Que se passe-t-il donc dans nos cours d’école quand les élèves ne jouent pas à leurs activités préférées ? Si l’on parle d’enfer des récréations, c’est qu’on trouve parfois dans ce petit monde secret et clos du racket, des conflits, de l’intimidation et aussi du harcèlement.
Le harcèlement à l’école touche 1 million d’élèves, soit 1 million de familles. Pour combien de larmes ? Si la victime vit un calvaire, son agresseur est aussi en souffrance. Tout le monde est perdant : enfants, parents, familles, enseignants et chefs d’établissement.
Le harcèlement est toujours une affaire complexe. Cette violence répétitive est fondée sur des rapports de domination et de discrimination d’âge, de sexe et de religion qui entraînent une dégradation des conditions de vie de la victime, qui se sent de plus en plus isolée, détruite et abandonnée. Les répercussions sont graves, tant elles portent atteinte à l’intégrité de ces enfants. Elles peuvent parfois conduire au pire. Il est urgent que les drames subis par les harcelés soient rapidement et sérieusement pris en considération sous tous leurs aspects.
En la matière, la prise en charge préventive est bien entendu la meilleure des choses : le harcèlement ne doit pas commencer ; à défaut, il doit être repéré et géré au plus tôt. Tel est l’objectif du programme pHARe.
Quand il est trop tard, que le harcèlement est installé, le monde adulte doit prendre toutes ses responsabilités pleines et entières : la victime doit être protégée et avoir foi en notre justice. De son côté, le harceleur doit comprendre que ses actes sont répréhensibles et être lui-même accompagné dans sa souffrance. Sinon, quels citoyens seront-ils demain ?
J’ai déposé le 21 février dernier une proposition de loi visant, dans le cadre d’un harcèlement scolaire, à poser le principe d’une mesure d’éloignement du harceleur pour protéger la victime. Son objet est d’affirmer un principe simple : ce n’est pas à la victime de fuir et de quitter son établissement et son environnement pour échapper à son harceleur, ce n’est pas non plus à sa famille de s’adapter à ce changement, mais au petit harceleur. Les maires m’indiquent signer les dérogations avec la boule au ventre quand de gentils gamins sont obligés de partir. J’ai voulu donner aux établissements scolaires une référence sur laquelle s’appuyer pour agir. Je remercie les 215 sénateurs qui ont bien voulu cosigner mon texte et ceux qui le partagent puisqu’ils l’ont repris.
Il existe bien sûr une procédure disciplinaire applicable aux élèves et qui relève du pouvoir réglementaire des établissements au travers de leur règlement intérieur. Actuellement, rien n’empêche un conseil de discipline d’exclure un élève auteur de faits de harcèlement. Force est de constater que, la plupart du temps, ce n’est pas le cas. Ma proposition vise donc à affirmer une position de principe : guider et soutenir les établissements dans leur prise de décision, dans la mesure où de trop nombreux témoignages montrent que les jeunes victimes subissent cette double peine.
Monsieur le ministre, je me réjouis que vous vous soyez emparé de cette idée. Pourquoi ne pas l’avoir fait plus tôt ? Pour lutter efficacement contre le harcèlement scolaire, il demeure nécessaire d’agir en amont en le reconnaissant, en le nommant et en évaluant l’efficacité des dispositifs mis en place. Aucun élève ne devrait avoir à quitter une école. Protéger les enfants est notre devoir, comme celui de leur transmettre des connaissances dans un milieu apaisé, qui leur laisse leur insouciance et leurs rêves.