Intervention de Muriel Jourda

Réunion du 1er février 2023 à 14h30
Droit fondamental à l'interruption volontaire de grossesse — Article unique

Photo de Muriel JourdaMuriel Jourda :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, j’avoue que j’ai quelques difficultés à reconnaître le Sénat dans les débats qui nous animent et qui nous animeront peut-être encore longtemps, puisque pas moins de six propositions de loi ont été déposées sur ce sujet…

J’ai des difficultés à reconnaître notre assemblée, parce que nous nous vantons souvent d’une certaine sagesse sénatoriale. Or je ne la vois pas ici, car en réalité nous réagissons, comme de vulgaires tabloïds, à un événement qui ne nous concerne pas et ne nous regarde pas : une décision de la Cour suprême des États-Unis qui n’a aucun impact sur la France, de la même façon que notre vote n’en aura aucun sur les États-Unis. Cette situation me paraît assez surprenante !

Je suis également étonnée, car nous avons l’habitude de faire preuve d’une certaine objectivité. Or j’entends que nous débattons de l’IVG comme si c’était le sujet de cette discussion et comme si une menace pesait vraiment en France sur cette liberté des femmes.

Mes chers collègues, vous savez que cela n’est pas le cas ; vous savez que nous ne discutons pas de l’IVG et que, même si l’on brandit assez facilement la menace de l’extrême droite qui pourrait nous priver de cette liberté, ses élus ont majoritairement voté, à l’Assemblée nationale, pour la constitutionnalisation de l’IVG. Là encore, nous manquons d’objectivité.

Généralement, nos débats sont empreints d’une certaine rigueur juridique. Aujourd’hui, j’entends parler de la Constitution comme si c’était un fourre-tout dans lequel nous pourrions inscrire tout ce qui nous tient à cœur, et qui serait alors protégé comme dans un coffre-fort.

Là encore, vous savez que c’est faux. La Constitution est l’ensemble des règles qui régissent nos institutions : elle n’est pas intangible, puisque nous l’avons modifiée vingt-quatre fois depuis 1958. La liberté dont nous débattons aujourd’hui n’a probablement pas grand-chose à y faire, même si le Conseil constitutionnel a indiqué qu’elle découlait d’une liberté déjà prévue dans la Constitution, la liberté des femmes.

Enfin, j’ai l’habitude ici d’un certain respect. Or j’entends que certains auraient des positions dignes et d’autres, non. Nous avons toujours des positions dignes dans cet hémicycle ; elles sont diverses, mais elles doivent pouvoir être acceptées.

Pour ma part, je ne voterai pas ce texte.

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