gournac et Alduy, Mme Bruguière, MM. Doublet, Laurent, Bécot, Houel, B. Fournier, Martin et Doligé, Mmes B. Dupont et Mélot et MM. Juilhard, Beaumont, Couderc, Vial, Ferrand, Cléach et Demuynck.
L'amendement n° 30 rectifié est présenté par MM. Anziani et Michel, Mme Klès, MM. Sueur, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 52 rectifié ter est présenté par MM. Détraigne et Dubois, Mme Gourault, MM. Maurey, Amoudry et Deneux, Mmes Férat, N. Goulet et Morin-Desailly et M. Merceron.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
I. - Après l'alinéa 5
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les indemnités versées aux avoués en application de la présente loi ne sont soumises ni à l'impôt, ni aux prélèvements sociaux, ni aux cotisations sociales professionnelles.
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
... - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Fouché, pour présenter l’amendement n° 4 rectifié bis.
Cet amendement vise à indemniser de manière équitable le préjudice subi par les avoués. Pour des motifs d'équité, les indemnités ne doivent être soumises ni à l’impôt, ni aux prélèvements sociaux, ni aux cotisations sociales professionnelles.
L'imposition des indemnités actuellement prévue par le texte porte atteinte au principe de la réparation intégrale du préjudice, du fait que serait prélevé un peu plus de 50 % des sommes allouées.
En l'état actuel du texte, les avoués financeront eux-mêmes une partie non négligeable de la réforme qu’ils subissent. C'est pourquoi l'amendement prévoit, pour une juste compensation de la perte de leur outil de travail par les avoués, la non-imposition des sommes versées.
La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l'amendement n° 30 rectifié.
Nous souhaitons une réparation intégrale du préjudice subi par les avoués, ce qui suppose que l’on n’ampute pas les indemnités en les soumettant à l’impôt, aux prélèvements sociaux ou aux cotisations sociales professionnelles.
La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter l'amendement n° 52 rectifié ter.
L'amendement n° 53 rectifié bis, présenté par MM. Détraigne et Dubois, Mme Gourault, MM. Maurey, Amoudry et Deneux, Mmes Férat, N. Goulet et Morin-Desailly et M. Merceron, est ainsi libellé :
I. - Après l'alinéa 5
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
- Les indemnités versées aux avoués en application de la présente loi en réparation de tous les préjudices subis, autres que celui tendant à réparer la perte du droit de présentation, ne sont soumises ni à l'impôt, ni aux prélèvements sociaux, ni aux cotisations sociales professionnelles.
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
... - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Yves Détraigne.
Les quatre derniers amendements faisant l’objet de la discussion commune sont identiques.
L'amendement n° 9 est présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° 31 est présenté par MM. Anziani et Michel, Mme Klès, MM. Sueur, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 54 rectifié bis est présenté par MM. Détraigne et Dubois, Mme Gourault, MM. Maurey, Amoudry et Deneux, Mmes Férat, N. Goulet et Morin-Desailly et M. Merceron.
L'amendement n° 66 est présenté par M. Gélard, au nom de la commission des lois.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
I. - Alinéa 6
Rétablir le IV dans la rédaction suivante :
IV. - Les plus-values réalisées dans le cadre du versement de l'indemnité mentionnée au I sont exonérées de toute imposition.
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
... - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 9.
Cet amendement reprend la rédaction issue de la première lecture du texte au Sénat. Il tend à rétablir l’exonération fiscale pour les plus-values réalisées dans le cadre de l’indemnité versée aux avoués.
Cette exonération ne porte que sur l’indemnisation versée au titre de la perte du droit de présentation, seule susceptible d’être imposée au titre des plus-values.
En l’état, l’imposition au titre des plus-values qui frappe l’indemnisation relative à la valeur de la perte du droit de présentation crée une rupture d’égalité entre, d’une part, les avoués amenés à se reconvertir dans une autre profession, et, d’autre part, ceux qui, choisissant de prendre leur retraite, bénéficient grâce à une exception au principe fiscal de droit commun votée à l’article 54 de la loi de finances rectificative pour 2009 de l’exonération de l’imposition sur les plus-values. Cette exception, je le rappelle, avait été votée en 2009 au motif notamment que les avoués futurs retraités ne pourront plus céder leur office. Il serait donc totalement inéquitable – si ce mot a encore un sens ! – que des avoués soient fiscalisés sur le fondement d’un impôt dont l’assiette est celle du montant d’une cession qui leur est également interdite au seul motif qu’ils ne seront pas en mesure de faire valoir leurs droits à la retraite.
Le respect du principe d’égalité entre avoués n’est effectif que si tous bénéficient du même régime fiscal.
Cette rupture d’égalité est d’autant plus évidente en l’occurrence que lorsque les avoués exercent sous forme de société – cela représente 95 % des cas –, l’indemnisation de la perte du droit de présentation est versée à la société civile professionnelle, seule titulaire de l’office.
Sous réserve des explications complémentaires qui pourraient être apportées, il semble que les avoués entrés au sein de la structure postérieurement à sa constitution se trouveraient assujettis au paiement d’un impôt sur une plus-value dont ils n’auront jamais bénéficié.
Le seul moyen d’atténuer cette pression fiscale est de dissoudre la SCP, pour permettre une remontée des moins-values engendrées par l’annulation des parts, ce qui implique nécessairement la liquidation de toutes les structures et, par voie de conséquence, le licenciement de tous les salariés.
Une exonération des seules plus-values pourra permettre de conserver une partie des emplois. Il n’est d’ailleurs même pas certain que ce mécanisme fiscal puisse être mis en œuvre, les avoués n’ayant aucune maîtrise des dates distinctes des faits générateurs de plus-values et de moins-values.
Contrairement à ce qui a pu être dit, le juge de l’expropriation n’a pas le pouvoir de tenir compte du poids de la fiscalité, qui, aux termes d’une jurisprudence constante, ne peut être considéré comme un préjudice réparable.
La réparation du préjudice doit être intégrale pour tous, et il ne serait pas équitable que certains voient l’indemnisation de la perte de leur droit de présentation amputée par la fiscalité. Je le redis, les avoués n’ont pas fait le choix d’être supprimés ; ils subissent cette situation. C’est d’ailleurs ce qu’avait très clairement indiqué le Sénat en première lecture.
Contrairement à ce qu’a avancé le Gouvernement, il n’y a aucun risque de rupture d’égalité au regard des précédentes réformes ayant concerné les commissaires-priseurs ou les courtiers maritimes, dans la mesure où ces professions, à la différence de celle d’avoué, n’ont fait l’objet d’aucune suppression ; il ne s’agissait que d’indemniser une perte partielle de monopole.
Il s’agit bien ici d’une suppression, car les avoués ne vont pas se transmuer en avocats. Ils bénéficiaient d’ailleurs déjà du droit de devenir avocats.
Les dispositions fiscales qui avaient été adoptées en première lecture par le Sénat sont indispensables, afin de permettre aux avoués amenés à se reconvertir de ne pas voir leur indemnisation réduite, parfois dans de larges proportions, par l’imposition. Il s’agit de rétablir l’égalité entre les avoués, qui ne sauraient être soumis à deux régimes distincts.
Je reprends à mon compte les propos de M. Mézard.
La rédaction actuelle du texte est contraire à l’article 54 de la loi de finances rectificative de 2009, qui exonérait d’imposition les avoués partant à la retraite.
De plus, les avoués qui seront amenés à acquitter cette imposition sur les plus-values devront rapidement dissoudre leur structure afin de faire remonter les moins-values, et donc licencier au plus vite l’ensemble des salariés. En conséquence, cette mesure ne rapportera pas grand-chose aux finances publiques.
La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter l'amendement n° 54 rectifié bis.
Il s’agit de revenir à la version du texte adoptée en première lecture par le Sénat.
Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, il s’agit d’un amendement de repli, dans l’hypothèse où les réponses du Gouvernement ne seraient pas satisfaisantes. Si elles l’étaient, je demanderais le retrait de l’ensemble des amendements faisant l’objet de la discussion commune, afin que l’article 13 puisse être voté conforme.
Conformément à la position adoptée par la commission des lois en deuxième lecture, le présent amendement pourra être adopté si le Gouvernement n’est pas en mesure de prendre des engagements clairs et précis sur la fiscalité qui sera applicable à la plus-value que réaliseront les avoués indemnisés en application de l’article 13.
Nous n’aurions jamais dû adopter la disposition précitée de la loi de finances rectificative de 2009, car c’était une aberration au regard du respect du principe d’égalité devant l’impôt. Cela étant, monsieur Anziani, elle n’était applicable que pour l’année 2009.
Un certain nombre d’arguments solides ont été présentés par MM. Mézard et Détraigne, notamment, concernant les avoués exerçant dans le cadre de sociétés civiles professionnelles. Dans ce cas, la SCP est détentrice de l’office. Ainsi, l’indemnisation de la perte du droit à présentation sera perçue par la SCP et non par l’avoué.
Si la plus-value réalisée est calculée en fonction de la date d’acquisition de l’office, les avoués ayant acquis leurs parts sociales au cours des dernières années risquent d’être imposés au titre d’une plus-value particulièrement élevée, alors qu’ils ont payé un droit d’entrée important, tenant compte de la valeur actualisée de l’office.
Il paraît donc indispensable que le Gouvernement prenne des mesures permettant que les avoués ayant récemment acquis des parts sociales ne soient pas soumis à une imposition disproportionnée.
Si la dissolution des SCP apparaissait comme une solution pertinente, encore faudrait-il veiller à ce que l’articulation dans le temps de la dissolution et de l’indemnisation des avoués permette effectivement d’apporter les corrections nécessaires au calcul de l’impôt.
Il faut donc que le Gouvernement s’engage dès à présent à prendre l’instruction fiscale nécessaire pour résoudre cette question d’organisation dans le temps de la liquidation de la SCP et du versement de l’indemnité. Si le Gouvernement nous donne satisfaction, la commission retirera son amendement et demandera le retrait de tous les autres.
Pour ne pas rester dans la théorie, je me suis penché sur des exemples concrets.
L’impôt sur la plus-value, si celle-ci est calculée par rapport à la date d’acquisition, s’établit à 6 700 euros pour un avoué qui aurait acquis 20 % des parts d’un office en 1999. En revanche, si le calcul retient pour point de départ la date d’acquisition de l’office par la société, l’impôt sur la plus-value atteint 66 000 euros : on ferait alors payer aux avoués une partie de la réforme. Monsieur le ministre, nous confirmez-vous clairement que c’est la date d’acquisition des parts qui est prise en compte ?
Oui ! C’est ce que j’ai dit tout à l’heure !
Monsieur le garde des sceaux, certains ne l’ont pas encore entendu ! Cela n’était pas évident a priori, et il était nécessaire que vous indiquiez nettement que ce sera bien la date d’acquisition des parts qui sera prise en considération. Certains ont essayé d’interroger les services de Bercy à ce sujet, sans obtenir de réponse très claire.
Par ailleurs, monsieur le ministre, c’est à la clôture des opérations de liquidation que la régularisation au titre de l’annulation des parts interviendra, avec prise en considération du prix d’acquisition des parts. Néanmoins, il n’y aura pas de clôture des opérations en 2012, année de la détermination du droit de présentation d’un successeur. Par conséquent, aucune compensation ne sera possible, d’où l’inquiétude légitime des professionnels : ils ne savent pas quand et comment l’avance pourra leur être remboursée par l’administration fiscale.
Vous avez déjà répondu à ces préoccupations, monsieur le ministre, mais je crois nécessaire d’y revenir, afin de convaincre un certain nombre de nos collègues !
Je vais tâcher de clarifier les choses une nouvelle fois. Il est vrai que les questions fiscales sont toujours complexes.
Une instruction fiscale sera envoyée afin que le texte soit correctement appliqué.
Premièrement, je confirme que la plus-value sera calculée in fine par rapport à la valeur d’acquisition des parts de la SCP.
Deuxièmement, je m’engage à ce que des dispositions soient prises afin qu’il en soit également ainsi dans l’hypothèse où l’indemnité ne serait pas versée la même année que celle de la dissolution.
Je réponds donc par l’affirmative à vos deux questions, monsieur Hyest. Il me semble que le Gouvernement prend un engagement clair en réponse à une demande claire de la commission des lois du Sénat. Cet engagement sera formalisé par le biais d’une instruction fiscale, comme vous l’avez demandé.
La commission retire l’amendement n° 66 et demande le retrait de tous les autres amendements faisant l’objet de la discussion commune.
L'amendement n° 66 est retiré.
Monsieur Détraigne, les amendements n° 52 rectifié ter, 53 rectifié bis et 54 rectifié bis sont-ils maintenus ?
Les explications apportées me semblent satisfaisantes sur le plan fiscal, mais que le garde des sceaux réponde à la place de Bercy me gêne un peu…
Les amendements n° 52 rectifié ter, 53 rectifié bis et 54 rectifié bis sont retirés.
Monsieur Fouché, l’amendent n° 4 rectifié bis est-il maintenu ?
L'amendement n° 4 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote sur l’amendement n° 30 rectifié.
Nous assistons à une facétie indigne du Sénat.
Il est tout à fait compréhensible que le nouveau garde des sceaux veuille solder un passif dont il n’est pas responsable et qui le handicape en vue de l’année à venir. Pour cela, il faut à tout prix un vote conforme. Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent : si celles du Gouvernement sont sincères, monsieur le ministre, inscrivez-les dans la loi ! Alors seulement nous vous croirons ! Si vous ne le faites pas, les engagements que vous avez pris ne seront pas tenus ; nous le savons très bien, et les avoués aussi !
C’est la raison pour laquelle nous maintenons les amendements n° 30 rectifié et 31. Les collègues qui se dégonflent porteront la responsabilité du texte qui sera voté. Pensons aux victimes !
L’Assemblée nationale s’est ralliée au texte du Sénat, mais n’a rien précisé sur le régime fiscal des plus-values, alors qu’une incertitude subsistait. Les précisions nécessaires ayant été apportées sur ce point, il ne faudrait pas laisser traîner les choses plusieurs mois encore : ce ne serait à l’avantage ni des avoués, ni de leurs salariés. Il ne s’agit absolument pas d’une mascarade, mon cher collègue, mais au contraire d’une grande victoire du Sénat ! Je ne suis absolument pas d’accord avec vous !
Je peux comprendre que notre collègue Jean-Pierre Michel se laisse emporter par le débat, mais je n’ai pas le sentiment d’être un « dégonflé ». Certes, ce n’est pas la ministre de l’économie et des finances qui a pris un engagement à propos de l’instruction fiscale, mais le garde des sceaux représente ici le Gouvernement.
Absolument !
Nos échanges figureront au Journal officiel : cela me semble de nature à donner la force nécessaire aux engagements qui ont été pris par le garde des sceaux.
Par conséquent, je ne crois pas m’être dégonflé en retirant mes amendements. Un débat doit être un échange permettant de progresser ensemble vers le meilleur texte possible, et non la juxtaposition de discours parallèles ne se rejoignant jamais. Or, sur ce plan, les engagements pris par le garde des sceaux me paraissent satisfaisants.
Je voudrais rappeler que, lorsqu’un ministre prend un engagement, il le fait au nom du Gouvernement, …
… et non au titre de son seul département ministériel. La réponse que j’ai faite a naturellement été préparée avec les services de Bercy. Mes propos, qui figureront au Journal officiel, engagent le Gouvernement.
Monsieur le ministre, nous sommes d’accord sur le fait que votre parole engage le Gouvernement tout entier. Cela étant, vous avez trop d’expérience parlementaire pour ne pas savoir qu’il est déjà arrivé que des engagements pris au banc du Gouvernement par d’autres que vous soient restés de simples paroles !
