Il ne m'appartient pas de justifier l'étude d'impact. Cela étant, le solde financier du régime général se détériore. (M. Renaud Villard présente un graphique.) Comme vous le voyez, la pente de la courbe s'apparente à une piste rouge, voire noire. Nos chiffres sont ceux du Conseil d'orientation des retraites (COR), il n'y a pas l'épaisseur d'une feuille de papier à cigarette entre nous : les faits sont têtus, et la perspective du solde est très dégradée. À l'horizon 2032, la réforme entraîne à la fois des dépenses réduites et des financements nouveaux, mais aussi certaines dépenses nouvelles.
Nos chiffres convergent avec ceux de l'étude d'impact, car ces derniers ont largement été produits par les équipes de Pascale Breuil. Sans prendre position sur la réforme, madame la rapporteure générale, oui, le déficit du régime général, et celui de son agrégat avec le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), est bel et bien croissant. Cette réponse est aussi celle du COR.
L'effet de l'intégration de quelques dizaines de milliers de nouveaux cotisants est relativement simple à gérer, car nous en avons déjà 22 millions. L'intégration du régime de la SNCF s'est d'ailleurs faite sans difficulté. Toutefois, les régimes spéciaux conserveront une identité propre, notamment pour la branche maladie : il faudra donc construire des échanges en gestion, notamment pour les trimestres validés au titre de la maladie et de la maternité. Nous menons déjà de tels échanges avec la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) pour le régime général.
Ensuite, sur les trimestres accordés aux femmes ayant eu des enfants, je rappelle qu'il y a trois types d'avantages liés à la maternité : le congé maternité, le congé parental, c'est-à-dire l'assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF), et la majoration de durée d'assurance. Celle-ci correspond à huit trimestres supplémentaires pour chaque enfant. Le congé maternité est, aujourd'hui, transparent en matière de retraite. En effet, il est recevable en durée d'assurance comme en durée cotisée et, depuis 2010, permet le report au compte des 25 meilleures années d'un salaire égal au Smic.
L'AVPF est transparente en matière de durée d'assurance, mais elle n'est prise en compte ni pour les carrières longues ni pour le minimum contributif. Le PLFRSS prévoit de prendre en compte une partie de ces trimestres de congé parental - ceux pendant lesquels la mère interrompt son activité pour s'occuper de ses enfants, c'est-à-dire l'essentiel des cas - dans le cadre de ces deux dispositifs.
Enfin, la majoration de durée d'assurance s'apparente à un bonus quelque peu hors sol, sur l'ensemble de la carrière, de huit trimestres par enfant. Effectivement, ce bonus n'est pas pris en compte pour les carrières longues, et le PLFRSS ne modifie pas cet état de fait. Ainsi, une mère de trois enfants bénéficie de six années d'assurance supplémentaires, c'est-à-dire qu'elle peut théoriquement atteindre la durée requise pour ce taux plein à 56 ans aujourd'hui et 58 ans demain. De ce fait, les femmes partent globalement plus tôt que les hommes : la réforme n'a pas d'effet sur cet état de fait. La retraite moyenne des femmes augmentera du reste davantage que celle des hommes.
En revanche, leur âge moyen de départ à la retraite tend à se rapprocher de celui des hommes. Cela résulte, non du PLFRSS, mais de l'allongement de la durée de travail des femmes. En 2021, deux courbes se sont croisées, celle de la durée d'assurance des femmes et celle de la durée d'assurance des hommes. Jusqu'en 2021, cette dernière était plus longue. Ainsi, l'âge moyen de départ à la retraite des femmes se rapproche de celui des hommes, parce que leurs carrières se rapprochent aussi, sur le plan de la durée d'assurance.
Le chiffrage de la surcote évoquée par M. Savary est simple : une année de surcote est neutre pour un régime de retraite. Par exemple, une année de surcote de 5 % pour un départ à la retraite à 64 ans équivaut à faire partir la personne à 63 ans - de même pour une surcote de 10 % pour un départ à 64 ans au lieu de 62 ans. Il s'agit d'un calcul actuariel : partir 64 ans revient à bénéficier, en moyenne, de 22 ans de retraite au lieu de 24.
Vous soulevez la question de l'articulation entre retraite de base et retraite complémentaire. La loi de 2003 fixait l'objectif, politique, mais non normatif, d'une pension globale égale à 85 % du Smic pour une carrière complète au Smic. Depuis, on a décroché de 100 euros. Or, une retraite se compose d'une pension de base et d'une pension complémentaire, cette dernière étant gérée par les partenaires sociaux. Le PLFRSS prévoit d'augmenter de 100 euros le minimum contributif, et donc de faire reposer sur la seule pension de base la compensation de ce décrochage, pourtant dû en partie à la pension complémentaire. Cela s'explique parce que le législateur n'est pas décisionnaire en ce qui concerne le régime complémentaire, mais cet effort pose un problème de financement.
Quant au seuil de 1 200 euros, 1,8 million de personnes bénéficieront du coup de pouce de 100 euros.