Intervention de Cécile Cukierman

Réunion du 6 décembre 2022 à 14h30
Limitation de l'engrillagement des espaces naturels et protection de la propriété privée — Vote sur l'ensemble

Photo de Cécile CukiermanCécile Cukierman :

Comme nous l’avons rappelé en première lecture, cette proposition de loi visant à garantir la libre circulation des animaux sauvages dans les territoires concernés par les pratiques d’engrillagement est bienvenue.

Si ce phénomène n’est pas nouveau, il n’est plus circonscrit à la Sologne et concerne aujourd’hui un nombre croissant de territoires. Lors d’une assemblée, le président de la Fédération nationale des chasseurs évoquait un véritable problème et expliquait que, si l’on ne réagissait pas rapidement, l’on finirait par avoir des cages partout en France.

Cette pratique, qui fait obstacle aux continuités écologiques, pose en effet des problèmes de sécurité incendie et de sécurité sanitaire, empêche la libre circulation de la faune, cantonne les populations de gibiers à l’intérieur des domaines, interdit la promenade et nuit au développement du tourisme rural. Elle traduit aussi une logique de privatisation de nos espaces forestiers, qui exacerbe les conflits d’usage.

Comme le souligne le rapport de mission interministérielle sur l’engrillagernent en Sologne, « il s’agit d’une appropriation renforcée de l’espace et un frein à l’exercice de la police de l’environnement, par une déviance du droit des enclos créant des zones de non-droit […] où la gestion “cynégétique” est littéralement aberrante ».

Le rapport mentionne même des installations de miradors et postes de tir mettant en danger les usagers des voies publiques.

Loin d’être un texte contre la chasse, cette proposition de loi met fin à une pratique – réservée à une très petite partie de la population, à une élite – qui s’apparente plus à un carnage. Je veux le dire ici : ce n’est pas là le sens de la chasse, n’en déplaise à certains !

De plus, ces barrières créent des risques sanitaires, liés à la surdensité et la maîtrise des populations. Elles interrogent sur l’égalité d’application du droit de la chasse, sur l’éthique, ainsi que sur l’illégalité de certaines pratiques, comme le souligne le rapport commandé par le ministère de la transition écologique et solidaire, en 2019.

En ce sens, la chasse en enclos contrevient au principe même d’une chasse populaire issue de la Révolution française, devenu acquis de la République.

En étendant le droit commun de la chasse à l’ensemble des territoires sur lesquels celle-ci est pratiquée et en renforçant l’accès aux enclos cynégétiques à des fins de contrôle, cette proposition de loi marque une avancée significative, même si nous pouvons regretter que le texte n’aille pas jusqu’à interdire la chasse en enclos à caractère commercial.

Ainsi, nous regardons comme une avancée la possibilité désormais offerte aux gardes de l’Office français de la biodiversité d’aller voir ce qui se passe dans ces enclos, sans avoir à saisir le juge des libertés et de la détention en cas de refus du propriétaire.

Nous nous réjouissons également de l’équilibre trouvé entre les deux assemblées quant à la sanction en cas de pénétration dans la propriété rurale ou forestière. La violation d’une propriété ne sera en effet sanctionnée par une contravention de quatrième classe uniquement dans le cas où le caractère privé du lieu est clairement identifié par une signalétique spécifique.

Les débats et la navette parlementaire aboutissent donc à un texte qui nous paraît prendre la bonne direction et pourrait être en mesure de contribuer – c’est le vœu que nous formons en cette fin d’année – à apaiser autant que possible le débat autour de la chasse dans notre pays, à faciliter cette pratique tout en en limitant les excès.

Cette proposition de loi, attendue par les chasseurs comme par les différents acteurs de nos territoires ruraux, va donc dans le bon sens et nous la voterons.

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