Notre collègue Jean-Pierre Michel l’a exprimé de manière un peu rugueuse – cela n’est pas défendu ! –, mais il nous semble que votre ambition et votre objectif sont d’obtenir un vote conforme !
À cet égard, je voudrais revenir brièvement sur le scrutin public de tout à l’heure. La position de 183 d’entre nous, soit la majorité du Sénat, était a priori claire : outre les 152 membres de l’opposition, 10 collègues du groupe de l’Union centriste et 21 du groupe UMP avaient signé les amendements identiques faisant l’objet du scrutin public.
Ils pouvaient difficilement changer d’avis, monsieur Hyest, puisque la plupart d’entre eux n’étaient pas en séance ! Néanmoins, ils ont voté contre leur propre amendement, car l’objectif est que le texte soit adopté conforme.
Nous avons assisté à un joli pas de deux entre la commission et le Gouvernement, remarquablement exécuté, autour de l’amendement n° 66, finalement retiré. Ce numéro a suscité l’étonnement sur toutes les travées, pour dire les choses sur un mode plaisant !
Monsieur le ministre, je vous dis « chiche » : pouvez-vous nous affirmer que le ministre du budget confirmera ce soir devant nous l’engagement pris cet après-midi par son excellent collègue le garde des sceaux ? Cela ne suffirait peut-être pas à lever toutes les inquiétudes, mais en tout cas une telle manifestation de l’unité de vues du Gouvernement donnerait un poids supplémentaire à votre engagement et nous permettrait presque d’oublier que des divergences peuvent parfois apparaître entre ministres, par exemple entre M. Hortefeux et vous-même à propos des magistrats…
Sinon, nous pourrons faire nôtre la formule de Jacques Chirac, selon laquelle les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Depuis déjà un an, ce débat sur l’indemnisation des avoués et de leurs salariés est fait d’hésitations, de tergiversations, d’avancées suivies de reculs.
Si le Gouvernement était vraiment convaincu de l’utilité de cette réforme, sous cette forme précise et en cette période de disette budgétaire, il paierait sans discuter le vrai prix de cette expropriation. Or, manifestement, il n’y est pas prêt ! Pourquoi ne nous présente-t-il pas des amendements nous garantissant que les engagements pris aujourd’hui figureront dans la loi ? Il a eu des mois pour les préparer ! Nous avons pourtant déjà vu le Gouvernement agir dans des délais nettement plus courts et dans des conditions beaucoup plus difficiles, pour ne pas dire acrobatiques, afin de permettre un débat serein au Parlement.
Monsieur le ministre, en l’absence d’amendements visant à les inscrire dans la loi, j’ai beaucoup de peine à croire en vos engagements. J’ai vraiment l’impression que l’on nous propose un marché de dupes. Nous devons vous faire confiance, dites-vous, mais ce sont les avoués et leurs salariés qui en paieront demain les conséquences ; c’est pourquoi je ne peux vous faire confiance !
Je voudrais appuyer ce qu’a dit avec beaucoup de talent notre collègue Bernard Frimat.
Nous avons retiré notre demande de scrutin public, qui n’avait plus aucun sens, …
… mais ce qui s’est passé lors du vote précédent est inacceptable. Étant donné la manière dont les choses se déroulent, vous n’aurez pas à recourir deux fois à ce procédé.
Cependant, dans les assemblées parlementaires, la sincérité des votes a une grande importance. Or l’analyse du résultat du précédent scrutin public, portant sur un sujet susceptible d’intéresser le Conseil constitutionnel, fera apparaître qu’il a été acquis uniquement parce que des sénateurs absents en séance auront voté contre l’amendement qu’ils ont signé !
Vous trouvez cela très bien ? C’est votre droit. En tout cas, mes propos et ceux de mes collègues figureront au Journal officiel et serviront en tant que de besoin.
Je crains les textes qui viennent en discussion à la veille de Noël ou des grandes vacances, comme ce fut le cas pour la proposition de loi relative au travail le dimanche, adoptée conforme dans des conditions qui sont restées dans les mémoires…
Nous avons bien compris quelle était ici la manœuvre. Pour ma part, je fais confiance à la parole de M. le garde des sceaux, mais j’ai vécu récemment, à propos du projet de loi relatif aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services, texte auquel j’étais particulièrement attaché, une expérience marquante : M. Novelli m’a fait une promesse qui a été bafouée trois mois après par un autre membre du Gouvernement.
Il est donc important d’écrire les choses, car des engagements pris oralement, même s’ils doivent figurer au Journal officiel, ne remplaceront jamais un texte.
Monsieur le garde des sceaux, je n’ai aucune raison de ne pas vous faire confiance, mais je sais parfaitement, par expérience, qu’un autre ministre pourra renier demain l’engagement que vous avez pris tout à l’heure !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
L'amendement n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 9 et 31.
Je voudrais résumer la situation en termes simples, afin que les choses soient bien claires pour tout le monde.
On supprime une profession qui ne l’avait pas demandé.
Peu importe que ce soit ou non justifié, là n’est pas le débat : elle est supprimée. Par conséquent, ceux qui l’exerçaient, quel que soit leur âge, vont devoir faire autre chose.
Cette suppression implique une indemnisation. Il est vrai, monsieur le rapporteur, que le Sénat a fait progresser le texte sur ce point, mais finalement, par le biais de l’impôt, l’État reprendra d’une main une partie de ce qu’il donne de l’autre !
Par conséquent, les avoués qui ont emprunté pour acheter leur charge ou des parts de la SCP dans laquelle ils exercent devront rembourser après avoir cessé leur activité, sans en avoir forcément retrouvé une autre, ni avoir été indemnisés. De surcroît, lorsqu’ils le seront, on leur reprendra d’une main ce qu’on leur aura donné de l’autre !
Voilà, en termes simples et clairs, la manœuvre dont vous êtes aujourd’hui le pilote, monsieur le garde des sceaux !
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'article 13 est adopté.
(Non modifié)
Tout licenciement survenant en conséquence directe de la présente loi entre la publication de celle-ci et le 31 décembre 2012, ou le 31 décembre 2014 pour les personnels de la chambre nationale des avoués près les cours d’appel, est réputé licenciement pour motif économique au sens de l’article L. 1233-3 du code du travail.
Dès lors qu’ils comptent un an d’ancienneté ininterrompue dans la profession, les salariés perçoivent du fonds d’indemnisation prévu à l’article 19 des indemnités calculées à hauteur d’un mois de salaire par année d’ancienneté dans la profession, dans la limite de trente mois. Ces indemnités ne peuvent être cumulées avec les indemnités de licenciement prévues aux articles L. 1234-9 et L. 1233-67 du même code.
Le licenciement ne prend effet qu’au terme d’un délai de trois mois à compter de la transmission par l’employeur de la demande de versement des indemnités de licenciement adressée à la commission nationale prévue à l’article 16. L’employeur notifie au salarié le contenu de la demande et la date de sa transmission à la commission.
L’employeur signifie, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, à tout salarié qui en fait la demande, s’il est susceptible ou non de faire l’objet d’une mesure de licenciement répondant aux conditions définies au premier alinéa du présent article. Dans l’affirmative, le salarié concerné qui démissionne perçoit du fonds d’indemnisation prévu à l’article 19 une indemnité exceptionnelle de reconversion égale au montant le plus favorable des indemnités de licenciement auxquelles il pourrait prétendre en vertu de l’article L. 1234-9 du code du travail ou de la convention collective nationale des avocats et de leur personnel du 20 février 1979.
L’employeur qui s’abstient de répondre dans un délai de deux mois à la demande du salarié ou qui lui indique qu’il n’est pas prévu qu’il fasse l’objet d’une mesure de licenciement perd le droit de voir versée par le fonds d’indemnisation prévu à l’article 19 de la présente loi la part de l’indemnité majorée de licenciement correspondant aux indemnités légales ou conventionnelles de licenciement qu’il lui appartient de verser à l’intéressé au titre de la rupture du contrat de travail.
En cas d’adhésion à une convention de reclassement personnalisé mentionnée à l’article L. 1233-65 du code du travail, le salarié peut bénéficier des indemnités prévues au deuxième alinéa du présent article.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 11, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer les mots :
le 31 décembre 2012, ou le 31 décembre 2014
par les mots :
un an après la date fixée par l’article 34 de la présente loi, ou deux ans après la date fixée par le même article
La parole est à M. Jacques Mézard.
Cet amendement de coordination et de bon sens subira sans doute le même sort que les précédents…
Près d'une année s’est écoulée depuis l’adoption en première lecture du projet de loi par le Sénat. Les délais initialement prévus pour la mise en œuvre de l’ensemble des dispositions du texte ne pourront, de toute évidence, être tenus. Dans l’intérêt des avoués et de leurs collaborateurs, dont un certain nombre vont subir une reconversion professionnelle difficile, il est nécessaire de revoir les délais de rupture du contrat de travail du personnel des études et de la Chambre nationale des avoués, conformément à l’esprit du projet de loi tel que le Sénat l’avait voté en décembre 2009.
Les trois amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 12 est présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° 32 est présenté par MM. Anziani et Michel, Mme Klès, MM. Sueur, Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 57 est présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 1
Remplacer l'année :
par l'année :
et l'année :
par l'année :
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 12.
Cet amendement procède de la même logique que le précédent.
Même si certains ne veulent pas l’entendre, les conditions d’examen de ce texte ont rendu caducs les délais prévus, qui avaient été fixés dans l’optique d’une entrée en vigueur de la loi en 2010. Il est donc impératif de les prolonger, car plus d’une année sera nécessaire pour liquider les offices d’avoués qui ne deviendront pas des cabinets d’avocats ou pour restructurer les autres, d’autant qu’une procédure de licenciement économique dure au minimum six mois.
Là encore, ce sont des réalités de calendrier, des réalités comptables. Toutefois, je ne doute pas que l’on nous dira une fois de plus qu’il faut passer outre la logique et le bon sens, l’essentiel étant d’obtenir un vote conforme !
On nous répète constamment qu’il faut donner du temps au temps, mais cela ne vaut pas, manifestement, pour la suppression de la profession d’avoué, qui doit intervenir dans la précipitation, comme un couperet qui s’abat.
À cause du Gouvernement, il s’est écoulé une année entre les deux lectures de ce texte. Cela doit nous amener à revoir le calendrier d’application de la réforme.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 57.
Cette réforme a été engagée voilà plus d’une année : les délais prévus sont raisonnables, nous n’allons pas prolonger d’un ou deux ans une situation provisoire. Il convient de statuer sur le sort des avoués et de leurs salariés.
La commission émet par conséquent un avis défavorable sur les quatre amendements.
Par ailleurs, je ne vois pas en quoi un vote conforme serait contraire à la vie parlementaire. Cela signifie qu’un terrain d’entente a été trouvé entre les deux assemblées. C’est l’aboutissement normal de l’examen d’un texte. Votre attitude d’opposition systématique au vote conforme ne tient pas la route ! Pour ma part, je préfère qu’un accord puisse se dégager à ce stade plutôt qu’en commission mixte paritaire.
Le Gouvernement partage pleinement l’avis de la commission et émet lui aussi un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote sur l'amendement n° 11.
Si le vote conforme allait de soi, M. le rapporteur n’aurait pas prévu, à l’article 13, un amendement de repli…
… et il n’aurait pas cru nécessaire d’obtenir un certain nombre d’engagements oraux de la part du Gouvernement. Cela signifie bien qu’il y a un problème !
Nous ne sommes pas par principe opposés au vote conforme. Nous voudrions simplement que la loi soit conforme à la volonté du législateur.
Il est tout de même assez étrange que l’Assemblée nationale et le Sénat se soient accordés sur un texte, cependant que le garde des sceaux s’oppose pour sa part à toute modification ! La finalité d’un vote conforme, c’est que la loi soit la traduction de la volonté du législateur, au-delà du nuage du verbe gouvernemental !
Je voudrais moi aussi revenir sur cette question du vote conforme.
Les avoués et nous-mêmes nous tuons à vous expliquer que le présent texte, rédigé dans la précipitation après quelques modifications majeures, est truffé d’erreurs de forme et comporte de nombreuses incohérences, quoi que l’on puisse en penser sur le fond. Malgré cela, on s’obstine à attendre du Sénat un vote conforme. Cela confine à l’absurdité !
Vous nous reprochez de répéter sans cesse les mêmes choses, mais pour notre part nous avons l’impression de nous adresser à des sourds ! Puisque ce texte comporte des erreurs, il faut les corriger. Autant le faire maintenant, en en profitant pour débattre de nos désaccords sur le fond, même si cela amène le Sénat à ne pas adopter conforme ce projet de loi !
Je rappelle que, sauf sur un point, l’Assemblée nationale s’est ralliée au texte adopté par le Sénat en première lecture. En fait, ce sont nos collègues députés qui ont voté conforme le texte du Sénat ! Les avoués nous ont d’ailleurs vivement remerciés de notre vigilance.
Il subsistait un seul point de divergence : la fiscalité. Exonérer totalement les plus-values pourrait poser problème au regard du principe de l’égalité des citoyens devant l’impôt. Toutefois, nous avons obtenu que la plus-value soit calculée par rapport à la date d’acquisition des parts de la SCP, et non par rapport à la date de création de l’office. Cela est très important, car la différence en termes d’imposition est considérable : selon le mode de calcul retenu, le montant de l’impôt s’établit à 6 000 euros ou à 66 000 euros dans un cas précis que nous avons étudié.
Par ailleurs, s’agissant de la date d’effet, une instruction fiscale sera nécessaire, ce qui n’a rien d’extraordinaire. En effet, l’application du code général des impôts fait couramment l’objet d’instructions fiscales. Tout ne peut pas figurer dans la loi : la partie législative du code général des impôts est déjà incompréhensible, sauf pour quelques éminents spécialistes. Le Gouvernement s’étant engagé à prendre cette instruction fiscale, je ne vois pas pourquoi on reviendrait sur une rédaction qui a été voulue par le Sénat. Je ne parviens pas à comprendre l’attitude de certains d’entre vous, mes chers collègues, qui vont jusqu’à remettre en cause ce que nous avions voté en première lecture.
Ces amendements visent à proroger les délais prévus.
Nous parlons beaucoup des aspects financiers de cette réforme, monsieur le garde des sceaux, mais intéressons-nous aussi au fonctionnement de l’institution judiciaire. Vous ferez peut-être des promesses à cet égard, mais à mon avis elles ne valent rien !
La période de mise en place de la dématérialisation des procédures a été prolongée. Une convention liait la Chancellerie et la Chambre nationale des avoués pour l’informatisation des études d’avoués d’appel. La plupart d’entre elles se sont équipées selon les nouvelles normes, notamment les offices destinés à se transformer en cabinets d’avocats.
Qu’en sera-t-il à l’échéance fixée ? À ce jour, le Conseil national des barreaux ne peut pas assurer que, fût-ce au 1er avril 2012, tous les cabinets d’avocats disposeront des outils informatiques leur permettant d’utiliser la procédure d’appel dématérialisée. D’ailleurs, à l’heure actuelle, seules onze cours d’appel sont en mesure de recevoir ces appels dématérialisés.
Puisqu’il faut croire à tout prix le garde des sceaux, nous voulons bien croire que tout sera rentré dans l’ordre d’ici au 1er avril 2012 et que, à cette date, tous les cabinets d’avocats et toutes les cours d’appel seront équipés. Sinon, il faut prévoir des délais supplémentaires pour l’entrée en vigueur de la loi ou pour l’application des décrets dits Magendie, du nom d’un premier président de cour d’appel qui n’a d’ailleurs pas, à mon avis, laissé un grand souvenir…
L'amendement n'est pas adopté.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 58, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Aucun licenciement ne peut intervenir avant la publication d'un décret fixant les conditions d'application du présent article, en particulier, les modalités du reclassement des salariés.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
La loi de finances pour 2010 prévoyait la création de 190 emplois à temps plein dans la fonction publique, afin de permettre le recrutement, parmi les salariés des études d’avoués, de 380 personnes devant être affectées aux greffes des juridictions.
