Le texte sur l'assurance récolte, Monsieur Duplomb, n'est pas passé au forceps, puisqu'à l'issue d'un débat parlementaire où les points de vue ont été exprimés, les positions du Sénat ont été largement reprises, y compris sur le règlement omnibus - en réalité, vous avez obtenu ce que vous demandiez. Et nous savions qu'il fallait un dialogue avec les filières, nous avons vu qu'il y avait des différences, et je ne veux pas nourrir les oppositions entre filière, car nous avons intérêt à ce que le système fonctionne pour tout le monde. Vous me dites qu'il faut crédibiliser la loi par le budget ; certes, mais il faut aussi crédibiliser le budget lui-même. Or, si nous avons une trajectoire autour de 680 millions d'euros dans le triennal, nous en sommes cette année autour de 560 millions d'euros, mais nous ne connaissons pas encore la réaction précise des agriculteurs. Le Président de la République a dit qu'on visait 600 millions d'euros dans le triennal, et que l'État couvrirait sur ses deniers les dépenses si elles allaient au-delà, jusqu'à 680 millions d'euros. Nous avons un travail à faire, de conviction après des agriculteurs, nous le savons bien, des arboriculteurs par exemple ont besoin d'être convaincus de la solidité du système.
Sur les calamités naturelles, nous avons accéléré, pour 12 départements, le processus de reconnaissance, donc de traitement. Les indemnités étaient versées en mars-avril, désormais ce sera début décembre pour les 12 départements concernés. J'ajoute que, pour le système prairial, la reconnaissance satellitaire fonctionne dans 90 % des cas, c'est une avancée parce que si l'on dit qu'on doit partout faire une enquête de terrain, les délais seront trop longs. Nous allons travailler avec les secteurs, et, en cas de désaccord, on regarde les différences, mais il est important de dire que le système satellitaire fonctionne, même s'il peut être amélioré - je fais la comparaison avec la météo : ce n'est pas parce qu'elle se trompe parfois, qu'on doit s'en passer toujours.
Nous réintégrons le TO-DE dans le budget et nous avons perspective à trois ans, cela ne vous donne peut-être pas entière satisfaction, mais c'est intéressant, cela donne plus de prévisibilité. Il faut regarder maintenant s'il y a des ajustements à faire pour les filières où la main-d'oeuvre est un facteur déterminant de compétitivité.
Nous ajoutons 90 ETP à la police sanitaire, c'est là aussi un progrès, et nous devons, du fait du regroupement des effectifs, faire converger des cultures administratives qui sont loin d'être les mêmes, le tout en faisant davantage de contrôle. J'étais ce matin à Rungis, j'ai vu l'équipe de 36 contrôleurs, elle est significative et elle contrôle aussi bien à l'importation qu'à l'exportation. Je suis ouvert à ce qu'on regarde en détail la pertinence de l'affectation des agents compte tenu des risques et des besoins de contrôle, je crois que l'échelle pertinente n'est pas nécessairement départementale, il faut raisonner à l'échelle nationale. En tout état de cause, je partage votre sentiment qu'il faut, à travers le contrôle des clauses miroirs en particulier, crédibiliser nos dispositifs vis-à-vis de l'extérieur.
Nous travaillons à la délégation des contrôles. Les scandales sanitaires, s'ils sont rares, sont, par définition même, scandaleux, mais nous ne devons pas perdre de vue que nous sommes les meilleurs pour la sécurité sanitaire des aliments, nous n'en rabattons pas - et c'est aussi pour cette raison qu'il faut contrôler l'application des clauses miroirs. Nous travaillons à la délégation des contrôles à des organismes bien précis, par exemple ceux qui contrôlent déjà des végétaux et qui ont le niveau d'expertise suffisant.
Est-on en situation de suradministration ? J'ai été surpris, en prenant mon poste, de l'effet que peut avoir un oubli, comme dans l'exemple que vous citez, Monsieur Duplomb : dans les dossiers de la PAC dont on parle, il n'y a pas de droit à l'erreur. C'est pourquoi nous mettons en place le droit à l'erreur, où l'administration peut même s'enquérir de savoir, ça s'applique dans l'exemple que vous citez, si l'agriculteur n'a pas oublié de cocher une case pour une aide qu'il obtient régulièrement, où l'agent de l'administration traite ces questions avec bienveillance. Cependant, si la superposition des règles peut effectivement alourdir les dépenses - c'est un ancien maire qui vous parle -, les lois « Egalim » fixent des objectifs et ne pénalisent pas lorsqu'on ne les atteint pas - c'est le cas, par exemple, pour les emballages plastiques. Il faut donc être très attentif à la transition, pour laisser le temps aux agriculteurs de s'adapter aux règles quand elles changent.
Face au mal-être agricole, Madame Férat, je crois que nous ne devons pas méconnaitre que nous avons, collectivement, une responsabilité. Car si ce mal-être a des causes financières, il tient aussi à ce que la société dit des agriculteurs, en particulier les médias, il tient au regard que les agriculteurs sentent sur eux, aux critiques dont ils font l'objet, aux discours qui les font passer pour des pollueurs venus d'un autre temps. Nous ajoutons 12 millions d'euros pour faire face au mal-être agricole, il faut accompagner ces moyens pour dire aux agriculteurs qu'ils ont droit à des mesures pour améliorer leurs conditions de travail, mais aussi au répit, au remplacement, aux vacances - ce n'est pas une faiblesse, nous devons en faire la promotion.
Le plan de prévention se déploie, il est en place dans une cinquantaine de départements, j'ai piloté une réunion il y a deux semaines pour demander qu'il soit déployé complètement. Nous allons assouplir la procédure d'aide à la relance des exploitations agricoles et prévoir l'octroi du RSA en urgence. Les agriculteurs ne le demandent pas, mais cet octroi peut être utile en cas de chute soudaine des revenus. Nous devons nous assurer que les lois sur la revalorisation des retraites agricoles sont bien appliquées, je le demande aux préfets dans tous mes déplacements.
Dans le cas du suicide que vous citez, Madame Férat, où un contrôle avait précédé ce passage à l'acte fatal, j'ai diligenté une enquête administrative pour que l'on regarde comment s'était passé le contrôle. Il faut assumer la nécessité du contrôle, mais il faut aussi de la confiance dans les contrôles. Cela implique de maîtriser leur multiplication et aussi d'assurer que le contradictoire soit respecté, et il faut se garder de présenter toute erreur comme intentionnelle - même dans le contrôle, il faut une relation de confiance. Sur le cas particulier dont vous parlez, très douloureux, je pense à la famille de cet agriculteur et à ce qu'elle a vécu, ce drame pose la question du dialogue et de la confiance. Bien de fautes au regard de la réglementation tiennent à ce qu'on ne connait pas toujours la loi, et chacun sait ici qu'elle est complexe. Je travaille avec le directeur de l'OFB, pour faire connaitre les nouvelles règles de la PAC.
Sur les crédits vétérinaires, ensuite, la dotation n'a pas diminué mais le nombre d'étudiants a augmenté...