Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes à 471 jours du début des jeux Olympiques et c’est la fin de la préparation législative de cette échéance. Le projet de loi de mars 2018 avait été adopté à l’unanimité, témoignant ainsi de la bonne volonté de l’ensemble de ceux qui siègent sur ces travées dans l’optique de la réussite de Paris 2024.
Ce projet de loi aura été moins consensuel, tant dans cet hémicycle qu’à l’Assemblée nationale. Avec mes collègues du groupe socialiste – je pense notamment à Jean-Jacques Lozach, Corinne Féret ou Sylvie Robert –, nous avons fait de notre mieux pour apporter notre pierre à l’édifice.
En effet, nous souhaitons tous ardemment la réussite de ces Jeux, parce qu’ils seront la vitrine de notre pays et celles de collectivités fières d’être des puissances accueillantes, comme Paris et Saint-Denis, et parce qu’ils représentent pour la jeunesse française une chance rare d’accueillir le monde.
Bon nombre de mesures très utiles sont présentes dans les vingt-quatre articles de ce projet de loi. Ainsi, les adaptations nécessaires en matière d’offre de soins et de formation aux premiers secours sont compréhensibles. On perçoit bien la nécessité d’avoir un centre de santé au sein du village olympique, tout comme la possibilité de former davantage de monde aux premiers secours.
En première lecture, nous nous étions félicités du contenu de ce texte concernant la lutte contre le dopage. Nous avions accepté plusieurs mesures relatives à la mise en conformité du régime de la vidéoprotection avec le droit européen sur la protection des données. Mais le fameux article 7, relatif à la vidéosurveillance algorithmique, et la tonalité générale du texte, très sécuritaire, nous avaient refroidis.
Les débats en commission mixte paritaire ont été francs et je tiens à saluer le travail de notre collègue rapporteur Mme Canayer.
La commission mixte paritaire a permis plusieurs avancées notables : suppression de l’article 8 bis, qui tendait à ouvrir un peu trop grandes les portes du centre de commandement opérationnel de la préfecture de police ; suppression de l’article 12 bis, qui prévoyait l’aggravation des sanctions pénales applicables aux auteurs de violences commises dans une enceinte lors du déroulement ou de la retransmission en public d’une manifestation sportive ; enfin, limitation au 31 mars 2025 de l’expérimentation des caméras augmentées – c’est moins bien que la proposition de l’Assemblée nationale, mais mieux que celle du Sénat, de sorte que cela reste un progrès.
Nous regrettons cependant la suppression de l’article 1er bis relatif à la campagne des violences sexistes et sexuelles sur les sites du village des athlètes et du village des médias. Nous ne voyons pas en quoi cet article posait problème. Il aurait été avantageux de le maintenir.
Nous regrettons aussi l’augmentation à douze mois de la durée de conservation des images comme données d’entraînement des algorithmes. Il ne nous semblait pas illogique de s’aligner sur le droit commun sur ce point. Si le Conseil constitutionnel valide ce dispositif, ce qui reste à vérifier, j’espère que les organisateurs de la Coupe du monde de rugby préviendront les spectateurs que leurs images serviront à entraîner les algorithmes pour les jeux Olympiques.
La suppression de la référence au 19.6 de SecNumCloud a été justifiée par le fait qu’aucune entreprise française ne détenait ce label. Toutefois, la partie de l’article 7 issue de cet amendement ne concernait que la protection vis-à-vis du droit extraterritorial.
J’aimerais revenir sur les sujets qui n’ont pas pu être abordés par voie d’amendement, mais qui occupent et occuperont le débat public : la privatisation du réseau de bus, la taxe de séjour dans les hôtels de luxe des villes hôtes, le travail le dimanche dans les communes concernées par les Jeux ou l’affectation de renforts humains pour assurer la sécurité des jeux Olympiques, qui a déjà été évoquée par plusieurs de nos collègues – Jean-Pierre Sueur, auteur d’une proposition de résolution sur l’article 45 de la Constitution, ne me contredira pas.
Nous étions entrés dans la discussion parlementaire de manière constructive, en souhaitant, j’y insiste, la réussite des Jeux. Le texte déposé par le Gouvernement n’était pas parfait, la discussion en commission et dans l’hémicycle n’a pas levé tous nos doutes. Des inquiétudes légitimes autour de l’article 7 ont beaucoup crispé. Il est d’ailleurs curieux de constater que l’intelligence artificielle, dont nous avons débattu voilà quelques instants dans cet hémicycle, après avoir été accusée de nombreux maux et alors qu’elle est porteuse de tant d’inquiétudes, devienne anodine quand elle est appliquée à la vidéosurveillance.
Notre vote d’abstention s’explique par cet article 7. Même si les Jeux doivent être une réussite et que ce texte y contribue, le pas franchi à la faveur de la mise en œuvre de cette vidéosurveillance intelligente est inopportun, voire dangereux.