Plusieurs de ces salariés ayant fait acte de candidature ont reçu une réponse négative, pas toujours formulée en des termes très agréables…
Deux ans plus tard, nous en sommes toujours au même point : de nombreuses promesses d’ouverture de postes dans la fonction publique ont été faites, mais, à ce jour, aucun moyen n’a été accordé aux personnes concernées pour accéder à ces postes. Il faut avoir conscience que nombre d’entre elles ont effectué toute leur carrière dans une profession aujourd’hui supprimée et se retrouvent, à plus de 50 ans, dans une situation des plus difficiles.
Monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, voter conforme ce texte reviendrait à considérer qu’il est parfait. Or il l’est tellement peu que, à gauche comme à droite de cet hémicycle, nous avons été obligés de présenter des amendements pour tenter de l’améliorer, dans la mesure du possible.
L'amendement n° 13, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Un décret fixe les conditions d'application du présent article. Il détermine en particulier les modalités du reclassement des salariés.
La parole est à M. Jacques Mézard.
Cet amendement vise à renvoyer à un décret la fixation des conditions d’application du présent article, en particulier s’agissant des modalités du reclassement des salariés des avoués.
Nous considérons qu’il est impératif que ces derniers bénéficient de garanties renforcées quant à leur avenir professionnel, au vu notamment des conditions déplorables dans lesquelles sont organisées, jusqu’à présent, les passerelles vers les métiers du ministère de la justice. À cet égard, les engagements qu’a pris M. le garde des sceaux ne vaudront que si les méthodes évoluent considérablement par rapport à celles qui ont prévalu cette année : les résultats en matière de reconversion de ces salariés dans des emplois relevant du ministère de la justice ont en effet été catastrophiques. Pour que le dispositif fonctionne, une véritable volonté d’intégrer les salariés d’avoués est nécessaire, sachant que les conditions de leur nouvel emploi seront le plus souvent très nettement moins favorables que celles dont ils bénéficiaient précédemment.
Leur licenciement étant réputé économique, les salariés d’offices d’avoués pourront bénéficier des dispositifs de reclassement de droit commun, comme les conventions de reclassement personnalisé prévues à l’article L.1233-65 du code du travail, ainsi que de l’accompagnement social et territorial des procédures de licenciement.
Par ailleurs, d’autres dispositifs sont prévus, notamment l’intégration par concours aux greffes des tribunaux de grande instance.
Il n’est donc pas nécessaire de prévoir qu’un décret fixe les modalités de reclassement des salariés en question. Ce serait même inapproprié, certaines dispositions relevant uniquement de la loi.
Sur le fond, l’avis est donc défavorable.
Néanmoins, la discussion de ces amendements donnera au Gouvernement l’occasion de nous fournir des éclaircissements sur l’état d’avancement du reclassement des salariés d’avoués et sur les perspectives qui leur sont ouvertes.
J’ai d’ailleurs une suggestion à vous faire à propos des concours, monsieur le garde des sceaux : s’il n’est pas possible d’organiser des concours spéciaux, on peut du moins prévoir des aménagements, par exemple en dispensant les candidats anciens salariés d’avoués des épreuves écrites, au titre de leur expérience professionnelle. Cette solution permettrait de faciliter leur intégration dans les greffes des juridictions.
Je ne crois pas qu’un décret puisse régler les questions évoquées par les auteurs de ces amendements, pas plus d’ailleurs que celle que vous soulevez, monsieur le rapporteur.
Si vous voulez modifier l’organisation des concours, il faut déposer une proposition de loi à cette fin !
Certes, mais, comme je l’ai dit précédemment, c’est la loi qui crée les postes. Ainsi, c’est au titre du budget de 2011 que nous pourrons recruter 19 agents contractuels de catégorie A et 223 agents de catégorie C sur dossier, ainsi que 497 greffiers sur concours. Dans ce concours, une épreuve portera sur la valorisation de l’expérience professionnelle. De ce point de vue, les employés des cabinets d’avoués se trouveront dans une situation favorable.
Quant aux modalités de reclassement des salariés, comme vous l’avez très bien dit, monsieur le rapporteur, elles relèvent des dispositions existantes. Une commission tripartite, composée des organisations représentatives des employeurs, des organisations représentatives des salariés et de représentants de l’État, a été installée conjointement par le ministère de la justice et des libertés et par le ministère de l’économie, des finances et de l’industrie. Cette commission doit aboutir à la signature simultanée de deux accords, l’un entre employeurs et salariés, définissant les mesures d’accompagnement applicables aux licenciements intervenus par l’effet de la réforme, l’autre entre l’État et les avoués employeurs, visant à prévoir les modalités du financement par l’État.
Sur cette base, les salariés des offices d’avoués pourront bénéficier d’une convention de reclassement personnalisé, qui comprendra des aides à la mobilité, des indemnités de perte de salaire et un suivi personnalisé.
En conclusion, j’exprime un avis défavorable sur ces deux amendements.
La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote sur l’amendement n° 58.
Je crois, monsieur le garde des sceaux, que vous ignorez comment les choses se passent pour les collaborateurs d’avoués pouvant prétendre à des emplois de catégorie C.
Par exemple, après avoir convoqué pour entretien à Douai des personnes résidant dans le ressort des cours d’appel de Reims, de Caen, de Rouen ou d’Amiens, on leur a proposé des postes situés à plusieurs centaines de kilomètres de chez elles et assortis d’un salaire moitié moindre de celui qu’elles touchaient précédemment. Bien entendu, de telles propositions ont été refusées dans la plupart des cas et, à ce jour, seulement onze collaborateurs d’avoués ont été intégrés ! Je doute qu’il y en ait beaucoup plus l’année prochaine dans ces conditions, même si Mme Alliot-Marie, dans toute sa splendeur et sa raideur, nous a annoncé que quelque 300 postes réservés seraient inscrits au budget !
Monsieur le ministre, vous nous avez gratifié d’une lecture que j’ai déjà faite tout à l’heure à la tribune. Ces propos sont certes bien écrits, mais n’emportent pas d’engagement précis.
Par ailleurs, M. le rapporteur a suggéré que l’on modifie les modalités des concours, indiquant que cela relève du domaine réglementaire. M. le garde des sceaux lui a répondu qu’il devait présenter une proposition de loi à cette fin.
M. le ministre a raison dans cette affaire. Quand bien même le voudrait-on, il n’est pas possible de changer en quelques semaines les règles des examens et concours. On s’exposerait d’ailleurs inévitablement à des recours.
Cet échange témoigne de l’impréparation de la réforme. Nous regrettons que la réflexion sur les garanties à apporter aux salariés des offices d’avoués en matière de reclassement n’ait pas été menée à son terme.
Monsieur le garde des sceaux, j’ai sous les yeux un document que vous nous avez adressé.
Cela ne m’étonne pas : je vous donne toutes les informations !
J’en prends connaissance avec le plus grand intérêt ! Ce document s’intitule « Réforme de la représentation devant les cours d’appel ».
Non, il s’agit d’apporter des explications aux sénateurs, au cas où ils n’auraient pas bien compris la réforme et le texte qui leur est soumis.
Au dernier paragraphe, il est indiqué qu’ « un accompagnement personnalisé sera mis en place dans chaque cour d’appel dès le vote de la réforme ».
Je souhaiterais savoir en quoi consiste cet accompagnement personnalisé. Qui va l’assurer ? Dans quelles conditions ? Des postes d’accompagnateur seront-ils créés ou cette mission sera-t-elle prise en charge par le premier président de chaque cour d’appel ?
En outre, ce document fait la démonstration, monsieur le ministre, que la parole de l’État peut parfois être mise en doute à juste titre, puisque vous indiquez qu’ « une convention a été signée à cet effet entre l’État, la Chambre nationale des avoués et les représentants des salariés ». Or jamais une telle convention n’a été signée ! Vous avez donc adressé à chacun d’entre nous un document comportant une information erronée – pour employer un terme gentil, comme à mon habitude !
Enfin, cette convention comprendrait des aides à la mobilité, des aides à la formation, des allocations compensant une éventuelle perte de revenus, ainsi que, cerise sur le gâteau, des aides à la création d’entreprise proposées par le ministère de la justice en lien avec la Caisse des dépôts et consignations…
M. Jean-Pierre Michel s’esclaffe.
Je trouve cela absolument magnifique ! Je souhaiterais savoir quelles aides spécifiques sont prévues pour permettre aux salariés des offices d’avoués de créer des entreprises, car je pense qu’ils seront nombreux à être intéressés par une telle offre !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 14 est adopté.
(Maintien de la suppression)
L'amendement n° 37, présenté par MM. Anziani et Michel, Mme Klès, MM. Sueur, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un rapport sur le reclassement des salariés des offices d'avoués est remis au Parlement dans les plus brefs délais. Ce rapport doit notamment étudier la possibilité, pour les salariés en fonction à la date de publication de la présente loi, privés de leur emploi et remplissant les conditions générales d'accès à la fonction publique, d'intégrer le corps des fonctionnaires des services judiciaires ou d'être recrutés comme agents contractuels du ministère de la justice, dans un délai maximum de quatre ans à compter de la date d'entrée en vigueur de la même loi.
La parole est à Mme Virginie Klès.
Cet amendement vise à prévoir la remise d’un rapport sur la reconversion des salariés des offices d’avoués.
J’entends déjà vos objections, chers collègues de la majorité : encore un rapport ! Oui, encore un, mais compte tenu du débat que nous venons d’avoir, je pense que l’on ne peut pas mettre en doute l’utilité de celui-ci. J’ai même envie de dire, eu égard aux questions de M. Mézard restées sans réponse, qu’il est absolument nécessaire.
Peut-être ces réponses figureront-elles dans le rapport que nous demandons ici, monsieur le ministre… Vous aurez le temps d’y réfléchir ! Vous pourriez ainsi nous donner des indications précises sur ces aides personnalisées, qui seront mises en place dès demain puisque, si je ne m’abuse, le texte sera voté conforme ce soir et le calendrier pourra être respecté.
Ce rapport me semble également indispensable eu égard aux témoignages de salariés d’avoués s’étant portés candidats aux postes qui leur étaient prétendument réservés que nous avons recueillis.
Effectivement, on leur a proposé des postes à plusieurs centaines de kilomètres de chez eux, avec un salaire – je crois qu’il faut le répéter pour que tout le monde l’entende bien – très inférieur à celui qu’ils perçoivent aujourd’hui. En outre, on leur a laissé un délai de deux jours pour accepter ou rejeter définitivement la proposition.
Cela fait tout de même peu de temps pour prendre une décision qui remodèlera une vie entière – professionnelle, familiale, amicale – du jour au lendemain. Beaucoup de choses leur tombent sur la tête en même temps !
Enfin, nous avons évoqué tout à l’heure les difficultés d’indemnisation que vont rencontrer les avoués, notamment les jeunes avoués, ceux qui auraient pu conserver des salariés ou recréer de l’emploi. Les cabinets d’avocats, nous a-t-on dit, auront bien du mal à recruter les anciens salariés des offices d’avoués, et nous avons émis beaucoup de doutes sur les engagements pris par le garde des sceaux.
Cette situation nous semble donc vraiment nécessiter l’élaboration d’un rapport, qui nous permettra de distinguer, parmi les engagements pris aujourd’hui, ceux qui seront suivis d’effets et ceux qui ne le seront pas.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Je voudrais d’abord apporter une précision en réponse aux propos tenus tout à l’heure par M. Sueur : si la décision d’organiser un concours relève du domaine législatif, le contenu du concours est bien du domaine réglementaire. En outre, l’aménagement que j’évoquais a déjà été pratiqué pour d’autres concours. Cela étant, une telle modification de l’organisation du concours devra être annoncée au moins un an à l’avance.
Cette parenthèse étant refermée, j’en viens à l’amendement présenté par Mme Klès.
Demander la remise de rapports est une sorte de manie parlementaire. Or, à mon avis, la révision constitutionnelle de 2008 devrait nous amener à nous dispenser de ce genre de rapports. Il revient en effet au Parlement lui-même d’organiser le contrôle et de mettre en demeure le Gouvernement de lui présenter toutes les explications utiles. Nous avons d’ailleurs débattu hier soir des examens sur place et sur pièces conduits par les commissions d’enquête et autres.
Si nous le souhaitons, nous pourrons donc parfaitement décider de confier à certains d’entre nous la mission d’évaluer l’application des dispositions du présent texte, s’agissant plus particulièrement du reclassement des salariés des offices d’avoués. Nous n’avons pas besoin du Gouvernement pour procéder à un tel contrôle. Celui-ci pourrait d’ailleurs faire traîner les choses ou nous livrer une vision tronquée de la situation.
Assurer le contrôle de l’application des lois que nous avons adoptées fait désormais partie de nos missions.
Je partage tout à fait l’avis de M. le rapporteur sur les conséquences de la révision constitutionnelle.
Dès lors qu’une partie de l’ordre du jour du Parlement est dévolue à ses missions de contrôle, chaque groupe disposant, aux termes de la Constitution et du règlement de l’assemblée, d’un créneau spécifique, vous avez toute latitude, mesdames, messieurs les sénateurs, pour organiser le contrôle de l’application du présent texte. Quant à moi, je me tiens à votre disposition.
Monsieur le rapporteur, j’accepte volontiers votre invitation à créer une commission chargée d’étudier le reclassement des salariés des études d’avoués.
Cependant, je suis navrée du manque de confiance que vous avez affiché envers les rapports « tronqués » du Gouvernement : je n’arrive pas à y croire !
M. Jean-Pierre Michel applaudit.
L'amendement n'est pas adopté.
(Non modifié)
Les demandes d’indemnisation présentées en application des articles 14 et 15 sont formées avant l’expiration d’un délai de deux ans à compter de l’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi.
Elles sont portées devant une commission nationale présidée par un magistrat hors hiérarchie de l’ordre judiciaire et composée d’un représentant du garde des sceaux, ministre de la justice, d’un représentant du ministre chargé du budget et de deux représentants des avoués près les cours d’appel.
Les indemnités mentionnées à l’article 14 et les sommes mentionnées à l’article 15 sont fixées par la commission sur production d’un état liquidatif établi par l’employeur et des pièces justificatives. Elle transmet sa décision au fonds d’indemnisation, qui procède au paiement.
Le président de la commission peut statuer seul sur les demandes d’indemnisation présentées en application des articles 14 et 15.
Les indemnités résultant de l’application de l’article 13 sont versées dans le mois suivant la décision du juge de l’expropriation. Celles résultant de l’application de l’article 14 sont versées dans les trois mois du dépôt de la demande. Les remboursements résultant de l’application de l’article 15 sont versés dans les trois mois du dépôt de la demande.
Les décisions prises par la commission, ou par son président statuant seul, peuvent faire l’objet d’un recours de pleine juridiction devant le Conseil d’État.
L'amendement n° 14, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
hors hiérarchie de l'ordre judiciaire
par les mots :
désigné par le premier président de la Cour des comptes
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. le garde des sceaux s’exclame.
Je m’efforce d’être constructif, monsieur le garde des sceaux ! Il reste bien des corrections à apporter à ce projet de loi rédigé à la hâte.
