Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les confinements des dernières années ont mis un coup d’arrêt brutal à la circulation des personnes.
La pandémie est désormais sous contrôle et les déplacements de population ont repris. Qu’ils soient légaux ou non, ils sont à présent en pleine expansion. Ainsi, selon l’Union européenne, on dénombrait environ 330 000 franchissements irréguliers de notre frontière commune pour l’année 2022.
La prise du pouvoir par les talibans en Afghanistan, le chaos libyen ou encore celui de Syrie continuent d’alimenter ces mouvements de population.
En 2015 déjà, l’Europe avait connu une crise migratoire majeure. L’Union européenne avait alors délégué le contrôle de ses frontières à la Turquie d’Erdogan, lequel s’était empressé de s’en servir comme d’un formidable moyen de pression.
Avec nos partenaires européens, nous prenions alors conscience que la libre circulation en Europe était certes une chance, mais qu’elle constituait également une source de vulnérabilité majeure si la frontière extérieure n’était pas soigneusement contrôlée.
En 2014, le budget de Frontex, agence chargée de contribuer à ce contrôle, s’élevait à 93 millions d’euros. Moins de dix ans plus tard, ce budget a été multiplié par neuf.
Prenant conscience de l’importance de sa mission, les États membres ont doté Frontex des moyens les plus importants jamais octroyés à une agence. Dans un délai de quatre ans, ses effectifs opérationnels devraient ainsi atteindre 10 000 agents.
Les temps futurs s’annoncent difficiles. Les crises géopolitiques se multiplient. Les manœuvres biélorusses de novembre 2021 nous rappellent que les flux migratoires peuvent être employés comme des armes de déstabilisation. Il est donc essentiel d’augmenter les moyens consacrés à la surveillance de nos frontières.
Si Frontex rencontre des difficultés dans l’accomplissement de ses missions, cela tient principalement au fait qu’elle doit protéger les frontières européennes sans porter atteinte aux droits fondamentaux des migrants. Ce dernier point est essentiel : l’Union européenne, puissance normative, ne peut admettre que le droit soit bafoué !
La présente proposition de résolution européenne nous semble tout à fait équilibrée et nécessaire. Nous partageons le souhait de saluer le travail de Frontex et la volonté de lui témoigner notre confiance. Nous appelons donc au renforcement de ses moyens.
En inscrivant cette proposition de résolution à l’ordre du jour, les groupes Écologiste – Solidarité et Territoires et Socialiste, Écologiste et Républicain ont tenu à exprimer leurs préoccupations quant au respect des droits fondamentaux des migrants. Celles-ci sont légitimes, mais il ne faut pas perdre de vue la raison d’être de Frontex : la surveillance des frontières européennes.
Si la Grèce a procédé à des refoulements illégaux, si la Pologne n’a pas souhaité faire appel à Frontex afin d’avoir les coudées franches, si la Hongrie a construit un mur de barbelés, si le Royaume-Uni et le Danemark ont envisagé de renvoyer leurs migrants vers le Rwanda, si l’extrême droite est au pouvoir en Italie, et pourrait l’être demain dans d’autres États européens, c’est bien le signe que quelque chose ne va pas !
La France doit disposer d’une véritable politique migratoire qui s’appuie sur un socle de valeurs républicaines, comme la maîtrise de la langue, la laïcité ou encore l’égalité entre les hommes et les femmes. C’est une attente légitime de nos concitoyens.
La politique migratoire plus stricte menée par le Danemark doit nous inspirer. La situation migratoire européenne n’est plus acceptée par nos concitoyens et il est urgent d’agir. Il sera sans doute indispensable, à terme, de revoir nos procédures, aussi bien en matière de droits fondamentaux que d’entrées sur le territoire européen, pour faire respecter notre législation.
Pour l’heure, nous pensons qu’il faut laisser à Frontex le temps de monter en puissance et d’intégrer les nouvelles composantes qui lui ont été adjointes. Un contrôle politique nous paraît essentiel, car c’est au politique de prendre les décisions et d’en assumer les conséquences.