Je n’en disconviens pas, monsieur Hyest. Chaque gouvernement a contribué à l’augmentation des dotations de l’État. Il n’en demeure pas moins que cette spécificité risque de s’accentuer avec la réforme liée à la suppression de la taxe professionnelle.
À l’heure où chacun parle de l’autonomie financière, voire fiscale des collectivités locales, on peut se demander quel est l’intérêt d’un si grand nombre de dotations de l’État pour contribuer au financement des collectivités locales.
La bonne réponse à cette question, ce serait la péréquation. Dans la mesure où l’État finance très largement les collectivités locales, il peut assurer une meilleure répartition des ressources en fonction de la disparité des situations.
En effet, nous le savons tous, il n’y a pas de relation entre les charges et les ressources des collectivités locales. Certaines collectivités disposent de recettes élevées et supportent moins de charges que d’autres, qui, au contraire, assument de lourdes charges, mais perçoivent des ressources plus faibles.
Voilà déjà de nombreuses années que je plaide pour la péréquation. Force est malheureusement de constater que nous sommes, à cet égard, dans un quasi-immobilisme. Cela soulève une vraie difficulté, car la péréquation est une question de simple justice et d’efficacité, aussi.
Tout le monde s’accorde sur un présupposé en vertu duquel les dotations d’une collectivité ne pourraient pas baisser d’une année sur l’autre.
La difficulté tient au fait qu’il est très malaisé, dans une période où l’enveloppe augmente peu, voire régresse, d’appliquer le principe de la péréquation si chacun revendique au moins autant que l’année précédente.
Si l’on veut afficher des priorités, il faut avoir le courage de dire que tout le monde ne peut pas être prioritaire. Prétendre le contraire relève de la pure démagogie.
Certes, monsieur le secrétaire d’État, il est plus facile d’agir lorsque l’enveloppe globale augmente. Or, cette année, la DGF ne progresse que de 0, 6 %, soit la moitié de l’inflation prévisible. Les conditions ne sont donc pas très favorables.
Lorsque j’évoque les vertus de la péréquation, on me répond souvent qu’il existe des dotations de péréquation : la DSR, la DSU, et même la DDU. Mais, dans la DGF, le poids de tout ce qui est forfaitaire, donc stable, est si lourd que l’inertie du système l’emporte sur la dynamique de la péréquation.
M. Jarlier écrit, à la page 28 de son rapport, que « le poids relatif des dotations de péréquation est extrêmement modéré au sein de la DGF des communes. La DSR et la DSU représentent ainsi respectivement 3, 2 % et 5 % du montant global de la DGF. »
C’est pourquoi, mes chers collègues, il est possible de plaider que, à l’intérieur de la masse de la DGF, la péréquation réelle est inférieure à 10 %. Je sais qu’un rapport a dit le contraire, mais je maintiens ce chiffre. Pourquoi ? Parce que, si l’on examine les deux dotations en question, on s’aperçoit qu’elles ne sont pas aussi péréquatrices qu’on pourrait le souhaiter.
La DSR, monsieur le secrétaire d’État, reste un considérable saupoudrage. Chaque commune est contente, sans doute, de recevoir sa petite part, encore qu’elle ne s’en rend pas tellement compte, disons la vérité.
Ne serait-il pas préférable, dans le cadre d’une politique péréquatrice active en faveur de l’espace rural, de concentrer les crédits sur des projets de développement économique ou d’aménagement dynamiques, plutôt que de continuer l’éternel, le perpétuel saupoudrage de cette DSR ?
La DSU, nous ne cessons de le dire depuis des années, n’est pas assez sélective. Je ne vous l’apprendrai pas, monsieur le secrétaire d’État – les excellents services de la DGCL le savent –, 75 % des communes de plus de 10 000 habitants touchent la DSU.
Un remarquable amendement de nos collègues députés François Pupponi et Pierre Cardo a prévu d’abonder de 70 millions d’euros la DSU, pour la cibler sur la première moitié des communes dans le classement, celles qui sont les plus défavorisées. Pour ces communes, savez-vous de combien augmentera la DSU à la suite du vote de cet amendement ? De 1, 2 %, mes chers collègues, soit l’augmentation du montant de l’inflation... Autant dire qu’il n’y aura pas d’augmentation.
Je sais que nos collègues ont dû guerroyer pour arriver à ce résultat, car le Gouvernement n’était pas tout à fait d’accord, mais, franchement, il faut faire beaucoup plus !
Certes, vous pourrez nous rétorquer : « Non seulement il existe la DSU, mais nous avons, de surcroît, créé la DDU. » Extraordinaire ! Entre nous, on aurait pu faire plus simple… Mais nous avons la manie des dotations. Plus on crée de dotations, moins il y a d’argent dans les dotations. C’est merveilleux…
La DDU a représenté 50 millions d’euros en 2008 pour 2009. Il est prévu naturellement pour 2010 une simple reconduction du montant fixé en 2009, qui bénéficiera à 100 communes.
Permettez-moi à cet égard de citer l’excellent rapport de M. Jarlier. Il y est écrit, page 36 : « Si 100 % des autorisations d’engagements 2009 – 50 millions d’euros –, ont effectivement été déléguées, seuls 26 millions de crédits de paiement – dont une large part risque de n’être pas effectivement consommée – ont été délégués à la même date sur un total voté en loi de finances initiale 2009 de 40, 79 millions d’euros. »
Vous le voyez, mes chers collègues, si on fait le bilan, il n’y a pas de véritable effort de péréquation. Je le dis avec gravité, parce que cela n’est pas acceptable ! La manière dont on continue, année après année, à ne pas vouloir réformer dans le sens de la péréquation est particulièrement néfaste.
Je citerai également le rapport de M. Saugey, pour ne pas faire de jaloux.