Intervention de Cyril Pellevat

Réunion du 2 mai 2023 à 14h30
Réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Cyril PellevatCyril Pellevat :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est le lot du dernier intervenant de redire un certain nombre des choses qui ont déjà été dites – et bien dites !

La France s'est fixé des objectifs ambitieux pour développer la fibre optique dans le cadre du plan France Très Haut Débit. D'ici à 2026, l'intégralité de la population et des entreprises devra être raccordée.

Alors que près de 80 % de la population est d'ores et déjà raccordée, nous sommes assurément l'un des pays d'Europe les plus performants en matière de déploiement même si, ces derniers temps, une ombre au tableau atténue cette réussite : les raccordements FttH (Fiber to the Home – fibre jusqu'à l'abonné) effectués sur les derniers mètres par les opérateurs commerciaux et leurs sous-traitants sont devenus une véritable jungle du fait de la souplesse du mode Stoc.

Détérioration des équipements, brassages inextricables, non-respect des routes optiques, locaux abîmés et laissés ouverts, dépôts sauvages de matériel dans les shelters, abonnés débranchés au profit d'autres usagers : la liste des malfaçons ne cesse de s'allonger. Leur impact financier est important, puisque les collectivités doivent engager des frais pour réparer les dommages.

Dans mon département, près de quatre dégradations sont constatées chaque semaine par le Syndicat des énergies et de l'aménagement numérique (Syane), l'opérateur d'infrastructure. En dix mois, ce sont 145 incidents qui ont été relevés et 12, 5 millions d'euros qui ont dû être engagés pour pallier ces difficultés.

Cette situation est inadmissible au regard des montants colossaux engagés pour déployer la fibre et entraîne un véritable gâchis d'argent public.

Monsieur le ministre, je vous ai interpellé le mois dernier à ce sujet. Vous m'aviez alors répondu que le problème était probablement dû à l'accidentologie du réseau en lui-même. Or les dégradations existent partout, y compris sur des réseaux considérés comme peu accidentogènes. Il est évident qu'elles résultent des mauvaises pratiques des opérateurs commerciaux et de leurs sous-traitants permises par le mode Stoc.

Cette exception à la française, qui devait initialement être dérogatoire, mais qui est devenue la norme, a clairement montré ses limites.

Les opérateurs ont certes pris des engagements pour que cessent ces détériorations. Des formations labellisées ont également été mises en place et un plan de reprise des points de mutualisation dégradés a été lancé, mais force est de constater qu'aucune amélioration ne se fait ressentir. La présidente de l'Arcep a elle-même reconnu publiquement qu'il n'y avait aucune véritable avancée malgré les mesures mises en œuvre.

Il faut donc regarder la réalité en face et conclure à l'échec du mode Stoc dans sa version actuelle. L'adoption de mesures coercitives est nécessaire pour corriger le tir, la méthode contractuelle n'ayant pas suffisamment porté ses fruits depuis sa mise en œuvre en 2018.

Il est donc temps de mettre les opérateurs commerciaux face à leurs responsabilités. Tel est précisément l'objet de la proposition de loi de notre collègue Patrick Chaize, que je ne peux que remercier pour son initiative.

J'y souscris en tout point et je partage le constat établi : ce n'est qu'en encadrant le recours à la sous-traitance, en clarifiant la responsabilité de chacune des parties prenantes, en renforçant les contrôles de la qualité des raccordements et en protégeant les droits des usagers que nous parviendrons à mettre fin à ces mauvaises pratiques.

Les modifications apportées par la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable – j'en profite pour remercier ma collègue Patricia Demas de son travail – sont bienvenues, en ce qu'elles permettent de renforcer la portée du texte, tout en garantissant la poursuite du déploiement de la fibre optique. C'est pourquoi je voterai évidemment cette proposition de loi.

Enfin, je tiens à rappeler que, même si un objectif est rempli à 100 % sur le papier, lorsque le taux d'incidents s'élève à 75 %, on ne peut pas considérer dans les faits que cet objectif est réellement atteint.

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