Intervention de Marie-Christine Blandin

Réunion du 30 juin 2011 à 15h00
Interdiction de l'exploration et de l'exploitation des mines d'hydrocarbures par fracturation hydraulique — Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixte paritaire

Photo de Marie-Christine BlandinMarie-Christine Blandin :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je regrette fortement que ce ne soit pas pour valider la proposition de loi déposée par Nicole Bricq que nous sommes aujourd'hui réunis. J’avais en effet cosigné ce texte avec plaisir, parce qu’il avait le mérite de s’attaquer au fond du problème : il interdisait purement et simplement l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures de roche-mère. Les permis exclusifs de recherches, dont on sait avec quelle transparence et quel discernement ils ont été délivrés, auraient ainsi été définitivement abrogés et rendus impossibles. La volonté populaire majoritaire et la demande de ses représentants auraient, quant à elles, été entendues.

La proposition de loi que nous examinons ce jour présente au contraire bien des ambiguïtés et des lacunes, qui se sont aggravées au fil de la navette et de son passage en commission mixte paritaire.

Son principal défaut est de ne s’attaquer – d’ailleurs tout à fait partiellement ! – qu’à la méthode d’extraction par fracturation hydraulique, au demeurant qu’elle ne définit pas, laissant une confortable faille à qui veut s’y glisser. Elle ne touche pas en revanche au cœur du problème qu’est l’utilisation d’une « nouvelle » ressource fossile dispersée au sein d’une formation de roche non poreuse qu’il faut fissurer pour en permettre l’extraction.

L’abrogation des permis en cours emprunte des chemins tortueux qui laissent aux exploitants toute latitude pour observer une attitude passive et conserver leurs droits dans le temps en ne mentionnant pas l’utilisation des techniques de fracturation hydraulique.

Si elle ne les autorise plus explicitement à l’article 1er, la proposition de loi continue en effet de faire référence à de telles techniques, aux articles 1er bis et 4. Que veulent ses auteurs ? Les citoyens ont le droit de savoir !

Oui, la méthode de fracturation hydraulique pose de nombreux problèmes environnementaux et sanitaires, et il est urgent de faire en sorte qu’elle ne se pratique pas sous nos sols. Mais, d’une part, le Gouvernement n’a pas besoin de cette proposition de loi pour suspendre et abroger les permis exclusifs qu’il a accordés. D’autre part, ce texte ne répond pas à l’exigence minimale d’interdiction de la fracturation hydraulique, puisqu’il laisse la porte ouverte à la prospection et à l’expérimentation.

Enfin, comment pouvez-vous faire mine d’ignorer les retours d’expériences extrêmement négatifs des pays comme les États-Unis ou le Canada, qui, depuis une dizaine d’années, utilisent cette technique ? On prévoit d’expérimenter comme si l’on ne savait rien ! Pourtant, les rapports d’information confirment, les uns après les autres, les dégâts causés à l’environnement lorsqu’il y a fracturation de la roche, y compris par des techniques autres que l’injection de fluides.

Une fois de plus, les questions liées au choix des énergies fossiles et carbonées ne sont pas posées.

Avec le recours à ce type de ressource souterraine, plus compliquée à exploiter et coûteuse sur le plan environnemental, économique et sanitaire, l’apport irresponsable de gaz à effet de serre, qui accélère le changement climatique par un bilan carbone particulièrement chargé, où sont passés les engagements de la France de diviser par quatre ses émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050 ?

Madame la ministre, face à l’unanime mobilisation des territoires contre vos initiatives, vous faites de la communication avec le mot « interdire », mais vous laissez les portes ouvertes pour les industries gazières et pétrolières.

Pourtant, la question de l’exploitation des hydrocarbures de la roche-mère est grave et mérite un arbitrage clair, rendu en connaissance de cause. Les risques environnementaux – consommation d’eau, dispersion de polluants, contamination des nappes phréatiques, perturbation des sous-sols, bilan carbone négatif... – ont été longuement évoqués lors des discussions précédentes.

Aux articles 1er bis et 4, vous prévoyez respectivement la création d’une commission ainsi que la rédaction d’un rapport afin d’en savoir davantage. Pour ma part, je vous propose, à la place de ces articles, de gagner du temps et de l’argent public.

L’Agence de protection environnementale des États-Unis, l’EPA, peut vous donner toute la liste des composants des fluides de fracturation. L’Institut national de santé publique du Québec, l’INSP, met à votre disposition les effets des 20 millions de litres d’eau utilisés pour chaque puits.

Enfin, voici le rapport réalisé par la très sérieuse Association Toxicologie Chimie, sous la direction d’André Picot, toxicologue expert auprès de l’Union Européenne

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