Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, vous l’avez rappelé, cher président Requier, l’objet de cette proposition de loi est simple, mais n’en reste pas moins essentiel, puisque le texte corrige une malfaçon issue de la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire. Celle-ci n’avait rétabli l’obligation pour la cour d’assises de décerner un mandat de dépôt, à effet immédiat ou différé, que lorsque l’accusé comparaissait libre et qu’il était condamné à une peine d’emprisonnement ferme, laissant un vide s’agissant des accusés comparaissant détenus.
Un décret du 25 février 2022 portant application de l’article 367 du code de procédure pénale palliait cette incongruité, afin d’éviter que certains accusés ne soient remis en liberté par les juridictions, en prévoyant le cas dans lequel l’accusé comparaissait détenu et était condamné à une peine d’emprisonnement ferme.
La commission des lois a, par la voix de sa rapporteure Mme Maryse Carrère, retenu une rédaction plus concise pour préciser que l’arrêt vaudra titre de détention, lorsque l’accusé est condamné à une peine de réclusion criminelle, ou s’il comparaît détenu devant la cour d’assises. Ces dispositions seront également étendues à Wallis-et-Futuna, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française.
Le groupe RDPI votera donc la proposition de loi ainsi modifiée.
L’examen de ce texte démontre une nouvelle fois que le législateur n’est pas infaillible. Je suis moi-même intervenu, il y a tout juste un mois, en tant que rapporteur d’une proposition de loi visant à actualiser le régime de réélection des juges consulaires dans les tribunaux de commerce, dont l’objet était de réparer des malfaçons législatives introduites par la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte, du 22 mai 2019, à l’occasion de la réforme du régime électoral de ces juges.
Ce n’est finalement qu’une illustration supplémentaire des limites de la procédure accélérée et de notre propension à légiférer dans l’urgence, elles-mêmes induites par la densité de nos travaux.
Compte tenu de l’ordre du jour chargé du Parlement, peut-être serait-il opportun d’envisager de regrouper au sein d’un seul et même texte des corrections comme celles-ci.
Enfin, nonobstant la malfaçon législative qu’elle renfermait, je tiens à souligner – rapidement, rassurez-vous – les avancées de la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire. Je pense notamment aux procès filmés, aux enquêtes préliminaires limitées à deux ans, au secret professionnel des avocats ou encore à la généralisation des cours criminelles au 1er janvier 2023, qui sont en expérimentation dans quinze départements depuis septembre 2019.
Je suis conscient de la réticence que cette dernière mesure suscite chez certains, étant moi-même très attaché à la persistance des jurés populaires, qui sont l’expression de la participation des citoyens à la justice.
Néanmoins, je rappelle que les réformes des cours d’assises ont toujours été réalisées avec parcimonie – c’est la quatrième en vingt ans – et que la mise en place de ces cours a déjà permis l’abaissement du taux d’appel, la réduction du délai d’audiencement ainsi que d’éviter que certains crimes sexuels ne soient correctionnalisés.
En outre, les jurés populaires subsisteront au sein des cours d’assises traditionnelles, pour toutes les infractions punies de plus de vingt ans de réclusion criminelle, ainsi qu’en appel.
Si l’on se réfère aux crédits alloués à la justice ces trois dernières années, je ne vous ferai pas offense, monsieur le garde des sceaux, en vous disant que sans moyens, tant pour ce qui est des magistrats et du personnel judiciaire qui mènent ces audiences qu’en matière de locaux pour les accueillir, ces cours criminelles n’auront qu’une utilité relative sinon nulle.