Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’associe à mon intervention mon collègue de Haute-Loire, Laurent Duplomb, qui ne peut prendre la parole ce soir en raison d’un malheureux contretemps.
Produits laitiers, fruits et légumes, viande, céréales et légumineuses, voilà quelques produits de première nécessité que chaque Français trouve chaque jour sur sa table grâce à nos agriculteurs, qui travaillent dur pour nous procurer la nourriture made in France que nous consommons toute l’année.
Ces produits de qualité, nous les devons entre autres au travail de Jacky, éleveur laitier, ou de Régis, éleveur de porcs, qui, à raison de soixante-dix heures à cent cinq heures de travail par semaine, sept jours sur sept, touchent aujourd’hui respectivement 1 027 euros et 926 euros mensuels de retraite.
Tous ces travailleurs sans relâche, que je connais personnellement, ont nourri les Français bien souvent 365 jours par an, avec des congés quasi inexistants. Le service rendu, vous en conviendrez, mes chers collègues, au-delà de la richesse produite, est inestimable. En sommes-nous suffisamment conscients et reconnaissants ?
À l’heure où notre souveraineté alimentaire donne des signes d’inquiétude, où il nous faut encourager ceux qui consacrent leur vie à ce métier fondamental, quel sort notre société réserve-t-elle aux travailleurs de la terre ? Au regard des montants de retraite que je viens de citer, il n’est pas glorieux !
Certes, le système de retraite des non-salariés agricoles est un montage complexe, fruit de compromis historiques successifs reposant sur des bases de calcul qui ont évolué au cours du temps. Cependant, comment faire perdurer un décompte aussi obsolète ?
Comment justifier la prise en compte de l’intégralité de leur carrière, alors qu’ils sont les premiers confrontés à des aléas climatiques et sanitaires, à un début de carrière en tant qu’aide familial comptabilisé comme un revenu zéro et à une première année d’installation blanche ? Et cela alors que la majorité des Français bénéficient de la prise en compte des vingt-cinq meilleures années. Mettre fin à cette inégalité de traitement nous honorerait, mes chers collègues.
Si le principe de cette réforme ne saurait trouver d’opposants parmi nous, sa mise en œuvre n’est en revanche pas si simple et requiert prudence, finesse juridique et délais d’évaluation.
Prudence, car il convient de bien peser les conséquences de cette réforme pour qu’elle ne puisse en aucun cas se révéler défavorable aux agriculteurs.
Finesse juridique, car il s’agit d’une articulation subtile entre la loi, qui détermine l’architecture duale du système de retraite de base des agriculteurs, et le règlement, qui prévoit son mode de calcul et son fonctionnement à points.
Délais d’évaluation enfin, car cette réforme mettra fortement à contribution les services de la MSA pour retracer toutes les carrières et nécessitera une analyse rigoureuse des situations ainsi que des conditions exigibles en fonction des différents statuts, afin d’aboutir, je l’espère, à un nouveau mode de calcul pertinent.
Voilà l’objet du consensus qui s’est dégagé de la rédaction votée à l’Assemblée nationale. Il s’agit d’une position sage, que nous devons tenir, malgré nos tentations d’améliorer le texte, si nous voulons aider les agriculteurs et mettre fin dans un avenir proche à ce mode de calcul dépassé de leur pension.
Ne pouvant juger de l’issue de la future réforme des retraites, il convient d’aller au bout de cette proposition de loi et de tenir notre cap, afin de réparer l’injustice faite depuis trop longtemps aux agriculteurs. Aussi, mes chers collègues, dans un esprit de responsabilité, parce qu’ils nous nourrissent et qu’ils méritent toute notre reconnaissance, je voterai bien évidemment ce texte.