Comme vous l'avez peut-être compris, si nous n'avons pas souhaité faire de PPRE, c'est parce que, avec Philippe Bonnecarrère, nous sommes d'accord sur nos désaccords. Il était difficile de proposer une PPRE qui marque une direction très précise car nous avons des sensibilités différentes sur ce point.
Je me permets d'ajouter qu'il y a quand même un sujet sur lequel nous sommes vraiment en désaccord avec Philippe Bonnecarrère : la primauté du droit communautaire est un combat de la CJUE, qui manifeste des résistances et en manifestera toujours. Le Brexit met cette primauté sous tension. Contrairement à la position qui consiste à penser que, c'est en réaffirmant la primauté du droit communautaire que l'on donne de la robustesse à l'Union européenne, je pense que c'est en affrontant toutes les contradictions que l'on a entre nous et avec l'extérieur, et en affrontant le contrôle externe que l'on consolidera l'UE. La perception d'une Union européenne nous obligeant à aller à l'encontre de notre Constitution est un sujet sensible ; par conséquent, il ne faut pas considérer que la CJUE se trouve au sommet d'une pyramide et que tout ce qui la remettrait en cause est un danger pour l'Union. Je ne conteste pas son rôle essentiel. Encore la semaine dernière, sur le fait d'affirmer la liberté académique en Hongrie, la CJUE a joué son rôle. Mais je pense que le dialogue doit être favorisé, et non la préservation à tout prix d'une hiérarchie. Aussi, si nous voulons faire en sorte que les droits de l'Homme soient défendus en Turquie et en Russie, l'Union européenne ne peut pas être sur la réserve face à la Cour de Strasbourg, qui n'est pas un groupe de juges qui ne feraient que condamner les États par rapport à des requêtes de leurs citoyens. Bien au contraire, les juges nationaux ont un rôle particulier et il serait utile que l'Union européenne dispose d'un juge siégeant à la Cour de Strasbourg.