Cet amendement a pour objet de placer à la présidence de la commission nationale chargée de l’indemnisation un magistrat issu de la Cour des comptes. M. Détraigne devrait être sensible à cette proposition et m’apporter son soutien. §
Il paraît en effet cohérent, eu égard à sa mission générale de contrôle de l’utilisation des deniers publics, que la Cour des comptes soit représentée au sein de cette commission par un magistrat désigné par son Premier président.
L'amendement n° 15, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Dans un délai de trois mois suivant la promulgation de la présente loi, la commission prévue à l’article 16 notifie au titulaire de l’office et aux avoués associés le montant des offres d’indemnisation. En cas d’acceptation des offres par leurs bénéficiaires, les indemnités correspondantes leur sont versées au plus tard dans un délai d’un mois à compter de la cessation d’activité.
La parole est à M. Jacques Mézard.
Cet amendement vise lui aussi à améliorer la rédaction du projet de loi. Il complète ceux que nous avions déposés au cinquième alinéa de l’article 13. L’objet est similaire : fixer le point de départ du processus d’indemnisation dès la promulgation de la présente loi en tenant compte de l’ensemble des préjudices qui affectent les avoués et prévoir le paiement de l’indemnisation dans les trois mois suivant la cessation de l’activité. Il semble nécessaire de répéter les choses, car nous avons beaucoup de difficultés à nous faire entendre !
J’avoue avoir du mal à comprendre l’objet de l’amendement n° 14, car la Cour des comptes n’a pas à connaître des procédures d’expropriation, contrairement au juge de l’ordre judiciaire. Rien ne justifie de remettre en cause les compétences de ce dernier.
Je souhaite donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Sur l’amendement n° 15, la commission émet un avis identique à celui qu’elle avait donné à l’amendement n° 8, à l’article 13. Cependant, il me semble que cet amendement n’a plus d’objet. Toutefois, si la présidence devait estimer que tel n’est pas le cas, la commission y serait défavorable.
Je partage l’avis de M. le rapporteur sur ces deux amendements.
En ce qui concerne l’amendement n° 14, il me paraît souhaitable que la présidence de la commission d’indemnisation soit confiée à un magistrat de l’ordre judiciaire. Cela est d’ailleurs la tradition dans notre droit. Les magistrats de la Cour des comptes sont certes extrêmement compétents, mais peut-être pas sur de tels dossiers.
Monsieur le sénateur, je vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement, car sinon je serais au regret de devoir émettre un avis défavorable.
Quant à l’amendement n° 15, j’y serai défavorable s’il n’est pas tombé.
Pour faire plaisir à M. le garde des sceaux, dans un souci de conciliation, je retire l’amendement n° 14.
En revanche, je maintiens l’amendement n° 15, qui n’est pas tombé. Nous en avons assez de choir ! §
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 16 est adopté.
(Non modifié)
Tout avoué près les cours d’appel peut demander dès la publication de la présente loi et au plus tard dans les douze mois suivant cette publication :
– un acompte égal à 50 % du montant de la recette nette réalisée telle qu’elle résulte de la dernière déclaration fiscale connue à la date de la publication de la présente loi ;
– le remboursement au prêteur, dans un délai de trois mois, du capital restant dû au titre des prêts d’acquisition de l’office ou des parts de la société d’exercice à la date à laquelle ce remboursement prendra effet.
Lorsque l’avoué demande ce remboursement anticipé, le montant de l’acompte est fixé après déduction du montant du capital restant dû.
La décision accordant l’acompte et fixant son montant est prise par le président de la commission prévue à l’article 16.
L’acompte est versé dans les trois mois suivant le dépôt de la demande.
Les demandes de remboursement anticipé sont transmises au fonds institué par l’article 19.
Lorsque l’avoué a bénéficié du remboursement anticipé du capital restant dû au titre des prêts d’acquisition de l’office ou de parts de la société d’exercice, le montant de ce capital est déduit du montant de l’indemnité due en application de l’article 13.
Lorsque l’avoué a bénéficié d’un acompte, celui-ci est imputé sur le montant de cette indemnité.
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° 6 rectifié est présenté par MM. Fouché et Gournac, Mme Bruguière, MM. Doublet, Laurent, Bécot, Alduy, Martin, Houel, B. Fournier et Doligé, Mme Mélot et MM. Juilhard, Beaumont, Couderc, Vial, Ferrand et Demuynck.
L'amendement n° 39 est présenté par MM. Anziani et Michel, Mme Klès, MM. Sueur, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 51 rectifié bis est présenté par MM. Détraigne et Dubois, Mme Gourault, MM. Maurey, Amoudry et Deneux, Mmes Férat, N. Goulet et Morin-Desailly et M. Merceron.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Alain Fouché, pour présenter l’amendement n° 6 rectifié.
L’article 17 prévoit que tout avoué pourra demander un acompte égal à 50 % de la dernière recette nette, ainsi que le remboursement du capital restant dû au titre des prêts d'acquisition de l'office ou des parts de la société.
Cependant, l'alinéa 4 de cet article dispose que ce remboursement anticipé des dettes que l’avoué a contractées pour acheter son office se fera par déduction au montant de l'acompte. Autrement dit, l'acompte versé à chaque avoué sera amputé ou annulé, à concurrence du capital restant dû.
Ce texte va donc à l’encontre de la volonté de permettre aux avoués, par le biais d'un acompte, de supporter la procédure d'expropriation, qui comporte des lenteurs. De plus, cette disposition est caractéristique d'une rupture d'égalité, car les avoués endettés, notamment les plus jeunes, qui venaient d'acheter un office, ne pourront bénéficier en totalité du droit à percevoir cet acompte prévu pour tous les avoués.
L'alinéa 4 de l’article 17 institue deux types d’acompte, l’un pour les avoués non endettés, qui sont en général bien établis et plutôt âgés, l’autre pour les avoués endettés, qui sont souvent les plus jeunes.
Pourtant, tous devront faire face aux mêmes charges. Dans ces conditions, il nous semblerait raisonnable de supprimer cette distinction, afin de respecter le principe d’égalité devant la loi.
La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter l’amendement n° 51 rectifié bis.
Lors de la réunion de la commission des lois de l’Assemblée nationale du 5 octobre 2010, Mme Alliot-Marie, alors garde des sceaux, avait indiqué que, « pour parer au risque de lenteur que comporte cette procédure, nous avons décidé de verser, en attendant la décision du juge de l’expropriation, un acompte égal à 50 % du montant de la dernière recette nette connue. Les avoués endettés pourraient également, si vous en êtes d’accord, obtenir le remboursement aux prêteurs du capital restant dû et la prise en charge des pénalités de remboursement anticipé. »
Monsieur le garde des sceaux, le présent amendement vise donc à prendre en compte cette proposition de votre prédécesseur.
Ces amendements tendent à supprimer la déduction du remboursement anticipé du capital restant dû au titre des prêts à l’acquisition de l’office ou des parts de la société d’exercice.
Aux termes du projet de loi, ce remboursement viendra en déduction de l’acompte égal à 50 % du montant de la dernière recette nette.
L’adoption de ces trois amendements pourrait avoir un effet pervers : au moment de l’attribution de l’indemnisation finale, les avoués risqueraient d’avoir à rembourser des sommes, compte tenu de ce qu’ils auront touché au titre de l’acompte. Il serait donc très dangereux de suivre la proposition des auteurs de ces amendements, même si je comprends très bien leur point de vue.
Le dispositif que nous avons adopté en première lecture paraît équilibré. N’oublions pas que les avoués poursuivront leur activité tout au long de l’année 2011.
En conclusion, je demande le retrait de ces trois amendements identiques.
Comme vient de l’indiquer avec raison M. le rapporteur, l’adoption de ces amendements pourrait conduire certains avoués à devoir rembourser une partie des sommes qu’ils auraient perçues à titre d’acompte.
Pendant le délai de présentation des demandes d’acompte et de remboursement du capital, l’avoué ne sera pas privé de revenu. Il poursuivra son activité et il continuera à rembourser normalement son prêt.
Par ailleurs, les éventuels coûts de rupture des contrats en cours avec des fournisseurs ou un bailleur interviendront à la fin de la période de préavis.
En outre, si l’on autorise le cumul du versement de l’acompte égal à 50 % du montant de la dernière recette nette réalisée et du remboursement du capital restant dû, on risque, comme vient de le souligner M. le rapporteur, dans certaines hypothèses, de dépasser le montant total de l’indemnité qui pourra être allouée. L’avoué serait alors amené à devoir rembourser le surplus.
Je ne pense pas que cela corresponde à la volonté des auteurs des amendements, mais une telle situation pourrait se présenter. C’est la raison pour laquelle le dispositif prôné par la commission me semble nettement préférable. Je sollicite donc le retrait de ces trois amendements identiques.
L'amendement n° 6 rectifié est retiré.
Monsieur Détraigne, l'amendement n° 51 rectifié bis est-il maintenu ?
Les explications qui nous ont été données me laissent quelque peu sceptique. En effet, dès lors que la procédure de dédommagement aura été engagée, je ne suis pas sûr que les avoués continueront à travailler comme auparavant.
Cela étant, bien que je ne sois pas complètement convaincu par les explications de M. le rapporteur et de M. le garde des sceaux – mais peut-être les ai-je mal comprises ! –, je vais moi aussi retirer mon amendement.
L'amendement n° 51 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Alain Anziani, pour explication de vote sur l’amendement n° 39.
Pour ma part, je crois avoir tout compris ! Après avoir décidé de supprimer la profession, vous voulez sauver les avoués malgré eux ! Voilà qui est plutôt pervers ! Ces professionnels responsables, qui gèrent leur office depuis des années, ne seraient donc pas capables de préparer eux-mêmes leur avenir ? C’est la cerise sur le gâteau : après leur avoir enfoncé la tête sous l’eau, vous mettez en doute leur aptitude à organiser la cessation de leur activité. Pourquoi ne pas les placer sous tutelle, tant que vous y êtes ?
Laissons aux avoués la responsabilité de gérer leur avenir comme ils l’entendent.
Ce débat me désole. Que des sénateurs décident de retirer un amendement auquel ils étaient censés croire après avoir avoué ne pas avoir tout compris aux explications de la commission ou du Gouvernement ne donne pas une belle image de nos travaux ! C’est la troisième ou la quatrième fois aujourd’hui que certains de nos collègues accordent le bénéfice du doute au Gouvernement, au détriment des victimes !
Je rappelle que la commission défend le texte que le Sénat avait adopté en première lecture. Cela étant, on peut choisir de se contredire en permanence !
La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote sur l’amendement n° 39.
Nous n’avons pas de leçon à recevoir ! Nous prenons nos décisions librement, selon les réponses qui nous sont apportées.
Je n’accepte pas les critiques qui nous sont adressées ! Pour ma part, je pense avoir démontré en de nombreuses circonstances ma liberté de vote. Je me détermine en fonction des éléments d’appréciation qui me sont livrés.
Certaines réflexions me surprennent quelque peu. Dès lors qu’un sénateur décide de retirer un amendement, ce serait un « dégonflé ». Ça commence à bien faire !
Je ne suis à la botte de personne ! Je confirme que je n’ai pas été convaincu par l’argumentation qui m’a été donnée, mais j’ai un doute sur la solidité de l’amendement que j’ai déposé ! C’est tout !
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 17 est présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° 40 est présenté par MM. Anziani et Michel, Mme Klès, MM. Sueur, Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 5
Supprimer les mots :
le président de
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 17.
Nous souhaitons que le montant de l’acompte versé aux avoués soit fixé par l’ensemble de la commission nationale, et non par son seul président. Il s’agit, au travers de cette collégialité, de garantir que le montant de cet acompte soit le plus juste possible.
Nous ne comprenons pas pourquoi le soin de fixer le montant de l’acompte serait confié au seul président de la commission nationale. Il nous semblerait préférable que ce soit une décision collégiale.
Je suis obligé d’émettre un avis défavorable sur ces amendements. C’est la loi qui fixe le montant de l’acompte. Le président de la commission est tenu de s’y conformer.
Je ne comprends pas cette attitude consistant à remettre systématiquement en cause tout ce qui a été décidé lors de la première lecture. Cela n’a aucun sens ! Le dernier désaccord que nous avions avec l’Assemblée nationale a été réglé ; toutes les dispositions dont nous débattons ont déjà été adoptées en première lecture, à l’unanimité ou presque !
Certaines revendications vont à l’encontre des demandes mêmes des intéressés, que nous avons fait en sorte de toutes prendre en compte. On peut toujours vouloir en rajouter, mais alors cela ne s’arrêtera jamais !
M. le rapporteur vient de nous dire pour la énième fois que le débat doit cesser.
Nous ne faisons qu’exercer notre droit d’amendement. Nous jouons notre rôle de parlementaires !
Que nos positions ne vous conviennent pas, nous pouvons le comprendre. Mais vous devriez admettre, de votre côté, que nous formulions des propositions.
J’ajoute que le vote n’a pas été unanime lors de la première lecture. Permettez-nous d’essayer de convaincre nos collègues du bien-fondé de notre point de vue !
Je remarque d’ailleurs, monsieur le rapporteur, que vous-même avez conditionné votre vote conforme à l’apport de certaines assurances par le Gouvernement. Vous aussi, vous posez des conditions, mais les promesses du Gouvernement vous suffisent. Ce n’est pas notre cas !
Toutes les opinions sont respectables, et je ne vois pas pourquoi on nous fait reproche de déposer de tels amendements. En première lecture, le Sénat avait par exemple voté l’exonération des plus-values, or cette disposition n’a pas été maintenue. Vous auriez donc le droit de remettre en cause certaines choses, tandis que nous n’aurions le droit, si j’ai bien compris, que de nous taire. C’est un peu excessif…
Un désaccord existait certes entre l’Assemblée nationale et le Sénat concernant le régime fiscal des plus-values, mais l’alinéa relatif à la fixation de l’acompte a été adopté en première lecture dans les mêmes termes par les deux assemblées. Franchement, il faut savoir s’arrêter ! Si vous continuez ainsi, vous justifierez l’usage de la procédure accélérée !
C’est la loi qui fixe le montant de l’acompte, à savoir la moitié de la dernière recette nette réalisée. Je ne crois pas nécessaire de réunir l’ensemble de la commission pour procéder à une telle division par deux…
Tout le monde pourra contrôler si le résultat de l’opération est juste. Dans cette affaire, le principe est d’aller le plus vite possible pour répondre aux demandes d’acompte.
Au nom de cette exigence de rapidité, je demande à MM. Mézard et Anziani de retirer leurs amendements ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° 18 est présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° 41 est présenté par MM. Anziani et Michel, Mme Klès, MM. Sueur, Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 65 est présenté par M. Gélard, au nom de la commission.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
I. - Alinéa 9
Remplacer les mots :
cette indemnité
par les mots :
l'indemnité relative à la perte du droit de présentation
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
... - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 18.
Nous considérons qu’il est essentiel de préciser sur quel poste d’indemnisation l’acompte doit s’imputer, au regard des importantes conséquences fiscales de la ventilation de l’indemnisation.
Dans la mesure où l’indemnisation visée n’était, dans les premières versions du texte, que celle de la perte du droit de présentation, cet acompte doit naturellement s’imputer sur l’indemnisation de la perte du droit de présentation et suivre le régime fiscal de ce poste d’indemnisation.
Cette clarification est nécessaire pour répondre à l’attente des services fiscaux.
En matière de fiscalité, monsieur le garde des sceaux, j’ai bien relu le document que vous nous avez fait parvenir tout à l’heure. Ce n’est pas très clair : outre les plus-values, les moins-values qui seront subies postérieurement à l’indemnisation posent aussi problème, car selon la règle fiscale, pour qu’une moins-value puisse être imputée sur une plus-value, il faut que les deux événements interviennent au cours du même exercice fiscal.
