Intervention de Daniel Chasseing

Commission des affaires sociales — Réunion du 8 mars 2023 à 11h00
Proposition de loi relative aux outils de lutte contre la désertification médicale des collectivités — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Daniel ChasseingDaniel Chasseing, rapporteur :

Le risque de concurrence a été évoqué, mais il n'existe pas dans la mesure où le dispositif vise les cas où un médecin vient s'installer et a déjà pris sa décision. J'exerce comme médecin depuis des dizaines d'années. J'ai toujours eu la même secrétaire, et elle n'a jamais été formée : il n'y a pas besoin de diplôme spécifique. Mme Le Houerou a assisté aux auditions : le médecin que nous avons entendu est d'ailleurs dans la même situation que moi, il est assisté d'une secrétaire qui n'a pas été formée. Ma secrétaire accueille les patients et les connaît : ils s'adressent à elle pour demander la prolongation de leur ordonnance, etc. À la fin de la journée, elle me transmet tous les dossiers à régler. C'est une aide indispensable. S'il n'a personne pour l'aider, un médecin ne s'installera pas.

Une formation particulière est-elle nécessaire ? Je n'en suis pas convaincu. Sans doute certains médecins dictent-ils leurs lettres, mais pas tous. Peut-être faut-il savoir utiliser un ordinateur pour rentrer des données, et encore, ce n'est pas systématique. La principale qualité requise des secrétaires qui exercent dans les cabinets médicaux est d'aimer les patients, de savoir les accueillir et travailler avec les médecins. Nul besoin de diplômes pour avoir ces qualités.

N'ayons pas d'inquiétude concernant le respect du secret médical : il appartient aux médecins de l'expliquer au personnel mis à disposition. Je rappelle aussi que les fonctionnaires territoriaux sont soumis au secret professionnel.

La mise à disposition se fera sur la base du volontariat.

En ce qui concerne les auditions, les syndicats de médecins soutiennent ce texte. Les maires ruraux craignent qu'il ne crée une nouvelle charge sur les collectivités, mais il ne s'agit pas d'une mise à disposition permanente et le remboursement par les médecins est obligatoire.

Il ne faut pas craindre de concurrence entre les collectivités, car ce n'est pas cette mesure, à elle seule, qui fera venir un médecin. Elle vise à l'aider, si la collectivité le peut, pendant trois mois. Il s'agit d'un dispositif d'amorçage, qui vise à accompagner un médecin qui arrive, notamment s'il vient de l'étranger.

Le problème de fond est celui du manque de médecins, c'est vrai. En effet, il appartient à l'État de former davantage de médecins. Mais cela ne se fera pas instantanément, et d'ici là, il nous appartient de répondre à la désertification médicale en oeuvrant à une meilleure répartition des médecins sur le territoire.

La coordination avec les assistants médicaux est nécessaire, évidemment, mais elle n'intervient que dans un second temps. Le dispositif vise à aider le médecin lors de son installation. Si celui-ci a embauché quelqu'un, ce ne sera pas nécessaire. Je pense à la maison de santé où j'exerce, qui compte six infirmières, deux kinésithérapeutes, deux orthophonistes et des médecins spécialistes vacataires : il s'agit d'une personne pour assurer l'accueil, faire la coordination entre tous les acteurs. Un assistant médical n'a pas la même fonction.

Sur l'aspect financier, les médecins n'ont pas à payer les frais des cabinets libéraux et le médecin devra donc rembourser la collectivité. Les mises à disposition à titre gratuit sont d'ailleurs interdites, sauf dérogation ; et ce texte ne prévoit pas de dérogation. Souvenons-nous que, dans le PLFSS, nous avons soutenu l'installation en exercice libéral. Le médecin libéral embauche une personne pour assurer l'accueil ou le secrétariat ; dans les centres de santé gérés par des collectivités, ce sont les collectivités qui prennent à leur charge le secrétariat.

Il n'y a pas d'imprécision dans la définition des zones sous-denses. Elles sont définies à l'article L. 1434-4 du code de la santé publique et déterminées par les directeurs généraux des ARS sur la base d'une méthodologie fixée par arrêté.

Ce texte ne résoudra pas la question du manque de médecins, mais vise à faciliter l'installation en zones sous-denses. Des maisons de santé peuvent dépendre de communes ou d'intercommunalités. Chaque cas est particulier. Encore une fois, il s'agit d'offrir de la souplesse en cas de besoin pour aider le médecin pendant quelques mois. J'aimerais préciser que le texte ouvre non seulement aux communes, mais aussi aux EPCI, départements et régions la possibilité de mettre à disposition leur personnel auprès de médecins libéraux.

Il ne faut pas craindre un élargissement de la mise à disposition à tous les professionnels libéraux. Là encore, cette proposition de loi a une portée bien définie : aider un médecin à titre provisoire pour faciliter son installation dans un territoire qui manque de médecin. Il ne s'agit pas de financer un médecin.

Le risque de déménagement du médecin d'une zone sous-dense à une autre existera toujours. Il s'agit d'aider un médecin qui souhaite venir à s'installer, mais s'il n'est pas accompagné, il partira quoi qu'il arrive. Ce n'est pas une question de concurrence entre territoires.

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