Intervention de Dominique Estrosi Sassone

Commission des affaires économiques — Réunion du 8 novembre 2022 à 17h30
Projet de loi de finances pour 2023 — Audition de M. Olivier Klein ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires chargé de la ville et du logement

Photo de Dominique Estrosi SassoneDominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis :

Je voudrais d'abord vous interroger sur le budget dévolu à l'hébergement d'urgence et à l'accès au logement, car donner un toit à chacun est la première des exigences. Les moyens du programme 177 sont importants, et l'État est globalement au rendez-vous financier via des PLF croissants et des ajustements en cours d'année. Cependant, le secteur a besoin de stabilité, de lisibilité et de moyens pour assurer l'accompagnement social, clé de la réussite de la politique du logement d'abord.

Très récemment, vous avez annoncé 40 millions d'euros supplémentaires pour maintenir un parc de 197 000 places en renonçant aux baisses programmées initialement. Pour autant, beaucoup estiment une telle enveloppe insuffisante au regard des coûts effectifs. Prévoyez-vous d'aller plus loin ? En termes d'accompagnement, les associations me font part de graves difficultés de recrutement et d'un problème d'attractivité des métiers. Je suis par exemple interpellée sur le fait que les écoutants des SIAO ne bénéficient pas des revalorisations obtenues par d'autres catégories de travailleurs sociaux. Allez-vous apporter une réponse à cette injustice ?

J'attire également votre attention sur la situation de certains gestionnaires de logements foyers ou de logements accompagnés. Elle peut être très difficile, compte tenu de la hausse des coûts de l'énergie. En effet, lorsque la facturation au résident est forfaitaire, le gestionnaire doit supporter l'essentiel de la hausse sans pouvoir la répercuter, alors que les hébergés bénéficient du chèque énergie. ADOMA et l'UNAFO ont présenté plusieurs pistes de solutions, dont l'attribution du chèque énergie aux gestionnaires, une modification des conditions de révision des forfaits ou encore une refacturation partielle des consommations excessives. Que comptez-vous faire à ce sujet ?

Ensuite, certains commencent à dire qu'il faudrait choisir entre la rénovation et la construction neuve. C'est bien un domaine où le « en même temps », que je ne privilégie en aucun cas, aurait pourtant tout son sens. La crise actuelle du logement est particulièrement grave, et ne cessera de s'aggraver, à court terme tout du moins. Faire un choix entre la rénovation et la construction neuve équivaudrait à revenir sur les conclusions de la commission Rebsamen. Elle avait pu aboutir à un consensus sur le besoin en construction neuve. Ce serait également dangereux au regard des besoins urgents d'accès au logement. Les bailleurs sociaux, mais aussi les promoteurs, sont très préoccupés par l'accès au foncier. Certains opérateurs s'inquiètent que le nouveau « fonds vert » conserve tous les avantages et la simplicité du fonds friche, qui s'est révélé efficace pour débloquer des dossiers complexes. Pourriez-vous nous rassurer sur ce point ?

En matière de rénovation, je suis préoccupée par un discours uniquement punitif vis-à-vis des propriétaires, bien loin d'être tous des « marchands de sommeil louant des logements indignes ». Beaucoup sont confrontés aux difficultés techniques et financières de la rénovation et pourraient retirer leurs biens du marché.

J'ai constaté dans votre entretien pour Le Parisien que vous évoquiez le statut du bailleur privé. Sachez que vous trouverez au sein de cette commission une écoute plus qu'attentive. Je plaide depuis de nombreuses années la nécessité de le mettre en place. Nous devons aider ces bailleurs privés, et non prendre des mesures coercitives à leur encontre. Je reste convaincue qu'un geste tel que l'actualisation du déficit foncier sur l'inflation serait un signal efficace pour les embarquer dans cette volonté de rénovation énergétique de leur logement. Surtout, cette décision empêcherait bon nombre de biens de sortir du marché locatif. Dans le cadre de la loi « Climat et résilience », j'avais même proposé un certain nombre de mesures fiscales et financières à destination des propriétaires, dont un doublement du déficit foncier.

MaPrimeRénov'Copropriétés prend progressivement de l'ampleur. On pourrait accélérer et débloquer progressivement certains dossiers en permettant à l'ANAH de doubler la prime pour les propriétaires modestes. De même, sans doute faut-il bouger les curseurs pour que le soutien à la rénovation globale soit toujours plus avantageux que celui aux gestes uniques de travaux. Pensez-vous pouvoir agir en ce sens ?

Enfin, les enjeux ne sont pas moins forts dans le parc social. Les bailleurs ont moins de marges de manoeuvre avec la RLS et la hausse des taux d'intérêt ou du livret A, qui pourraient à l'avenir peser davantage sur leur capacité d'autofinancement. L'USH a émis des propositions pour aller directement vers les meilleures étiquettes énergétiques, dans l'objectif de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC), et pour financer la deuxième vie des logements. Qu'en pensez-vous ?

Nous avons bien compris que ce budget était un budget de transition. Nous souhaitons maintenant obtenir de la visibilité sur le budget du logement pour les quatre années à venir. Il s'inscrit sur un temps long, mais jusqu'à présent, nous n'avons eu qu'à déplorer une politique de stop & go. Les opérateurs, privés comme publics, ne savent où aller et sont contraints dans leurs capacités à agir.

Comment pensez-vous matérialiser votre annonce sur l'interdiction des passoires thermiques sur les meublés de tourisme ? Un véhicule législatif ad hoc concernera-t-il cette mesure ?

Enfin, la Première ministre a annoncé l'extension du bouclier tarifaire sur le gaz aux ménages résidant en copropriété et en logement social à chauffage collectif. Quelles seront ses modalités de mise en oeuvre ? À Nice, j'ai rencontré certaines copropriétés, qui ont pris la décision de ne pas se chauffer, parce que les charges sont beaucoup trop importantes. Elles sont contraintes à des avances de charges, qu'elles ne parviennent pas à faire au regard du bouclier tarifaire, perçu beaucoup trop tardivement. Elles souhaitent bénéficier du même dispositif que les copropriétés actuellement en chauffage individuel au gaz.

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