Intervention de Pascal Martin

Réunion du 17 janvier 2023 à 14h30
Construction de nouvelles installations nucléaires — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Pascal MartinPascal Martin :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, au nom de laquelle je m’exprime aujourd’hui, salue le signal sans équivoque que constitue le texte soumis à l’examen du Sénat.

Après de trop nombreuses années d’atermoiements, ayant conduit à un délaissement de la filière nucléaire, préjudiciable pour le climat, mais aussi pour la préservation de notre souveraineté, la nouvelle impulsion énergétique et industrielle est bienvenue. Elle est même indispensable au maintien de la France à sa place de numéro un de l’électricité décarbonée et au soutien de l’électrification des usages prévue par la stratégie nationale bas-carbone, grâce à une production pilotable, en parallèle du développement des énergies renouvelables et de la réduction massive de notre consommation énergétique.

Notre commission a toutefois regretté la méthode consistant à aborder le particulier avant le cadre général : il eût été préférable, pour la clarté des débats politiques, de définir au préalable les objectifs de la politique énergétique dans le cadre de la loi de programmation sur l’énergie et le climat, qui doit être adoptée au Parlement dans le courant de l’année 2023.

En dépit des réserves et des remarques que je vous présenterai ici succinctement, notre commission a donné un avis favorable au présent projet de loi.

Compte tenu du champ très restreint du texte, de sa grande technicité et du calendrier des consultations actuellement à l’œuvre concernant les projets des six premiers EPR 2, ainsi que de l’élaboration de la stratégie française pour l’énergie et le climat, notre commission a souhaité apporter au texte des ajustements essentiellement juridiques, avec un double objectif : premièrement, améliorer la sécurité juridique et la lisibilité du texte, afin de limiter les risques contentieux qui affaibliraient la relance souhaitée du nucléaire français ; deuxièmement, encadrer les marges laissées au pouvoir réglementaire.

S’agissant du premier objectif, notre préoccupation principale a été de mieux définir la notion de proximité immédiate, telle qu’elle est proposée par le Gouvernement à l’article 1er.

Nous pensons que cette notion pourrait correspondre à toute implantation ne nécessitant pas de modification de la zone d’application et du périmètre du plan particulier d’intervention, aussi appelé PPI, des centrales nucléaires existantes.

À l’article 4, nous avons également souhaité définir plus précisément par voie réglementaire les bâtiments sensibles dont la construction ne pourra être entreprise qu’après la délivrance de l’autorisation de création et ceux, à moindres enjeux de sûreté, qui pourront commencer dès l’octroi de l’autorisation environnementale.

En ce qui concerne le second objectif visant à encadrer les marges laissées au pouvoir réglementaire, notre commission a souhaité que ce dernier soit contraint d’ordonner la mise à l’arrêt définitif d’une installation nucléaire de base ayant cessé de fonctionner pendant une durée continue supérieure à deux ans, dès lors que l’absence de volonté ainsi que l’incapacité de l’exploitant de remettre son installation en service dans des délais raisonnables sont constatées par la puissance publique.

Cette option nous semblait équilibrée et offrait une opportune valeur ajoutée : elle évitait les instructions inutiles, comme le souhaitent les auteurs du projet de loi, sans pour autant affaiblir le principe d’un démantèlement des installations, le plus tôt possible, après leur arrêt. Elle n’a pas été retenue lors de nos débats en commission.

Avant de conclure, j’aimerais rappeler que ce projet de loi, aussi bienvenu soit-il, aura un impact limité sur la relance du nucléaire français : l’accélération des procédures et la réduction du risque contentieux ne constituent que des leviers mineurs pour s’assurer du développement dans les délais souhaités d’un nouveau parc et de la prolongation du parc existant dans les conditions de sûreté adaptées.

Les défis à relever dépassent en réalité largement le périmètre du texte et sont de deux ordres, ayant trait à la capacité des pouvoirs publics et du secteur, d’une part, à opérer une indispensable montée en compétences de la filière, et, d’autre part, à assurer une acceptabilité locale et nationale autour de la relance du nucléaire.

En résumé, il conviendra en 2023 de donner une visibilité suffisante aux acteurs du nucléaire : l’anticipation, indispensable à la fois à la montée en compétences de la filière et à l’acceptabilité du nouveau programme, constitue sans aucun doute la meilleure réponse aux défis qui s’annoncent pour le nucléaire français.

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