Je considère que la possibilité de faire remonter la moins-value engendrée par l’annulation des parts, elle-même liée à la dissolution de la société civile professionnelle, sur la plus-value liée à l’indemnisation, quel que soit l’exercice fiscal, doit être affirmée sans la moindre ambiguïté.
Cette question est très importante. Nous proposons que l’acompte soit imputé sur l’indemnisation de la perte du droit de présentation. C’est un point essentiel, puisque le régime fiscal varie selon le poste d’indemnisation.
Si le Gouvernement veut vraiment rassurer les avoués, il doit préciser nettement quel sera le régime fiscal de cette imputation.
Je retire l’amendement n° 65, M. le garde des sceaux ayant parfaitement répondu à la question du statut fiscal de l’indemnité préliminaire.
Par conséquent, je sollicite le retrait des amendements n° 18 et 41, qui sont également satisfaits.
Dois-je désespérer ou voir dans nos échanges avec MM. Mézard et Anziani la vérification de l’adage selon lequel il n’est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre ?...
Depuis le début de la séance, j’ai répondu au moins à huit reprises à cette question, mais je le ferai bien volontiers une neuvième fois pour complaire à MM. Mézard et Anziani.
Oui, l’acompte a été créé comme étant une partie de l’indemnité de perte du droit de présentation. Par conséquent, il sera soumis au même régime fiscal.
Par ailleurs, lorsque les événements qui sont les faits générateurs de l’impôt n’ont pas lieu la même année, on calculera la plus-value et l’imposition en tenant compte de ce décalage d’une année.
Je finis par bégayer, à force de me répéter, …
… mais je demande à MM. Mézard et Anziani de bien vouloir retirer leurs amendements.
Monsieur le garde des sceaux, vous ne bégayez pas, mais vous ne dites pas tout ! Vous confirmez donc qu’il sera possible de faire remonter une moins-value sur une plus-value, quel que soit l’exercice fiscal au cours duquel se produira le fait générateur de la moins-value. Est-ce bien ce que vous avez dit, oui ou non ?
Je vais donc, pour la dixième fois, me répéter, en vous donnant lecture littérale d’une note rédigée par les services de Bercy. Cela montrera bien que je représente ici l’ensemble du Gouvernement !
« Si jamais le versement de l’indemnité et la dissolution de la SCP n’avaient pas lieu la même année, des dispositions spécifiques seront prises afin de faire en sorte que la plus-value soit calculée par rapport à la valeur d’acquisition des titres et tienne compte d’éventuelles moins-values. »
Une instruction finale précisera ces éléments, comme je l’ai déjà dit neuf fois depuis le début de cette séance !
C’est à votre écoute, monsieur le garde des sceaux, que je deviens sourd…
Je maintiens mon amendement.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'article 17 est adopté.
(Non modifié)
I. –
Non modifié
II. – Le fonds d’indemnisation est chargé du paiement des sommes dues aux avoués près les cours d’appel et aux chambres, en application des articles 13, 15 et 17, ainsi que des sommes dues à leurs salariés en application de l’article 14.
Le fonds d’indemnisation procède au remboursement au prêteur du capital restant dû au titre des prêts d’acquisition de l’office ou de parts de la société d’exercice à la date où il intervient. Il prend en charge les éventuelles indemnités liées à ce remboursement anticipé.
Les paiements interviennent en exécution des décisions de la commission prévue à l’article 16 ou de son président statuant seul.
III. –
Non modifié
–
Adopté.
L'amendement n° 19, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La Chambre nationale des avoués est maintenue pour une durée de deux ans après la date fixée par les dispositions de l’article 34 de la présente loi, à l’effet notamment de traiter des questions relatives à la défense des intérêts moraux et professionnels des anciens avoués près les cours d’appel, au reclassement du personnel des offices et des structures professionnelles, comme des anciens avoués eux-mêmes, à la gestion et à la liquidation de son patrimoine, et d’une façon générale à l’ensemble des conséquences résultant de l’application de la présente loi.
La parole est à M. Jacques Mézard.
Conformément aux dispositions des articles 14, 15 et 16, cet amendement vise à préciser que la Chambre nationale des avoués près les cours d’appel est maintenue pour une durée de deux ans après la date fixée par les dispositions de l’article 34.
Il s’agit notamment de traiter des questions relatives à la défense des intérêts moraux et professionnels des anciens avoués près les cours d’appel, au reclassement du personnel des offices et des structures professionnelles comme des anciens avoués eux-mêmes, à la gestion et à la liquidation de leur patrimoine et, d’une façon générale, à l'ensemble des conséquences qui résulteront pour les anciens avoués et leurs personnels de l’application du présent projet de loi.
Cet amendement vise, lui aussi, à améliorer le texte qui nous est soumis.
Madame la présidente, je suis obligé de le dire : la disposition que vise à introduire cet amendement n’est pas une amélioration. Le texte, dans son article 29, a prévu que la Chambre nationale des avoués allait rester en place jusqu’au 31 décembre 2014. Par conséquent, cet amendement n’a aucune raison d’être.
Cet amendement est satisfait par le texte.
(Non modifié)
Un décret fixe :
– les modalités de désignation des membres de la commission prévue à l’article 16 et de leurs suppléants, et les modalités de son fonctionnement ;
– les modalités de désignation des membres du conseil de gestion du fonds institué par l’article 19 et les modalités de son fonctionnement ;
– la liste des justificatifs à fournir à l’appui des demandes présentées en application des articles 13, 14, 15 et 17.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 42, présenté par MM. Anziani et Michel, Mme Klès, MM. Sueur, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
- le montant du budget de la chambre nationale des avoués dans le cadre de ses missions fixées par la présente loi.
La parole est à M. Alain Anziani.
Le texte prévoit des dispositions pour le moins étranges : d’un côté, il prévoit le maintien de la Chambre nationale des avoués jusqu’au 31 décembre 2014, cela vient de nous être rappelé, de l’autre, il ne prévoit pas son financement. Comment la Chambre nationale des avoués va-t-elle donc faire ? Aujourd'hui, elle est financée par les cotisations des avoués. Dès lors qu’il n’y aura plus d’avoués, il n’y aura plus de cotisations, donc plus de financement !
Cette question a déjà été posée. Votre prédécesseur, monsieur le garde des sceaux, avait répondu que la Chambre nationale des avoués avait un patrimoine, qu’elle pourrait valoriser d’une façon ou d’une autre, ce qui lui permettrait de fonctionner.
Or la Chambre nationale n’a pas de patrimoine ! Lorsque nous nous sommes inquiétés de cet aspect précis, il nous a été confirmé qu’elle n’est pas propriétaire, par exemple, de son immeuble et qu’elle n’a pas non plus d’autre valeur mobilière. Elle n’a donc pas les moyens d’assurer sa subsistance.
Je fais observer qu’une mission de service public va être confiée à la Chambre nationale des avoués et qu’il est donc bien normal que la collectivité publique assure son financement.
L'amendement n° 20, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
- le montant du budget de la Chambre nationale des avoués dans le cadre des missions fixées en application des articles 14, 15, 16, 19 et 29.
La parole est à M. Jacques Mézard.
C’est tout simple, madame la présidente : le montant du budget de la Chambre nationale des avoués ne peut pas être fixé par décret.
La parole est à M. Alain Anziani, pour explication de vote sur l'amendement n° 42.
Nous n’avons pas obtenu de réponse à la question que nous avons posée. Nous aurions aimé que M. le garde des sceaux reconnaisse au moins que nous faisons face à un réel problème, que nous sommes dans une impasse et qu’il nous propose une solution.
Peut-être le budget de la Chambre nationale des avoués ne peut-il être fixé par décret, en tout cas, cette question relève du pouvoir du ministre de la justice.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 20 est adopté.
Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 28 rectifié, présenté par MM. Anziani et Michel, Mme Klès, MM. Sueur, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 20, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Douze mois avant la date de fin de la période transitoire instaurée par l'article 34 de la présente loi, il est créé une commission spéciale transitoire chargée d'évaluer la mise en œuvre des dispositions des chapitres Ier et II de la présente loi et particulièrement de la spécialisation en procédure d'appel instituée au bénéfice des avoués et de leurs collaborateurs justifiant de la réussite à l'examen d'aptitude à la profession d'avoué. Elle examine également les conséquences de la présente loi sur le fonctionnement des cours d'appel.
La commission transmet son rapport d'évaluation au Parlement qui peut proposer des modifications législatives.
La commission comprend :
- un représentant de la Chancellerie,
- deux premiers présidents de cours d'appel,
- deux représentants de la Chambre nationale des avoués,
- un représentant du Conseil national des barreaux,
- un représentant de la Conférence des bâtonniers,
- un représentant de la Cour des Comptes,
- deux députés membres de la Commission des lois de l'Assemblée nationale,
- deux sénateurs membres de la Commission des lois du Sénat.
La parole est à Mme Virginie Klès.
Cet amendement vise à prévoir la création d’une commission spéciale transitoire – « Encore une ! » va-t-on me dire, après m’avoir déjà objecté « Encore un rapport ! » tout à l’heure –, le temps d’évaluer l’ensemble des conséquences de cette réforme.
Nous ne cessons de vous répéter depuis le début de nos débats que ce texte comporte des erreurs, qu’il est insuffisamment préparé et précis et que des ajustements seront donc nécessaires. Un réel suivi s’impose pour les 2 000 personnes dont on supprime aujourd'hui la profession.
Le rapport de cette commission, monsieur le rapporteur, ne serait pas juste une version tronquée de celui du Gouvernement, comme vous aviez l’air d’en avoir peur tout à l’heure. La composition de cette commission permettrait d’éviter cet éventuel écueil.
Le rôle de cette commission transitoire serait non seulement de nous rendre compte de ce qui se passe réellement, mais aussi de proposer les ajustements nécessaires afin que la justice et le droit à l’appel restent un service public accessible à toutes et à tous en France.
Il s’agit d’une sage proposition. Nous ne proposons pas de créer une commission pour le plaisir d’en créer une.
Une telle commission est nécessaire, car il reste encore du travail à faire sur ce texte. Vous souhaitez qu’il soit adopté conforme, monsieur le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, pour aller vite. Admettez au moins qu’on puisse y réfléchir a posteriori, même si le texte est adopté conforme, même si la loi est promulguée demain, afin de pouvoir rectifier les erreurs.
L'amendement n° 1 rectifié, présenté par M. Vial, est ainsi libellé :
Après l'article 20, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Douze mois avant la date de fin de la période transitoire instaurée par l'article 34 de la présente loi, il est créé une commission spéciale chargée d'évaluer la mise en œuvre des dispositions des chapitres Ier et II de la présente loi ainsi que ses conséquences sur le fonctionnement des cours d'appel.
Chargée d'évaluer tout particulièrement la mise en œuvre de la spécialisation en procédure d'appel instituée par le b bis de l'article 1er de la présente loi, cette commission spéciale transmet son rapport d'évaluation au Parlement qui peut proposer des modifications législatives.
La commission spéciale est composée de :
- un représentant de la Chancellerie ;
- deux premiers présidents de cours d'appel ;
- deux représentants de la Chambre nationale des avoués,
- un représentant du Conseil national des Barreaux,
- un représentant de la Conférence des bâtonniers,
- un représentant de la Cour des comptes,
- deux députés membres de la Commission des lois de l'Assemblée nationale,
- deux sénateurs membres de la Commission des lois du Sénat.
La parole est à M. Jean-Pierre Vial.
L'amendement n° 21, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 20, insérer un article ainsi rédigé :
Douze mois avant la date de fin de la période transitoire instaurée par l’article 34 de la présente loi, il est créé une commission spéciale chargée d’évaluer la mise en œuvre des dispositions des chapitres Ier et II de la présente loi ainsi que ses conséquences sur le fonctionnement des cours d’appel.
Elle transmet son rapport d’évaluation au Parlement.
Cette commission est composée :
- d'un représentant de la Chancellerie ;
- de deux premiers présidents de cours d’appel ;
- de deux représentants de la Chambre nationale des avoués ;
- d'un représentant du Conseil national des barreaux ;
- d'un magistrat de la Cour des comptes ;
- de deux députés ;
- de deux sénateurs ;
Un décret fixe les modalités d'application du présent article.
La parole est à M. Jacques Mézard.
Cet amendement tend à créer une commission chargée d’évaluer la mise en œuvre des dispositions relatives à la disparition et à l’indemnisation des avoués et de remettre un rapport sur ce sujet au Parlement. Tout cela me semble en contradiction avec la réforme constitutionnelle de 2008. Il appartient au Parlement de faire ce travail et de se doter des organes nécessaires. Un tel travail ne saurait être sous-traité à un organisme dont la composition mériterait d’ailleurs des discussions plus approfondies.
Par conséquent, je prie les auteurs de ces amendements de les retirer. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
Ces amendements sont une véritable déclaration de défiance à l’égard du Parlement. La réforme de la Constitution a permis au Parlement d’exercer un pouvoir de contrôle renforcé. Vous n’êtes pas obligés, madame, messieurs les sénateurs, de le confier à quelqu’un d’autre. Le mieux, c’est de l’exercer !
La commission des lois du Sénat peut tout à fait effectuer le travail que vous souhaitez confier à une commission spéciale transitoire. Elle en est capable. Je lui fais toute confiance pour contrôler l’application de la loi.
C'est la raison pour laquelle je vous prie, madame, messieurs les sénateurs, de bien vouloir retirer vos amendements. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Monsieur le rapporteur, monsieur le garde des sceaux, je ne suis pas vraiment surpris par vos réactions. Avant de vous dire si je retire ou non mon amendement, j’aimerais que vous compreniez ce qu’il y a derrière notre demande.
J’entends bien que le Parlement n’a pas besoin d’instaurer une commission pour faire son travail, comme vous l’avez indiqué.
Ce soir, nous avons beaucoup évoqué le régime indemnitaire et fiscal des avoués. Nous pouvons nous féliciter que les choses aient beaucoup progressé. Nous avons obtenu des éclaircissements et des garanties.
Nous avons également parlé de la situation des personnels. On aurait d’ailleurs pu en parler encore davantage, car, très sincèrement, des zones d’ombre demeurent sur leur situation.
Nous savons que tout ne sera pas garanti.
En revanche, monsieur le garde des sceaux, nous ne manquerons pas de vous interpeller dans les mois à venir sur les activités de cette profession, qui seront mises en œuvre grâce à ce que l’on appelle pudiquement la « dématérialisation ».
Monsieur le garde des sceaux, très sincèrement, nous ne pouvons pas ce soir, dans cet hémicycle, laisser entendre que tout ira bien dans le meilleur des mondes. Cette réforme posera de nombreuses difficultés. Je suis sûr que la profession d’avocat, qui va devoir prendre le relais, comme elle l’a fait après l’adoption de la loi de 1972, mais dans un contexte bien différent, n’est pas en mesure ce soir de garantir que cette réforme se passera de la même manière.
Monsieur le garde des sceaux, je vais bien évidemment retirer mon amendement. Toutefois, nous formulons le souhait que la Chancellerie reste vigilante sur le devenir de cette loi et sur les garanties, pour les justiciables, en termes de procédures.
L'amendement n° 1 rectifié est retiré.
Monsieur Mézard, l'amendement n° 21 est-il maintenu ?
Je maintiens l’amendement. Je partage tout à fait le point de vue que vient d’exposer notre collègue Jean-Pierre Vial.
On ne cesse de nous opposer la révision constitutionnelle et de nous dire de faire notre travail. Or ce type d’argument peut se renverser très facilement. On pourrait aussi dire au président de la commission des lois de l’Assemblée nationale que ce n’est pas une bonne chose de déléguer son travail à un cabinet de juristes, aux frais de ladite assemblée.
