Intervention de Marie-Noëlle Lienemann

Commission des affaires économiques — Réunion du 23 novembre 2022 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2023 — Mission « cohésion des territoires » - crédits « logement » - examen du rapport pour avis

Photo de Marie-Noëlle LienemannMarie-Noëlle Lienemann :

Mon groupe est d'accord avec nombre des analyses et propositions faites par Dominique Estrosi Sassone, même si nous ne partageons pas tout à fait la même vision de ce que doit contenir le concept de « statut du bailleur privé ».

Notre groupe votera contre ces crédits parce qu'il y a trop de non-dits. En étudiant les documents publiés par la haute administration, de Bercy ou du logement, nous comprenons ce qu'ils ont théorisé : il faut construire moins. Ils semblent le justifier en arguant de la baisse démographique prévue. Mais cette baisse n'est pas certaine. De plus, le processus de décohabitation est toujours en cours et le mal-logement reste considérable. Enfin, pour procéder à leur calcul, ils divisent le nombre de logements et de mètres carrés par le nombre d'habitants, pour arriver à la conclusion qu'il y en a assez. Comme si tout le monde allait trouver un logement, spontanément et sur chaque territoire ! Comme ils refusent d'observer la situation de manière objective et de planifier de façon souple en fonction des besoins des territoires, la crise est chronique. Cependant, si la construction n'est plus un enjeu pour le Gouvernement, il se garde d'en faire part aux Français pour qui cette idée est inaudible.

J'en profite pour préciser que nous n'avons pas seulement besoin de constructions en zones tendues. En effet, d'autres besoins se font sentir en zones détendues, en moindre quantité et d'une autre nature qualitative. Les besoins dans les territoires sont variés et doivent être redéfinis.

En ce qui concerne le logement social et Action Logement, je voudrais rappeler que pour la partie énergétique, le plan de relance avait consacré 200 millions d'euros supplémentaires pour la rénovation des HLM sur deux ans. La première année, tout était déjà consommé et des dossiers sont encore en attente. Pourtant, si l'on consacrait 500 millions d'euros par an à cette question, on entrainerait une accélération de la rénovation dans le logement social, qui tirerait la filière sur l'ensemble du territoire.

Par ailleurs, nous sommes pris en étau sur la question d'Action Logement. En effet, si nous baissons sa contribution, l'État ne compensera pas. En même temps, on ne peut cautionner la manière dont l'État conçoit l'avenir de cet organisme.

Nous pourrions préparer une résolution du Sénat sur Action Logement, sur sa conception et son avenir. En effet, il nous faut préserver cet outil et demander une clarification juridique. Je ne suis d'ailleurs pas étonnée qu'un problème juridique se pose, puisque nous n'avons pas bien calé, au regard des critères européens, la Peec et la garantie de pouvoir conserver l'autonomie paritaire de l'organisme. Il faut trouver les moyens de sauvegarder ce paritarisme, structurant pour notre modèle social depuis le Conseil national de la Résistance.

En outre, même avec la prime accession, il est difficile de trouver des accédants modestes, en province, qui parviennent à acheter un logement parce que les banques ne leur prêtent pas en raison d'apports personnels insuffisants. Le prêt à taux zéro (PTZ) répond en partie à cette problématique. Nous avions obtenu d'Action Logement la création pour les salariés modestes d'une prime de 10 000 euros pour l'accession sociale. Cependant, il n'est pas certain qu'Action Logement puisse encore mettre en oeuvre ce dispositif. De plus, la mesure ne concerne pas les fonctionnaires, notamment ceux dont les métiers sont essentiels. Je déposerai donc un amendement pour que cette prime soit élargie, grâce à des financements de l'État, aux travailleurs essentiels dont les entreprises ne cotisent pas au dispositif du 1 % logement.

Quand nous avons entendu M. Béchu, qui est pourtant un élu local, dès que nous avons parlé logement, il a renvoyé la responsabilité vers les copropriétés ou les bâtiments publics. Mais la question des logements et de la fameuse résorption des passoires énergétiques reste aberrante.

Sans vision planifiée - au sens gaulliste du terme - établie avec les territoires dans un mouvement de consultation puis de planification centrale, nous n'atteindrons pas les objectifs fixés et les Français auront le sentiment que la classe politique leur ment. Peut-être faudrait-il demander à François Bayrou d'être entendu puisqu'il est chargé de la planification...

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