Le shadow banking est un sujet qui est lié au renforcement très puissant de la réglementation dans le secteur bancaire.
Depuis 2009, on a considérablement renforcé les obligations pesant sur les banques : je pense aux obligations de fonds propres, qui auront été multipliées au moins par cinq, mais parfois plus pour les institutions identifiées comme étant systémiques. On a mis en place des règles contraignantes, par exemple en termes de rémunération des opérateurs de marchés. Ces règles ont été transposées en droit interne français par un certain nombre de textes, y compris réglementaires, avec des pouvoirs intrusifs donnés à l'Autorité de contrôle prudentiel pour vérifier que ces standards sont respectés. Donc, dans toute une série de domaines, et ce sera également le cas en matière de supervision et de résolution des banques, on a renforcé le contrôle sur les banques.
Le problème est que, ce faisant, on renforce les incitations à faire dériver un certain nombre d'activités de nature bancaire vers des acteurs non bancaires. Il peut s'agir d'un trust, d'une compagnie d'assurance, d'un hedge fund, un fonds de gestion collective.
Si l'on ne prend pas garde à avoir des règles compatibles entre elles ou, a minima, comparables, on créera une forte incitation à faire dériver un certain nombre de pratiques et d'activités d'un domaine vers l'autre. C'est l'origine des travaux sur le shadow banking.
C'est d'ailleurs un travail qui a été impulsé, notamment sur notre initiative, lors d'une assemblée plénière du Conseil de stabilité financière en octobre 2010, en Corée du Sud. Quand nous avons dit qu'il fallait traiter ce sujet, au début on nous a regardés un peu bizarrement : quel est le sujet ? Aujourd'hui - cela a été entériné dans le cadre de la présidence française du G20 l'année dernière et cela a fait l'objet de travaux hier à Hong Kong dans le cadre de l'assemblée plénière du FSB, le communiqué de presse publié ce matin en atteste -, nous progressons. Le sujet est complexe puisque l'on traite d'opérateurs qui sont le plus souvent régulés, mais qui justifient d'une régulation différente.
Je pense aussi à la titrisation, une activité importante qui relève de ce domaine, mais qui peut présenter des différences, par exemple en termes de contraintes pesant sur la solvabilité, la liquidité, la rémunération des opérateurs. Tel est l'essentiel des travaux en cours sur le shadow banking.
Il y aura évidemment des interactions possibles avec ce qui vous intéresse, mais, aujourd'hui, la problématique n'est pas nécessairement concentrée sur ce sujet-là, notamment dans la mesure où toute une série de ces opérateurs sont par ailleurs régulés. La réglementation en matière de lutte contre le blanchiment s'applique aussi bien à des opérateurs non bancaires qu'à des opérateurs strictement bancaires.
C'est un axe de programme qui permettra aussi d'avoir un oeil sur les problématiques d'évasion fiscale ou de fraude, qui n'est pas le fait générateur de cette réflexion, mais qui, de manière générale, consiste à vérifier que la sphère bancaire n'est pas la seule à justifier d'une attention forte des régulateurs et des superviseurs pour éviter que tout ce qui, en réalité, peut créer un problème pour le système financier dans son ensemble ne parte vers d'autres domaines qui seraient régulés, mais qui présenteraient des opportunités pour des activités qui seraient mieux régulées dans le secteur bancaire.