Protestations sur les travées de l ’ UMP.
Je le répète : il faut faire attention à certains arguments, car ils peuvent être réversibles.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
Chapitre III
Dispositions relatives à l’accès aux professions judiciaires et juridiques
(Non modifié)
Les avoués près les cours d’appel qui renoncent à faire partie de la profession d’avocat ou qui renoncent à y demeurer ainsi que les personnes ayant travaillé en qualité de collaborateur d’avoué postérieurement au 31 décembre 2008 et justifiant, au plus tard à la date d’entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi, de la réussite à l’examen d’aptitude à la profession d’avoué, peuvent, sur leur demande présentée dans le délai de cinq ans à compter de la date de publication de cette même loi, accéder aux professions d’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, de notaire, de commissaire-priseur judiciaire, de greffier de tribunal de commerce, d’huissier de justice, d’administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire. Les conditions dans lesquelles ils peuvent bénéficier d’une dispense partielle ou totale de stage, de formation professionnelle, d’examen professionnel, de titre ou de diplôme sont fixées par décret en Conseil d’État.
Les conditions dans lesquelles les collaborateurs d’avoué, non titulaires du diplôme d’aptitude à la profession d’avoué, peuvent, sur leur demande présentée dans le même délai, être dispensés de certaines des conditions d’accès aux professions mentionnées au premier alinéa sont fixées par décret en Conseil d’État.
Je suis saisie de trois amendements.
Les deux premiers sont présentés par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° 22 est ainsi libellé :
Alinéa 1, première phrase
Remplacer les mots :
ainsi que les personnes
par les mots :
, en application de l'article 1er de la présente loi, conservent la possibilité de s'inscrire au barreau de leur choix dans un délai de dix ans à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi. Les personnes
L'amendement n° 23 est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer l'année :
par l'année :
La parole est à M. Jacques Mézard.
S'agissant de l'amendement n° 22, la renonciation à devenir avocat de l’avoué, dans les trois mois précédant l’entrée en vigueur du chapitre 1er, ne peut être définitive. Un avoué qui aurait tenté une reconversion doit pouvoir, si celle-ci ne s’avère pas satisfaisante pour lui, s’inscrire au barreau dans les dix ans suivant l’entrée en vigueur de la loi, comme tout avocat démissionnaire peut se réinscrire au barreau dans ce même délai.
L'amendement n° 23 vise à faire mieux reconnaître l’expérience et les diplômes des collaborateurs d’avoués. Ces derniers sont en effet soit des personnes embauchées en CDD dont le contrat va prendre fin avant l’entrée en vigueur de la loi et ne sera pas renouvelé, soit des personnes dont le CDD a déjà expiré au cours de l’année 2008 et n’a pas été renouvelé du fait de l’annonce de la suppression de la profession d’avoué, soit des collaborateurs diplômés qui n’ont pas été embauchés à l’issue de leur période de stage ou qui, pour des raisons diverses, n’ont pas trouvé d’emploi chez les avoués.
Ces personnes sont à l’heure actuelle dans des situations très diverses : encore en poste chez un avoué, mais pour moins de six mois, ou déjà au chômage, ou encore salariées chez d’autres professions, comme les experts-comptables ou les assureurs, mais dans le cadre de contrats précaires.
Compte tenu du contexte économique et de la dureté du marché de l’emploi, il est essentiel que toutes ces personnes puissent valoriser leur diplôme d’aptitude à l’exercice de la profession d’avoué, comme elles auraient pu le faire par le passé, durant dix ans.
Certaines personnes ayant été licenciées ou leur contrat n’ayant pas été renouvelé dès l’annonce de la suppression de la profession d’avoué en juin 2008, ou, eu égard aux rumeurs de suppression, dès janvier 2008, il est essentiel de prendre en considération une période d’activité pouvant aller jusqu’au 1er janvier 2008 inclus.
Je rappelle d’ailleurs que de nombreux salariés ou collaborateurs d’avoués ont été amenés à quitter la profession dans des conditions de rapidité inhabituelles, compte tenu des annonces qui ont été faites depuis l’année 2008.
L'amendement n° 43, présenté par MM. Anziani et Michel, Mme Klès, MM. Sueur, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
Les personnes ayant travaillé en qualité de collaborateur d'avoué postérieurement au 31 décembre 2008 et justifiant au plus tard à la date d'entrée en vigueur du chapitre premier de la présente loi de la réussite à l'examen d'aptitude à la profession d'avoué bénéficient de plein droit de la mention de la spécialisation en procédure d'appel mentionnée à l'article premier de la présente loi.
Elles sont inscrites de plein droit au tableau de l'Ordre des avocats dès qu'elles en font la demande.
La parole est à M. Alain Anziani.
Les collaborateurs d’avoués sont les grands oubliés de cette réforme. Ils ont pourtant les mêmes diplômes, les mêmes compétences, le même parcours que les avoués. Malgré ces différents titres, ils ne bénéficieront pas des mêmes droits, qu’il s’agisse, par exemple, de la qualification en matière de procédure d’appel ou bien de l’inscription automatique au tableau de l’ordre des avocats. C’est tout à fait regrettable.
M. le rapporteur ou M. le garde des sceaux nous expliquera peut-être que ces points pourront être revus ultérieurement par la voie réglementaire, mais pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? Ce qui a été fait pour les avoués peut l’être également pour les collaborateurs d’avoués.
L’amendement n° 22 a déjà été examiné en première lecture. Sous réserve des précisions que pourra donner le Gouvernement, cet amendement devrait être très largement satisfait par les modifications apportées au décret de 1991 relatif à la profession d’avocat pour aménager les passerelles existantes entre les professions d’avoué et d’avocat. J’en demande donc le retrait.
En ce qui concerne l’amendement n° 23, le projet de loi relatif à la suppression de la profession d’avoué a été déposé en juin 2009. C’est pourquoi avait été retenue la date du 31 décembre 2008 pour accorder le bénéfice de la passerelle. Ainsi, seuls les collaborateurs d’avoués ayant travaillé en cette qualité après cette date bénéficieront de la passerelle vers les professions juridiques. Cette disposition paraît équilibrée. Il ne semble pas nécessaire de remonter au 31 décembre 2007. Notre avis est donc défavorable.
Quant à l’amendement n° 43, il est satisfait puisqu’il a fait l’objet d’un amendement au projet de loi de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et de certaines professions réglementées. La situation est donc réglée. En conséquence, j’en demande le retrait.
Monsieur Mézard, l'amendement n° 22 est pleinement satisfait par l’article 97 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat, qui ouvre un accès direct à cette profession sans examen ni formation préalable à tous les avoués. Le projet de décret d’application de la présente loi relatif aux passerelles offertes aux avoués et à leurs collaborateurs, qui a bénéficié d’une large diffusion, maintient cette passerelle sans limitation dans le temps pour tous les anciens avoués. Votre amendement est dès lors satisfait, même au-delà des dix années que vous proposez. Je vous prie donc de bien vouloir retirer votre amendement, qui restreindrait la disposition prévue par le Gouvernement.
En ce qui concerne l’amendement n° 23, je partage l’avis de la commission : j’en demande le retrait.
L’amendement n° 43, présenté par M. Anziani, vise à étendre le bénéfice de plein droit de la mention de spécialisation en procédure d’appel aux collaborateurs d’avoués titulaires du diplôme d’aptitude et à permettre leur inscription de plein droit au tableau de l’ordre des avocats.
Le premier souhait que vous exprimez est satisfait par l’article 1er B du projet de loi de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et de certaines professions réglementées, récemment adopté en première lecture par le Sénat. Il sera entré en vigueur avant la fusion des professions.
Pour le reste, les avoués et leurs collaborateurs, même titulaires du diplôme d’aptitude, ne sont absolument pas dans la même situation. Les collaborateurs d’avoués ne peuvent être inscrits au tableau de façon automatique, car il importe de vérifier qu’ils remplissent les autres conditions de l’article 11 de la loi du 31 décembre 1971, notamment l’absence de condamnation pénale, de sanction disciplinaire ou administrative. En effet, à la différence des avoués en exercice, ceux-ci n’ont pas déjà fait l’objet d’un contrôle dans le cadre de la procédure d’agrément ministériel.
Il appartiendra donc aux barreaux de faire ces vérifications et ensuite, si les résultats sont concluants, de procéder à l’inscription au tableau. Sous cette réserve, nous n’y voyons pas d’inconvénient.
Compte tenu de ces explications, monsieur Anziani, je vous demande de retirer votre amendement.
M. Jacques Mézard. M. le rapporteur a indiqué que l'amendement n° 22 était très largement satisfait et M. le garde des sceaux plus que satisfait. La nuance est considérable.
Sourires.
Je maintiens en revanche l’amendement n° 23, auquel vous seriez tout à fait favorables, n’en doutons pas, si vous ne recherchiez pas un vote conforme. Son adoption n’aurait soulevé aucune difficulté et aurait constitué un progrès pour ceux qui ont dû quitter leur emploi de collaborateur d’avoué au cours de l’année 2008.
L'amendement n° 22 est retiré.
Monsieur Anziani, l'amendement n° 43 est-il maintenu ?
Je le retire, madame la présidente. J’ai bien noté, monsieur le garde des sceaux, que l’inscription au tableau de l’ordre des avocats serait automatique si les autres conditions, concernant notamment le casier judiciaire, sont remplies.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 21 est adopté.
(Non modifié)
Trois mois avant la date prévue à l’article 34, les avoués près les cours d’appel peuvent exercer simultanément leur profession et celle d’avocat. L’inscription au barreau est de droit sur simple demande des intéressés.
Toutefois, ils ne peuvent simultanément postuler et plaider dans les affaires introduites devant la cour d’appel avant cette date pour lesquelles la partie est déjà assistée d’un avocat, à moins que ce dernier ne renonce à cette assistance.
Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 63, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Rédiger ainsi cet alinéa :
À compter de la publication de la présente loi, les avoués près les cours d'appel et leurs collaborateurs titulaires du Certificat d'aptitude à la profession d'avoué peuvent exercer simultanément leur profession et celle d'avocat. L'inscription au barreau est de droit sur simple demande des intéressés dès lors qu'ils ont prêté serment. Les avoués près les cours d'appel et leurs collaborateurs titulaires du Certificat d'aptitude à la profession d'avoué bénéficient de la reconnaissance de la spécialisation en procédure d'appel à compter de la publication de la présente loi.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Le Sénat avait prévu que le double exercice, pendant la période transitoire, de la profession d’avocat et d’avoué serait possible dès la publication de la loi et jusqu’à la disparition de la profession d’avoué.
Les députés ont limité cette période aux trois mois précédant cette disparition. Ce délai est insuffisant pour permettre ne serait-ce qu’un début de reconversion, voire pour déposer les demandes d’inscription au barreau et prêter serment.
Afin de respecter le droit au travail et le principe d’égalité, il convient de prévoir que les collaborateurs d’avoués titulaires du certificat d’aptitude soient inclus dans toutes les dispositions propres à organiser l’avenir de la profession dans son intégration à la profession d’avocat. Ils doivent même pouvoir bénéficier de la spécialisation en procédure d’appel dès la publication de la présente loi.
Cette dernière disposition a certes été introduite dans le projet de loi de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et de certaines professions réglementées en première lecture, mais l’issue est encore incertaine.
Il convient, dans le respect des principes d’égalité, de cohérence et de sécurité, d’inclure ces mesures dans la loi prévoyant la suppression des avoués, afin de ne pas entraver leur reconversion.
M. Bernard Frimat remplace Mme Monique Papon au fauteuil de la présidence.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 24 est présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° 44 est déposé par MM. Anziani et Michel, Mme Klès, MM. Sueur, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 1
Remplacer le mot :
Trois
par le mot :
Six
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 24.
Par cet amendement, nous proposons de limiter l’exercice simultané des deux professions d’avoué et d’avocat à six mois au lieu de trois mois, tout en permettant un différé d’application de la loi.
En effet, le délai de trois mois prévu par le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale en deuxième lecture ne nous paraît pas du tout suffisant pour permettre, dans des conditions optimales, un début de reconversion. Trois mois seront parfois même insuffisants pour formuler les demandes d’inscription au barreau et prêter serment.
Il convient donc logiquement de rallonger le délai à six mois. Là encore, je suis convaincu que, si nous n’étions pas dans l’obsession d’un vote conforme, cet amendement serait adopté.
En l’occurrence, on ne peut pas nous dire que l’Assemblée nationale et le Sénat étaient parfaitement d’accord et que nous revenons inutilement à la charge. Il s’agit bel et bien, d’une part, de la réorganisation de la vie professionnelle de 2 000 personnes et, d’autre part, de la réorganisation d’un service public de la justice pour les justiciables qui veulent aller en appel : excusez du peu !
Le délai initialement prévu pour mettre en place cette réforme était d’un an – la garde des sceaux de l’époque n’était pourtant pas spécialement attentiste ; il est passé à six ou huit mois compte tenu du retard pris dans l’adoption du texte. Aujourd'hui, il est porté à trois mois : ce n’est pas raisonnable !
On nous demande d’éviter les distorsions de concurrence entre les avocats et les avoués. Je peux parfaitement l’entendre. D'ailleurs, je ne suis pas partie prenante, n’étant ni avocate ni avouée. Mais, en l’espèce, il s’agit simplement de réorganisation. Nous avons évoqué à plusieurs reprises les 45 000 dossiers en appel de Paris quasiment bons à mettre à la poubelle et l’on ne se donne pas le temps de faire les choses !
On demande aujourd’hui aux avoués – c’est tout de même un comble ! – de prolonger eux-mêmes les conventions pour la communication électronique des dossiers entre les cours d’appel. Autrement dit, vous disparaissez, mais vous vous occupez pendant un an de la convention et vous ne disposez que de trois mois pour vous réorganiser, vous refaire une vie professionnelle et une clientèle !
Cela défie le bon sens, et je ne comprends pas pourquoi vous vous accrochez à ce vote conforme. Pourquoi craignez-vous tellement d’aller en CMP sur les quelques points qu’il convient de revoir ? Six mois pour les avoués, pour réorganiser la justice, pour que les justiciables voient leurs dossiers correctement traités en appel, cela ne me paraît vraiment pas abusif.
Le problème est plus complexe qu’il n’y paraît. N’oublions pas que, dans l’année à venir, les avoués vont conserver leur monopole et qu’à l’issue de celle-ci ceux qui continueront leur activité deviendront automatiquement avocats.
Pour permettre la facilitation du passage d’une profession à l’autre, nous avons autorisé, avant la fin de l’année 2011, la possibilité pendant une durée de trois mois d’être avoué et avocat. Si cette durée était portée à six mois, les avocats se dresseraient contre cette disposition en invoquant une concurrence déloyale. Les avoués pourraient cumuler les deux fonctions alors que les avocats n’auraient pas le droit de le faire.
Par conséquent, il faut réduire cette période au maximum, et la durée de trois mois que nous avons fixée semble équilibrée. Nous avons déjà eu cette discussion en première lecture et nous avions tranché dans le sens que je viens d’indiquer ; il faut être logique par rapport à la profession judiciaire que constitue l’ensemble avoué-avocat.
Nous émettons donc un avis défavorable sur les amendements n° 63, 24 et 44.
Je partage tout à fait l’avis de la commission des lois et de son rapporteur. La période transitoire de trois mois peut paraître courte, mais on ne peut guère aller au-delà pour une raison simple : on ne peut pas laisser trop longtemps en situation de concurrence des professionnels soumis à des statuts différents.
L’amendement de Mme Mathon-Poinat vise la possibilité pour les collaborateurs d’avoués d’exercer en parallèle comme avocat pendant la période transitoire.
