Depuis trente ans que je m'intéresse à la question, je ne compte plus le nombre de fois où nous avons constaté des difficultés considérables et trouvé des équilibres en urgence, grâce à des solutions bricolées. Tout le monde s'accorde à dire que les choses doivent bouger, mais personne n'est d'accord sur les solutions.
C'est pourquoi le Parlement s'autorise, en quelque sorte, à pousser les feux, afin de sortir par le haut de cette situation et de trouver des solutions de meilleure qualité, et sur lesquelles l'ensemble des parties pourront se retrouver.
François Rebsamen, coprésident de la commission Finances et fiscalité de France urbaine. - La démarche engagée par la commission des finances du Sénat est d'autant plus pertinente et stimulante qu'elle s'inscrit dans une perspective de moyen terme visant à dégager plusieurs scénarios.
Permettez-moi également de saluer le rapport de la Cour des comptes, à l'élaboration duquel France urbaine a participé par ses réponses. Les propositions que ses auteurs formulent sont intéressantes, nouvelles et, pour certaines - je pense aux droits de mutation à titre onéreux (DMTO) -, disruptives même si bien entendu, France Urbaine n'en partage pas l'intégralité.
Dans la recherche du consensus qu'appelle de ses voeux le président Raynal, la nécessité, pour le bloc communal, de disposer de recettes territorialisées devrait au moins nous rassembler. Un autre impératif, souligné depuis de nombreuses années, est la complète remise en cause des relations financières entre l'État et les collectivités.
Force est de constater que, quarante ans après la mise en oeuvre des premières lois de décentralisation - j'étais alors simple conseiller de Pierre Joxe -, bien des questions n'ont toujours pas trouvé de réponse.
Les « réformettes » fiscales qui se sont accumulées depuis ont toujours été conçues selon le seul point de vue de l'État, qui continue de considérer les collectivités locales comme étant par essence dépensières. La question des besoins des allocataires de l'impôt local que sont les collectivités locales est rarement posée. Il en a résulté une architecture des ressources totalement déresponsabilisée, qui est à l'origine d'une perte d'efficacité de l'action publique locale.
J'en veux pour preuve l'exemple de la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales ou encore le combat que j'ai dû mener, en tant que rapporteur de la Commission pour la relance durable de la construction de logements, pour obtenir des compensations raisonnables au bénéfice des collectivités.
Le rapport de la Cour des comptes met en avant le renforcement de l'autonomie fiscale, qui paraît plus adaptée au bloc communal. La loi ayant donné la compétence générale aux communes, cette piste devrait réunir un large consensus. Elle doit cependant s'accompagner d'une solidarité territoriale plus efficace et des péréquations que le Sénat a longtemps défendues.
Il n'est pas acceptable que la gouvernance des finances locales demeure aussi archaïque et soit placée sous le signe permanent de la défiance, en raison de la verticalité des relations entre l'État et les collectivités. L'absence de concertation sur la durée est un obstacle à l'installation d'une gouvernance efficace et responsable des finances locales.
Il importe de mieux associer les collectivités à la préparation des lois de finances, comme le précise l'enquête de la Cour des comptes. Il s'agit d'une priorité pour l'État. Plusieurs propositions ont été faites au fil du temps sur ce sujet. On ne peut pas accepter, par exemple, que les collectivités découvrent, au détour d'un « 49.3 », le report de deux ans de la révision des valeurs locatives.
La Cour des comptes propose notamment de mettre en place une autorité indépendante, qui émettrait un avis sur les projets de loi relatifs aux collectivités, dans le souci de veiller au respect du principe d'équilibre, ainsi qu'à la compensation des transferts de compétences, à la perte de fiscalité et à la réduction des inégalités entre les collectivités.
Cela étant, on écarte un peu facilement le Comité des finances locales (CFL), qu'il est impossible de balayer d'un revers de main. Il faut peut-être réfléchir aussi à un rôle renforcé et différent pour le CFL, qui est une émanation des collectivités locales. Comment lui donner plus de responsabilités ?
Autorité indépendante, CFL renforcé : les options sont devant nous. En tout état de cause, il faut trouver des solutions opérationnelles.
La Cour des comptes mentionne justement les deux possibilités : création d'une autorité indépendante ou renforcement du CFL. Avez-vous une préférence ?