Je commencerai par demander le retrait de l’amendement n° 225 rectifié quater, qui vise à ajouter à la surface minimale de développement communal celle des bâtiments agricoles ; j’émettrai tout à l’heure un avis favorable sur un amendement à l’objet similaire.
Sur l’amendement n° 60 rectifié bis, pour répondre à la demande d’explication supplémentaire formulée par M. Brisson, je rappelle que les communes régies par le RNU ne sont pas soumises à un objectif communal de réduction de l’artificialisation ni concernées par le processus de territorialisation ; elles ne sont donc pas incluses dans le champ de notre dispositif. Il faut bien noter que nous ne parlons pas ici de droit à construire général : on touche simplement à ce qui sera décompté ou non comme de l’artificialisation et pas aux règles de constructibilité du droit de l’urbanisme. C’est pourquoi la commission spéciale émet un avis défavorable sur cet amendement.
La commission spéciale demande également le retrait de l’amendement n° 237 rectifié quinquies ; à défaut, elle émettra un avis défavorable. En effet, il est déjà satisfait en ce qui concerne les intercommunalités disposant d’un PLUi, puisqu’elles n’auront qu’un objectif intercommunal mutualisé qui pourra être ventilé entre les communes au cours de la période décennale. En outre, l’idée est de créer une garantie communale et non un marché d’échanges de droits à construire. À ce titre, je le redis : il faut faire confiance aux élus !
L’amendement n° 80 rectifié de M. Vial vise les 784 communes nouvelles créées au cours de la dernière décennie, qui auraient de facto une garantie un peu moindre, car elles regroupent plusieurs communes. La commission spéciale émet un avis favorable sur cet amendement, notamment parce qu’il a été retravaillé, après nos échanges en commission spéciale, de manière à limiter son coût en nombre d’hectares, comme M. Vial lui-même l’a expliqué.
Enfin, monsieur le ministre, en réponse à votre amendement, je développerai un peu plus longuement la position de la commission spéciale sur la garantie de un hectare que nous proposons. Comment sommes-nous arrivés à cette idée ?
Rappelons d’abord que, lors de l’examen de la loi Climat et résilience, en ce qui concerne le ZAN, l’Assemblée nationale avait privilégié une approche de dérogation. Elle avait commencé par les projets d’intérêt national, puis leur avait ajouté les projets d’intérêt régional, qui sont ensuite devenus autre chose ; au cours des débats, on avait même voulu des dérogations pour les zones de revitalisation rurale (ZRR), ou encore pour le photovoltaïque.
Quand le texte est arrivé au Sénat, plutôt que de poursuivre dans cette logique de dérogation, nous avons adopté une autre approche, en votant la territorialisation des objectifs de réduction de l’artificialisation. Cette territorialisation s’est traduite par un droit de proposition qui devait s’exercer à l’échelle de chaque Scot ; à ce moment-là de l’histoire, nous avons fait le choix des Scot plutôt que des PLUi et des intercommunalités.
Bien que le Premier ministre d’alors ait envoyé une circulaire aux préfets leur demandant d’accompagner les élus, de mettre de l’ingénierie à leur disposition et de créer des espaces de dialogue, pour les aider à élaborer une stratégie de territoire, avec nombre d’outils à la clé, il se trouve que ce droit de proposition n’a pas pu s’exercer partout de la même façon, parce que les élus n’ont pas toujours eu l’ingénierie ou l’information requises pour ce faire.
Certes, la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite 3DS, a prolongé les délais – ces propositions ont pu être déposées jusqu’au 22 octobre dernier ; elles l’ont été, bon gré mal gré, mais elles n’ont pas pu faire l’objet de réelles discussions entre cette date et le 22 février, délai beaucoup trop court.
Par ailleurs, il y a en la matière deux types de régions : d’une part, celles qui ont bien intériorisé la transition écologique et le fait qu’elles étaient peu à peu devenues chefs de file sur le sujet, celles qui avaient une vision nette de la transition écologique, de la loi Climat et résilience et en particulier du ZAN ; d’autre part, celles qui n’ont pas vraiment procédé à cet exercice d’accueil des propositions, de territorialisation, de différenciation.
Tout cela explique que nous tous ici – sur toutes nos travées, je pense pouvoir le dire – avons été saisis de ce problème par les élus de très nombreuses communes – petites, rurales, périphériques, littorales, de montagne –, qui nous ont exprimé qu’ils n’étaient pas associés au ZAN et se sentaient perdants.
C’est bien pourquoi nous avons créé une mission conjointe de contrôle, devenue notre commission spéciale, de manière à réfléchir aux outils qui permettraient de raccrocher ces communes à la loi Climat et résilience et au ZAN. Tel est, je le réitère, notre objectif : il ne s’agit pas de déroger au ZAN, d’en sortir ou de le détricoter, comme cela a été dit ou écrit à tort, il s’agit au contraire de trouver des outils, des solutions, pour que tout le monde s’inscrive dans cette trajectoire.
Nous avons donc mené une réflexion sur les petites communes, en particulier sur les toutes petites communes rurales, et c’est de cette réflexion qu’est issue notre idée de garantie de un hectare. Certes, cet objectif est égalitaire, mais au moins il est clair, net, précis et simple. Nous l’avons tous testé dans nos départements et il nous semble que les élus le comprennent, l’acceptent et, maintenant, le veulent.
Je tiens à remercier M. le ministre des échanges que nous avons depuis de très nombreuses semaines sur ce sujet ; nous n’avons pas toujours bénéficié d’une telle disponibilité du Gouvernement, je tenais donc à le relever. C’est au cours de ces échanges qu’a émergé l’idée alternative du 1 %.
Permettez-moi donc d’exposer quelques arguments sur notre proposition et celle du Gouvernement.
On accuse d’abord le dispositif de un hectare que nous proposons de consommer beaucoup trop d’hectares. Tel n’est pas vraiment le cas, d’abord parce que c’est une garantie universelle et non pas un droit. L’indépendance des procédures est évidemment maintenue : on va bien séparer l’application du ZAN et, plus largement, du droit de l’environnement, de celle du droit de l’urbanisme. L’un ne peut se faire au détriment de l’autre.
Ce dispositif n’est donc ni un droit de tirage, ni une incitation à consommer, ni une obligation de consommer ; c’est la préservation d’un potentiel universel, qui garantit aux communes qu’elles pourront répondre à leurs besoins émergents. Au-delà, cela me semble de nature à rassurer tous les élus, qui seront ainsi incités à s’inscrire dans cette trajectoire, comme nous l’avons tous vu dans nos départements.
Ce n’est pas non plus une dérogation à la compatibilité du ZAN. Il ne faut pas tomber dans cette caricature, car cette surface garantie sera bel et bien prélevée sur l’enveloppe du Sraddet ou du Scot. C’est simplement un mécanisme de péréquation, de solidarité, en faveur de territoires moins urbains qui, de surcroît, ont souvent été plus sobres par le passé et dont les élus voient dans l’objectif à atteindre une forme de double peine.
Quant au critère de 1 % proposé par le Gouvernement, il nous a évidemment fait beaucoup réfléchir, monsieur le ministre, au sein de la commission spéciale, mais une question demeure : en quoi serait-il un meilleur indicateur des dynamiques locales que ce que nous proposons ?
Se baser sur la surface aujourd’hui urbanisée, c’est en quelque sorte récompenser les gros consommateurs de foncier d’hier. Plutôt que de corriger les effets de bord de l’application du ZAN, on les renforcera !