Les collaborateurs ne sont pas dans la même situation que les avoués titulaires de charges. Par hypothèse, ils sont salariés, et un avocat ne saurait être salarié d’une autre profession du droit. Ce serait en grave contradiction avec la réglementation. C’est la raison pour laquelle il serait préférable que vous retiriez votre amendement ; à défaut, j’y serais naturellement défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
La parole est à Mme Virginie Klès, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 24 et 44.
Monsieur le président, compte tenu des réponses qui nous ont été apportées, j’espère que vous me permettrez de me montrer une nouvelle fois un peu provocatrice.
Si nous suivons le raisonnement de la commission et du Gouvernement, pourquoi trois mois et pas rien du tout ? Après tout, là, il n’y aurait ni distorsion de concurrence ni concurrence illégale.
Les avoués ne pourront pas faire beaucoup plus en trois mois que dans l’hypothèse où ils n’auraient aucun délai. Et s’il y a vraiment un risque de concurrence illégale, ne le laissons pas du tout s’installer !
Au demeurant, les avoués qui n’auront plus d’étude d’avoué et qui n’auront plus de moyens de subsistance ne seront peut-être pas encore indemnisés à ce stade ! Trois mois ou rien du tout, je ne vois pas bien ce que cela change !
Les amendements ne sont pas adoptés.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 25 est présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° 45 est présenté par MM. Anziani et Michel, Mme Klès, MM. Sueur, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
ce dernier
par les mots :
celle-ci
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 25.
De notre point de vue, il appartient à la partie, c'est-à-dire au client, de faire le choix de conserver son avoué ou son avocat. D’ailleurs, cela paraît tout à fait logique.
Or l’alinéa 2 de l’article 24 est ainsi rédigé : « Toutefois, ils ne peuvent simultanément postuler et plaider dans les affaires introduites devant la cour d’appel avant cette date pour lesquelles la partie est déjà assistée d’un avocat, à moins que ce dernier ne renonce à cette assistance. » Que faut-il en conclure ?
Comme vous le savez, le Conseil national des barreaux a l’habitude de se satisfaire de miettes. Là, j’ai le sentiment qu’on lui a donné une petite friandise car son appétit était un peu aiguisé. §
Le premier alinéa de l’article 416 du code de procédure civile pose le principe suivant : « Quiconque entend représenter ou assister une partie doit justifier qu’il en a reçu le mandat ou la mission. L’avocat ou l’avoué est toutefois dispensé d’en justifier. » Mais ils ne sont pas dispensés de détenir un tel mandat !
Quel que soit le domaine d’intervention, l’avocat ou l’avoué doivent avoir un mandat. Et seul le client peut décider de modifier ou de retirer ledit mandat.
Dès lors, on ne comprend pas pourquoi le projet de loi offre la possibilité de renoncer à une telle assistance à l’avocat et non à la partie. C’est à la fois illogique et contraire à la règle de droit !
Certes, on en comprend bien les motivations : un petit bonbon de temps en temps, cela fait toujours plaisir ! §Mais je ne crois pas que cette option soit juridiquement sérieuse.
À l’évidence, une telle anomalie justifierait à elle seule le refus d’un vote conforme ! Mais je sais bien ce qu’on va me répondre…
Le dispositif proposé par les auteurs de ces deux amendements avait déjà été repoussé par le Sénat en première lecture. Et si l’Assemblée nationale a modifié le texte adopté par le Sénat, c’était pour rectifier une faute de français !
Ces deux amendements tendent à permettre à la partie de renoncer à l’assistance de son avocat pour retenir seulement celle de l’avoué, qui aura alors la possibilité d’exercer les deux professions. La question a été abordée en première lecture : il semble préférable de laisser l’avocat décider s’il souhaite continuer à plaider dans un dossier en appel pendant la période transitoire. On évitera ainsi toute suspicion d’influence de la partie intéressée par l’avoué ou par l’avocat.
Par conséquent, la commission demande le retrait de ces deux amendements identiques. À défaut, l’avis serait défavorable.
Le Gouvernement émet le même avis que la commission.
Je souhaite simplement poser une question : là, il n’y a pas de distorsion de concurrence ?
Je suis tout de même étonné par la réponse de M. le rapporteur.
Si j’ai bien compris, il faut faire confiance à l’avocat, mais pas à l’avoué, …
… qui serait suspect.
Nous arrivons là à une situation qui est à la fois illogique et – je l’ai déjà indiqué – contraire à la règle de droit.
Que ce soit pendant la période transitoire ou non, il n’y a pas de raison de faire plus confiance à une profession qu’à l’autre !
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'article 24 est adopté.
(Non modifié)
Sont supprimés :
1° Les mots : « avoués, » et «, avoués » respectivement :
a) À l’article 7 de la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat, aux articles 2 et 5 de la loi du 25 nivôse an XIII contenant des mesures relatives au remboursement des cautionnements fournis par les agents de change, courtiers de commerce, etc., au premier alinéa de l’article 91 de la loi du 28 avril 1816 sur les finances, au dernier alinéa de l’article 10 de la loi n° 68-5 du 3 janvier 1968 portant réforme du droit des incapables majeurs, au 11° de l’article L. 122-20 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie, à la dernière phrase du deuxième alinéa de l’article L. 1424-30 et au 11° de l’article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales et au premier alinéa de l’article 860 et à l’article 865 du code général des impôts ;
b) Au second alinéa de l’article 1er, à l’article 2 et au premier alinéa de l’article 4 de la loi du 24 décembre 1897 relative au recouvrement des frais dus aux notaires, avoués et huissiers et au premier alinéa de l’article 862 du code général des impôts ;
c) (Supprimé)
2° Les mots : «, un avoué » et «, d’un avoué » respectivement :
a) À l’article 38 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique ;
b) À l’article 56-3 du code de procédure pénale et au dernier alinéa de l’article L. 212-11 du code de justice militaire ;
3° Les mots : « ou avoué », « ou un avoué » et « ou d’un avoué » respectivement :
a) Au dernier alinéa de l’article L. 144-3 du code de la sécurité sociale ;
b) Au deuxième alinéa de l’article 388-1 et à la première phrase des articles 415 et 424 du code de procédure pénale ;
c) Au premier alinéa de l’article 504 du code de procédure pénale ;
4° Les mots : « les avoués, » et « des avoués, » respectivement :
a) À l’article 1er de la loi du 25 nivôse an XIII précitée et au cinquième alinéa de l’article 16 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 précitée ;
b) Aux articles L. 211-8, L. 311-5 et L. 311-6 du code de l’organisation judiciaire ;
c) (Supprimé)
5° Les mots : « et avoués » et « et d’avoués » respectivement :
a) À l’article 31 de la loi du 22 ventôse an XII relative aux écoles de droit ;
b) Au deuxième alinéa de l’article 18 de la loi n° 46-942 du 7 mai 1946 instituant l’ordre des géomètres-experts ;
c) (Supprimé)
6° Les mots : « ou d’avoué à avoué » au premier alinéa de l’article 866 du code général des impôts ;
7° Les mots : «, l’avoué près la cour d’appel », « les avoués près les cours d’appel, », «, d’avoué près une cour d’appel, d’avoué près un tribunal de grande instance » et «, par un avoué près la cour d’appel » respectivement :
a) À l’article 31 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 précitée ;
b) Au 13° de l’article L. 561-2 du code monétaire et financier ;
c) À l’article 1er de la loi n° 48-460 du 20 mars 1948 permettant aux femmes l’accession à diverses professions d’auxiliaire de justice ;
d) Au deuxième alinéa de l’article 380-12 du code de procédure pénale ;
8° Les mots : « ou la chambre de la compagnie des avoués » et les mots : « ou le président, selon le cas, » au premier alinéa du III de l’article L. 561-30 du code monétaire et financier ;
9° Les mots : «, ou parmi les avoués admis à plaider devant le tribunal » au troisième alinéa de l’article 417, et les mots : « ou par un avoué près la juridiction qui a statué, » à la première phrase du deuxième alinéa de l’article 502 du code de procédure pénale ;
10° Les mots : «, et d’honoraires d’avoués énoncées par l’article 5 de la loi n° 57-1420 du 31 décembre 1957 sur le recouvrement des honoraires des avocats » à l’article L. 211-6 et les mots : « et, après eux, les avoués selon la date de leur réception, » au premier alinéa de l’article L. 312-3 du code de l’organisation judiciaire ;
11° Les mots : « des débours tarifés et des émoluments dus aux avoués et » au premier alinéa du I de l’article L. 663-1 du code de commerce ;
12° La dernière phrase du cinquième alinéa de l’article 131 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure ;
13° Le mot : «, avoué » au 2° de l’article L. 622-5 du code de la sécurité sociale. –
Adopté.
L'amendement n° 59, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 32, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'État rédige pendant cinq ans un rapport annuel sur la situation des avoués et des salariés concernant leur reconversion.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Cet amendement concerne la rédaction d’un rapport sur la situation des avoués. Je sais évidemment que cet amendement sera refusé, puisque vous refusez les commissions, les rapports…
Pourtant, comme ce projet de loi est imparfait, nous aurons sans doute des contentieux. La reconversion suscitera probablement également des difficultés. Peut-être un nouveau texte de simplification du droit viendra-t-il rectifier les erreurs…
Quoi qu’il en soit, je persiste et demande la rédaction d’un rapport sur le sujet.
L'amendement n° 61, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 32, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport avant le 1er juin 2011 sur l'utilité pour le justiciable et le coût pour l'État de l'augmentation de l'aide juridictionnelle.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Il s’agit d’un amendement d’appel, que j’ai déjà présenté aux membres du barreau.
L’aide juridictionnelle est complètement absente de ce projet de loi. Cet amendement d’appel vise donc à souligner à quel point elle est nécessaire.
Le dispositif proposé par les auteurs de l’amendement n° 59 a déjà été rejeté au Sénat en première lecture, de même qu’à l’Assemblée nationale.
Comme je l’ai déjà indiqué à trois reprises, il appartient au Parlement de suivre l’exécution des lois, en vertu de la révision constitutionnelle. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement n° 61 est un cavalier législatif qui est, à mon sens, irrecevable.
Peut-être, mais il s’agit tout de même d’un cavalier. Cet amendement n’a pas de lien avec l’objet du projet de loi.
Monsieur le rapporteur, je vous rappelle que l’amendement n° 61 n’a pas été déclaré irrecevable. Il appartient donc au Sénat de se prononcer sur son éventuelle adoption.
Dans ces conditions, je vous indique que la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Comme l’a souligné M. le rapporteur, le principe défendu par les auteurs de l’amendement n° 59 a déjà fait l’objet de nombreux votes.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous confirme que je serai à votre disposition pour vous apporter toutes les précisions utiles sur l’application de la loi lorsque vous m’en ferez la demande.
Bien entendu, un délai de cinq ans me laisse beaucoup d’espérance ; c’est le principal intérêt de votre amendement, et je vous en remercie.
Néanmoins, je vous propose tout de même de le retirer. À défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
L’amendement n° 61 concerne l’aide juridictionnelle. À mon sens, nous serions mieux à même d’aborder cette question lors de l’examen du texte législatif portant réforme de la garde à vue.
M. le président de la commission des lois acquiesce.
L'amendement n'est pas adopté.
Oui, monsieur le président.
L’aide juridictionnelle est absente de ce texte, et il convient de l’aborder. Le sujet fait, hélas, couler beaucoup d’encre et l’aide juridictionnelle a besoin de financements.
L'amendement n'est pas adopté.
(Non modifié)
Sont abrogés ou supprimés :
1° Les articles 93 à 95 de la loi du 27 ventôse an VIII sur l’organisation des tribunaux ;
2° Les articles 27 et 32 de la loi du 22 ventôse an XII relative aux écoles de droit ;
3° Les articles 2, 3, 5, 6 et 7 du décret du 2 juillet 1812 sur la plaidoirie dans les cours d’appel et dans les tribunaux de grande instance ;
4° L’article 5 de la loi du 24 décembre 1897 relative au recouvrement des frais dus aux notaires, avoués et huissiers ;
5° L’ordonnance n° 45-2591 du 2 novembre 1945 relative au statut des avoués ;
6° La loi n° 57-1420 du 31 décembre 1957 sur le recouvrement des honoraires des avocats ;
7° L’article 82 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 précitée ;
8° Le 8° de l’article 55 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 précitée ;
9° Le 1° de l’article L. 311-4 du code de l’organisation judiciaire ;
10° L’avant-dernier alinéa de l’article L. 144-3 du code de la sécurité sociale ;
11° Le deuxième alinéa de l’article 10 de la loi du 22 août 1929 sur l’organisation judiciaire des tribunaux de grande instance. –
Adopté.
Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l’objet de la deuxième lecture.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. François Zocchetto, pour explication de vote.
De mon point de vue, le fait d’émettre un vote conforme sur le présent projet de loi ne signifie nullement, bien au contraire, que le Sénat n’a pas fait son travail.
En comparant le texte initial du Gouvernement et le texte que nous allons, je l’espère, adopter ce soir, on constate tout l’apport du Parlement, en particulier du Sénat et singulièrement de son rapporteur Patrice Gélard.
En outre, monsieur le garde des sceaux, pour que cette réforme soit un succès, il faut véritablement que la dématérialisation fonctionne.
J’espère donc que les procédures de dématérialisation seront adoptées par l’ensemble des acteurs du dispositif dans les mois à venir. Je souhaite en particulier que le réseau privé virtuel des avocats, le RPVA, soit mis en œuvre de manière efficace.
J’évoquerai enfin la question de la postulation, que nous n’avons quasiment pas abordée au cours de ce débat. Chacun doit avoir conscience que cette réforme est devant nous ; nous n’y échapperons pas ! Je ne sais pas s’il faut supprimer la postulation. En tout cas, la question est posée. Dès lors, il faut engager une réflexion.
Compte tenu des conséquences qu’aurait une réforme de la postulation sur le terrain, en particulier pour les barreaux de province et de tribunaux de grande instance, c'est-à-dire ceux qui ne sont pas dans des sièges de cour d’appel, elle ne peut se concevoir que sur une durée assez importante.
Pour ma part, je voterai ce texte en me réjouissant du travail accompli par notre Haute Assemblée.
Notre groupe votera très majoritairement contre ce texte.
Il était important, me semble-t-il, que les avoués et leurs représentants constatent l’autisme du Gouvernement et son refus de toute modification.
Cet après-midi, nous avons pu avoir la démonstration que tout ce qui était présenté par l’opposition, voire par certains de nos collègues de la majorité parlementaire, était manifestement insensé. En application d’une logique inacceptable, car fondée sur des bases qui ne sont pas saines, la totalité des propositions formulées aujourd'hui ont été refusées !
Vous avez le droit de défendre le texte de la commission, mais nous, nous avons le droit de protester contre la méthode retenue depuis le début de l’examen de ce projet de loi ! Souvenons-nous dans quelles conditions ce texte a été introduit !
Certes, monsieur le rapporteur Patrice Gélard, ce projet de loi vous doit effectivement beaucoup. Vous l’avez considérablement amélioré, notamment grâce au travail que vous avez effectué en première lecture.
Pour autant, l’examen du texte s’est déroulé dans des conditions que les avoués et leurs salariés peuvent considérer comme tout à fait déplorables.
D’ailleurs, après avoir adopté le projet de loi en première lecture au mois de décembre 2009, nous avons dû attendre un an – nous sommes aujourd'hui le 21 décembre 2010 – pour en être saisis en deuxième lecture. Pendant tout ce temps, les avoués et leurs collaborateurs sont restés dans l’incertitude. Ce n’est ni normal ni acceptable ! Ces méthodes de travail ne sont pas bonnes !
