Intervention de Thomas Dossus

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 15 novembre 2022 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2023 — Audition de mmes marlène schiappa secrétaire d'état chargée de l'économie sociale et solidaire et de la vie associative et sarah el haïry secrétaire d'état chargée de la jeunesse et du service national universel

Photo de Thomas DossusThomas Dossus :

Au-delà du quantitatif dont le bilan est plus que mitigé, il me semble que votre vision du SNU est un peu abstraite. Je vous citerai quelques exemples.

En juillet de cette année, une vidéo montre 130 jeunes épuisés, alignés dans la cour d'un centre SNU pour faire des pompes et du gainage. Plusieurs jeunes sont en pleurs, se plaignent de douleur. La vidéo a été filmée par les encadrants responsables de la punition.

Le 13 juillet, Le Canard enchaîné révèle que, lors des cérémonies du 18 juin, 31 jeunes participants au SNU ont fini aux urgences après avoir été laissés au garde-à-vous au soleil, en pleine canicule, pendant de longues minutes.

Le 2 août, le compte Twitter de la police nationale du Bas-Rhin vante l'organisation d'un stage de « menottage » avec des jeunes du SNU, atelier dans lequel ils sont invités à immobiliser leurs camarades, avec l'utilisation de menottes réservées normalement aux forces de l'ordre.

Ce ne sont pas des cas isolés, ils incarnent l'identité même du SNU : un moment qui se veut républicain, mais qui, vidé de toute substance, ne devient qu'un simulacre de service militaire - le maniement des armes en moins. Faux service, vraie caporalisation de la jeunesse.

Le SNU n'est pas le seul outil de caporalisation de la société déployé par le gouvernement.

Madame la ministre Schiappa, vous venez de parler de faciliter la vie des associations, la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République - dite loi « séparatisme » - a pourtant instauré les contrats d'engagement républicain (CER) que les associations doivent signer pour espérer obtenir un agrément, des subventions ou des avantages fiscaux.

Le résultat est prévisible et le mouvement associatif avait déjà alerté au moment de l'étude du texte : en septembre dernier, le Préfet de la Vienne a appelé à retirer les subventions à l'association écologiste Alternatiba en raison de l'organisation d'un atelier de désobéissance civile. Les contrats d'engagement républicain deviennent des outils utilisés contre la liberté d'expression et pour mettre au pas les associations militantes qui s'opposent à votre politique, on est loin de la lutte contre le séparatisme islamiste.

La vitalité associative et l'émancipation de la jeunesse ne sont pas des menaces pour notre république.

Si nous sommes dans un momentum, profitons-en, finissons-en : les crédits alloués au SNU - 140 millions d'euros cette année, avec un objectif de 1,5 milliard d'euros - seraient mieux utilisés dans le soutien à l'éducation populaire, dont les crédits sont pour la deuxième année consécutive inférieurs à ceux du SNU. Ce serait un signal appréciable envoyé à toute la société.

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