L’absence de réponses sur les questions soulevées au sujet de l’accompagnement des salariés et des pseudo-aides à la création d’entreprise, lesquelles ont suscité non l’hilarité, mais le sourire chez nombre de nos collègues, prouve qu’une fois que le texte sera voté une grande partie des salariés touchera certes des indemnités revues à la hausse…
Tout à fait, mais ces salariés, en particuliers ceux d’entre eux qui ont peu d’ancienneté, seront amenés à rechercher un emploi dans des conditions catastrophiques. Cette « mise sur le marché du chômage » a été décidée volontairement par le Gouvernement. Elle doit être portée non à son crédit, mais à son débit.
En ce qui concerne les problèmes de fiscalité pour l’indemnisation des avoués, nous avons pris acte des engagements de M. le garde des sceaux. Si nous avons confiance en vous, monsieur le ministre, nous avons moins confiance en la politique du Gouvernement. Je l’ai souligné tout à l’heure, nous avons été échaudés. Cependant, j’ai l’habitude de faire confiance à l’homme. J’espère bien, monsieur le garde des sceaux, que vous ferez le maximum pour que le Gouvernement suive vos engagements. Il n’en reste pas moins que mon expérience récente sur un autre texte m’incite à douter de la parole du Gouvernement, raison pour laquelle je voterai contre ce projet de loi.
Quoi qu’il en soit, j’ai été très choqué au cours de l’examen de ce texte de la façon dont les avoués ont été traités. Certes, j’entends la logique qui justifie la suppression de cette profession. Pour autant, ces hommes et ces femmes ont été plus que des auxiliaires de la justice ; ils ont été des officiers ministériels pendant une certaine période et ont beaucoup contribué à la qualité du droit. Ils ont été balayés de la vie judiciaire par des méthodes qui n’honorent pas ceux qui les utilisent !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
M. Jean-Pierre Michel. Depuis que je suis sénateur, c’est la première fois que j’assiste à un débat aussi malsain !
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
Nous savions depuis quinze jours que ce texte devait être voté conforme. J’entends bien, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, que nous pouvons nous exprimer en séance et qu’il n’est nul besoin pour ce faire de prévoir une troisième lecture ou une commission mixte paritaire. Sauf qu’y compris la majorité et vous-même, monsieur le rapporteur, avez émis de profondes réserves sur les points principaux de ce texte : le régime fiscal, l’indemnisation préalable, la situation des collaborateurs et des salariés. Sur tous ces points, des amendements identiques ont été déposés par tous les groupes. Puis, au dernier moment, par un coup de baguette magique, …
Ça ne s’est pas fait au dernier moment, ces amendements ont été refusés en commission !
… ces amendements sont retirés ou repoussés. Je ne pense pas, monsieur le garde des sceaux, que vos réponses imprécises, voire quelquefois votre absence de réponses, aient suffi à convaincre nos collègues de la majorité de voter conforme un texte qui, en l’état, ne le méritait pas. Un tel vote s’explique simplement par la solidarité d’une majorité envers son gouvernement.
Le retrait ou le rejet des amendements a provoqué quelques interrogations chez certains de nos collègues, interrogations qui n’ont pas eu l’heur de plaire à M. Détraigne mais qui n’avaient pas pour objet de le froisser.
Je note, pour ma part, que M. le garde des sceaux ne nous a apporté aucune réponse sur le financement de la Chambre nationale des avoués près les cours d’appel, laquelle sera maintenue deux ans après la suppression de la profession. Il n’y aura plus d’avoués, plus de cotisations, mais il y aura toujours une Chambre nationale des avoués. Comment fonctionnera-t-elle ? Nul ne le sait !
Par ailleurs, M. ministre n’a pas répondu – ou mal – sur la situation des salariés et des collaborateurs lors de l’examen des amendements présentés par MM. Gélard, Mézard et Anziani, notamment, sur les possibilités offertes aux collaborateurs titulaires des diplômes d’accéder aux professions juridiques.
Il n’a pas apporté de réponse non plus à ce qui me semble être le principal problème : avec la dématérialisation, comment fonctionnera la justice et comment s’élaborera la procédure ? Monsieur le garde des sceaux, vous ne nous apportez aucune réponse parce que vous êtes dans l’incapacité de nous en donner : vous ne savez pas ce qui va se passer, vous ne savez pas comment seront informatisés les futurs cabinets d’avocats et les cours d’appel ! Aujourd'hui, ces dernières ne sont pas toutes prêtes. D’ici à trois mois, un effort budgétaire formidable permettra-t-il d’assurer leur informatisation ? Sur ce point, vous n’avez pas répondu.
Par conséquent, même si des arguments ont été échangés, même s’il faut rendre hommage à la commission des lois et à son rapporteur qui ont considérablement amélioré le texte présenté en première lecture il y a un an, nous avons eu aujourd'hui un mauvais débat. Certes, les avoués ont été relativement entendus, …
M. Jean-Pierre Michel. … mais on supprime une profession dans des conditions indignes d’un Gouvernement de la République !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Jacques Mézard applaudit également.
Je reprendrai à mon compte l’ensemble des arguments qui viennent d’être développés. La méthode utilisée m’a profondément choquée. Ce n’est pas le fait d’arriver à un vote conforme qui est ennuyeux, …
… c’est le fait que ce vote conforme ait été décidé en amont même du débat ! Parce qu’il fallait éviter pour on ne sait quelles raisons une troisième lecture ou la réunion d’une commission mixte paritaire, des erreurs matérielles n’ont pu être rectifiées.
Ce mépris à l’égard d’hommes et de femmes qui ont œuvré pour la justice de notre pays et pour nos concitoyens pendant de longues années est inacceptable. Tous ces professionnels se sont investis en temps et en matériel aux côtés des justiciables. Ils ont été aujourd'hui balayés d’un revers de main.
Monsieur le rapporteur, je me rappelle très bien mon intervention l’année dernière dans la discussion générale lors de l’examen de ce texte en première lecture ; je suis même allée la relire. J’avais rendu alors hommage à votre travail et à votre pugnacité, comme tout un chacun. Vous avez contribué, avec les autres membres de la commission des lois, à améliorer le texte en première lecture. Mais pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? À quelle pression cède aujourd'hui le Sénat pour décider, en amont même du débat, que, quelles que soient les erreurs repérées dans le texte, quelles que soient les énormités qui s’y trouveraient, le vote serait conforme ?
Je serais la première à me réjouir si mon analyse de la situation se révélait erronée. Je serais heureuse si tous les salariés d’avoués retrouvaient rapidement un travail correct, avec un bon niveau de rémunération, un travail qui ne se situe pas à 600 kilomètres de leur domicile familial. Je serais ravie que tous les avoués puissent demain exercer la profession d’avocat dans les meilleures conditions du monde. Je crains hélas de ne pas me tromper ! La mise en application de ce texte mal préparé et qui comporte des erreurs suscitera plus que des hoquets. Il posera des problèmes d’interprétation et une multitude de difficultés aux ex-futurs avoués, à leurs salariés et aux justiciables.
Par conséquent, même seule, je rédigerai ce rapport et je vous garantis que nous en reparlerons tant je suis malheureusement intimement persuadée de ne pas me tromper !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Jacques Mézard applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au début de cette séance, un membre éminent de la majorité sénatoriale a déclaré que ce projet de loi n’avait aucun caractère d’urgence et qu’il ne présentait aucune nécessité manifeste. Dans cet hémicycle, nous sommes nombreux à partager ce point de vue, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons. Pourtant, ce texte va être voté. C’est l’un des mystères de la vie parlementaire auxquels il faut s’initier !
Pourquoi va-t-il être voté ? Personnellement, je ne connais toujours pas la raison d’être de ce projet de loi. Jean-Pierre Vial l’a dit tout à l’heure, nous ne savons pas non plus ce qui se passera après l’adoption de ce texte. Plus exactement, nous ne le savons que trop bien : d’un côté, il y aura le désarroi des salariés, qui ne sauront pas de quoi sera fait leur avenir – nos débats de cet après-midi ne vont pas les apaiser sur ce point ; de l’autre, il y aura l’inquiétude des avoués. Or nos discussions d’aujourd'hui ne sont pas non plus de nature à éveiller la sérénité chez eux.
Pourquoi supprimons-nous la profession d’avoué ? Tout simplement parce qu’un jour une commission a affirmé qu’il serait plus moderne de le faire et qu’un gouvernement a jugé qu’elle avait raison. Au nom de la modernité, il a été décidé de supprimer cette profession ancienne, qui n’avait certainement pas démérité. Une telle disposition, personne n’a d’ailleurs affirmé le contraire dans cet hémicycle, n’a d’intérêt ni pour le justiciable ni pour le contribuable : au contraire, cela leur reviendra plus cher. Pourtant, elle va être adoptée !
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les motifs qui sont aujourd'hui avancés ne peuvent nous convaincre. C’est la raison pour laquelle nous ne voterons pas ce texte.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Jacques Mézard applaudit également.
Il y a un an, nous nous félicitions tous du travail accompli par la commission des lois, qui a amélioré considérablement – je pèse mes mots – le texte du Gouvernement.
Le projet de loi qui nous est présenté ce soir est-il en retrait par rapport à celui que nous avions adopté il y a un an ? Je n’ai pas le sentiment que ce soit le cas. Nous avons, par ailleurs, obtenu un certain nombre d’engagements fermes pris publiquement par M. le garde des sceaux. J’ai du mal à comprendre qu’on se lamente sur le travail réalisé et sur le texte qui va être soumis dans quelques instants au vote de notre assemblée.
À titre personnel, il m’est toujours désagréable de constater que mes amendements sont refusés et je sais qu’il en va de même pour tous mes collègues, car même les élus de la majorité préfèrent que leurs propositions soient adoptées !
Il n’en reste pas moins que le texte sur lequel nous allons nous prononcer dans quelques instants est considérablement amélioré par rapport à celui que nous avait présenté le Gouvernement. De surcroît, M. le garde des sceaux a pris un certain nombre d’engagements solennels devant nous. Ne nous flagellons pas ! La commission des lois, sous la houlette de son président et de son rapporteur, Patrice Gélard, a réalisé un excellent travail. Il faut le dire. Arrêtons le concert des lamentations ! Ce texte n’est pas parfait, mais nous avons tout de même accompli un très bel ouvrage.
Pour cette raison, sans hésitation, nous voterons ce projet de loi !
Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.
Si l’on se reporte à nos débats en première lecture, on constate que nous étions effectivement très insatisfaits du travail réalisé par l’Assemblée nationale, puisqu’elle n’avait reconnu ni l’indemnisation du préjudice de carrière, ni la possibilité, pour les salariés, d’obtenir le versement direct, par le fonds d’indemnisation, d’allocations exceptionnelles par rapport au droit commun. Sur toutes ces questions, le Sénat avait fait preuve d’une fermeté extrême et avait décidé de s’inspirer de la procédure d’expropriation pour garantir que tous les préjudices soient indemnisés.
Le texte que nous avions adopté a été transmis à l’Assemblée nationale, qui a un peu tardé à se prononcer – neuf mois, c’est quand même beaucoup ! Cette attente était insupportable pour les avoués et leur personnel, qui se sont trouvés plongés dans l’incertitude – s’il s’était agi d’une entreprise privée, l’inspection du travail aurait été fondée à intervenir…
Ce retard était donc tout à fait regrettable, mais M. le garde des sceaux a repris l’affaire en main : l’Assemblée nationale s’est prononcée en deuxième lecture et le texte est revenu devant le Sénat.
Personnellement, je suis plutôt content du texte adopté en deuxième lecture par l’Assemblée nationale. En effet, il reprend tous les apports du Sénat. La mariée n’était peut-être pas assez belle pour certains d’entre nous, puisqu’ils ont remis en cause des votes unanimes de première lecture. Je dois avouer que j’ai du mal à comprendre cette attitude… Je suis moins partisan que d’autres, mais reconnaissez que, si le Parlement fait bien son travail, il parvient parfois à imposer ses vues au Gouvernement !
Comme vous, monsieur Mézard, je n’étais pas convaincu de l’intérêt de cette réforme. Mais à partir du moment où elle avait été décidée, elle aurait été votée par l’Assemblée nationale, quoi qu’il arrive. Je préfère donc que nous y apportions notre contribution, afin qu’elle soit la meilleure possible pour les avoués et leurs salariés, qui n’en peuvent mais ! C’est ce que nous avons fait.
Restait une incertitude, monsieur le garde des sceaux, relative au mode de calcul des plus-values. En effet, l’indemnisation versée d’une main par l’État aurait pu être reprise de l’autre, sous couvert de l’imposition des plus-values. Des clarifications étaient attendues par les professionnels, et elles étaient indispensables ; elles feront l’objet d’instructions précises aux services fiscaux. Ceux d’entre nous qui veulent bien être honnêtes ce soir pourront admettre que la situation a été clarifiée et qu’il valait mieux que cette clarification intervienne ici.
Certes, tout reste améliorable, mais je sais que M. le garde des sceaux va s’engager, avec ses services, pour que cette réforme soit un succès, comme cela a été le cas pour d’autres professions judiciaires : la première réforme de la profession d’avoué s’est déroulée dans de bonnes conditions, la réforme des commissaires-priseurs aussi, comme celle des courtiers maritimes.
Il doit en aller de même pour cette nouvelle réforme de la profession des avoués : les services du ministère de la justice doivent faciliter la résolution des difficultés plutôt que la freiner, mais je suis sûr que la commission d’indemnisation fera bien son travail, comme elle l’avait fait dans les autres cas.
J’espère donc que cette réforme, si elle n’était pas indispensable, profitera au moins aux justiciables. Vous le savez, monsieur le ministre, au-delà de la réforme de la profession d’avoué, se pose le problème de la modernisation des méthodes de travail de la justice, où beaucoup d’efforts restent à faire. Je veux bien croire qu’il faut toujours réformer, mais si un garde des sceaux se préoccupe un jour du fonctionnement quotidien de la justice, il faudra lui élever une statue !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi.
Le projet de loi est définitivement adopté.
Monsieur le président, je souhaite tout d’abord vous remercier, ainsi que les autres présidents de séance qui vous ont précédé cet après-midi, d’avoir veillé au bon déroulement des débats.
Je remercie également l’ensemble des sénatrices et des sénateurs qui ont participé à cette séance, car les textes dont nous discutons sont parfois complexes et le temps qui nous est imparti souvent restreint. Je remercie plus particulièrement ceux d’entre eux qui ont bien voulu voter ce projet de loi, à la demande de la commission des lois, de son président Jean-Jacques Hyest et de son rapporteur Patrice Gélard.
Cette réforme est désormais votée et il appartient à la Chancellerie de faire en sorte qu’elle soit une réussite. J’entends bien employer toute mon énergie pour que les engagements que j’ai pris devant vous soient tenus – et j’y veillerai ! –, mais aussi pour que le dialogue nécessaire s’instaure avec les avoués et leurs salariés, afin que la réforme se déroule le mieux possible, même s’il est toujours difficile de quitter une vie professionnelle pour s’orienter vers une autre, j’en suis pleinement conscient !
La réforme a été lancée, elle va maintenant entrer en application. Il faut qu’elle profite à l’ensemble des justiciables. Les questions relatives à la dématérialisation des procédures sont essentielles et tout le monde devra fournir un effort. Bien que n’étant pas spécialiste de ces questions, je sais que la modernisation de la justice passe aussi par l’utilisation des nouvelles technologies ; je sais également que je peux compter sur l’appui du Sénat dans ce domaine.
Je vous souhaite à tous de bonnes fêtes, en attendant de nous retrouver très tôt l’année prochaine, dès les mois de janvier et de février, pour discuter de quelques textes tout à fait fondamentaux.
Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente-cinq.